MILLEVOLOĂD
Les univers trashs et dĂ©jantĂ©s de Batronoban, mĂȘlĂ©s Ă la forĂȘt cryptique de Millevaux pour une quĂȘte Ă©pique parfaitement hors du rĂ©el !
(temps de lecture : 45 min)
Terminé le 07/12/2019
Les jeux principaux :
MantoĂŻd Universe de Batronoban & co., space opera barbare du chaos
La Trilogie de la Crasse, par Batronoban et Christophe Siebert : cafards, porcs et mouches mutantes et toxiques
Univers : la forĂȘt de Millevaux
von Zzyzx, cc-by-nc
L'histoire :
La rÚgle n°1 du Fight Club : il est interdit de parler du Fight Club.
La rÚgle n°2 du Fight Club : il est interdit de parler du Fight Club.
Et je colle une patate en pleine poire de mon adversaire. Mais ça ne mâempĂȘche pas dâen prendre une au passage. Jâai du sang dans la bouche mais je mâen fous. Je montre les dents, en crache une et balance un coup de pied dans lâestomac du type qui me fait face. Les autres hurlent autour de nous. Je comprends rien Ă ce quâils disent. Mon adversaire a le teint pĂąle et ça fait ressortir ses scarifications. Il a les traits tirĂ©s aussi, aprĂšs le coup que je viens de lui flanquer. Objectivement, il est plus fort que moi mais⊠il est moins⊠brutal ! Alors quâil tente de se relever, je vais pour lui balancer un nouveau shoot dans les cĂŽtes. Ăa lâachĂšve ! Le gars sâĂ©croule au sol et fait signe quâil abandonne. Peut-ĂȘtre que lui il abandonne mais pas moi !
Je sens le chaos bouillir dans mes veines. Ăa envahit mon cerveau. Ăa me dĂ©fonce la gueule. Ăa me dĂ©chire la gueule au sens propre alors quâune espĂšce de trompe mĂ©cano-insectoĂŻde remplace mon nez et tout le bas de mon visage. Mes yeux ? Mes yeux ! Je vois⊠partout ! les types autour de moi continuent Ă gueuler. Je ne sais pas sâils se rendent compte de ce qui est en train de mâarriver. Mon dos me fait mal et ma peau se dĂ©chire pour laisser apparaĂźtre des ailes translucides. Mes jambes se tordent et me font mal. Les autres hurlent toujours mais jâentends aussi dans leurs tĂȘtes. Et ils ne remarquent rien. Ils ne voient quâun type Ă la gueule en sang qui vient dâen Ă©clater un autre. Un samedi soir comme un autre.
Je mâappelle Tad-Angel Corso. Mais, je ne sais pas pourquoi, les autres crient le nom de Roormi. Je regarde autour de moi. Je suis⊠Je suis une MouchoĂŻde PĂ©trolâhead qui torture ses ennemis ! Je veux savoir ! Tout savoir ! Les secrets de lâunivers & dâAzathoth ! Mais aussi ses liens avec Millevaux et Shub-Niggurath ! Et lâorigine de cette Ă©trange vision aussi⊠Celle dâun autre moi, dans une forĂȘt, en train de trancher en deux un gĂ©ant mĂ©canique.
Je nâai pas besoin de faire un tour sur moi-mĂȘme pour avoir une vision pĂ©riphĂ©rique de ce qui mâentoure. Je nâai pas besoin dâĂ©couter ce que disent les autres pour savoir ce quâils pensent. Ils voient trĂšs bien ce que je suis devenu. Mais ils refusent de lâaccepter car câest trop dĂ©gueulasse. Alors, ils voient seulement le type que jâĂ©tais il y a quelques instants Ă peine. Les noms dâAzathoth, Shub-Niggurath et Millevaux tournent en boucle dans mon crĂąne. Je ne peux pas rester lĂ Â ! Je suis encerclĂ© par tous les membres du Fight Club. Je saute au plafond et cours jusquâĂ la sortie.
Je suis une MouchoĂŻde, un Mouche. Je le sais parce que lâ« Autre », le « Joueur », dont je suis lâavatar le sait. Je ne sais que ce quâil veut bien que je sache car, autrement, il nây aurait plus de jeu et⊠le Joueur est⊠joueur.
