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#21 05 Jun 2018 09:31

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
Inscription : 05 Feb 2008

Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

LA FORÊT DU DESSOUS

Quand les souterrains deviennent cavernes et les fantômes deviennent horlas. Un crossover Poltergeists / Millevaux, premier épisode d’une campagne Millevaux multi-jeux jouée en solo par Damien Lagauzère

Pour l'instant, je viens de finir mon pti solo de Poltergeist/Millevaux. Bon, ce n'est qu'un test et c'est très modeste hein. Je suis très loin de maitriser tous les secrets de Millevaux et ça se voit ^^ Néanmoins,je ne peux m'empêcher de penser que la routine de Poltergeist permet de faire quelque chose de fun. Quand je connaitrait mieux l'univers de Milevaux, je pense pouvoir faire des choses qui auront plus de gueule. Mais bon, d'ici là, je te met mon petit CR. J'espère que ça ne te fera pas hurler au sacrilège ni à l'hérésie ^^

Le jeu : Poltergeists, par Vincent Baker (quand on se confronte à ses pires fantômes en explorant les profondeurs)

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crédits : RARstudios, licence cc-by-nc
"

NoAnde avait découvert
ce passage sous l'arbre la veille. Il avait demandé conseil au shaman mais celui-ci ne lui avait pas fait la réponse qu'il attendait. Selon le vieil homme, ces petites poupées de bois et de mousses, ces statuettes en os représentant des hommes-poissons étaient un mauvais présage et NoAnde ne devait pas s'en approcher.
Autant pour le vieil homme, la curiosité fut la plus forte. NoAnde retourna auprès de l'arbre et s'enfonça dans le passage terreux qui s'ouvrait entre ses racines. Après quelques minutes de reptation, le vide le surprend. NoAnde bascule, tombe et perd connaissance.



Il reprend ses esprits
dans un couloir souterrain. Tout, du sol au plafond, n'est que terre.
Les parois comme le plafond sont traversés de racines tordues. Entre ses pieds coule un petit filet d'eau. Il regarde autour de lui, au dessus, impossible de faire demi-tour. Ni les racines ni la terre ne lui offrent la possibilité de grimper vers la surface. Alors que ses yeux s'habituent à l'obscurité, il distingue une silhouette affalée contre la paroi. Il s'approche. Il s'agit d'un homme horriblement défiguré avec un bandeau sur l’œil. Malgré cela, on dirait qu'il a l'air réjoui. NoAnde l'observe et tente de comprendre
comment s'y est pris son bourreau pour tordre son visage à ce point.
Quelle cruauté !



NoAnde se rappelle alors quand lui-même avait failli mourir. C'était il y a peu. Parti cueillir des baies et des champignons, il s'était éloigné du groupe et retrouvé sur le territoire d'un Horla. Celui-ci ressemblait à un humain mais en plus... grossier, mal dégrossi.
Comme une sculpture inachevée, dont on aurait négligé les détails.
De plus, son visage asymétrique générait un sentiment de malaise.
Malgré cela, l'air qu'il jouait à la flûte était mélodieux,
raffiné et délicat. NoAnde avait été... charmé. Ce ne fut que grâce à la chance qu'il esquiva le coup de griffe que lui porta le Horla quand celui-ci tenta de l'attraper. Il se mit alors à courir et parvint, là encore par chance, à quitter le territoire du Horla.



De retour au présent, NoAnde examine de plus prêt ce cadavre. Rien dans les poches mais, quand il soulève le bandeau, il trouve une grosse écaille de poisson fichée dans l'orbite creuse. N'osant toucher cette chose, il repositionne le bandeau et abandonne le cadavre. Ainsi, il entame une longue marche sous terre et se retrouve dans un petit espace aménagé comme une sorte de campement. Il y a en effet une couche faite de fourrure, les traces d'un feu de camp et quelques ustensiles pour cuisiner. L'endroit est désert. NoAnde fouille un peu plus les affaires du propriétaire des lieux et trouve une enveloppe. À l'intérieur, un dessin représente une carte. NoAnde reconnaît une boussole. Il y a aussi un crane et un diamant. Il y aurait donc un trésor sous terre ? Il a beau retourner la carte dans tous les sens, NoAnde n'a aucune idée de là où il pourrait être. Et il lui semble très peu probable que le crane sur la carte soit celui de l'homme qu'il a croisé plus tôt. Aussi, il remet l'enveloppe à sa place et poursuit sa route. En effet, si quelqu'un vit ici, il y a forcément une sortie.



Du bruit. Un grognement ! NoAnde se retourne. Il ne voit rien. Puis apparaît, marchant à quatre pattes, un être terrible. Il est à la fois jeune et vieux et il saigne abondamment du nez. Il y a quelque chose de
sensuel dans sa façon de se déplacer qui fascine NoAnde. Il s'approche en faisant des zigzags. On dirait un serpent. Soudain, il agite la tête de bas en haut, projetant du sang en direction de NoAnde. « Pourvu qu'il ne me touche pas », se dit le jeune homme. Mais peut-être fait-il pire en réalité. En effet, NoAnde recule et se retrouve dos à une paroi. Et l'homme, ou plutôt la chose qui ressemble à un homme, s'approche. NoAnde se rend alors compte que la chose n'est pas nue. Elle porte une combinaison faite
de peau humaine...



Un horrible bruit. Un craquement, une déchirure. La bête jaillit de son costume d'homme et se jette sur NoAnde griffes et crocs en avant. NoAnde est comme hypnotisé par ses gigantesques mâchoire carrée. C'est tout juste s'il se rend compte que la tête de cette chose est faite de dures plaques osseuses alors que son corps, mou et spongieux, est recouvert d'écailles et de squames. N'écoutant que son instinct, NoAnde se jette en dessous de la créature. Il effectue une sorte de roulade qui lui fait mal à l'épaule mais il se redresse et se met à courir sans se retourner.
Au bout d'un moment, NoAnde remarque que le monstre ne le poursuit plus. C'est alors qu'il s'écroule à terre. Son épaule le fait souffrir le martyre. Il est beaucoup plus mal en point qu'il ne le pensait et seul l'adrénaline lui a permis de tenir jusqu'ici. Assis par terre, adossé à une paroi, il fixe cette caverne terreuse dont il se demande s'il en trouvera la sortie. Pour l'heure, NoAnde se rend compte qu'il a échoué dans...

… un abattoir !
La terre ruisselle de sang. Des crochets pendent du plafond. À certains sont accrochés des cadavres d'animaux mais aussi d'hommes.
Tous sont égorgés, éventrés. Des branches ont été introduites dans les anus autant d'animaux que d'hommes. Pourquoi ? Est-ce le « garde-manger » du monstre qu'il vient de fuir ?
Il n'a aucune envie de le savoir. Malgré la douleur, il se relève et s'éloigne aussi vite qu'il le peut de ce carnage insensé.

NoAnde arrive alors dans une plus grande salle. Il y a des degrés circulaires. On dirait un amphithéâtre, mais un tout petit. Il a un étrange sentiment. Il n'est pas claustrophobe mais... là... il commence à douter.
S'approchant d'une paroi, il se rend compte que des étagères y ont été creusé. C'est une... bibliothèque ! NoAnde s'empare d'un ouvrage. Il ne sait pas lire. Il l'ouvre et le porte à son nez pour sentir l'odeur des pages, de l'encre. Ça sent le pourri. Ça sent la mort. Repoussant le livre, il voit les mots s'agiter comme une chaîne de lombrics et autres vers gluants. Puis le livre se met à bouger dans ses mains. Les autres aussi se mettent à trembler. Ils sautillent et s'approchent du bords des étagères. Les livres en hauteur lui tombent dessus. L'un d'entre eux heurte son épaule, ravivant un pic de douleur. NoAnde n'a qu'une peur, que ces livres lui parlent ! Et pourtant, c'est bien son nom qui résonne dans
ce petit amphithéâtre. Qui parle ? Les livres ne parlent pas !
Ils ne parlent qu'à ceux qui savent lire, non ? Alors que les livres continuent de chuter sur lui, NoAnde sort de la torpeur qui l'avait gagné et s'éloigne. Quand il se retourne, NoAnde constate que chaque livre est de nouveau à sa place.

Il y a une petite porte de bois sous une torche. NoAnde doit se pencher pour l'emprunter. Peu lui importe tant qu'il fuit ce lieu malsain. Derrière la porte, une échelle de corde. En haut, la lumière..."


Réponse de Thomas :

A. Super CR ! un grand merci !

C. On dirait qu'il y a des liens vers Coelacanthes, ai-je bien vu ?
http://outsider.rolepod.net/millevaux/coelacanthes/

D. Est-ce qu'il y a un sens caché derrière le nom de NoAnde ?


Réponse de Damien :

A-de rien ^^

C-oui, je me suis permis une petite allusion. mais bon, c'est plus anecdotique qu'autre chose. c'est vraiment sans prétention :)

et pour le D- c'est le nom que j'ai donné à un PNJ sur Traumatica (un rp auquel je joue ici). en fait, il me fallait un nom rapidos alors j'ai tiré une carte Muses et Oracles et j'ai lu l'option "Non, et" que j'ai traduit en NoAnd ^^ j'ai trouvé que ça sonnait bien alors j'ai gardé en rajoutant un "e" parce que... parce que bon :D

en tout cas, j'espère ne pas avoir fait trop n'importe quoi avec les thèmes de Millevaux et ne pas faire hurler ceux qui ont l'habitude de cet univers ^^ et merci à toi pour l'intérêt que tu porte à mes petits rps solo :)


Réponse de Thomas :

En fait l'univers de Millevaux est très plastique. il y a un univers officiel décrit dans le supplément Civilisation (et dans d'autres qui pour l'instant ne sont diffusés qu'en format brouillon), mais rien ne t'oblige à le respecter, c'est très libre, c'est laissé à ta quasi-entière interprétation ;)


Auteur de Millevaux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.

Hors ligne

#22 12 Jul 2018 08:57

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
Inscription : 05 Feb 2008

Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

[Partie de jeu de rôle enregistrée par la communauté] Sur le blog Pilule Rouge, l’annonce d’une série d’Actual Play de Lamentations of the Flame Princess joués dans l’univers de Millevaux !

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Auteur de Millevaux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.

Hors ligne

#23 19 Aug 2018 07:32

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
Inscription : 05 Feb 2008

Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

JE SUIS D’UN AUTRE MONDE

L’agent Haze confronté à un serial killer originaire de Millevaux dans un imbroglio onirique des plus déroutants. Troisième épisode de la campagne Millevaux solo multi-systèmes de Damien Lagauzère.

Le jeu : Psychomeurtre, par Thomas Munier : les meilleurs des profilers contre les pires des serial killers


Épisodes précédents de la campagne :
1. La forêt du dessous (CSMS)
Quand les souterrains deviennent cavernes et les fantômes deviennent horlas. Un crossover Poltergeists / Millevaux

2. Traqué par les capuches blanches
Une course-poursuite mortelle qui débouche vers l’enfer souterrain du jeu de rôle Cœlacanthes !.

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crédits : foggydave, cc-by-nc, galerie sur flickr.com


L'histoire :

    NoAnde avait découvert ce passage sous l'arbre la veille. Il avait demandé conseil au shaman mais celui-ci ne lui avait pas fait la réponse qu'il attendait. Selon le vieil homme, ces petites poupées de bois et de mousses, ces statuettes en os représentant des hommes-poissons étaient un mauvais présage et NoAnde ne devait pas s'en approcher. Autant pour le vieil homme, la curiosité fut la plus forte. NoAnde retourna auprès de l'arbre et s'enfonça dans le passage terreux qui s'ouvrait entre ses racines. Après quelques minutes de reptation, le vide le surprend. NoAnde bascule, tombe et perd connaissance.

    Il reprend ses esprits dans un couloir souterrain. Tout, du sol au plafond, n'est que terre. Les parois comme le plafond sont traversés de racines tordues. Entre ses pieds coule un petit filet d'eau. Il regarde autour de lui, au dessus, impossible de faire demi-tour. Ni les racines ni la terre ne lui offrent la possibilité de grimper vers la surface. Alors que ses yeux s'habituent à l'obscurité, il distingue une silhouette affalée contre la paroi. Il s'approche. Il s'agit d'un homme horriblement défiguré avec un bandeau sur l’œil. Malgré cela, on dirait qu'il a l'air réjoui. NoAnde l'observe et tente de comprendre comment s'y est pris son bourreau pour tordre son visage à ce point. Quelle cruauté !

    NoAnde se rappelle alors quand lui-même avait failli mourir. C'était il y a peu. Parti cueillir des baies et des champignons, il s'était éloigné du groupe et retrouvé sur le territoire d'un Horla. Celui-ci ressemblait à un humain mais en plus... grossier, mal dégrossi. Comme une sculpture inachevée, dont on aurait négligé les détails. De plus, son visage asymétrique générait un sentiment de malaise. Malgré cela, l'air qu'il jouait à la flûte était mélodieux, raffiné et délicat. NoAnde avait été... charmé. Ce ne fut que grâce à la chance qu'il esquiva le coup de griffe que lui porta le Horla quand celui-ci tenta de l'attraper. Il se mit alors à courir et parvint, là encore par chance, à quitter le territoire du Horla.

    De retour au présent, NoAnde examine de plus prêt ce cadavre. Rien dans les poches mais, quand il soulève le bandeau, il trouve une grosse écaille de poisson fichée dans l'orbite creuse. N'osant toucher cette chose, il repositionne le bandeau et abandonne le cadavre. Ainsi, il entame une longue marche sous terre et se retrouve dans un petit espace aménagé comme une sorte de campement. Il y a en effet une couche faite de fourrure, les traces d'un feu de camp et quelques ustensiles pour cuisiner. L'endroit est désert. NoAnde fouille un peu plus les affaires du propriétaire des lieux et trouve une enveloppe. À l'intérieur, un dessin représente une carte. NoAnde reconnaît une boussole. Il y a aussi un crane et un diamant. Il y aurait donc un trésor sous terre ? Il a beau retourner la carte dans tous les sens, NoAnde n'a aucune idée de là où il pourrait être. Et il lui semble très peu probable que le crane sur la carte soit celui de l'homme qu'il a croisé plus tôt. Aussi, il remet l'enveloppe à sa place et poursuit sa route. En effet, si quelqu'un vit ici, il y a forcément une sortie.

    Du bruit. Un grognement ! NoAnde se retourne. Il ne voit rien. Puis apparaît, marchant à quatre pattes, un être terrible. Il est à la fois jeune et vieux et il saigne abondamment du nez. Il y a quelque chose de sensuel dans sa façon de se déplacer qui fascine NoAnde. Il s'approche en faisant des zigzags. On dirait un serpent. Soudain, il agite la tête de bas en haut, projetant du sang en direction de NoAnde. « Pourvu qu'il ne me touche pas », se dit le jeune homme. Mais peut-être fait-il pire en réalité. En effet, NoAnde recule et se retrouve dos à une paroi. Et l'homme, ou plutôt la chose qui ressemble à un homme, s'approche. NoAnde se rend alors compte que la chose n'est pas nue. Elle porte une combinaison faite de peau humaine...

    Un horrible bruit. Un craquement, une déchirure. La bête jaillit de son costume d'homme et se jette sur NoAnde griffes et crocs en avant. NoAnde est comme hypnotisé par ses gigantesques mâchoire carrée. C'est tout juste s'il se rend compte que la tête de cette chose est faite de dures plaques osseuses alors que son corps, mou et spongieux, est recouvert d'écailles et de squames. N'écoutant que son instinct, NoAnde se jette en dessous de la créature. Il effectue une sorte de roulade qui lui fait mal à l'épaule mais il se redresse et se met à courir sans se retourner.
    Au bout d'un moment, NoAnde remarque que le monstre ne le poursuit plus. C'est alors qu'il s'écroule à terre. Son épaule le fait souffrir le martyre. Il est beaucoup plus mal en point qu'il ne le pensait et seul l'adrénaline lui a permis de tenir jusqu'ici. Assis par terre, adossé à une paroi, il fixe cette caverne terreuse dont il se demande s'il en trouvera la sortie. Pour l'heure, NoAnde se rend compte qu'il a échoué dans...
    … un abattoir ! La terre ruisselle de sang. Des crochets pendent du plafond. À certains sont accrochés des cadavres d'animaux mais aussi d'hommes. Tous sont égorgés, éventrés. Des branches ont été introduites dans les anus autant d'animaux que d'hommes. Pourquoi ? Est-ce le « garde-manger » du monstre qu'il vient de fuir ? Il n'a aucune envie de le savoir. Malgré la douleur, il se relève et s'éloigne aussi vite qu'il le peut de ce carnage insensé.
    NoAnde arrive alors dans une plus grande salle. Il y a des degrés circulaires. On dirait un amphithéâtre, mais un tout petit. Il a un étrange sentiment. Il n'est pas claustrophobe mais... là... il commence à douter. S'approchant d'une paroi, il se rend compte que des étagères y ont été creusé. C'est une... bibliothèque ! NoAnde s'empare d'un ouvrage. Il ne sait pas lire. Il l'ouvre et le porte à son nez pour sentir l'odeur des pages, de l'encre. Ça sent le pourri. Ça sent la mort. Repoussant le livre, il voit les mots s'agiter comme une chaîne de lombrics et autres vers gluants. Puis le livre se met à bouger dans ses mains. Les autres aussi se mettent à trembler. Ils sautillent et s'approchent du bords des étagères. Les livres en hauteur lui tombent dessus. L'un d'entre eux heurte son épaule, ravivant un pic de douleur. NoAnde n'a qu'une peur, que ces livres lui parlent ! Et pourtant, c'est bien son nom qui résonne dans ce petit amphithéâtre. Qui parle ? Les livres ne parlent pas ! Ils ne parlent qu'à ceux qui savent lire, non ? Alors que les livres continuent de chuter sur lui, NoAnde sort de la torpeur qui l'avait gagné et s'éloigne. Quand il se retourne, NoAnde constate que chaque livre est de nouveau à sa place.
    Il y a une petite porte de bois sous une torche. NoAnde doit se pencher pour l'emprunter. Peu lui importe tant qu'il fuit ce lieu malsain. Derrière la porte, une échelle de corde. En haut, la lumière...

    Combien d'années ont passé ? NoAnde est finalement devenu Shaman du Clan des Arbre mais pour l'heure peu importe ! Il faut courir ! Vite, loin, sans se retourner.
    Les hommes en capuches blanches sont arrivés en nombre cette nuit et ils ont mis le feu au camp-village de NoAnde. Il a tenté de parlementer, de comprendre, de les arrêter... mais comment discuter avec des hommes (des hommes, vraiment?) qui ne parlent pas, qui ne répondent pas ? Ils n'ont rien cherché à savoir. Il ont craché leur flamme sur les tentes, les cabanes, les hommes, les femmes et les enfants du Clan des Arbres. Alors, ils ont fuit, tous, dans des directions différentes. Un temps, NoAnde courut aux côté de son ami JaHaber mais, sentant la menace se rapprocher, il a changé de chemin sans se préoccuper de savoir si l'autre shaman du Clan des Arbres le suivait. Il se sentait lâche, avait le sentiment d'avoir abandonné son ami. Mais l'une des voix qui lui parlaient dans sa tête depuis qu'il était devenu shaman lui dit quel chemin emprunter pour se mettre en sécurité. Et quand un esprit parle, nul autre choix que de l'écouter et obéir. Autant pour la culpabilité. NoAnde la laissera le ronger plus tard. Quand il sera sûr que sa vie ne sera plus en danger.
    Un carreau d'arbalète se fiche dans un tronc non loin de lui. Les hommes en capuches blanches sont tout prêt. NoAnde n'a rien pour répliquer. Il n'est pas un chasseur, encore moins un guerrier. Il est un médiateur. Entre les hommes. Entre les hommes et les esprits. Il ne possède pour se défendre que la dague rituelle qui lui a été offerte lors de son initiation. Il accélère et tente de distancer ses poursuivants. En vain. Il manque de trébucher sur une racine. Sa cheville le fait souffrir mais il peut encore courir. Il le doit. Derrière lui, on hurle. Il reconnaît la Langue Putride. Ces hommes, s'ils ne sont pas des monstres, des Horlas, sont au moins des sorciers. Mais NoAnde, s'il connaît la langue des esprits, la langues des Arbres, ne parle pas la Langue Putride. Il n'en reconnaît que les accents, les intonations. Il sait que cette langue est celle des êtres et des choses mauvais. Il tente de regarder par dessus son épaule pour voir, savoir ce que font ses adversaires. Il ne voit rien. Une voix dans sa tête lui souffle que c'est uniquement après lui que ces hommes, ces choses, en ont. Ils auraient massacré tout son clan juste pour lui ? Non, car ce n'est pas la voix d'un esprit qui lui parle. Juste celle de sa peur mâtinée d'un égocentrisme exacerbé soudain par son instinct de survie.
    Soudain, une série de sifflements. De nouveaux volent des carreaux d'arbalète. L'un d'eux se fichent dans son dos. Il en a le souffle coupé. Il perd le rythme de sa course, manque de s'écrouler. Et s'écroule finalement. Rabattant sur son visage sa houppelande faite de feuilles et de plumes, il espère ainsi se camoufler au mieux et ramper jusqu'à un abri. Des cris lui signifient qu'il est repéré. Alors, il se rappelle, quand il était plus jeune, avant de devenir un shaman. Il y a un monde sous la Forêt, sous les Arbres. C'est un monde dangereux mais, pour l'heure, il y sera en sécurité. Il rampe jusqu'au racine d'un arbre pluricentenaire et l'implore de lui offrir un passage salvateur. La Forêt est clémente. Les racines de l'arbre dissimule l'entrée d'un souterrain. NoAnde s'y introduit, s'y terre et sombre...

    A son réveil, une tête morte lui fait face. Elle ouvre les yeux juste après lui. Elle parle...
    « Donner la mort, c'est un art. La face d'os parle une langue secrète. La vérité diminue l'amitié. C'est pourquoi la cible fragile collabore avec le froid destructeur. »
    Et la tête va pour refermer les yeux.
    « Non ! » crie NoAnde.
    La tête rouvre les yeux.
    « j'ai des choses à te dire, à te demander. Si donner la mort est un art, je ne suis pas la toile sur laquelle le carreau de l'arbalète doit étaler sa peinture de sang. Je ne parle pas la langue secrète, la Langue Putride. Sont-ce des faces d'os sous ces capuches blanches ? Suis-je la cible ? Qui est le destructeur ? »
    « Le Lézard a eu une vision. Il a vu le Serpent-Fleur, reprends la tête morte. Grattes la  croûte et trouve la noirceur. La Noirceur... Ici commence l'errance de Celui Qui A Disparu Pendant Un An. L'univers dans une coquille de noix. » Et la tête ferme à nouveau les yeux.
    NoAnde, si c'est bien de lui dont il est question, aurait disparu pendant un an ? Mais quand ? Avant ou après son initiation ? Et pourquoi il ne se rappelle de rien ? Il fouille dans sa besace et en sort... une noix. Dehors, les hommes aux capuches blanches hurlent. Ils le cherchent. Ils sont tout prêt. Ils l'ont vu ! NoAnde rampe à reculons vers le fond du souterrain, s'éloignant de la tête morte. Il pense à JaHaber, son ami qu'il a perdu de vue (abandonné?). Est-il mort ?
    De la fumée ! Ils ont mis le feu à l'entrée du souterrain et comptent l'enfumer pour la faire sortir. La carreau fiché dans son épaule le fait toujours souffrir. NoAnde a dans sa besace quelques décoctions qui pourraient apaiser sa douleur, mais ses doigts s'enroule autour d'une noix, une unique noix. « L'univers dans une coquille de Noix. » Il éclate la coquille entre deux pierres et avale le fruit.

Je m'appelle Demian. J'ai 43 ans. Je mesure 1m77 pour environ 62kg. J'ai les cheveux très courts. Je les avais longs avant mais j'ai fini par les couper car j'avais la flemme de passer des heures à les sécher et les démêler. Je porte des lunettes. Une monture que j'espère discrète mais c'est aujourd'hui d'en trouver de telles aujourd'hui. Aujourd'hui, il faut que ça se voit. Impossible d'être discret, de vouloir être discret. Nous vivons dans le monde de la téléréalité, tout le monde doit être m'as-tu vu, extravertie, égocentrique... Bref...
    Je travaille comme assistant de vie scolaire dans une classe pour élèves souffrant de troubles de la fonction cognitive. Quand j'écoute les profs en salle des profs, je ne fais pas la différence entre leurs élèves et les miens. À l'ère de la téléréalité, nous somme tous des déficients.
En ce qui me concerne, ma déficience fait de moi ce qu'on appelle un « Nécrosexuel ». Pour faire simple, je te baise, je te tue. Autant dire qu'avec une telle affection ma vie sociale en générale et sentimentale en particulier est... compliquée.
Je n'ai plus tué depuis l'âge de 17 ans. Mais peut-être que je mens. J'ai usé de biens des palliatifs pour éprouver malgré tout quelque chose d'approchant l'extase. Les paraphilies et les drogues en tous genres sont d'excellents palliatifs.
Ce soir, j'ai rendez-vous avec un nouveau dealer. On l'appelle la Magicienne. Je l'attends dans ce squat, une sorte de terrain de camping sauvage aménagé dans les ruines d'un immeuble qu'on a jamais fini de construire. Il y a 15 ans, des raves electro-indus faisaient trembler les murs jusqu'au levé du soleil. Aujourd'hui, la nature a déjà commencé à rependre ses droits. La végétations rampent sur le sol, court sur les murs. Et moi, j'attends la Magicienne dans le noir et le silence.
Des bruits de pas. Elle arrive.
Elle porte un vieux manteau de cuir et un chapeau en fourrure orné d'une tête de loup. Son visage est surmaquillé. Mais sous la couche de peinture, je devine qu'elle me ressemble. Ses mains sont... Non ! C'est impossible ! Ça, ça n'existe pas. Un courant d'air soulève un pan de son manteau. Dessous, elle est nue. Je découvre qu'elle est androgyne. C'est... bizarre. Je pourrais la tuer pour ça. Elle se met à parler. Elle me raconte la Forêt, les Abysses, les Horlas et les Coelacanthes qui veulent envahir notre monde. Elle me raconte comment cette drogue, cette noix, va me projeter dans les cauchemars qui me permettront de sauver le monde. Car c'est seulement en vivant, en survivant et en mourant dans les cauchemars que je pourrais repousser les Coelancanthes et protéger notre monde de la Forêt.
    Elle me tend une noix. Je la prends. J'en brise la coquille entre deux cailloux traînant là. Je porte le fruit à ma bouche. Je vois... Millevaux !

    C'est la douleur qui réveille NoAnde. Il ne se rappelle même pas avoir perdu connaissance. Il peine à se relever. Ses mouvements sont lents, difficiles. Il passe de longues minutes à se réapproprier son corps. Puis, quand ses yeux se sont habitués au ténèbres, il regarde ses mains. Elles sont couvertes de feuilles, il y a des branches entre ses doigts. Non ! Ses doigts sont des branches d'arbres et sa peau est recouverte de feuilles. Il tâte ses biceps, palpe ses pectoraux. Il sent la rugosité de l'écorce. Il sent... la noix. Il est un Noyer ? Un Noyé ?

    Étrangement, cette unique noix l'a rassasié. Même sa blessure est moins douloureuse. Par précaution, il applique dessus un baume composé d'herbes médicinales. Il ne ressent rien de particulier. Il n'est pas plus soulagé que cela mais espère que ça évitera que la douleur se réveille.
    En plissant des yeux et se concentrant, NoAnde parvient à mieux voir là où il se trouve et ce qui l'entoure. Il y a des peintures sur les murs. On y voit des hommes en rond autour d'arbres. Mais ce sont des arbres étranges, pas comme ceux de la forêt. Il ne sait pas si c'est en raison de la seule maladresse de l'artiste, mais ces arbres ont quelques de... corrompus. Ils sont biscornus, tordus. Malgré la simplicité des traits, il émane d'eux quelque chose de malsain, de maléfique. Ce ne sont pas les Arbres que vénère le Clan des Hommes-Arbres. Même les silhouettes représentant les hommes sont étranges. Il y a quelque chose de dérangeant dans cette scène. Pourtant, NoAnde se sent rassuré car il quitte le domaine de l'inconnu. Il se rappelle les leçons de son maître. Ces arbres n'en sont pas. En réalité, il s'agit de rejetons de La Chèvre Noire des Bois aux Milles Chevreaux, Grand Esprit de la Forêt et objet de cultes impies. On a toujours mis NoAnde en garde contre Shub-Niggurath et les esprits qui hantent la forêt, les Horlas. Et on lui a aussi enseigné qu'il ne fallait pas se laisser tenter par ces esprits. Ils promettent monts et merveilles, pouvoir et richesse mais ce ne sont que mensonges et tentations. Au bout de ce chemin de corruption et de souffrance, il n'y a que la folie, puis la mort. NoAnde frissonne. Où est-il tombé ? Spontanément, son regard se porte au sol. Il remarque alors que celui-ci est parsemé de petites statuettes tantôt de pierre, tantôt de bois, ressemblant vaguement à des hommes. Certains sont armés, d'autres recouverts de sang ou d'excréments séchés. Soudain, une tache de lumière attire son attention. Un petit bonhomme de bois recouvert de merde semble pointer quelque chose du bout de son bras de brindille. Une noix ? NoAnde la ramasse, la porte devant ses yeux et l'examine. À la périphérie de son regard, une ombre se faufile. NoAnde appelle. Pas de réponse. Juste un craquement. Puis un cri en Langue Putride ! « Ïa ! Ïa ! Shub-Niggurath !! » Il tente de suivre des yeux la silhouette qui lui tourne autour. Il tourne sur lui-même, de plus en plus vite. Il est soudain pris de vertige. « Ïa ! Ïa ! Shub-Niggurath !! » Alors que tout devient flou autour de lui, il voit apparaître un escalier devant lui. Au milieu des marches plane un crane. Il se recouvre progressivement de chair et recompose le visage mort qu'il a déjà vu tout à l'heure. La tête parle :
    « L'Ordre va être bouleversé. L’Équilibre va être rompu. La lumière va montrer tout l'éventail de son spectre. Il existe un Livre. Il parle d'amour et de mort. Manges la Noix... et assaisonne là de Viande Noire, d'Opium Jaune ou de Jus de Singe. Deviens Pan ! Deviens Dionysos ! Toi... ou un autre... »
    NoAnde sent son esprit vaciller. Il gobe la Noix sans même briser sa coquille. Elle se bloque dans son œsophage. Il étouffe. Il se tape au niveau du thorax, espérant la faire descendre ou remonter, espérant briser la coquille. Il sent finalement la Noix descendre et atterrir dans son estomac. Il faudra longtemps à ses sucs digestifs pour dissoudre la coquille. Dans combien de temps ressentira-t-il les effets du fruits ? Il se rend alors compte que sa blessure ne le fait plus souffrir. Il la palpe. La douleur revient. Elle repart presque aussitôt. Il rassemble ses esprits. L'escalier a disparu. À sa place, NoAnde voit un monticule de chair en putréfaction. Des corps humains démembrés ont été empilé afin de former une pyramide d'environ 1m ou 1m20 de haut. Les bras, jambes, têtes et troncs sont collés les uns aux autres par un ciment de sang, de boue et de merde.
    Un horrible rictus barre alors le visage de NoAnde. Il ne ressent maintenant nulle compassion pour ses pauvres victimes. Il a le sentiment de comprendre la fonction, le but de tout cela. Ces hommes et ses femmes n'avaient été mis sur Terre que pour servir de sacrifice en l'honneur de « Ïa ! Ïa ! Shub-Niggurath !! » hurle-t-il dans la pénombre. Il regarde ses mains. Les branches composant ses doigts sont maintenant plus épaisses. Il sent que l'écorce recouvrant sa peau est elle aussi plus solide. Les feuilles et les plumes au dessus de sa tête ne sont plus celles de sa houppelande. Sa chevelure végétale court maintenant jusque sur ses épaules. Il secoue la tête et éprouve un vrai plaisir à entendre le bruit des feuilles. Il se sent devenir arbre. Un noyer. Spontanément, il porte sa main à son entrejambe et y trouve 2 nouveaux fruits qu'il met dans sa besace.
    NoAnde a sommeil. Il plante ses pieds dans la boue et laisse ses racines pénétrer profondément la Terre. Il n'avait jamais éprouvé un tel sentiment de fusion avec la Forêt. Ses racines s'enfoncent jusqu'au Rêve, au Rêve de la terre. NoAnde va rêver.

Putain ! Ce tunnel n'a pas de fin ! No End !
    Après avoir gobé la noix donnée (ou plutôt vendue, mais à quel prix ?) par la Magicienne, j'ai vu la Forêt et elle portait le nom de Millevaux. C'était ça le cauchemar ? Le cauchemar dont je suis sensé sauvé le monde ? Non, je n'y crois pas. Le cauchemar, le vrai, c'est ce tunnel sans fin. Ça fait des heures que j'erre dans cet espèce de blockhaus sans même savoir comment je m'y suis retrouvé. Je suis sous terre. Je le sens. Les murs de béton suintent d'une humidité crasseuse et des racines se fraient un chemin par les fissures au plafond. Où suis-je ?
Puis, un intérieur. Une maison souterraine. Un laboratoire, comme le repaire d'un alchimiste du Moyen-Âge. Il y a des fours, des fioles, des bocaux remplis de trucs organiques bizarres. Des ombres qui s'agitent...
Dans un coin, il y a une grande armures en terre, branchages et feuillages. On dirait un gros homme dans lequel on pourrait entrer. Un amateur de comics de chez Marvel y verrait un mélange entre Hulk et Groot.
« Je s'appelle Hulk ! »
Ça ne me fait pas rire non plus. Mais cela arrache un bruit de gorge à la magicienne. Je ne l'avais pas vu. Elle est là.
Elle a l'air fatigué, vieilli. Je la fixe droit dans les yeux.
« Pour sauver le Monde des Abysses, tu dois enfiler cette armure et retourner d'où tu viens pour quérir mon aide. »
l'espace d'un espace d'un instant, je ne sais plus qu parle à qui. J'ai l'impression que c'est moi qui m'adresse à la magicienne mais, quand elle me tend un gobelet rempli d'un mixture à l'odeur bizarre, je suis certain que c'est elle/lui/moi qui me parle.
Je bois.
Je rentre dans cette espèce d'armure et je la sens se modifier, se resserer, se plaquer contre moi, s'adapter à ma morphologie.
Je regarde mes mains, des branches tordues. Je secoues la tête, le bruit du vent dans les feuillages.
Ma vision se trouble.
Mes yeux s'ouvrent dans une pièce qui fut ma chambre et mon bureau. Les doigts-branchent courent sur le clavier d'un ordinateur portable usé. Le mien. Les murs blancs ne le sont plus. Ils sont humides et envahis par de la mousse et des moisissures. Le sol est dégueulasse. Par la fenêtre, je reconnais vaguement la route de Paris. Mais elle est envahie par la forêt.
Où-suis je ? Et quand ?
Je me retourne. La porte coulissante donnant sur la salle de bain est sortie de son rail... depuis très longtemps visiblement. La porte donnant sur la pièce principale s'ouvre maintenant sur... un tunnel obscur, sans fin... No End !
J'accède finalement à ce qui fut la pièce principale de mon appartement. Un air fraoid s'engouffre par la vitre brisée de la véranda. Les étagères sont renversées. Ça me fend le cœur de voir mes livres à terre, abîmés, rongé par l'humidité et les bestioles qui m'ont remplacé ici depuis... combien de temps ?
Ma basse est toujours là, sur son socle. Une odeur atroce s'échappe du frigo dont l'intérieur est intégralement recouvert de moisissures. Par la véranda fracassée, je vois que le petit parking de derrière a lui aussi cédé la place à la forêt. Dans les arbres, un couple de corbeaux a remplacé le couple de pies. Je sens l'armure de terre vibrer, bouger tout autour de moi. Des filaments de terre s'infiltrent sous ma peau. Je tombe à genoux. Des larmes brouillent ma vision mais je vois mes mains à nouveau changer de forme. Mes cris, mes gémissements, ressemblent de plus en plus aux grommellements d'un sanglier.
Quand je parviens à me relever, il fait nuit. La lune est pleine. Quelques notes de basse. Je me retourne. Un être difforme, moitié-homme moitié... sanglier ? Se tient là. Comme moi à l'époque, la basse à la main, le pied droit en appui sur l'une des 2 malles dans lesquelles je rangeais mes vieux comics de chez Marvel. Dans quel état doivent-ils être ?
Je lui demande ce qu'il fait là, chez moi. Il repose tranquillement la basse sur son support et m'explique que c'est moi qui l'ai appelé. Je ne le crois pas mais, quelque part, je suis rassuré par sa présence. Je lui dis que je veux rentrer chez moi, que je ne comprends rien à tout ça et que tout ça est certainement un very very bad trip que je dois à cette putain de noix !
C'est bizarre le rire d'un sanglier.
« Si tu veux faire un choix éclairé, embrasse-moi ! »
mon premier réflexe est de faire un pas en arrière. Puis, j'en fais deux autres, en avant.
C'est bizarre de rouler une pelle à un sanglier.
Je vois !
Deux chemins. Un vers le monde. Un vers les cauchemars.
Le monde est laid. Je choisis le cauchemar.
Sans fin...

    NoAnde ouvre les yeux et hurle. Il regarde ses mains. Ce ne sont plus des branches. Il secoue la tête. Ce n'est plus le bruit du vent dans les feuillages. Son cri résonne comme celui d'un sanglier. Un horrible homme-sanglier. Et devant lui se tient un homme au corps disproportionné, musculeux et noueux. Ses mains sont énormes. Son visage est dur, inhumain. Il arbore des bois de cerfs et des cornes de bouc. Ses yeux sont clos, cousus par de la grosse ficelle. Il se dégage de lui une forte odeur de terre. Il pousse de longs gémissement sourds et graves. Il lève une énorme masse faite d'un agglomérat de branches et d'os.
    NoAnde repousse violemment la chose qui vacille. Il en profite et se rue sur lui, le rouant de coups. Mais la créature semble ne rien sentir. Bien que NoAnde le frappe sans relâche et pèse sur lui de tout son poids, l'être se relève et tente de se saisir de lui. NoAnde tente de se dégager, en vain. Le monstre enserre le coup de NoAnde d'une seule main et lève sa masse.
    NoAnde sent les os de son crane céder sous l'impact. Il sent le sang couler. Il sait qu'il ne tient encore debout que parce que la créature le porte, l'étrangle. Il voit trouble. Le désespoir s'insinue à mesure qu'il sent la vie le quitter. À qui peut-il demander de l'aide ? Il a tourné le dos aux Esprits de la Forêt, aux Esprits des Arbres. Shub-Niggurath ? Doit-il offrir son âme à la Chèvre pour espérer sauver sa vie ?
    Oui ! Milles fois oui comme les Milles Chevreaux !
    « Ïa ! Ïa ! Shub-Niggurath !! »
    NoAnde crie, hurle, chante son adoration pour son nouveau dieu qu'il appelle désespérément à l'aide.
    Un coup de masse pour seule réponse.
    Un corps meurt.
    Une âme est vouée à la folie.