Les Mouches appartiennent gĂ©nĂ©ralement Ă cette organisation secrĂšte nommĂ©e Black Rain. Mais ce nâest pas mon cas. Mes investigations ne vont pas concerner le Meurtre MĂ©taphysique de lâHommonde. Non, moi, je veux utiliser mes nouvelles facultĂ©s pour percer dâautres mystĂšres. Les mystĂšres de lâunivers ! Les mystĂšres dâAzathoth et de Millevaux !
Je ne pars pas de rien ni de nulle part. GrĂące aux connaissances du Joueur, je connais lâexistence de ce marchĂ© noir aux mains dâun underground composĂ© de morts-vivants, dâhommes-porcs et de cafards gĂ©ants. Alors, je mây rends. On y accĂšde par un cimetiĂšre et ce nâest mĂȘme pas une blague. Par contre, câest plutĂŽt joli car il neige. Mais ça reste Ă©trange car ce nâest pas tout Ă fait la saison. Bref, je mâenfonce dans cette ville souterraine et suis plus quâĂ©tonnĂ© parce que jây dĂ©couvre.
Ce marchĂ© ressemble Ă un village traditionnelle du Japon mĂ©diĂ©val. Il y a ces petites maisons Ă pagode, des petits ponts qui enjambent les Ă©gouts. En vrai, toute lâarchitecture et lâesthĂ©tique du coin emprunte aux clichĂ©s du japon. Et mĂȘme quelques marchands et visiteurs portent le kimono traditionnel, ou caricatural, au choix.
Il nây a pas beaucoup de monde ce soir. Aussi, je repĂšre assez facilement cette femme Ă lâair nerveux, toute excitĂ©e. Elle a le teint pĂąle et, drapĂ©e dans son impermĂ©able noir, on dirait un vampire. Mais ce nâest pas le cas. Elle nâest pas un vampire. Elle est un mort-vivant, en fuite du Tas de Merde des Cafards. Je mâapproche, lâair le plus cool possible. Je lui demande si elle a besoin dâaide. Je sais dĂ©jĂ que câest le cas. Le Joueur me dit quâelle sâest effectivement enfuie du Tas de Merde mais que ce nâest pas tout. Par la bouche de cette fille, il me dit que le Passeur lâa faite transiter par une forĂȘt, Millevaux, et que lĂ , on lui a volĂ© son cĆur. Elle avait rĂ©ussi Ă tromper le passeur et conserver son organe mais, une fois dans la forĂȘt, un Horla le lui a volĂ©. Elle ouvre son impermĂ©able et mon montre la tĂąche de sang qui imprĂšgne sa chemise au niveau de sa poitrine, cĂŽtĂ© gauche. Elle me demande si je peux lui rapporter son cĆur. Elle me dit quâelle a de lâargent. Ăa tombe bien, trĂšs bien mĂȘme. Je veux me rendre Ă Millevaux. Mais, mĂȘme si en tant que MouchoĂŻde je peux voyager entre les mondes, il me faut quand mĂȘme des coordonnĂ©es. Elle les a mais⊠Et elle prend un air suspicieux. Comment sâassurer que je vais revenir ? Elle nâa quâĂ venir avec moi, je lui propose. Mais non ! câest exclu ! Elle ne veut pas retourner lĂ -bas. Alors, elle va devoir me faire confiance. Je lui demande les coordonnĂ©es de Millevaux, des informations sur lâendroit oĂč elle a atterri et une description du Horla qui lui a volĂ© son cĆur. Je lui propose aussi de nous donner rendez-vous oĂč elle veut en ville, quand elle veut. Je lui promets dâĂȘtre lĂ , que jâaie trouvĂ© son cĆur ou non, au moins pour lui dire oĂč jâen suis. Cela semble lui convenir. Elle me donne rendez-vous dans quatre jours, dans une brasserie. Mais avant cela, je devrais, dans la forĂȘt, me rendre prĂšs dâune falaise. Je reconnaĂźtrai lâendroit car il y pleut beaucoup et lâeau de pluie transforme les choses. Il faudra aussi faire attention aux parasites vĂ©gĂ©taux. Ils sont une des consĂ©quences