Où suis-je ? Quelle heure est-il ?
Putain, quelle migraine !!

    26 juin 2018, l'agent spécial Damon Haze débarque à Olympia, capitale de l'état de Washington. Vu de l'avion, son surnom de « l’État vert » n'est pas usurpé. Il est 11h50, le ciel est toujours brumeux. Il y avait ce matin un fort brouillard qui peine à se lever.

    L'agent Haze travaille seul depuis l'échec de la négociation avec un terroriste qui a coûté la vie de plus de la moitié des otages et ses jambes à son coéquipier. Ce dernier ne lui en tient pas rigueur et ils se voient régulièrement. Malgré tout, Haze se sent toujours coupable. Il vit seul également. Il pratique le jeu de rôle par forum. À cause de ses fréquents déplacements, il ne peut pas jouer « irl » comme il le voudrait. Il s'est pris d'amitié pour une de ses partenaires de jeux « Anke », qu'il n'a jamais vu et dont il n'a même jamais entendu le son de la voix.

    L'agent Haze a rendez-vous avec le chef des forces de l'ordre locale. Son aide a été requise au titre de consultant afin de résoudre une affaire d'homicides multiples. Comme pour conjurer un mauvais sort, on n'ose pas encore parler de meurtres en série. Haze a profité du vol pour étudier le dossier concernant la dernière des neuf victimes. Toutes des femmes, des prostituées. Ada Bowler a, ou plutôt avait, 32 ans. Une rousse ou cheveux longs, comme les autres victimes. Et comme les autres victimes, on l'a retrouvée parée d'un collier d'esclave, aux extrémités soudées. Ada a été retrouvé nue, déposée sur le flanc gauche sur les berges d'un canal. Elle porte des traces de blessures par balles mais, s'il s'agit du même MO que pour les victimes précédentes, elle n'est pas morte des suites des coups de feu. Elle présente également des entailles qu'on ne peut attribuer à une arme blanche. On constate des marques, des hématomes, au niveau de son cou mais, là encore, on ne peut pas parler de strangulation. Éventuellement, d'une tentative inaboutie. Il y a évidemment de petites entailles causées par le collier et des marques de brûlures en raison de la soudure. Elle n'a visiblement pas été vidée de son sang. Toutefois, il y a beaucoup de sang sur la scène de crime. La victime montre aussi des traces de liens au niveau des chevilles et des poignées. L'analyse toxicologique est positive. Comme pour les autres victimes, il s'agit de cette nouvelle drogue qu'on trouve sur le marché : « la Noix ». Cela explique notamment l'absence de trace d'injection. Reste à savoir si la victime a été drogué de force ou si elle était déjà consommatrice de ce produit. La victime a été violé, avant et après la mort. On n'a pas retrouvé de traces de sperme mais des poils ont permis de procédé à une analyse ADN. Pour l'heure, cela ne correspond à aucune entrée répertoriée dans les bases de données de la police et du FBI.
    Un détail, et pas des moindres. Comme pour chaque victime, on a retrouvé près d'Ada un petit bristol avec, tapé, un message. Ici :

    « Au commencement, je la prends. J'en brise la coquille entre deux cailloux traînant là. Je porte le fruit à ma bouche. Je vois... Millevaux ! C'est la douleur qui réveille NoAnde. Il ne se rappelle même pas avoir perdu connaissance. Il peine à se relever. Ses mouvements sont lents, difficiles. L’hôpital est en ruine, envahi par la forêt et ses esprits, ses Horlas. L'assistance pousse une clameur. Tu veux tuer ton frère ? Tu dois trouver le lieu parfait. Millevaux ! »

    Qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire ? Et les autres messages ? Haze survole alors les dossiers des autres victimes.
    1-Lynn Parker (45 ans) a été retrouvée sur le parking d'un restaurant à la sortie de la ville.
    « La soumission livre la Vision du Lézard. La braise arrache à la loi. Elle est hors la loi. Elle revendique la loi du Horla. À jamais. »

    2-Jody Bennett (36 ans) a été retrouvée sur la parking d'un motel.
    « Égorger l'(in-)secte est l'initiation. Le Jus de Singe interroge l'intégration de l'enfant de Dionysos. »

    3-Cindy Jones (41 ans) a été retrouvée près d'un collecteur d'égout.
    « Lever le voile. La Cité Bleue ! Je suis l'ambassadeur de la Cité Bleue ! La Nature me torture. Les Cœlacanthes marchent ! »

    4-Laura Bennett (aucun lien avec la victime 2) (32 ans) a été retrouvée à l'entrée d'un cimetière.
    « La greffe du Horla brandit l'oriflamme de la Cité Bleue. Je franchis la piste sans hésitation. Laisses-toi entraîner, élevé, par le Horla ! »

    5-Mary Baker (47 ans) a été retrouvée près d'une cabane dans la forêt.
    « N'est-ce pas marchander que de prendre un pseudonyme ? Ou est-ce un luxe ? Une performance à graver ? Une performance aggravée ? La Vision du Lézard, félicitée ! Convoyeur, passeur, ce n'est pas la mort. C'est une œuvre d'art. »

    6-Betsy Wilson (39 ans) a été retrouvée dans une zone industrielle à la périphérie de la ville.
    « Se déplacer, allumer Dionysos. Présenter l'opposant. Abandonner la malchance. Souhaiter la mort de la mémoire est un cri d'amour ! »

    7-Léonora Carpenter (38 ans) a été trouvée dans un terrain vague.
    Dionysos charme la brindille. La Forêt cesse d'être un compagnon. Il faut s'en arranger, c'est un pari. Ou alors, récupérer un nouveau contrat... »

    8-Angelina Lopez (36 ans) a été retrouvé au pied d'un monument aux morts.
    « Gavé de Jus de Singe, j'annonce la véracité. Je cite le Verrat. Je collabore. Je suis brave. Le gain au bout du protocole. Depuis mon exil, je vous épies. »

    OK, avant son rendez-vous avec le chef de la police, Haze décide d'aller manger un morceau dans un petit restaurant non loin du commissariat. Il commande le burger maison avec double ration de frites et fait bien attention de ne pas tâcher d'huile ses dossiers. Sur un coin de la nappe en papier, il commence à prendre des notes...

    Sitôt son café enfilé, Haze se rend au commissariat. Là, il est reçu par Pete DiCompain, le corpulent et jovial chef de la police d'Olympia. Haze est accueilli avec du café et des donut's qu'il ne refuse pas. Les présentations sont rapides. Haze ne veut pas perdre de temps. Il sort ses dossiers et le bout de nappes arrachée sur laquelle il a commencé à prendre des notes sur l'affaire. DiCompain semble alors méfiant. Pour l'apaiser, Haze passe alors en mode warm-up. Il s'excuse de son empressement, met ses notes de côté et partage un café et quelques beignets, prenant le temps de faire un peu plus ample connaissance avant d'attaquer les choses sérieuses. Haze est quelque peu ennuyé quand la conversation dérive sur les problèmes conjugaux du chef, visiblement cocufié par sa femme. Mais, ne voulant pas le froisser et encore moins se le mettre à dos, il l'écoute pendant de longues minutes durant lesquelles, peu à peu, il fait rentrer ses notes dans le champ de vision du chef. Quand ce dernier a enfin fini de s'épancher, il aperçoit miraculeusement les dossiers. Les choses sérieuses vont enfin commencer.
    Haze dresse rapidement un plan d'ensemble de la situation telle qu'il la perçoit à la lecture des dossiers qu'on lui a fourni :
-Toutes les victimes sont des femmes aux longs cheveux roux entre 30 et 50 ans.
-Ce sont toutes des prostitués.
-Elles ont toutes été retrouvées dans un lieu public, nues, ne portant qu'un seul collier métallique aux extrémités soudées.
-Elles ont toutes été retrouvées couchées sur le flanc gauche.
-Elles présentent toutes des blessures par balles, par une arme blanche inconnue ainsi que des marques de strangulation au niveau du cou. Mais, ce n'est pas cela qui les a tuées.
-Elles ont toutes été ligoté aux poignées et aux chevilles (voir les marques).
-Elles ont toutes consommées, de gré ou de force, cette nouvelle drogue qu'on appelle la Noix.
-Elles ont toutes été violées avant et après la mort.
-On a retrouvé, sur chaque scène de crime, un bristol avec un message étrange tapuscrit.

    Partant de là, Haze livre pèle-mêle ses premières impressions :
-Les victimes ont certainement retenues en captivité durant un moment. Cela signifie que le tueur dispose d'un lieu pour cela. Il s'y sent en sécurité et l'a sûrement équipé afin de procéder au mieux. Avec presque 10 victimes au compteur, son mode opératoire est bien rodé. Il a l'habitude. Il a certainement pris confiance en lui, ce qui peut aussi le conduire à commettre des erreurs. Il faudrait vérifier si les victimes présentent des traces de malnutrition. Est-ce que le tueur « prend soin » d'elles ou les laisse-t-il mourir ? Combien de temps les garde-t-il en vie ?
    Le chef explique alors que les victimes ont été nourri a priori correctement. Elles ne présentent pas du tout les effets de la malnutrition évoquée par Haze. Cela signifie notamment que le tueur achète cette nourriture. S'il vit seul, ce qui est probable, comment expliquer qu'il achète de la nourriture pour 2 ou plus selon le nombre de victimes qu'il retient en même temps ? De plus, sa planque est certainement isolée. Aussi, pour éviter les trajets inutiles, il doit acheter en grande quantité.

-Les victimes présentent toutes un profil similaire. La tranche d'âge, liée à la profession, peut amener à penser que le tueur considère ses femmes comme plus vulnérables et isolées car, en « fin de carrière ». Ce sont peut-être à ses yeux des proies plus faciles. On peut aussi penser qu'il procède à une sélection. Il doit donc roder dans les parages en quête de la victime idéale.
    Le chef note alors d'organiser des rondes dans les quartiers chaud. Peut-être pourra-ton repérer un véhicule en repérage. Il s'agit également de protéger les femmes correspondant aux profil des victimes.

-Bien que tuées ailleurs, la scène de crime est pleine de sang. On dirait que le tueur les « vide », littéralement. Quel sens cela a pour lui. En tout cas, cela veut dire qu'il prend le temps de le faire. Il se sent donc en sécurité. Il y a des chances pour qu'il connaisse les lieux et leur taux de fréquentation. Peut-être fait-il du repérage à ce niveau là aussi pour trouver le lieu adéquat où laisser sa prochaine victime ? En tous les cas, il souhaite manifestement qu'on retrouve ces corps.

-Concernant la drogue, les victimes étaient-elles connues pour en être des consommatrices régulières ? Auquel cas, le tueur les a peut-être « appâtées » en leur en proposant. Et, dans ce cas, comment s'en est-il procuré ? Est-il également un consommateur de Noix ? Agit-il sous l'influence de cette drogue ?
    Le chef note d'envoyer des hommes secouer quelques dealers et autres indics afin de voir s'il tombe quelques informations à ce sujet.

-On a retrouvé de poils (et donc de l'ADN) dont on peut penser qu'ils appartiennent au tueur. Mais ils n'appartiennent à aucun échantillon recensés dans les fichiers de la police et du FBI. Il faudra quand même les comparer systématiquement à ceux de tout suspect interrogé.

-Concernant les proches des victimes, Haze demande si on a interrogé leur famille et leurs amis ?
    Le chef avoue qu'ils n'ont pas exploré cette piste là. Enfin, pas encore. Il y ont pensé, c'est en cours. Mais, comme l'a deviné Haze, ces femmes étaient plutôt isolées et prendre contact avec leur famille n'est pas si facile que ça. Et c'est la même chose pour leurs rares amis qui vivent tous aux marges de la loi.

-Enfin, les messages ! Haze pense que là sont les véritables indices. Il pense même que les points communs entre les victimes (cheveux, coucher la victime sur le flanc gauche etc.) ne sont pas réellement important pour le tueur. Homme organisé, certainement instruit, il s'est renseigné sur les serial killer et, à sa façon, copie cet aspect de leur mode opératoire. Mais son véritable but serait ailleurs. Et la clé est dans ces messages qui seraient adressés à un éventuel allié. On peut penser qu'à travers eux le tueur cherche un allié, quelqu'un qui le comprendrait, qui partagerait ses objectifs. Les meurtres et les viols ne seraient alors qu'un élément parmi d'autres dans un desseins plus vaste dépassant largement la seule recherche d'une satisfaction sexuelle. Tous ces messages sont autant d'indices qu'il faut décoder. Le tueur donne des informations, mais pas nécessairement à la police. On peut penser qu'il est provocateur, mais pas seulement. Il a suffisamment confiance pour écrire ses messages mais a également un profond besoin d'être écouté et compris. Peut-être, aussi, a-t-il besoin d'aide pour achever son œuvre ?
    Sous la dictée, le chef note que Haze pourrait jouer ce rôle, encore faudrait-il trouver un moyen de communiquer avec le tueur. La presse ? Le Net ?

-Haze, même s'il ne les a pas étudiés en profondeur, a déjà relevé quelques éléments qui lui semblent important ou en tout cas significatifs. Par exemple, il explique certains de ses jeux de mots. Il donne des indices. Il veut qu'on le trouve. Mais est-ce seulement une manifestation de son sentiment de culpabilité. Le reste des messages, notamment les références mythologiques et ésotériques, font penser qu'il y a vraiment un but plus élevé à toute son entreprise et qu'il entendrait bien la mener à son terme. Dans tous les cas, il va falloir faire vite car, comme son plan n'est pas encore réalisé, il y a de fortes chances qu'il tue à nouveau et bientôt. De plus, il risque fort de disparaître car il cessera de tuer quand son but sera atteint. Il faut absolument le capturer avant !

    Le chef DiCompain a envoyé des hommes dans le milieu des dealers et des toxicomanes. S'il s'avère que les victimes étaient des consommatrices régulières de la Noix, on pourra imaginer que le tueur s'en est servi pour les aborder. Si non, peut-être utilise-t-il la drogue pour les garder sous contrôle.
    Pendant ce temps, Haze a repris toutes ses notes et a tenté d'identifier le profil du tueur. Il a commencé par définir son mode opératoire. Le tueur cherche donc une victime type (quand bien même ce ne serait que pour brouiller les pistes ou par simple confort). Il l'observe, la traque. Quand il est certain d'avoir affaire à une personne qu'il estime vulnérable et isolée, il la kidnappe. Il l'a conduit dans son repaire, en droit isolé, bien équipé, où il peut se livrer à ses activités en toute tranquillité. Il nourrit correctement ses victimes. On peut penser qu'il les séquestre un long moment. Il leur fait subir diverses tortures (blessures par balles et armes blanches volontairement non létales, strangulation, viol). Il leur fait porter un collier de servitude en acier, certainement pour asseoir sa domination sur elles. Il les drogue (à quelle fin?). Puis, au bout d'un certain temps, il les achèves et les expose dans un lieu public. Là, il continue de les torturer en les vidant de leur sang. À noter que les victimes ont toutes été violées post-mortem (sur la scène de crime?). Sur chaque scène de crime a été retrouvé un petit bristol avec inscrit un court message énigmatique et halluciné.
    Dans un premier temps, Haze pensait avoir à faire à un tueur mystique. Il y a des références mythologiques (Dionysos), à des lieux apparemment sacrés. Il y a une vraie cohérence qu'on discerne dans la récurrence de certains termes, lieux et personnages (il va falloir approfondir tout ça). Mais, en définitive, il a plus l'impression que le tueur décrit une sorte de monde imaginaire qu'il chercherait à atteindre par cette succession de meurtres et de tortures.
    Haze prend une fiche de serial killer vierge dans sa chemise en plastique. Il note donc « Celui qui vit dans un monde imaginaire » dans la catégorie Profil. Il détaille ensuite le MO dans la case correspondante et note, à titre d'hypothèse, dans la case Pathologie Mentale, que le tueur souffre certainement d'hallucinations, de troubles dissociatifs et/ou de schizophrénie. Et ce, peut-être bien à cause de sa propre consommation de Noix. Concernant les anciennes victimes, il y en a eu 8 avant celle-là. Dans la mesure où il semble bien que le tueur cherche à communiquer, il est peu probable qu'il en a dissimilé une. Auquel cas, pourquoi ? Pour ce qui est d'éventuels complices, Haze pense justement que le tueur agit seul et que cette solitude lui pèse. Il pense que ces messages sont en partie adressés à un éventuel complice, à quelqu'un qui saurait en déchiffrer la symbolique et qui le rejoindrait pour l'aider dans sa quête. D'autre part, ces messages seraient également adressés à celui à qui le tueur veut faire la démonstration de sa valeur. Pour entrer dans son monde imaginaire, il a besoin de l'accord (la bénédiction?) d'une sorte de passeur, de juge. Par ses messages et ses meurtres, le tueur demande donc de l'aide à un complice tout en entendant démontrer à ce « juge » qu'il mérite d'être accepter dans ce monde imaginaire. Plus prosaïquement, peut-on faire l'hypothèse que ce « Passeur » serait un vulgaire dealer de Noix ?

    Fort de cette première analyse et de ces hypothèses de travail, Haze attend maintenant le retour de la patrouille de police pour en savoir un peu plus et décider de la suite de l'enquête. Il en profite pour se connecter sur son site de RPG en ligne. Il a eu une idée  de personnage et de scenario. Ça fait un moment qu'il veut jouer dans une ambiance cyberpunk, il se crée donc le personnage de D. Maze. C'est un activiste, un journaliste indépendant et militant motivé par le savoir et la vérité. Pour l'heure, il veut faire la lumière sur cette nouvelle drogue qui fait des ravages à Reality-City : la Noix ! Ces yeux cybernétiques sont équipés d'un zoom et ses oreilles artificielles font office d'amplificateur. Sur un plan purement visuel, aucune trace de chrome. Et parce qu'il convient d'être prudent, il possède aussi un pistolet à fléchettes de marque Lik-Sang. D. Maze a beau travaillé en freelance, il bénéficie du soutien et du réseau d'ARN (Alternative Reality Network), un réseau de média indépendant. Mais, pour l'instant, la situation n'est pas rose. D. Maze commence l'aventure pris au piège par la bande de dealers qu'il voulait interviewer. Ils en veulent manifestement à ses crédits, voire même un peu plus.
    Haze stoppe là son récit. À la charge d'un autre joueur de renchérir. Maintenant, il crée la faction ARN, ce réseau média ayant pour but de faire le maximum de lumière sur les vérités qui dérangent. Ils ont l'avantage d'être particulièrement bien équipé. Ils possèdent un grand nombre de drones équipés de caméras et de micros, ainsi que toutes sortes de gadgets permettant de voler et stocker sons et images. Par contre, cet équipement a un prix et il est élevé. Il semblerait bien que, dans l'immédiat, ARN soit en quête de fond avant d'être en quête de vérité ! Toutefois, ARN va pouvoir souffler encore quelque temps puisqu'une banque vient d'accepter de leur faire crédit. Mais il va quand même falloir renflouer les caisses au plus vite. Un méga-scoop serait le bienvenu.

    C'est en fin de matinée, 2 jours plus tard, qu'on remet à Haze un rapport concernant les liens entre les victimes et le milieu des dealers et toxicomanes. Il se jette dessus comme le chef DiCompain sur une boite de donut's. C'est avec une certaine déception qu'il apprend que les victimes n'étaient pas connues pour être des consommatrices de Noix. Il apparaît même qu'elles ne prenaient aucune drogue et étaient au contraire connues pour être totalement « clean ». Haze doit donc revoir sa copie. Ce n'est pas par ce biais que le tueur les a abordées. De plus, impossible de mettre la main sur un revendeur de Noix. Les dealers interrogés ont bien un nom mais aucune idée de comment le contacter. Ce dealer se fait appeler « Le Magicien ». Toutefois, il y a un doute quant à son sexe. Il s'agirait peut-être d'une femme en réalité. En tout cas, le tueur est en contact avec lui. Partant du principe que le tueur vit ou veut rejoindre son monde imaginaire, Haze pense qu'il drogue ses victimes non seulement pour les garder contrôle mais aussi, peut-être, pour partager ses visions avec elles.
    Haze fait ensuite part au chef de ses impressions quant à la série de messages laissés sur les scènes de crime. Il a tout d'abord noté des références directes à la drogue. La Noix, mais aussi le Jus de Singe qui est le surnom d'un autre toxique. L'usage de drogue peut être une sorte de clé dans sa logique. Elle lui donne accès à ses visions ainsi, peut-être, que le « courage » de passer à l'acte. Là est peut être le lien avec la figure de Dionysos, dieu de l'ivresse. Le tueur évoque aussi différents lieux qu'on peut qualifier de fantasmatiques : La Cité Bleue, dont il serait l'ambassadeur ; Millevaux (est-ce vraiment un lieu?) ; l'Hôpital (a-t-il fait un séjour en hôpital psychiatrique?). Il parle aussi de la forêt, mais comme d'un lieu négatif. Elle a « cessé d'être un compagnon ». il écrit que la nature le torture. Il fait aussi référence à plusieurs personnages. NoAnde peut se comprendre comme No Hand (pas de main, il serait dans le déni de ses mains qui donnent la mort?) ou No End (il ne voit pas de fin à sa quête). Il évoque les Visions du Lézard. Voit-il un lézard dans ses hallucinations causées par la Noix ? Ce Lézard est-il le passeur qu'il cherche à amadouer par ses meurtres ? Il parle aussi plusieurs fois de ces esprits qu'il appelle Horlas. Il fait lui-même le lien entre ces Horlas et le fait d'être hors la loi. Il y a un lien, pour lui, entre être hors la loi et appartenir au monde des esprits. La transgression de la loi serait donc un moyen de franchir la frontière entre les mondes. Il évoque d'ailleurs tout un « protocole » et la notion de passeur, de convoyeur. Il y a donc des étapes à franchir, des lieux à visiter, des passeurs à payer (en meurtres?). Ce serait donc à ce prix qu'il parviendrait à gagner son monde imaginaire. Il souhaiterait d'autant y parvenir qu'il se considère en « exil ». Peut-on comprendre qu'il se sent exclu ? Le tueur serait donc quelqu'un de solitaire, isolé au sens propre comme au sens figuré. En admettant qu'il est une vie sociale, notamment un emploi, il ne doit avoir que peu de fréquentations. Ce doit être un homme plutôt discret, timide, voire mal à l'aise en société. Il vivrait autant que possible retiré. Il est possible qu'il habite une petite maison isolé à l'extérieur de la ville (dans ces bois qui le torturent?). Là, il aurait pu sans problème aménager sa planque pour y retenir ses victimes. De là, on peut imaginer que, par souci pratique, il possède nécessairement un véhicule. Et, pourquoi pas, un gros. Il s'agit autant de pouvoir faire de grosses courses et éviter les supermarchés autant que possible que de se donner un sentiment de puissance au volant, par exemple, d'un 4x4 ou d'un Hummer.
    Pour Haze, il ne fait aucun doute qu'il a à faire avec un schizophrène dont les hallucinations sont certainement accrues par la consommation de drogue et l'isolement. Il pense à un homme autour de la quarantaine n'ayant rien d'imposant. Il doit être vêtu d'une façon discrète et peu soignée. Il porte certainement des lunettes et arbore une calvitie naissante qu'il ne cherche pas à dissimuler. Il l'imagine marchant vite, voûté, fuyant tout contact avec les autres. Si, effectivement, le tueur est d'un certain âge, il est probable qu'il soit le seul de cette tranche parmi les clients du Magicien. Aussi, il faut absolument lui mettre la main dessus. Il leur faut six jours pour y parvenir. On conduit le Magicien en salle d'interrogatoire. Mais alors que l'agent Haze s'apprête à l'y rejoindre, un officier l'interpelle. Un témoin vient de se présenter au commissariat.
    Haze décide donc de faire patienter le Magicien et reçoit ce fameux témoin surprise. Il s'agit d'un homme d'âge moyen, dans les 35 à 40 ans. Il dégage une forte odeur de tabac et de marijuana. Il y a paquet de cigarettes posés devant lui sur la petite table en bois. Il enchaînera clopes sur clopes, alternant avec les gobelets de café dans lesquels il ne cessera de plonger des donut's dégoulinant de sucre glace. Haze lui trouve un air vif, intéressé. Il se présente et lui demande d'en faire autant tout en précisant le motif de sa venue.
    L'homme s'appelle Pete Peyno. Il a 40 ans et exerce la profession de couvreur. Ou plutôt exercerait si ses antécédents judiciaires en tant que consommateur et possesseur de produits stupéfiants ne l'avaient plus ou moins grillé dans la région. Aussi, il attend de la police qu'elle efface son ardoise, qu'il puisse de nouveau présenter un casier vierge à ses futurs employeurs. Il n'appartient certes pas à Haze d'accorder un tel privilège mais accepte sans souci, affirmant connaître un procureur qui lui doit un service. Pete semble indifférent, mais commence néanmoins son récit. Consommateur de drogue, il traîne souvent dans le quartier où il a vu la police enquêter ces derniers jours. On ne lui a rien demandé, mais il a compris qu'on recherchait un client du Magicien, un homme dans la quarantaine, comme lui. Lui, bien sûr, ne touche pas à la Noix. Mais, il connaît le Magicien de vue et certains de ses clients. Aussi, il a déjà aperçu un quadra négocier avec lui sur un parking. Non, il ne conduit pas un 4x4 ou un pick-up. Il l'a vu monter à bord d'un break. Il se rappelle d'un homme portant des vêtements tout fripés et auquel il manquait un doigt à la main droite. Le majeur ! Haze poursuit l'interrogatoire en vue, notamment, de confirmer ses hypothèses quant à l'apparence du suspect. Il porte bien des lunettes et présente une calvitie naissante. Toutefois, Pete n'a pas eu l'impression qu'il était voûté. Évidemment, le couvreur n'a pas retenu la plaque d'immatriculation du véhicule. Il ne restait plus maintenant à Haze qu'à confronter ces informations à celles qu'il pourrait tirer du Magicien.
    Dans la petite pièce où on l'a fait patienter, le Magicien paraît indifférent. Il tourne lentement la tête vers Haze quand ce dernier entre. Le Magicien a une quarantaine d'année lui aussi. Son visage est lourdement maquillé. Cela lui confère un côté androgyne qu'il n'aurait peut-être pas autrement. Il porte un long manteau de cuir usé sous lequel il est torse nu ainsi qu'un chapeau en fourrure orné d'une tête de loup. Haze lui trouve quelque chose de familier. Il se regarde dans la glace sans tain couvrant un des murs de la salle. Non, ce n'est pas possible. Pourtant, il a l'impression qu'ils se ressemblent tous les deux. Comme s'ils étaient cousins... mais c'est impossible.
    Haze s'assoit, se présente et se sent obligé de rassurer le Magicien en lui précisant qu'aucune charge de quelque nature que ce soit n'est retenue contre lui. C'est uniquement au titre de témoin qu'on lui a demandé de venir. Le magicien demeure impassible. Haze lui décrit alors l'homme qu'il considère comme le suspect principal dans son enquête et lui demande s'il le compte parmi ses clients.

Demian a une migraine carabinée. Il se lève difficilement. Il n'a aucune idée de là où il se trouve. Il regarde autour de lui en se massant les tempes. Il est dans une forêt. Qu'est-ce qu'il fout là ??! Heureusement, il a son petit sac à dos. Il farfouille à la recherche de son médicament contre les migraines. Mauvaise pioche. Il a oublié de les prendre. La journée va être très dure... et longue... comme une... Il n'a même pas la force de sourire à cette blague pourrie, ni celle de la trouver pourrie d'ailleurs...
Du bruit dans les feuillages. Un homme approche. Il porte un manteau de cuir et un masque en os. Demian reconnaît un Cœlacanthe.
Ce type, cette chose, lui veut du mal. C'est évident.
Demian essaye de réfléchir, mais avec cette migraine... Il y a bien un moyen d'en finir. Enfin, il y en a deux. Mais il ne peut se résoudre à cette deuxième solution sans avoir un tant soit peu tenté de sauver sa peau.
    Évidemment, il n'est pas armé. Mais, il peut tuer. Il le sait. Il sait comment. Ça le dégoutte, mais il sait comment tuer ce Cœlacanthe.
    Il s'arc-boute, se donne des coups de poings sur les tempes pour calmer la migraine. Juste assez pour sauter sur son agresseur, le ceinturer et tenter de le plaquer au sol. Mais le Cœlacanthe tient bon et reste debout. Demian enchaîne alors plusieurs coups de poings dans les côtes, sur les flancs. Le monstre montre alors quelques signes de faiblesse. Demian enchaîne les coups tout en tentant  de l'entraîner au sol. Il y a longtemps, il a un peu pratiqué les arts-martiaux. Avec un peu de chance, il pourra le maintenir au sol assez longtemps pour...
    Le Cœlacanthe tombe à genoux. Demian le pousse sur le ventre et, sans attendre, sans écouter ni son courage ni sa raison, il lui arrache son pantalon. Il défait les boutons de son propre jeans et s'enfonce dans la créature. Il lui maintient la tête dans la boue pendant qu'il enchaîne de violent va-et-vient entre ses reins. La petite mort s'offre rapidement à lui et lui offre la mort définitive du Cœlacanthe.
Demian se redresse et, avant même de renfiler son pantalon, retourne le monstre dont il arrache le masque d'os. Avec horreur, il contemple son propre visage.
Une idée horrible se fait un chemin à travers les méandres de la migraine. Il vient de se violer lui-même, de se tuer lui-même...
le décor change autour de lui. Il est sous l'eau. Des poissons à tête d'os nagent autour de lui. La pression est intenable. La migraine est intenable. Son corps explose. Sa tête aussi...
Demian émerge au fond d'un trou. Une gigantesque cavité dont les parois argileuses sont animés de pulsations régulières, comme un cœur qui bat. Il y a des cadavres partout. Parmi eux, il reconnaît celui de... son père ! Oh merde !! Pourvu que... Pourvu que tout ça ne soit qu'un cauchemar, rien qu'un cauchemar...
Soudain, une horrible douleur dans son ventre fait écho à celle qui lui vrille la tête. Il sent ses organes internes se... reconfigurer. Changer de forme, changer de place. Son système digestif se... réorganise. C'est impossible. Il fait que ça cesse et que ça cesse maintenant. Coûte que coûte !
Demian hurle...

    … car telle est la Vision du Lézard et cette t'est adressée Damon Haze. »
    Haze a l'impression d'émerger d'un rêve étrange, d'un sommeil absolument pas réparateur. Il n'a pas mal à la tête mais ressent pourtant le besoin de se masser les tempes. Il éprouve le besoin de demander au Magicien de répéter son histoire mais une irrépressible angoisse l'empêche de le faire.
    Le Magicien, lui, demeure impassible.
    Oubliant même le motf de cet interrogatoire, Haze quitte précipitamment la pièce. Il donne à la vite quelques consignes pour qu'on retienne le Magicien et court jusqu'au toilette. Il tente de vomir mais n'y parvient pas. Il se passe de l'eau sur le visage et contemple son reflet dans le miroir, ne sachant pas ce qu'il souhaite y trouver.
    OK, un nom. Il veut un nom. Celui du client. C'est pour ça que le Magicien est là et pas pour autre chose. Se sentant trop mal pour poursuivre l'interrogatoire, il délègue cette tâche à un inspecteur. Mais le Magicien reste intraitable et refuse de donner le nom de son client. D'une certaine façon, ils le tiennent. Ils peuvent le coffrer pour obstruction, refus de coopérer. À partir de là, ils auront tout le temps de le cuisiner.

    Haze a besoin de se changer les idées. Il se connecte sur son forum de rpg et regarde si on a répondu à son post dans son jeu cyberpunk. Bonne nouvelle ! Un certain DemianHesse lui a répondu via son personnage, le Techno-Vaudou Aaron Powl. Aaron se présente comme un noir albinos d'une trentaine d'année. Il porte de longues dreads dont certaines sont des implants cybernétiques. L'une d'elles est dotée d'une caméra, une autre d'une lame rétractable. Il prétend communiquer avec les Lwas, esprits vaudous, qui lui dictent sa conduite et dont il se fait un devoir d'accomplir la volonté.
    Demian décrit comment il met en fuite les dealers qui s'en prenaient à D. Maze. Il fait planer sur eux la menace des Lwas et du clan Powl. On se saura jamais vraiment laquelle de ces menaces a été efficaces mais les dealers s'enfuient. Pour autant, D. Maze n'est pas tiré d'affaire car Demian déclenche une scène de confrontation. Il entend en effet le faire renoncer à son enquête et déclare que son but va à l'encontre de la volonté des Lwas. Il est hors la Lwa ! Pour appuyer son propos, Powl agite sa cyberdread à la lame rétractable. D. Maze sent que l'albinos a des informations. Il enclenche tous ces cyber d'enregistrement et entend bien obtenir de lui autant de renseignements que possible. À la cyberlame, il oppose son pistolet à fléchettes. Il espère ne pas avoir à s'en servir, mais est-ce que ce sera suffisant pour intimider Aaron Powl ?
    On dirait que oui. L'albinos a un mouvement de recul. Il regarde un peu partout autour de lui. Il hoche plusieurs fois de la tête et marmonne des mots inintelligibles.
    « Maze ! Les Lwas t'ont à la bonne. Ils ne te veulent pas de mal. Aussi, tu devrais rester en dehors de toute cette histoire. La Cité Bleue n'est pas pour toi. Les Lwas ont un message pour toi. Alors, la voix du vaudou change. Elle devient à la fois plus rauque et lointaine.
    « Fange, ornières, bourbiers. Progresser dans l'infâme mangrove. Sables mouvants.
    Suffocation. Déchetterie de la mégafaune. La forêt de merde. »
    Puis, elle redevient normale. Aaron transpire abondamment. Il halète. D. Maze a l'impression qu'il veut lui dire quelque chose mais n'ose pas. Pour l'apaiser, il range son pistolet à fléchettes et lui tend la main. Le vaudou la lui prend et la serre, fort. D. Maze ressent une vive douleur, comme une décharge électrique. Il lit de la tristesse dans le regard de Powl qui s'excuse et s'enfuit. D. Maze le regarde courir à tout allure en secouant sa main endolorie. Quand il examine sa paume, une suite de lettres constituées de pixels bleutés s'efface. Un nom : Paul Singer...

    Haze se déconnecte sans trop comprendre ce qui vient de se passer. Même en admettant que ce Demian eut été connecté en même temps que lui, il est impossible qu'il ait pu participé à son post. Haze n'a jamais fait l'expérience de l'écriture automatique mais se dit que ça devrait ressembler à ça. Il décroche le téléphone de son bureau et demande à parler au chef DiCompain. Il veut savoir si le Magicien s'est décidé à parler. Oui, mais à lui seul... et il veut du café. Haze court jusqu'à la machine à café et commande deux gobelets. Il fonce ensuite jusqu'à la salle d'interrogatoire où l'attend le Magicien.
    « ''Fange, ornières, bourbiers. Progresser dans l'infâme mangrove. Sables mouvants.
    Suffocation. Déchetterie de la mégafaune. La forêt de merde'' Qu'est-ce que ça veut dire ? Et qui est Paul Singer ? »
    Le Magicien sourit. Il est à l'aise. Il hume la fumée de son café et en boit une gorgée.
    « Paul Singer se rendra dans la Cité Bleue. La Forêt gagne du terrain. La nature est une Torture. Je ne connais pas le nom de celui que tu cherche. Mais tu le trouveras dans la forêt, derrière l'hôpital en ruine. Tu es un gardien de la Lwa. Méfies-toi des Horlas et crains les Cœlacanthes. »
    Haze pousse devant le gobelet de café qu'il n'a pas touché. I lest encore fumant. Il attend que le Magicien s'en empare puis quitte précipitamment la pièce. Haze s'empare de son portable et donne ses consignes. « Qu'on organise une surveillance plus que serrée des bois derrière le vieil hôpital en ruine. Qu'on surveille aussi tous les accès routiers, qu'on arrête systématiquement tous les véhicules de type break et qu'on retienne tous les conducteurs répondant au profil décrit par le témoin. Qu'on organise aussi une battue « discrète ». Que les agents se fassent passer pour des chasseurs ou des randonneurs. Et qu'on ne s'arrête pas avant de l'avoir trouvé. Oh, et enfin, est-ce que quelqu'un connaît un certain Paul Singer ? »
    Sans attendre, Haze se rend sur les lieux décrits par le Magicien. Il s'enfonce dans les bois jusqu'à un petit cours d'eau. Évidemment, personne. Pour autant, il a le sentiment que c'est ici et maintenant que tout se joue. Il appelle le chef DiCompain et, ne voyant pas sur le terrain les hommes qu'il a demandé, lui met un coup de pression en lui rappelant premièrement que la vie d'une femme est certainement en jeu et, deuxièmement, qu'il sera tenu personnellement responsable de l'échec de cette affaire..il retourne alors à sa voiture. Il hésite à consulter ses mails. Il renonce, de  peur que ce Demian n'ait répondu à son post. La nuit tombe. Rien...
    Une semaine plus tard, Haze n'a toujours pas osé se connecter sur son site de rpg. Toutefois, une bonne nouvelle ce matin, on a arrêté un homme dans les bois. Un certain Paul Coleman. Il n'a fait aucune histoire lors de son interpellation. Il n'a d'ailleurs prononcé quasiment aucun mot. Il attend Haze en salle d'interrogatoire.
    Haze passe à la machine à café et commande deux gobelets fumants. Discrètement, il observe sa main droite et constate que le majeur manque. Il n'ose y croire. Ce serait donc lui. Il correspond bien à la description faite par le couvreur. Haze s'assoit. Il boit une gorgée de café. Le silence s'installe. Il n'ose le rompre. Coleman ouvre la bouche. Sa voix est rauque, lointaine...
    « Dans sa boutique, des centaines de flacons de larmes. Cristallines, fondues, fluides, opaques, irisées...
    Sentiments à boire et à vendre. »
    Haze le fixe droit dans les yeux. Coleman reprend, d sa voix normale.
    « Un incident et j'ai tout perdu. La Cité Bleue. »
    Sa voix change à nouveau.
    « Au bout de ce chemin de corruption et de souffrance, il n'y a que la folie, puis la mort. NoAnde frissonne. Où est-il tombé ? Spontanément, son regard se porte au sol. Il remarque alors que celui-ci est parsemé de petites statuettes tantôt de pierre, tantôt de bois, ressemblant vaguement à des hommes. Certains sont armés, d'autres recouverts de sang ou d'excréments séchés. Soudain, une tache de lumière attire son attention. Un petit bonhomme de bois recouvert de merde semble pointer quelque chose du bout de son bras de brindille. Une noix ? »
    Haze a un mouvement de recul. Coleman lève la main droite et pointe son index sur sa tempe. Il tire. Il s'écroule sur la petite table. Son sang – rouge – se mélange au café – noir – renversé sous le choc. Haze ne parvient pas à détacher son regard de l'index fumant de Coleman.


Réponse de Thomas :

C. Les messages sont vraiment cryptiques ! Comment t'es-tu pris pour les rédiger ?

D. J'aime l'influence de Coelacanthes avec la confusion fiction/réalité qui intervient quand l'enquêteur utilise la fiche de serial killer du jeu pour profiler le tueur !

E... Confusion renforcée quand le Magicien interrogé par l'enquêteur s'avère être son sosie...

F. Bien vu l'attaque par un double Coelacanthe et le fait que Demian utilise la nécrosexualité pour le tuer. La révélation finale n'en est que plus forte.

G. La multiplication des doubles se poursuit quand Haze interagit sur son forum RPG avec DemianHesse, son alter-ego.

H. La Cité Bleue, c'est une référence au JDR onirique Lacuna ?

I. C'est amusant que tu utilises les citations de l'Almanach verbatim, ça leur confère un côté ésotérique. j'attendais presque le moment où l'enquêteur allait embaucher un traducteur francophone pour aller étudier le vrai Almanach :)

J. En effet, il y a triche pour le final puisque d'une le surnaturel fait une irruption violente et de deux on ne va pas dans la planque du tueur et que l'enquêteur n'a pas la main sur le destin du tueur. Mais les jeux appartiennent aux personnes qui y jouent, pas à l'auteur. Tu fais ce que tu veux si tu as une idée derrière la tête pour ta transition :)

K. Et sinon, merci pour Tombe et Oubli ! ça a l'air bien !


Réponse de Damien :

C-pour les message, je pratique une sorte de cut up. Je pioche des mots au hasard dans Muses et Oracles et je croise ça avec une liste de thème récurrents et spécifiques à la campagne. Dans cette liste, il y a des références à des lieux, des personnages, la possibilité de reprendre (au hasard) des bouts de CR précédents et, maintenant, des passages de l'Almanach.

D et E- j'essaye de jouer cette carte de la confusion justement entre différents niveaux de jeu et de réalité. Il y a des consonances entre Hesse, Haze et Maze par exemple. Demian et Haze jouent tous les 2 la même partie sur leur forum de rpg et je joue moi-même cette partie en solo avec Remember Tomorrow etc.

F-oui ^^ j'ai un peu hésité et je me suis dit que c'était bien crado donc je l'ai fait :D

G-ah ben vala, retour à D et E ^^

H-carrément, c'est mon prochain solo !

I-en fait, à un moment, j'ai envisagé que Haze connaisse le jdr Millevaux et demande effectivement à ce qu'on lui traduise les textes, mais l'enquête a pris une autre orientation. Après, il n'est pas exclu que, dans le cadre de sa partie de Remember Tomorrow, les choses deviennent assez bizarres pour que cela se justifie.

J-ou, j'avoue, là j'ai triché ^^ mais pour la bonne cause puisque j'espère que ça rend bien et que ç aurait plu aux joueurs sir je l'avais joué sur table comme une partie classique. Et puis, ça me permet d'enchaîner sur Lacuna justement qui sera précédé d'une fouille de la planque du tueur par les forces de police. À l'occasion, ce sera peut-être l'occasion de continuer l'agent Haze.

K-de rien, je l'ai trouvé très sympa ce pti jeu et je pense que je le testerai dans cette campagne en mode « des survivants du Clan des Arbres sont hantés par le fantôme de l'un des leurs ». Et pourquoi pas NoAnde justement...


Auteur de Millevaux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.

Hors ligne

#24 29 Aug 2018 08:48

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
Inscription : 05 Feb 2008

Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

LA SERRE

Jouer des fantômes dans la forêt hantée de Millevaux, qui revivent un passé recomposé. Faire converger les souvenirs et réconcilier les âmes blessées, voici ce que permet un jeu beaucoup plus efficace qu'il ne le paraît.

Le jeu : Shades de Victor Gijsbers, affronter un passé douloureux et construire la confiance.

Joué le 22/10/2018 à la Convention Scorfel

Personnages : la mère, l'enfant sur le toit, l'enfant jardinier, l'enfant en double

Le jeu :

Shades étant un jeu atypique, je résume ici rapidement le principe. On joue des êtres qui se sont fait beaucoup de mal et ça s'est soldé par la mort de chacun d'entre eux. Aujourd'hui devenus des fantômes, ils se réincarnent dans le lieu où ils ont connu les affres de leur vie passé, et se remémorent peu à peu leur passé, maladroitement, failliblement. Chacun a sa version des faits. Les joueuses alternent des tours de paroles pendant lesquelles les autres joueuses doivent se taire, ne pouvant intervenir qu'en distribuant des jetons blanc (je suis d'accord avec ta version des faits) ou noirs (je suis en désaccord et c'est très important qu'on tranche cette ambiguïté). Seule la dernière phase de jeu permet de réunir les fantômes dans le présent pour une réconciliation ou un règlement de comptes.
Normalement, Shades se joue sans univers précis, il est défini en cours de jeu par les narrations des unes et des autres. J'ai fait une entorse à cette règle en précisant qu'on jouait dans l'univers de Millevaux, et en rappelant les grands principes de Millevaux en intro de partie.

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crédits : James Kerwin Photographic, cc-by-nc, sur flickr.com

L'histoire :

La mère :

Il fait noir. Noir comme dans "La lumière ne viendra plus jamais". Seule chose certaine : quelque chose de précieux est tout proche. Un mot : "regret", qui fait mal.

Je ressens mon propre poids, son grincement végétal organique. Envie de pleurer.

Je suis désolée. Si seulement j'avais pu expliquer. Il avait fallu faire des choses qui étaient nécessaires. Personne ne m'avait dit qu'il fallait vivre avec ça.

Le défaut de la corde qui vient de lâcher. Rappel des moments précieux. Je suis désolée mais c'était évident de finir comme ça.

Je desserre la corde. Il n'y en a pas.

Un arbre. Une maison. Une grande serre. C'était avant.

Je regarde la jardinière où pousse un jouet.

J'ai compris que tu ne serais plus le même, que je serais la seule à pleurer.  Moi aussi je voudrais oublier. Je n'arrive pas à vivre dans le présent.

Non, je n'étais pas en colère. C'était du désespoir. J'étais toute seule.

Oui, c'était un jour magnifique. Un bon augure. C'est vrai qu'il est mort très vite. Tout le monde a oublié. Il ne reste que moi. Quand les garçons sont venus, et si on oubliait qu'il était mort ? Je suis toute seule et j'ignore pendant combien de temps je vais pouvoir le supporter.

Mes mains caressent le manche déverni d'un long râteau. Après l'attaque du sanglier, je ne dormais pas. Je me suis endormie. C'était un délicieux jour d'avril. C'était un bel augure. Il est mort vite. Dans ton sommeil, je t'ai égorgé avec un rasoir. J'ai marché vers notre arbre. J'y ai fait descendre une longue corde.

Je t'appelais mon garçon. Tu avais des sautes d'humeur. Cela rendait les choses plus difficiles. Tu allais sur les poutrelles. J'espère que tu y trouvais ton compte. Pourquoi étais-tu si secret ? Tu as apporté du soleil. Tu étais si léger. Où étais-je ?

Cela m'a pris jusqu'à l'aube de recouvrir ton corps du terreau fertile. Les mains pleines d'humus, j'ai noué les cordes et je suis allée dormir.

Les enfants se sentent appelés. L'enfant au pot répond à sa mère devant un grand arbre. C'est la première fois qu'ils se revoient. "C'est mon préféré. Regarde comme tu as bien poussé. Je crois que cet endroit n'est pour aucun d'entre nous. Tu ne devrais pas rester ici. ll te reste assez de soleil.


L'enfant sur le toit :

J'ai faim. Des crepes de sanglier.

Le froid lumineux. La lumière froide. Assez de vent.

La faim. Il me manque quelque chose. Sur un toit de verrière. Un espace venteux rempli de plantes. Quelqu'un en contrebas. Un animal est censé être là.

Je suis en hauteur mais tout va bien. Quelqu'un entre. C'est mon chat, là où je devrais être. Suis-je mort ?

Assise sur une chaise sur le toi. Un chat sans nom. J'ai jamais été sympa avec les gens.

Les plantes de la verrière poussent avec des cadavres !

Je ne faisais rien.

Pas de raion de vivre ou de mourir. Tant pis si on oublie. Même en allant seule.

J'ai oublié de garder la serre. Ils râlent.

J'ai vu le chat bondir. Il est arrivé devant le sanglier sans pattes. L'homme avec une pelle. Chat-sanglier. Je descend du sommet de la serre, ça change de mes habitudes. Mais tout est déjà terminé. Le chat est calmé. Pas l'homme, il me crie dessus, et je n'ai pas le courage de me dérober à ses coups.

C'est comme si je me réveille en sursaut. Il n'y avait qu'un seul lit. Il est évident que j'oubliais des choses. L'homme dans la serre aussi oubliait des choses. J'élude la question. Je vais chercher le chat et je le mets dans les bras du jardinier.


L'enfant en double :

Un froid oppressant.

Le poids sur ma tête.

Rassurant, pas rassurant.

Un néon. Une jardinière.

Problème avec le chat que je vire de ma chaise.

L'enfant. "Occupe-toi du pot." Je lâche l'enfant et je donne le pot à son double.

Je jette le fauteuil du haut de la verrière, il passe à travers le fantôme de la femme.

"Assez de colère inutile".

La maison et la verrière s'effondrent. Ne reste que le grand arbre que la mère a fait pousser au centre de la verrière.


L'enfant jardinier :

Pas à ma place. Pas désiré. Envie de sortir.

Souvenir d'un monde grand, très grand, je devais toujours lever la tête.

J'étais un enfant.

Ce lieu me rejette. Tout est grand. Très vert. J'ai peur.

J'entends des pleurs. Je vois un grand animal. Il est couché, à terre. Un animal dangereux. Il n'a pas de pattes. Comme s'il avait été modifié. Il a changé.

J'aimais venir ici. L'animal n'est pas à sa place. Il ne devrait pas être là. C'était mieux avant.

Je partais jouer plus que d'attendre que les choses poussent.

J'explore l'espace. Des pierres, une construction éboulée. Les ruines d'une maison. J'ai grandi ici. J'aimais pas faire pousser les plantes.

Je regarde un arbre. J'aperçois le toit. Mes yeux m'y forcent. J'aime ce fauteuil et ce chat.

Mes yeux s'attardent sur le sanglier. Il est venu. Il a crié. Peut-être que j'aurais pu faire quelque chose mais je n'ai rien fait. Comme si je n'étais plus moi.

Le sanglier était si grand, si gigantesque. Je vois un chat et un enfant. Le sanglier meurt. L'homme s'en prend à l'enfant. Deux ne fond qu'un. Mes yeux se ferment.

Je passe dans les plantes-objets mémoriels cultivées dans la serre. J'essaye de leur apporter un souffle nouveau.  J'observe le fauteuil sur la verrière, le chat et le pot. Soupir.

J'écrase le pot sur le chat avec toute ma force et ma résignation. L'enfant sur le toit récupère le pot et le chat. "Montons. On n'a pas que ça à foutre."

Une course-poursuite éternelle après le chat.


Circulation des jetons :

Je n'ai noté que les jetons partant de ou allant vers mon personnage (l'enfant jardinier)

un désaccord avec la joueuse de l'enfant en double quand elle dit que le chat noir est seul

un désaccord avec le joueur de la mère, façon de dire : "Sois pas trop dure avec toi, prends le temps de vivre."

un désaccord avec le joueur de l'enfant sur le toit quand il dit qu'il n'aimait pas faire pousser les plantes

un accord avec le joueur de la mère quand il mentionne son désespoir.

un accord avec la joueuse de l'enfant en double quand elle mentionne avoir oublié les tâches de la serre.

La joueuse de l'enfant en double me signale son désaccord à propos de ce que je dis sur le sanglier.

Le joueur de la mère me signale son désaccord quand je dis que le père dispute l'enfant jardinier.

La joueuse de l'enfant en double me signale son désaccord quand je dis que des alliances poussent dans les pots.

Le joueur de l'enfant sur le toit me signale son accord pour la même chose.

La joueuse de l'enfant en double me signale son accord quand je dis que l(es) enfant(s) avai(en)t pour consigne de monter la garde autour de la serre.


Commentaires :

Durée de jeu :
1/2h briefing + 2h1/2 de jeu en cumulé (on a eu deux interruptions d'un quart d'heure) + 1/2 h de debriefing.

Profil de l'équipe :
Expérimentée sur du jeu de rôle classique et très ouverte à l'idée d'expérimenter d'autres formes.

Retour du joueur de la mère :
+ J'ai jamais été mentionnée par la joueuse de l'enfant en double :) [S'ensuit une dispute amicale sur l'ouverture du jeu]
+ [au joueur de l'enfant sur le toit] Je voulais jouer avec toi. J'ai failli jouer une mère infanticide. J'ai voulu garder l’ambiguïté sur son genre le plus longtemps possible. [note de Thomas : le rapport écrit ne rend pas forcément honneur à ceci.]
+ [On débat avec lui de son rapport avec le personnage de l'enfant en double.]

Retour du joueur de l'enfant sur le toit :
+ Pour éviter d'oublier plus, mon personnage se renfermait plus. Il ne donnait pas de nom au chat pour ne pas l'oublier. [Joueur de la mère : Mais il aurait fallu reformuler ton ressentiment.] [Thomas : C'est un jeu sur l'incommunicabilité.] [Le joueur de la mère reconnaît ensuite que le joueur de l'enfant sur le toit nous a tendu des perches.]
+ [On débat ensuite sur la question : faut-il divulguer le jeu intérieur, le ressenti du personnage ?]
+ Vers la fin de la phase 2, le don de jeton s'est complètement dévalorisé.
+ La difficulté, c'est de pouvoir tendre des perches et les saisir. Par exemple, j'ai eu du mal à jouer avec le personnage de la mère.

Retour de la joueuse de l'enfant en double :
+ Avec l'oubli, on savait pas si c'était une vraie famille ou une famille recomposée.
+ [S'ensuivent des débats à quatre sur l'efficacité du côté "jeu de plateau" de Shades, et sur la justesse de nos roleplays respectifs.]

Retour personnel :
+ J'ai été assez amusé/édifié de voir comment les "reproches" en debrief sur le jeu des uns et des autres, c'était aussi des reproches que se faisaient les personnages entre eux. Ainsi la joueuse de la mère qui se fait dire : "T'étais pas une vraie mère." C'était dit comme : "tu n'as pas joué une vraie mère" mais ça pouvait franchement être aussi compris comme "tu étais une mère absente", dit de personnage à personnage, et ça c'est vraiment dans le ton du jeu et on voit que c'est le jeu qui le provoque. D'ailleurs, j'ai omis de noter ce qu'on a fait dans la dernière phase (quand les fantômes peuvent interagir entre eux), mais quelque part ce debriefing en a tout a fait office.
+ Bien que le traducteur de Shades, Fabien Hildwein, m'ait déconseillé de faire jouer Shades avec un setting pré-établi (le flou sur le contexte étant un point important du jeu), j'ai pris le risque parce que je trouvais que Millevaux, notamment avec le côté magique de l'univers et tout ce qui tourne autour de l'oubli, collait beaucoup à l'ambiance de Shades et la justifiait. Ce test me l'a prouvé.
+ L’adéquation de Shades à l’univers de Millevaux (ou la capacité de Millevaux à tout absorbé) en a frappé d’autres avant moi, puisque pour rappel, Steve Jakoubovitch avait conçu un hack de Shades dans l’univers de Millevaux, Les Remémorants, qui donne aussi des résultats assez poignants.
+ En revanche, j'étais au départ très sceptique sur l'efficacité du jeu. Après la lecture des règles et l'écoute du podcast de la Cellule consacré au jeu, je pensais que la confusion entretenue par le jeu (interdiction de nommer les personnages, ou de décrire quoi que ce soit avec précision, interdiction de se coordonner hormis par un système de don de jetons assez peu informatif) provoquait des dialogues de sourds. La partie a entièrement dissipé mes doutes. J'ai trouvé que la convergence se construisait assez organiquement, et que le jeu poussait tout aussi organiquement à une grande écoute et une grande prise en compte des éléments apportés par les autres, et ce sans la moindre concertation verbale ni l'application de règles compliqués. Moi qui ais justement des difficultés d'écoute et de respect des narrations des autres (j'ai tendance à imposer rapidement ma vision des faits et à accaparer la parole), ça m'a fait beaucoup de bien. En outre, la fiction était étonnement claire. Le compte-rendu, rédigé 5 mois plus tard à partir de notes que j'ai parfois eu du mal à déchiffrer, ne rend pas forcément honneur à cette clarté. Je me rappelle qu'en jouant, le rôle du père était beaucoup plus clair qu'on ne le voit à l'écrit. Il y avait une ambiguïté sur le fait de savoir si l'enfant en double et l'enfant jardinier étaient la même personne, ou plutôt une ambiguïté sur le fait de savoir si les trois enfants étaient la même personne, mais même un truc aussi fumeux n'a pas posé problème. Au final, l'histoire est simple. Un couple de parents qui tiennent une serre d'objets mémoriels, leur enfant néglige sa tâche de gardien et de jardinier de sa serre pour aller explorer les alentours ou s'isoler sur le toit de la serre. Du coup, un sanglier-horla s'infiltre dans la serre et saccage le lieu. Le père tue l'enfant de colère. Puis il oublie son forfait. La mère tue le père, puis incapable de supporter le remords, met fin à ses jours. Il y a quelques petites subtilités et ambiguïtés à rajouter à tout ça, mais pas tant.
+ Le jeu était très émotionnel, je crois qu'on a tous été à fleur de peau dans cette partie.
+ On a joué à 4 ce qui est une personne de plus que prévu dans le jeu, mais c'est très bien passé.
+ Shades a été un coup de cœur étonnant de l'année 2017, je remercie encore mon équipe qui a été vraiment au top, du jeu émotionnel comme je l'aime. Je serais très tenter de retenter l'aventure en format GN, dans les bois.


Auteur de Millevaux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
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#25 10 Sep 2018 14:11

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
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Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

THANATRAUMA

Suite de la campagne Millevaux solo multi-systèmes par Damien Lagauzère. Où un agent secret onirique s’aventure dans la mégalopole de l’inconscient collectif en proie à la psychose végétale.

Le jeu principal : Lacuna, exploration onirique paranoïde, par Jared Sorensen

Épisodes précédents de la campagne :
1. La forêt du dessous (CSMS)
Quand les souterrains deviennent cavernes et les fantômes deviennent horlas. Un crossover Poltergeists / Millevaux

2. Traqué par les capuches blanches
Une course-poursuite mortelle qui débouche vers l’enfer souterrain du jeu de rôle Cœlacanthes !.

3. Je suis d’un autre monde
L’agent Haze confronté à un serial killer originaire de Millevaux dans un imbroglio onirique des plus déroutants. Troisième épisode de la campagne Millevaux solo multi-systèmes de Damien Lagauzère.



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crédits : Gareth Courage, cc-by-nc-sa, sur flickr.com


L'histoire :

    « Bonjour, je l'agent spécial Den...
    Non ! Pour cette mission, vous êtes l'agent Paul Singer. Vous nous avez été recommandé par l'Agent Spécial Miner. Savez-vous ce qu'il est devenu ?
    Euh... non...
    Porté disparu. En mission. Je tiens à vous signaler que Contrôle l'a jugé coupable de nombreuses violation du protocole. Tirez-en les leçons qui s'imposent.
    Il a disparu... en mission ? Je vais devoir le retrouver ?
    Non. Enfin, c'est sûr que si vous lui mettez la main dessus... Disons que ce n'est pas entièrement par hasard qu'on vous a choisi. Mais là n'est pas l'objet principal de votre mission. Vous n'avez pas lu le dossier ?
    On ne me l'a pas remis.
    Ah ! Tenez, lisez ça. »

    Début juillet 2018, la police d'Olympia (état de Washington) interpelle Paul Coleman dans le cadre d'une affaire de meurtres en série. On le soupçonne d'être l'auteur de neuf meurtres précédés de kidnapping et tortures. Il se laisse docilement conduire au commissariat où l'agent spécial Haze du FBI entend procéder à son interrogatoire. Après avoir proféré des paroles vides de sens dans le même style que les messages qu'il avait laissés sur les scènes de crime, Coleman se suicide d'une balle dans la tête tirée à l'aide de... son index droit. Notons que Coleman correspond à la description faite par des témoins (absence du majeur droit) et que, après autopsie et analyse, son ADN correspond avec celui retrouvé sur une des scènes de crime. Parallèlement, une brigade de la police d'Olympia investit la résidence principale de Coleman, un chalet en bois perdu dans la forêt. De prime abord, il s'agit d'un habitat sans histoire et tranquille. Tout est propre et bien rangé. Les placards sont remplis de nourriture, visiblement pour plusieurs semaines. Le sous-sol par contre... Une trappe dissimulée dans la salle de bain mène à un couloir souterrain. Là, les policiers ont fouillé plusieurs cellules équipées d'une couchette en bois et de chaînes fixées au mur. Il régnait là une forte odeur de pourriture et d'excréments. Ils ont trouvé des restes humains en divers états de putréfaction. Dans l'une des cellules, une femme rousse approchant la quarantaine était prostrée, nue, sur sa couchette. Elle était couverte de boue et de sang séché. Elle récitait en boucle et à voix basse, comme un mantra : « La Cité Bleue... Le mois de Vrillette... L'orgone, mystérieux fluide, drogue, aphrodisiaque et source d'énergie... Machines à orgones. L'emprise et l'égrégore dans le même flacon ! »

    « Vous voyez où nous voulons en venir agent Singer ?
    Oui, effectivement. La Cité Bleue. Cela n'est pas sans rappeler le nom de code du lieu que nous étudions.
    Nous ? Non, agent Singer. Vous n'étudiez rien. C'est la Compagnie qui étudie Blue City. Bref, il se trouve que plusieurs message laissés par Coleman évoquent Blue City mais également une forêt et d'autres lieux et personnages étranges. Nous voulons en savoir plus. Nous allons vous envoyer à Blue City. À charge pour vous une fois là-bas d'en savoir plus sur cette forêt et surtout sur la façon dont un pauvre type comme Coleman à pu obtenir toutes ces informations.
    Mais, on dirait que lui comme cette femme, cette Johanna Ackermann, aient été sous influence de stupéfiants. Ils ont consommé de la Noix. Est-ce que...
    Tutut agent Singer. Ne parlez pas de la Noix, je vous en prie ! Bon, si vous avez besoin d'informations complémentaires, vous aurez tout le loisir de voir directement ça directement avec Contrôle durant la mission. Pour l'instant, si vous voulez bien retirer votre chemise, que je procède à quelques examens... Bon, vous avez un plutôt bon cœur pour un homme de votre âge. Veuillez passer dans la pièce d'à coté, je vous prie. Nous allons procéder à l'insertion. »

    Insertion réussie. L'agent Singer se trouve dans une rue déserte. Tout autour de lui, des immeubles à la hauteur démesurée l'empêchent de voir le ciel. Il doit consulter sa montre pour savoir qu'il est 20h20. En juillet, il est donc sensé faire encore jour. Il se rappelle son ordre de mission : comprendre comment un tueur en série a pu être mis au courant de l'existence de Blue City. Sa piste privilégiée : une boutique avec des flacons. Il aurait apprécié quelques indications plus précises mais, avec la Compagnie, il a appris à se contenter de peu. Mais là, c'est vraiment trop peu. Un petit coup de pouce de Contrôle serait vraiment le bienvenu.
    L'agent Singer part donc en quête d'une cabine téléphonique. Alors qu'il marche tranquillement, il revient sur ses pas. Quelque chose a attiré son attention dans une vitrine. Ce bibelot en forme de chien à 6 pattes est vraiment, mais vraiment horrible ! Au fond de la boutique, une ombre s'anime. Spontanément, Singer met la main dans sa poche à la recherche de son arme. Évidemment, elle est vide. À mesure que la chose avance, il en discerne de mieux en mieux les contours. Il s'agit d'une espèce de gargouille mécanique. À vue de nez, elle doit mesurer dans les 2m50. Elle pointe son doigt dans sa direction. Singer se met alors à courir. Derrière lui, la vitrine vole en éclats. Malgré son poids, la machine court vite, très vite. Elle le rattrape trop rapidement et plaque sur son épaule sa lourde main d'acier. Elle le soulève et le retourne afin de lui faire face.
    « La viande noire s'agite. En ce mois de Vrillette, on nous disait clochards, nous étions pionniers, libres, chercheurs d'or. On nous disait fous, nous étions les seuls à pouvoir s'en sortir. Les Cœlacanthes se mélangent. Ils ont soif d'amour ? Quand je parviens à me relever, il fait nuit. La lune est pleine. Quelques notes de basse. Je me retourne. Un être difforme, moitié-homme moitié... sanglier ? Se tient là. Comme moi à l'époque, la basse à la main, le pied droit en appui sur l'une des 2 malles dans lesquelles je rangeais mes vieux comics de chez Marvel. Dans quel état doivent-ils être ? »
    La gargouille relâche alors sa prise tout en continuant de fixer Singer. Alors qu'il tourne dans une ruelle, il voit que la gargouille est toujours immobile. Il n'ose pourtant pas s'arrêter de courir. Pas tout de suite. Qu'est-ce que tout ça veut dire ? Après de longues minutes à courir, puis encore d'autres à reprendre son souffle, il se rappelle que la teneur de ce message évoque assurément les messages laissés par Coleman sur ses scène de crime. Cela signifie-t-il qu'il, ou plutôt que la Compagnie, serait sur une piste ?
    Et forcément, aucune cabine téléphonique en vue !
    OK, et si c'était un signe ? Dans ce cas, inutile d'essayer de s'en remettre à Contrôle. Enfin, dans l'immédiat en tout cas. Pour l'heure, Singer décide tout simplement de s'en remettre à son Instinct, en espérant qu'il le guide jusqu'à cette fameuse boutique. Et... ÇA MARCHE !!!
    Singer se retrouve face à une nouvelle vitrine. À l'intérieur, des flocons. Partout dans la devanture mais aussi dans la boutique. Singer voit nettement les rayonnages garnis de flacons en verre de toutes les tailles et de toutes les formes. Avant de se décider à entrer, il cherche une plaque ou quoi que ce soit indiquant la raison sociale d'un tel établissement. Rien ! Évidemment. Il se colle à la vitrine et scrute le fond de la boutique. Il veut s'assurer que les lieux sont vides. Il n'a aucune envie de se retrouver face à une autre gargouille mécanique.
    Une ombre bouge dans le fond de la boutique. Singer se plaque contre le mur extérieur et jette un œil pour savoir de qui il retourne. Une silhouette s'approche. Une silhouette... Singer estime que ce mot est bien mal choisi eu égard à la difformité de la créature qui s'avance. Plus elle s'approche et plus Singer se rend à quel point elle est grande. Elle dépasse très largement un humain normal. Cette chose est comme une masse grouillante. Il sent qu'il devrait fuir mais quelque chose le retient. Serait-ce juste le fait que cet endroit semble être un des objectifs de sa mission ? Singer est loyal, mais pas suicidaire.
    La chose avance un pseudopode en direction de la vitrine. Un bruit de succion se fait entendre quand son extrémité se colle au verre. Puis, un bruit sourd. La vitrine tremble. La chose grouillante est maintenant collée à la vitrine, à quelques centimètres seulement de Singer.
    « Je ne te vois pas, mais je sais que tu es là. Je ne vais pas te tuer. Je ne vais pas chercher à le faire. Si je le cherchais je le trouverais. Mais je ne vais pas chercher à le faire, Paul Singer. J'ai un message de la part de Dionysos. Le Thanatrauma et les Antigens sont des alliés. Mais je ne t'ai rien dit sur la Bouche de pierre. Ni sur la Bouche, ni sur Pierre. Et maintenant, je m'en vais... »
    S'ensuit un nouveau bruit de ventouse. Singer attend quelques instants, de longues minutes, avant d'oser jeter un regard à l'intérieur de la boutique. Une ombre bouge dans le fond de la boutique. Là, elle a clairement forme humaine. Singer s'élance à l'intérieur. Il plonge sa main à l'intérieur de sa veste à la recherche d'une arme. Vain réflexe. Ses poches sont vides.
    « Pas un geste, je suis armé !, ment-il.
    Au mois de Vrillette, un coup de pelle malheureux a crevé une poche de biocide. Poison déversé dans les rivières, crèvent plantes, bêtes, hommes ! Forêt de mort. » lui répond une faible voix de femme.
    Singer approche. Au sol, recroquevillé en position fœtale une femme nue est agitée de spasmes et chantonne en boucle ces mêmes paroles.
    « Madame Ackermann ? Vous êtes Johanna Ackermann ? Je suis l'agent Paul Singer. Je vais vous aider. »
    Joignant le geste à la parole, Singer enlève sa veste et la pose sur les épaules de Johanna. Il cherche un téléphone des yeux et en trouve un sur le comptoir, au fond de la boutique.
    « Allo, Contrôle ? Ici l'agent Singer. J'ai besoin d'aide.
    Pardon ? Vous dîtes ?
    C'est Paul Singer. J'ai besoin d'aide. Je viens de trouver Johanna Ackermann dans la boutique de flacons. Je ne sais pas comment l'extraire. Elle n'est pas sensée être là, non ? Si ?
    Agent Singer... Je, euh... Comment vous dire. Vous êtes mort il y a 12 minutes.
    Pas du tout. J'ai eu quelques petits ennuis mais rien d'insurmontable. J'ai croisé quelques « personnalités », dirons-nous. Mais tout va bien. Je suis avec madame Ackermann et elle, par contre, ne va pas bien du tout. Comment l'extraire ? Elle n'est pas sensée être là.
    Et bien, euh... Non, elle n'est pas sensée être là. Elle est sensée être hospitalisée dans le service des soins intensifs de l'hôpital d'Olympia. Il est donc effectivement théoriquement impossible qu'elle se trouve à Blue City.
    Et bien en pratique elle y est mon vieux ! Il faut nous sortir de là.
    Et bien, je...
    Contrôle, bougez-vous le cul s'il vous plaît !
    Euh... Oui, oui. On me dit de vous dire de vous rendre à l'hôpital.
    OK, on est parti. Oh, tant que je vous tiens, il me faudrait des vêtements pour madame Ackermann et une arme pour moi. »
    Singer inspecte alors l'arrière boutique. Dans un carton, il trouve des vêtements féminin et un Glock 19. Maintenant, direction l'hôpital de Blue City.

    Était-ce juste de la chance ou... autre chose, à un abris-bus, Singer consulte une carte du quartier et trouve l'hôpital. Colonne 13, ligne P. OK, c'est noté. Johanna Ackermann est toujours inaccessible à tout discours raisonné, mais au moins elle peut marcher. Elle regarde les murs de la ville avec un regard perdu et continue de marmonner des propos incohérents. Singer la prend par les épaules et la guide jusqu'à l'hôpital.
    Quelque chose titille Singer. Son Instinct lui dit que quelque chose de louche se trame. Il scrute la rue autour de lui. Rien, mais il sent malgré tout une présence. Pour autant, celle-ci ne lui semble pas nécessairement hostile. Mais la plus élémentaire prudence lui dicte malgré tout de ne pas s'attarder. Après une vingtaine de minutes à marcher dans les rues déserte, l'hôpital est en vue.
    Aux fenêtres, aucune lumière n'est allumée. Singer aide Johanna à monter les quelques marches menant à l'accès principal. La porte n'est pas verrouillée, mais quelque chose en bloque l'ouverture. Singer tente de l'enfoncer mais elle ne bouge pas. Enfin, pas assez pour leur permettre d'entrer. Pas de problème, dans une ruelle adjacente, il trouve une fenêtre accessible. Il la brise et s'introduit à l'intérieur. Ensuite, il aide Johanna à entrer à son tour.
    Tout est noir. Il n'y a aucun bruit mais il flotte une odeur étrange. Comme... de la terre meuble, de l'herbe. En fermant les yeux, il a le sentiment d'être dehors, dans une... forêt. Il observe les réactions de Johanna. Elle demeure impassible. Il trouve un interrupteur. La lumière fut, mais...
    Les murs autour d'eux sont décrépis. Ils tombent en ruine. L'hôpital n'est plus qu'une ruine envahie par la végétation. On voit le soleil briller à travers les fenêtres brisées. Johanna semble soudain triste. Elle se retient de pleurer. Tout en tentant de l'apaiser, Singer regarde autour de lui. En bas d'un des murs, juste au dessus de la plinthe, un graffiti. « La Bouche ne parlera plus. Pierre s'en est allé. »
    La Bouche, Pierre... La chose dans la boutique lui en a parlé. Qu'est-ce que ça veut dire ? Il soupire. Il doit avant tout trouver un point d'extraction. Pour ça, appeler Contrôle. Un téléphone. La réception. En admettant qu'il y en ait un, il est peu probable qu'il fonctionne, mais il doit tenter le coup. Il prend la main de Johanna et quitte la pièce. Dans le couloir, tout est obscur. Tout semble redevenu aussi normal que possible. Il regarde la porte qu'il vient de refermer et n'ose la rouvrir.
    OK ! Pas de téléphone à la réception. La question est réglée. Il doit pourtant contacter Contrôle, de toute urgence. Il est juste impossible qu'il n'y ait pas un téléphone dans un hôpital ! Traînant toujours Johanna derrière lui, il entre dans une chambre. Bonne pioche ! Il y a un combiné. Normalement, il ne devait servir que pour les communications internes, mais là... ça devrait marcher quand même. Il décroche. Il y a de la tonalité.
    « Contrôle, nous sommes à l'hôpital. Vous pouvez nous extraire. »
    Un cri lui répond.
    « Le Thanatrauma ! Il approche ! Éjection ! Éjection ! »

    L'agent Singer se réveille quelques ??? plus tard dans une chambre d'hôpital, service de soins intensifs. Assis à côté de son lit, Contrôle l'observe. Il y a un mélange de tristesse et de méfiance dans son regard.
    « Et madame Ackermann, elle va bien ? »
    Oui, oui, répond Contrôle. C'est plus pour vous que je m'inquiète.
    Comment ça ? C'est parce que je suis sensé être mort, comme vous avez dit ?
    Non ! J'aimerais que vous me parliez de votre « contact » avec le Thanatrauma.
    Pardon, de quoi vous parlez ? »


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#26 24 Sep 2018 16:01

Thomas Munier
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Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

LA FOLIE DE MA SŒUR

Suite de la campagne Millevaux Solo avec une incursion funèbre et enfiévrée dans la mémoire d'une défunte. Un récit par Damien Lagauzère.

Le jeu principal : Tombe et Oubli, le combat d'un mort pour rester dans la mémoire des vivants. Un jeu narratif par Benjamin Putois

Avertissement : contenu choquant (trigger warnings listés plus loin)

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~Erebos, cc-by-nc, galerie sur flickr.com

Épisodes précédents de la campagne :

1. La forêt du dessous
Quand les souterrains deviennent cavernes et les fantômes deviennent horlas. Un crossover Poltergeists / Millevaux

2. Traqué par les capuches blanches
Une course-poursuite mortelle qui débouche vers l’enfer souterrain du jeu de rôle Cœlacanthes !.

3. Je suis d’un autre monde
L’agent Haze confronté à un serial killer originaire de Millevaux dans un imbroglio onirique des plus déroutants. Troisième épisode de la campagne Millevaux solo multi-systèmes de Damien Lagauzère.

4. Thanatrauma
Suite de la campagne Millevaux solo multi-systèmes par Damien Lagauzère. Où un agent secret onirique s’aventure dans la mégalopole de l’inconscient collectif en proie à la psychose végétale.

5. Sous la coupe des horlacanthes
Damien Lagauzère poursuit sa campagne Millevaux solo multi-système avec l’un des scénarios les plus éprouvants de Coelacanthes !


Je viens juste de terminer mon solo avec Tombe & Oubli. j'avoue très modestement être loin d'avoir fait le tour des potentiels offert par ce jeu mais c'est clair qu'il est très sympa et qu'il y a vraiment moyen de se marrer à plusieurs. En tout cas, en solo et pour Millevaux, pour une 1ère fois, voila ce que ça donne :)


Trigger warning : viol

L'histoire :

NeinUnd était revenu sur les lieux du massacre. Là où les hommes en cagoule blanche avaient tué tous ceux, ou presque, du Clan des Arbres sans aucune pitié. Il se doutait qu'il n'était pas le seul survivant. C'était impossible. Il devait forcément y en avoir
d'autres. Mais pour l'instant, il était seul. Seul parmi les cadavres. Il errait au hasard, reconnaissant chacun des visages paré du masque de la mort.

Siy, sa sœur, gisait là. Paradoxalement, son visage exprimait une impassibilité qui n'avait rien à voir avec sa fougue habituelle.

Combien de fois avait-il dû la ramener à la raison, la retenir alors qu'elle s'apprêtait à se confronter aux dangers de la forêt en toute insouciance ? Elle n'avait que faire des Horlas. Les mises en garde des chamans glissaient sur elle. Avait-elle souffert ? On jurerait que non. Lui, il souffrait. Il avait envie de hurler mais se retint, de peur d'attirer les hommes en cagoule.

Tout en jetant des regards craintifs autour de lui, NeinUnd se mit à creuser le sol. Il savait que cela n'avait aucun sens car il ne pourrait pas offrir une sépulture décente à chaque membre du clan, mais il voulait quand même le faire pour sa sœur. Il utilise une
sorte de pelle en pierre pour creuser la terre mais la force et le courage lui manquent. Et il a peur, peur que ces hommes reviennent.

Le trou est peu profond mais suffisant pour qu'il y dépose Siy. Il se rappelle quand, petite, elle avait creusé deux trous dans lesquels elle avait « planté ses pieds ». Elle voulait prendre racine et, comme les chamans, devenir un arbre elle aussi.

NeinUnd avait commencé par rire mais avait commencé à s'énerver comme elle refusait de bouger alors même que le soleil se couchait. Il avait fallu l'intervention et l'évocation d'une vieille légende mettant en scène Shubb-Niggurath elle-même pour qu'elle consente à sortir de terre. Maintenant, elle ne sortira plus jamais de terre.

Puisse-t-elle prendre vraiment racine et donner naissance à un bel arbre. Puis, il éclate en sanglots. Non parce que sa sœur est morte, mais parce qu'il se souvient. Il se souvient de ce qu'il lui a fait.

Il était jeune et ne comprenait pas. Il avait pris les mots des chamans au pied de la lettre et avait conduit Siy dans la forêt, de nuit. Curieux d'observer les esprits de la nuit, il s'était servi d'elle pour attirer... Il ne savait pas vraiment ce qu'il voulait voir. Mais il avait vu. Il avait vu le futur. La forêt était devenu un gigantesque abattoir et d'immenses Horlacanthes d'au moins trois mètres de haut s'étaient emparées d'elle. Ils l'avaient prise, forcée et rejetée. Et lui, il avait observé la scène les yeux et la bouche grands ouverts, sans un mot ni un geste. Il avait ensuite attendu longtemps que sa sœur reprenne conscience. Puis, il l'avait ramenée au camp en lui jurant que tout cela n'était qu'un rêve.
Mais, il avait vu le futur...

NeinUnd ne fait qu'enterrer sa sœur. C'est ce souvenir, sa culpabilité qu'il enterre. Il voudrait aussi que ce futur qu'il a vu reste sous terre et ne voit jamais le jour. Il s'en veut d'avoir infligé ça à Siy. Et il s'en veut de n'avoir jamais plus vu en elle par la suite
que l'instrument, le jouet, de ce futur. Pendant des années, il s'est convaincu qu'elle était responsable de ce qui lui était arrivé et de ce qui leur arrivera à tous. Mais aujourd'hui, il sait que c'est lui le responsable de ce qu'elle a subi. Et les seuls Horlacanthes seront responsables de ce qu'ils infligeront aux humains. Ils n’avaient jamais évoqué cette nuit. Sauf une fois.

Sa fougue joyeuse, ce jour là, s'était muée en une violence verbale et physique dont il avait l'objet. Personne n'avait compris pourquoi elle l'avait agressé ainsi, sans aucun motif apparent. Lui, n'avait rien fait pour se défendre. Il avait encaissé les insultes et les coups, sachant qu'il les méritait et espérant qu'elle ne dise pas à tout le monde à quel point il les méritait. Il se souvient également de la fois où elle avait interrompu un rituel clanique. Là aussi, il avait craint qu'elle ne dévoile tout. Mais elle s'était borné d'injurier les chamans, les traitant au mieux d'ignorants, au pire de menteur. Il avait fallu l'exclure du cercle.

Ceux qui s'en étaient chargés devaient toujours porter les marques de griffures et de morsures qu'elle leur infligea.

Un jour, NoAnde leur fit part de sa volonté de devenir chaman. Il ne savait absolument pas d'où lui venait cette idée mais elle semblait profondément enracinée en lui. L'idée avait germé et la fleur de sa volonté était en train d'éclore. Il rendit visite à Siy et lui
demanda de l'accompagner dans sa démarche car le Serpent-Fleur en avait décidé ainsi. Elle refusa, arguant qu'elle était la gardienne d'une tradition trop ancienne pour se perdre dans ces enfantillages. Quand NoAnde lui demanda de s'expliquer quant à ce blasphème, elle se contenta d'un nom : le Thanatrauma ! Le Thanatrauma ! Oh oui ! Quel terrible Horla avait-elle déchaîné cette nuit. Nul ne sait comment elle s'y était pris et les chamans eux-mêmes préférèrent mentir et taire le rôle de Siy dans cette catastrophe, mais le Thanatrauma avait déferlé sur le Clan des Arbres. Il avait infecté les rêves de chaque membre du Clan et il avait fallu consacrer bien des jours et des nuits à de pénibles rituels de purifications. NeinUnd avait alors pensé que Siy serait  bannie. Mais les chamans n'en firent rien. Ils ne parlèrent jamais d'elle dans cette histoire alors même que NeinUnd était certain qu'ils savaient. Mais pourquoi, pourquoi la protéger ?

Siy était née le 18ème jour de Vomembres. Ce jour là, elle chantait « Y'avait les ruines de cet hôtel... Chaque chambre vous conduisait à un souvenir de votre passé. Est-ce que ça a réellement existé ? Et si... » Puis elle s'était arrêté de chanter et, très érieusement avait repris « et si ce n'était pas un hôtel mais un hôpital, qui est le Patient 13 ? »

Le même mois, elle avait de nouveau perturbé une cérémonie. Cette fois, elle avait brisé le cercle en arrivant le visage recouvert de sang. Elle avait peint le chiffre 13 sur sa poitrine dénudée. Elle tenait, dans une main un lézard, dans l'autre un serpent. Elle
poussait des cris étouffés car elle avait rempli sa bouche de fleurs des bois. Elle recracha les fleurs quand elle fut ceinturés par les hommes qui tentèrent de la refouler. Alors, on comprit ses paroles. « Les bourreaux réduisent la douleur ! On ne respecte les serments envoûtant du SerpentFleur que pour échapper à la peur ! L'objet légendaire disparaît tous les un et un et un an. Car telle est la Vision du Lézard ! » NeinUnd se frappe le front du plat de la main et pleure.

NeinUnd regarde autour de lui. Il a le sentiment d'être observé. Les hommes encagoulés sont-ils revenus ou est-ce autre chose... Il ne voit rien, n'entend rien. Ce qu'il craint n'est pas dehors mais dedans, en lui. C'est dans sa mémoire. Ce sont ses souvenirs. Ce souvenir... Cette nuit où il l'avait rejoint. Elle dormait. Il l'avait observée pendant de longues minutes. Il regardait ses mains s'approchant du cou de la jeune fille, lentement, très lentement. Mais, elle avait soudain ouvert les yeux. Elle l'avait fixé froidement puis avait ouvert la bouche. « Demian décrit comment il met en fuite les dealers qui s'en prenaient à D. Maze. Il fait planer sur eux la menace des Lwas et du clan Powl. On se saura jamais vraiment laquelle de ces menaces a été efficaces mais les dealers s'enfuient. Pour autant, D. Maze n'est pas tiré d'affaire car Demian déclenche une scène de confrontation. Il entend en effet le faire renoncer à son enquête et déclare que son but va à l'encontre de la volonté des Lwas. Il est hors la Lwa ! Pour appuyer son propos, Powl agite sa cyberdread à la lame rétractable. D. Maze sent que l'albinos a des informations. Il enclenche tous ces cyber d'enregistrement et entend bien obtenir de lui autant de renseignements que possible. À la cyberlame, il oppose son pistolet à fléchettes. Il espère ne pas avoir à s'en servir, mais est-ce que ce sera suffisant pour intimider Aaron Powl ? »

Aucun sens. Cela n'avait aucun sens. Sa sœur était folle. C'était lui qui l'avait rendu folle. C'était à cause de lui. Et c'était à lui de remédier à ça. À lui de la tuer. Mais il avait été lâche et aujourd'hui, c'était tout le Clan des Arbres qui payait cette lâcheté car nul doute que c'était pour elle que ces hommes étaient venus.


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#27 16 Oct 2018 17:03

Thomas Munier
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Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

DES CACAHUÈTES AVANT LA FIN DU MONDE

Un bœuf deux MJ-deux joueurs avec Batronoban où l'on mixe les univers de Millevaux et de la Trilogie de la Crasse en jetant les règles aux orties ! Un grand moment de jeu de rôle cracra-poubelle.

Jeu : La Trilogie de la Crasse, jeu de rôle porno-trash de gare, par Batronoban et Christophe Siébert

Joué le 23/02/18 au Festival International des Jeux de Cannes

Personnages : Le pêcheur, le patatier

Avertissement :
Contenu déconseillé aux moins de dix-huit ans.

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Ikhlasul Amal, cc-by-nc, sur flickr.com


Contexte :

Lors des tournois au Festival des Jeux de Cannes, les joueuses se positionnent sur les tables proposées par ordre de préférence : elles indiquent leurs sept jeux préférés et il y a un tirage au sort. Preuve que le jeu de rôle underground n'a pas encore contaminé tous les cerveaux influençables des rôlistes, ni Batronoban (qui proposait son jeu de rôle porno-gore La Trilogie de la Crasse), ni moi-même (je proposais du Little Hô-Chi-Minh-Ville) n'avons eu d'inscrits à nos tables (fort heureusement nous eûmes plus de succès lors du reste de l’événement).
Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, nous avons recruté un MJ lui aussi privé d'inscrit et un joueur désœuvré, et nous avons improvisé un crossover Millevaux-La Trilogie de la Crasse. Deux MJ : Batronoban et moi-même. On respecte peu ou prou nos univers respectifs, mais on joue sans règles (autrement dit, pas de mécanique de résolution pré-définie).


L'histoire :

L'Auvergne, près de Noirmont-ferrant. Les choses vont mal à Millevaux. Les arbres font caca. La fin du monde est annoncée pour dans une heure trente.

Il y a ce pêcheur installé sur l'ancienne autoroute devenue un canal. Il y a son ami le patatier. Ensemble, ils s'échangent de la bouffe.

Le patatier a eu une aventure avec Perrette la fromagère. Elle était habitée par une mouche.  Elle a fait un enfant avec lui, une progéniture mi-homme mi-mouche. Perrette garde les marais pour nourrir les œufs. Apparemment, des mouches sortent de son enfant, et elles en veulent à leur paternel (pour pondre dedans ?). Elles ont déjà attaqué sa jambe de bois. Le pêcheur l'a sauvé, et ça les a rapprochés. Mais maintenant, ils sont tous les deux poursuivis par les enfants-mouches.

Le ciel s'assombrit alors que les rumeurs annoncent la fin du monde pour dans une heure et demie. Que faire du temps qu'il leur reste ? Le patatier adorerait manger des cacahuètes, alors ils partent en direction de la station-service de l'autoroute déchue pour en trouver.

Ils naviguent sur l'autoroute inondée dans la pirogue du pêcheur. Lentilles d'eaux et courants turbides. Des hommes nagent vers eux. Ils leurs disent qu'en plongeant dans la vase, on peut récupérer ses souvenirs perdus. Ils font un peu flipper nos héros alors ils leur jettent un filet de pêche sur la gueule et les repoussent à coups de rame. Les plongeurs laissent tomber l'idée de les convertir à leur idée fixe et ils s'enfoncent sous l'eau.

Ils avancent au fil de l'eau. Sur la barge, ils repèrent un homme-porc avec une bite toute érigée, qui les épie. Ils accélèrent le pagayage.

Un énorme cœlacanthe de trois mètres de long attaque la pirogue. Le pêcheur le tue avec fil de fer, puis se fait une arme avec une rame qu'il sertit d'un croc de cœlacanthe. Mais la pirogue est perdue.
Durant la pagaille, le patatier est passé sur la rive opposée à la station-service. L'homme-porc de tout à l'heure surgit des bois, il a toujours le mandrin et il propose au patatier de l'enculer, ce qui en principe lui permettrait de fuir vers une autre dimension, et donc échapper à la fin du monde. Le patatier décline l'aimable proposition.

Le pêcheur se hisse sur la berge du côté de la station-service. Le bâtiment est bien évidemment à l'état de ruine, les entrées et les vitres sont barricadées. Il peut néanmoins entrer : c'est ouvert. A l'intérieur, un vieux lui dit : "Bonjour" d'une voix monocorde. Le pêcheur lui demande où sont les cacahuètes, le vieux lui indique un présentoir et dit : "Bonjour, prendre". Le pêcheur se sert. C'est alors que la peau du vieux se déchire et qu'en sort un énorme cafard !

Le patatier ne sait pas nager. L'Homme-porc donne une corde au patatier. Ils l'attachent à un arbre et font un lasso qu'ils lancent sur l'autre rive. Le patatier commence à traverser sur la corde raide. Mais il entend un vrombissement de mouches et cherche d’où vient le bruit, alors il repasse de l'autre côté.

Poursuivi par le cafard, le pêcheur saute dans l'eau et commence à traverser. Le patatier cherche à chasser les mouches qui l'assaillent. Des mouches lui passent dans le nez. Il lâche la corde et chute sur le pêcheur : celui-ci lui fourre les cacahuètes dans la bouche mais le patatier avale aussi la mouche.
Il est propulsé dans une vision cosmique où il voit le cadavre titanesque de l'homme-monde et trois mouches-parques qui le butinent avec avidité. Autour l'espace intersidéral, une ceinture d'astéroïdes-cacahuètes. Le patatier se laisse dériver. Sa jambe de bois se végétalise, alors il l'arrache. Il se projette hors de sa vision par la force de sa volonté. Il revient au milieu de la rivière mais ne sachant pas nager coule comme un pierre. Le pécheur tente le sauver et se souvient des nageurs qu'ils avaient croisés plus tôt. Il décide donc des les amener tout les deux au fonds de la rivière. C'est alors qu'ils sont rattrapé par le cafard. Le pécheur n'écoutant que son courage met le corps de son ami en opposition. Le patatier se fait parasiter et se transforme à son tour en cafard. Au point où il en est, il décide d'aller voir l'homme-porc pour accepter sa proposition. Alors que le patatier-cafard se fait envahir par le foutre porcin, il est propulsé dans une autre dimension. Une infinie plage de déchets où vivent des cafards. Il accoste les trois cafards-parques qui sont les maîtres ce petit monde et les tue à coup de rame-croc. Il finit ainsi ses jours en régnant sur les autres cafards.

Le pêcheur quant à lui continue sa plongée sans s'être rendu compte qu'un mouche lui était rentré dans le nez juste avant qu'il ne plonge. Arrivé au fond de l'eau il se rend compte que ces abrutis de plongeurs lui ont raconté des conneries et qu'ils l'ont bien niqué. Pendant ce temps-là, la mouche fait son œuvre.

Il se retrouve sur l'autoroute, de nos jours. Un énorme nuage de mouches envahit tout. Des véhicules roulent autour de lui à toute vitesse. Le pêcheur tente de traverser, mais il se fait emplâtrer par un camion ! Une routière en chemise à carreaux en sort, elle prend le pêcheur agonisant dans ses bras et l'entraîne dans les toilettes de la station-service. Elle l'embrasse fougueusement. Le pêcheur l'invite à lui faire une fellation alors qu'il se vide dans son sang. Toutes les routières de l'autoroute viennent lui tailler une ultime pipe et c'est dans cet orgasme sanglant que le pêcheur provoque la fin du monde !

A Millevaux, les gens voient le ciel se rembrunir de plus en plus. Les premières gouttes de l'apocalypse commencent à tomber.

Tout ça pour des cacahuètes !


Commentaires :

Durée :  1h1/2

Profil de l'équipe :
Je dirais expérimentée. Mais que vaut l'expérience face au jeu de rôle cosmico-porno-gore ?

Mise en jeu :
- On a utilisé ma carte IGN de l'Auvergne prévue pour ma campagne d'Ecorce. C'est le joueur du pêcheur qui a localisé notre aventure sur l'autoroute à l'est de Noirmont-Ferrant et il a dessiné au crayon bleu pour schématiser l'inondation.
- On avait dit sans règles, j'avoue qu'aux deux tiers je me suis senti le besoin de trancher quelques conflits par des lancers de dés : 1d6 avec réussite sur 1-4, échec sur 5, effet cosmique sur 6. Comme le joueur du pêcheur réussissait tout le temps, Batro a baissé le seuil de réussite à 1 et c'est devenu tout de suite plus intéressant.

Retour personnel :
C'est typiquement le genre d'impro débridée dans le gore où je suis très sceptique sur comment les autres peuvent recevoir ce qu'on dit. Mais apparemment, les deux joueurs étaient ravis :) Comme quoi pas toujours besoin de ce censurer.
Le mix entre les univers de Millevaux et la Trilogie de la Crasse a bien pris, mais c'était assez prévisibles vu les thématiques communes d'horreur organique, notre expérience de crossover entre Millevaux et les multivers de Batronoban déjà assez approfondie (Millevaux Mantra, Cœlacanthes), et la capacité de Millevaux à tout contaminer.


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#28 22 Oct 2018 14:36

Thomas Munier
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Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

CELLE QUI NE POUVAIT PAS ÊTRE LÀ

Suite de la campagne Millevaux solo multi-systèmes par Damien Lagauzère. Retour dans le monde contemporain, avec une prise d'otages orchestré par un forcené étrangement connecté à la forêt de Millevaux !

Salut, c'est encore moi car j'ai craqué et c'est dès ce matin que je me suis mis à Millevaux. Mais cette fois, j'ai utilisé le jeu de plateau Négociateur, prise d'otages. Et bien, je ne sais pas ce que vous en penserez, mais pour ma part c'était plutôt sympa à jouer. Et en plus, j'ai de nouveaux rebondissements pour la suite…


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Israel Defense Forces, cc-by-nc, sur flickr.com


Épisodes précédents de la campagne :

1. La forêt du dessous (CSMS)
Quand les souterrains deviennent cavernes et les fantômes deviennent horlas. Un crossover Poltergeists / Millevaux

2. Traqué par les capuches blanches
Une course-poursuite mortelle qui débouche vers l’enfer souterrain du jeu de rôle Cœlacanthes !.

3. Je suis d’un autre monde
L’agent Haze confronté à un serial killer originaire de Millevaux dans un imbroglio onirique des plus déroutants. Troisième épisode de la campagne Millevaux solo multi-systèmes de Damien Lagauzère.

4. Thanatrauma
Suite de la campagne Millevaux solo multi-systèmes par Damien Lagauzère. Où un agent secret onirique s’aventure dans la mégalopole de l’inconscient collectif en proie à la psychose végétale.

5. Sous la coupe des horlacanthes
Damien Lagauzère poursuit sa campagne Millevaux solo multi-système avec l’un des scénarios les plus éprouvants de Coelacanthes !

6. La folie de ma soeur.
Une incursion funèbre et enfiévrée dans la mémoire d'une défunte.


L’histoire :

L'agent spécial Haze est de nouveau appelé pour prêter main forte à la police d'Olympia. Un forcené s'est retranché dans un relais routier avec 7 otages. Pour l'instant, on ne sait rien de ses revendications.
Il n'y a visiblement pas de mort à déplorer mais des coups de feu ont été tirés et on craint qu'il n'y ait malgré tout des blessés. Ayant été négociateur avant de devenir profileur, l'agent Haze est tout indiqué pour tenter de raisonner cet homme dont on ne sait rien et sauver les otages.

Le chef DiCompain a l'air des plus préoccupé lorsqu'il tend un téléphone à Haze. La communication est établie mais l'homme semble très très nerveux. Haze tente alors une approche assez classique visant à le mettre à l'aise. Il commence par se présenter. Il continue en tentant d'en savoir plus sur lui, sa famille, sa vie. L'homme vit seul. Il a 3 enfants. 2 filles et un garçon entre 2 et 10 ans. Cela fait très longtemps qu'il ne les a pas vu. Haze enchaîne afin de savoir si ses revendications concernent ses enfants justement. Mais l'homme exige en tout et pour tout pas moins de 10 millions de dollars. Haze explique que c'est une grosse somme mais s'engage à relayer et appuyer cette demande.

L'homme, qui n'a toujours pas dit son nom, se crispe. Il n'en croit rien. Haze lui demande alors ce qu'il veut réellement. L'homme lui demande un hélicoptère. Haze interrompt la communication le temps, prétextant devoir en discuter avec le chef de la police locale. À peine Haze a-t-il raccroché qu'un coup de feu se fait entendre.

Haze attend quelques minutes. Il apprend qu'un otage a été tué. Il tente alors de calmer l'homme, de le convaincre de ne pas s'en prendre aux otages. On lui raccroche au nez. La situation est de plus en plus tendue. Haze rappelle aussitôt et l'invite à se calmer, à se détendre, à lui parler. Mais l'homme profère alors une suite de propos incohérents. Il déclare ne pas vouloir retourner à l'hôpital. Il n'est pas le 13ème. Tout cela n'est qu'une erreur, une tragique erreur ! Haze veut en savoir plus mais l'homme raccroche. Haze rappelle aussitôt. Il tente de gagner sa confiance en lui expliquant comprendre de quoi il s'agit. Lui aussi connaît cet endroit. À lui aussi, on lui a dit qu'il était le 13ème…

Avant de raccrocher, l'homme demande de l'eau. Haze attend quelques minutes avant de rappeler. Il explique alors que les autorités sont prêtes à accéder à cette dernière demande à condition d'un geste de bonne volonté de sa part. Au bout du fil, l'homme paraît se détendre. Haze prétend alors que des policiers sont partis chercher des packs d'eau minérale. Mais l'autre se plaint que ça ne va pas assez vite. Haze tente alors de gagner du temps en essayant de le faire à nouveau parler de ses enfants. Mais là encore, on lui raccroche au nez. Le clic du téléphonique est suivi d'un nouveau coup de feu. Haze rappelle et tend à s'emporter. « Mais qu'est-ce que tu veux à la fin ? Les gars sont partis ! »

A l'autre bout du fil, la voix monte d'un cran dans les aiguës. « Je suis votre Mère Truie. Ceci est mon corps, mangez-en. Amputez mes chairs et regardez-les repousser, dessiner de nouvelles formes de vie. » Le tout suivi d'un rire strident, hystérique. Haze pense à la forêt... Il reprend d'une voix qu'il espère plus posée et lui redemande ce qu'il souhaite vraiment obtenir en agissant ainsi. Il l'assure que les packs devraient bientôt arriver. Alors, la voix de l'autre semble se fissurer. « Les Cœlacanthes...
Protégez-moi... »

Il raccroche. Haze hésite à rappeler immédiatement. Mais la porte du relais s'ouvre et un homme corpulent d'une soixantaine d'année sort, les mains en l'air. Il tremble. Un otage vient d'être libéré, aussitôt pris en charge par les membres de l'équipe d'intervention.

Haze rappelle et remercie l'homme pour son geste. Il lui explique qu'à partir de maintenant, s'il continue comme ça, tout va aller pour le mieux. Il suffit de garder son calme. L'autre semble acquiescer. Haze poursuit dans cette direction. Il souhaite ensuite en savoir plus sur cet hôpital et ces Cœlacanthes. Là, l'autre lui parle d'un sorcier vaudou. Lui connaît les Cœlacanthes et les Horlas. Tous les Esprits maléfiques de la forêt... Haze ne peut croire à une simple coïncidence. Aaron Powl ? Vous connaissez Aaron Powl ? » L'autre raccroche. Puis, il rappelle aussitôt, exigeant de la nourriture.

Haze craint que cette dernière ne suppose qu'il compte faire durer la prise d'otage. Or, plus le temps passe, plus grand est le risque qu'il tue. Il l'enjoint donc à garder son calme, expliquant que les hommes de la maintenance s'occupent à conditionner packs d'eau et nourriture. Après un silence, l'autre reprend. « J'ai menti. J'ai un otage en plus. » Et il raccroche aussitôt.

Haze informe le chef de cette nouvelle puis rappelle le preneur d'otages.
« OK, on reste calme... De qui s'agit-il ? » D'une vois presque apaisée, l'homme répond. « Johanna Ackermann est avec moi. Elle n'a vraiment pas de chance. » C'est impossible !

Johanna Ackermann a été retrouvée dans la planque de Coleman. Elle est encore en service de soins intensifs. Elle ne peut pas être ici. Et comment connaît-il son nom ? Est-il lié d'une quelconque manière à Coleman ? Autant le lui demander. Mais il déclare ne pas connaître cet homme.

Haze tente alors de gagner du temps afin que des hommes de DiCompain s'introduisent dans le relais. En agissant discrètement, et pendant que Haze détourne l'attention du preneur d'otages, ils parviennent à exfiltrer deux personnes. Haze continue à tenter de l'apaiser. Il joue son jeu le plus qu'il peut et se laisse même aller à évoquer certains de ses échanges avec le personnage d'Aaron Powl dans son RP. Il prend cependant soin de ne pas prononcer le nom de Demian Hesse. L'homme semble se calmer. Alors, les hommes de DiCompain en profitent pour faire sortir les derniers otages.

Le forcené se retourne. Il se rend alors compte que ses otages ont été remplacés par des hommes du SWAT. Il a toujours le téléphone collé à l'oreille. Il lâche un soupir de lassitude. Sous la menace des
hommes du SWAT, l'homme lâche son arme et se rend. On apprendra qu'il s'agit d'un certain Paul Singer. Johanna Ackermann n'était évidemment pas présente sur les lieux, mais Singer avait sur lui la clé de son appartement."



Réponse de Thomas :

Le jeu Négociation, prise d'otages a l'air de générer efficacement de la tension ! On retrouve les connections effrayantes entre le monde contemporain, celui de Millevaux et tes différentes vies rôlistiques. Une trame commence à se dessiner. la vérité se rapproche !


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#29 29 Oct 2018 15:06

Thomas Munier
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Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

LOUISIANA

Test de la variante avec MJ, et crossover avec l'univers de Millevaux, dans la Nouvelle-Orléans post-Katrina. Une expérience hypnotique !

Joué le 25/02/2018 au Festival International des Jeux de Cannes

Jeu : Le Témoignage, personnes confrontées à une beauté, une horreur ou un mystère qui les dépasse

Personnages : Mary l'aide humanitaire, Björn le batteur de jazz
[Note : je n'avais pas le nom de l'aide humanitaire. Par commodité, je l'ai nommée Mary]


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Marvin Nauma, domaine public, sur wikimedia commons


Contexte :

Lors d'un test précédent du Témoignage, un joueur m'a remarqué que l'expérience contemplative / émotionnelle propre à ce jeu aurait été plus immersive avec un MJ (le jeu est de base sans MJ). J'ai voulu tester s'il avait raison. J'en ai également profité pour mélanger ce test à deux autres projets : tester le Témoignage dans mon univers forestier de Millevaux, et tester l'univers forestier de Millevaux transposé dans la Louisiane Contemporaine.
Pour étrange que le mélange puisse paraître, il est assez fonctionnel : les éléments horrifiques de Millevaux (ruine, forêt, oubli, emprise, égrégore, horlas) font d'excellents ressorts à la contemplation morbide propagée par le jeu Le Témoignage, et la Louisiane post-Katrina a beaucoup de points communs avec Millevaux : nature devenue folle, décrépitude des lieux et des moeurs, syncrétisme, multiculturalisme, superstition...
J'ai donc expliqué à l'équipe les principe de jeu du Témoignage, puis les six éléments tels que j'envisageais qu'ils se manifestaient dans une Louisiane contemporaine. Comme lieu, l'équipe s'est focalisée sur La Nouvelle Orléans, a choisi de vivre une horreur, et a choisi l'égrégore comme horreur.


L'histoire :

La Nouvelle-Orléans. Quelques semaines après l'ouragan Katrina. Mary et Björn, deux amis, arrivent en ville. Mary est une professionnelle de l'aide humanitaire et Björn ambitionne de percer dans la musique jazz.

Les rues sont à moitié désertes. Carcasses de voitures. Magasins où les habits blancs pendus aux cintres sont couverts de boue. Mais il y a quelques fêtards diurnes avec des colliers de perles colorées. Des résistants, à leur manière.

Mary se rend sur le port. Des bateaux échoués, la grève en bois a été pliée comme un accordéon. Des familles de rescapés s'entassent dans des containers. Mary rend visite à l'une d'elle, pour faire connaissance. Elle rencontre une mama de cent-vingt kilos affairée à faire la popote sur un réchaud. Une de ses paupières est perpétuellement à demi-close. Un bébé qui braille. Un gamin un peu kleptomane frôle les bijoux de Mary compulsivement. Sur la corde à linge pendant à sécher des habits mais aussi les photos de famille qu'on a pu sauver. La mama offre une Budweiser à Mary. Elle raconte qu'elle tenait un magasin dans le temps et qu'ils ont tout perdu. Ils ont été d'abord hébergés dans un gymnase, mais ils en sont partis. Quand Mary demande pourquoi, elle répond que les conditions d'accueil étaient mauvaises, mais aussi à cause de la présence du Sasquatch aux abords, une créature réveillée par les troubles actuels et qui s'en prend aux enfants pas sages. Le gamin l'a vu un soir qu'il était sorti du gymnase pour chaparder le contenu des voitures abandonnées.
Mary lui dit que ce n'est pas rationnel, mais la Mama lui répond que LE MONDE n'est pas rationnel. Si le monde était rationnel, ils n'auraient pas tout perdu alors qu'ils allaient à l'église tous les dimanches.

Björn avise un vieux black, clope au bec, qui nettoie les vitrines d'un bar jazz couvert de boue. Björn lui demande ce qu'il peut faire aider, le vieux lui fait essuyer les tables du bar. Une fois qu'il l'a ainsi "testé", il lui demande ce qu'il a dans sa mallette, Björn répond que ce sont ses baguettes de batteur. Le vieux lui demande ce qu'il aime comme musique, Björn évoque Chet Baker puis lui retourne la question. Le vieux parle de Duke Ellington, des big bands, du be-bop, du hard bop, de Coltrane.

Entre un saxophoniste. Un jeune black taciturne, en jogging. Il commande une bouteille de whisky (visiblement c'est comme ça qu'on le paie) et commence à faire des gammes. Le vieux indique à Björn la batterie qui trône au fond du bar. Le bœuf commence. Le sax part comme un cri primal. Björn a vraiment du mal à suivre, comme une trottinette derrière Lance Armstrong. De rage, il jette ses baguettes au sol.

Le saxophoniste lui commande un verre de whisky. Il explique que dans le temps, les autres musiciens l'appelaient "Breatheless". Il lui parle d'un gars qu'il a rencontré à l'angle de 64è et de la 115è.

Mary a emmené Björn pour aller voir le gymnase des réfugiés avec elle. Effectivement, les familles sont entassées dans des conditions précaires. Une vraie jungle. Ils rencontrent le responsable du gymnase. C'est un asiatique. Il montre ses tatouages qui prouve qu'il est un ancien taulard. Son travail dans le social aujourd'hui, c'est une sorte de rédemption. Mary lui demande s'il a entendu parler de disparitions d'enfants ou d'adolescents. En guise de réponse, il leur montre un panneau où s'alignent de nombreuses photos d'avis de recherche.
Mary demande s'ils ont envisagé des solutions. Il répond qu'ils ont mis des vigiles autour du gymnase, et qu'ils font aussi des tournées en ville pour distribuer des tracts et faire de la prévention. Puis il se plaint du manque de moyens mis en œuvre pour les aider. Il dit que Bush les a abandonnés.
Au panel des solutions envisagées, il évoque ensuite ce prêtre vaudou qui pourrait faire quelque chose. Mais il balaie cette option d'un revers de main.

Une cérémonie vaudou dans une maison abandonnée. Lumière rouge, bougies, chaleur étouffante. Comme tous les officiants présents (des noirs, des natifs, des hispanos et des caucasiens), Björn et Mary sont vêtus d'une robe blanche.
Un possédé prend la voix du Sasquatch. Il dit qu'il veut sa part de violence. Le prêtre l'asperge de sang de poulet, il l'enjoint à prendre le sang du poulet au lieu de victimes humaines.
Tout le monde entre en transe. Danses effrénées au son des tambours. Un bol de mescal passe de main en main. Emportés par l'élan collectif, Mary et Björn acceptent de boire le mescal et se joignent à la danse. Ils ont des visions du Sasquatch qui apparaît ça et là au milieu de la foule trouble. Björn est amené près des tambours et il prend part à la musique hypnotique, de toute son énergie.

Un campement de caravanes dans le bayou. Björn et Mary y ont retrouvé la Mama et ses enfants, installés ici après avoir quitté le port. Tandis qu'ils piquent-niquent ensemble, Mary essaye de la convaincre d'intégrer un foyer de secours. De la techno sort à fond la caisse d'une autre caravane.
Marécage. Moustiques. Chaleur. La forêt chargée de mousse espagnole qui tombe des arbres.
Mary remarque que le gamin a disparu. Quand elle en fait part à la Mama, celle-ci s'inquiète à son tour. On organise une battue.
Mary et Björn partent dans les marais. Ils ont de l'eau jusqu'aux genoux. Ils entendent des bruits. Mary insiste pour qu'on remonte sur la berge, quitte à perdre du temps. Il peut y avoir des alligators.
Ils entendent le gamin crier : "Maman !" Ils l'aperçoivent qui se débat dans l'eau. Ils voient l'ombre du Sasquatch derrière lui ! Ils plongent dans l'eau et le récupèrent à temps.
Ils le ramènent au camping sauvage. La Mama les prend tous les deux dans ses bras et pleure.

La nuit. Au carrefour de la 64è et de la 115è. Le saxophoniste fait du low-riding dans une vieille Buick. Björn est à la place du mort. L'autoradio passe "Agartha" de Miles Davis, un magma de jazz afro-funk. Sous le lampadaire, attend un homme en costume de cowboy à franges d'un blanc immaculé. Le saxophoniste fait signe à Björn de descendre.

Et Björn y va. Il va aborder le type.


Feuilles de personnage :

Mary
Travailleuse dans l'aide humanitaire missionnée à la Nouvelle Orléans suite à l'ouragan Katrina
Ce qu'elle va sauver : plusieurs familles
Ce qu'elle va perdre : non déterminé à l'avance
Événement bouleversant : le fait de sauver une famille avec Björn

Björn
Un musicien moyen à la recherche de renom
Ce qu'il va perdre : il y laissera une partie de sa raison
Ce qu'il va sauver : mais ça en fera un grand "artiste incompris"


Commentaires :

Durée :
1/4 h briefing, 3/4h jeu

Profil de l'équipe :
deux débutants, surtout habitués à des jeux de rôles comme Donjons et Dragons

Retour de Mary :
+ On est plus immergés qu'à Donjons et Dragons ou on doit penser à sa liste de sorts
+ Cela doit être difficile pour le MJ

Retour personnel :

+ J'ai improvisé la présence du Sasquatch en Louisiane comme une légende amérindienne, mais recherches faites, il semble que ça ne soit ni local ni amérindien. Disons que dans le cadre d'une impro, ça a fait l'affaire, mais ça aurait eu nettement plus sa place dans le contexte canadien de l'Autoroute des Larmes :)

+ La partie a bien fonctionné, sur un paradigme assez différent de la version sans MJ. Ici, j'avais quand même plutôt bien préparé mon contexte. D'abord les éléments de Millevaux que bien sûr je maîtrise sur le bout des doigts, mais aussi le contexte de la Louisiane. J'avais déjà des bases filmiques comme Angel Heart, L'étrange histoire de Benjamin Button, Dans la brume électrique ou La Route (qui je le rappelle a été en partie tourné dans les ruines de la Louisiane post-Katrina), et des bases rôlistiques avec Mississipi. J'avais aussi fait quelques recherches avant. Choses moins pensables sur un Témoignage classique ou le contexte est improvisé juste au début de la partie. J'ai appliqué une façon de maîtriser très tournée sur l'expérience que j'avais déjà rodées sur un certain nombre de parties de L'Appel de Cthulhu maîtrisées par moi ou un copain où l'aventure horrifique était juste un prétexte pour jouer des moments hypnotiques : des trips psychotropes, des concerts de musique en transe, des rituels... D'ailleurs en briefing, j'ai bien rappelé que Le Témoignage n'avait rien de ludique : aucun scénario à gagner ici. On est totalement dans l'expérience. Au final, je valide la version avec MJ, notamment parce qu'avec un MJ bien préparé, on va rentrer dans le flot beaucoup plus vite (et notamment sur le dernier quart d'heure je me suis permis des montages cut pour aller directement sur deux scènes clés.) Sans présager uniquement de la qualité de leur jeu, je pense que mes deux joueurs auraient démarré moins vite s'ils avaient été livrés à eux-même dans un mode sans MJ. Donc je pense que l'expérience immersive y est, côté joueuses et côté MJ, et c'est le principal. En revanche, je crois qu'on perd aussi quelque chose. J'ai trouvé que l'expression des émotions des personnages était frustre, quasiment limitée au piochage de jetons. Le mode sans MJ aurait je pense poussé les joueuses à roleplayer davantage cette émotion. Ou plutôt, si le terme roleplay s'applique à l'expression de ce que le personnage laisse voir, je crois que le mode sans MJ aurait poussé les joueuses à dire davantage ce que les personnages ressentent même quand ils ne le montrent pas.


Auteur de Millevaux.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
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#30 31 Oct 2018 09:12

Thomas Munier
un jeu par mois, tranquille
Inscription : 05 Feb 2008

Re : [Systèmes Millevaux] Comptes-rendus de partie

[Parties de jeu de rôle enregistrées par la communauté] On prend des nouvelles de la campagne Millevaux / Lamentations of the Flame Princess sur le blog Pilule Rouge !

Christophe Breysse et son équipe en sont maintenant à 11 vidéos !

Partis à travers les forêts, la troupe envoyée par la Société des Archives & Artefacts a dû essuyer une attaque de plantes carnivores qui décima ses rangs. Les rescapés arrivent dans l'étrange village de Smallbarrow. L'endroit a l'air paisible... un peu trop. Pourquoi l'église de l'Unique est en ruines ? Pourquoi les villageois semblent atteints par l'Oubli sans s'en émouvoir ? Comment se prémunissent-ils de la Souillure ? Le pacte qu'ils sont scellé avec les seigneurs Horlas de la forêt n'est-il pas contre-nature ? Nos aventuriers mènent l'enquête, avec à leur tête la candide Gwendoline.
Mais voilà que la nuit tombe et que des villageois semblent pris d'une frénésie plus que dangereuse et malsaine.
Au petit matin, après avoir survécu à cette ruée sauvage, les aventuriers décident d'explorer l'église en ruines pour trouver des réponses...

La playlist complète

Liste des épisodes :
1. Prologue
2. Promenons-nous dans les bois #1
3. Promenons-nous dans les bois #2
4. Promenons-nous dans les bois #3
5. Promenons-nous dans les bois #4
6. Promenons-nous dans les bois #5
7. Promenons-nous dans les bois #6
8. Interlude
9. Bienvenue à Smallbarrow #1
10. Bienvenue à Smallbarrow #2
11. Bienvenue à Smallbarrow #3

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