de la pluie. Ensuite, au nord-ouest, se trouve un palais-mille-pattes fait de milliers, voire de millions, de corps humains collĂ©s les uns aux autres. Le palais semble en ruine mais, en rĂ©alitĂ©, lâintĂ©rieur est « comme neuf ». Une lumiĂšre rouge palpite en permanence et, lĂ , on peut attirer les fantĂŽmes et les Horlas. Celui quâelle a appelĂ© Ă©tait scarifiĂ© mais malgrĂ© cela trĂšs beau. Ses cicatrices Ă©taient⊠artistiques et bouleversantes. Il lui a promis de la dĂ©livrer de ses peurs les plus profondes. LĂ , elle raconte sâĂȘtre transformĂ©e en un chien solitaire et apeurĂ©, terrifiĂ© Ă lâidĂ©e dâĂȘtre seul mais aussi Ă lâidĂ©e de nâĂȘtre quâun membre anonyme dâune meute. Elle mâexplique ĂȘtre tiraillĂ©e par ce paradoxe angoissant : peur de la solitude mais peur de se perdre dans un groupe. Puis, quand elle a retrouvĂ© forme humaine, le fantĂŽme, ou le Horla, sâĂ©tait enfui avec son cĆur quâelle sâĂ©tait donnĂ© tant de mal Ă conserver.
En vĂ©ritĂ©, je me fous complĂštement des histoires de cĆur de cette femme. Pourtant, son histoire mâintĂ©resse car ce palais-mille-pattes est bien le signe dâune prĂ©sence manifeste dâAzathoth sur le territoire de Shub-Niggurath. Pour lâheure, ce nâest pas trĂšs clair mais on dirait quâil y a eu des fuites entre les domaines des deux divinitĂ©s et je veux en savoir plus. Et je veux savoir en quoi ça me concerne. Et ça, pas de bol, je sais que le Joueur nâen a pour lâinstant aucune idĂ©e.
Millevaux ! Jâai lâimpression dâatterrir dans la cave inondĂ©e du Multivers. Je regarde autour de moi. Je suis inquiet par ces parasites vĂ©gĂ©taux qui semblent traĂźner dans le coin. Lâendroit est de plus humides et plus que propice au dĂ©veloppement de champignons en tous genres. En fait, lâair est tellement chargĂ© dâhumiditĂ© que cela lui donne des reflets multicolores, comme plein de petits nuages arc-en-ciel. MouchoĂŻde PĂ©trolâhead, je me dĂ©fais de ma forme humain. Mon bec de gaz devrait me protĂ©ger des spores. JâespĂšre. Maintenant, je dois trouver la falaise et le palais des mille-pattes. En vĂ©ritĂ©, je cherche nâimporte quelle manifestation de la prĂ©sence dâAzathoth. Et je suis servi !
Je ne sais pas si jâapproche de cette fameuse falaise mais, quoi quâil en soit, jâarrive en vue du palais-mille-pattes. Mais la situation est des plus chaotiques puisque le palais est assiĂ©gĂ© par une horde de SumĂ©riens. Les mille-pattes leur rĂ©pondent avec un bataillon de Sodomiseurs semant le trouble parmi les Ă©claireurs. Les SumĂ©riens ne doivent pas ĂȘtre habituĂ©s Ă ce genre de traitement. Dâailleurs, ils perdent du terrain.
Je profite du bordel ambiant pour tenter de mâintroduire dans le palais. Quel talent ! Quel brio ! Je vole jusquâĂ une ouverture puis, discrĂštement, marche au plafond jusquâĂ gagner cette fameuse piĂšce Ă©clairĂ©e dâun rouge palpitant. Je ne sais pas trop ce que je cherche lĂ . Le Horla ayant volĂ© le cĆur de la fille ? Autant je me fiche de son cĆur, autant il aura peut-ĂȘtre des rĂ©ponses Ă mes questions. Et puis, que fout-il dans un palais-mille-pattes ? Et surtout, que fout un palais-mille-pattes ici ?
Me baladant au plafond, je constate une intense activitĂ© mille-pattes. Pourtant, ces saloperies ne paraissent pas du tout intĂ©ressĂ©es par la bataille qui se joue dehors. Jâen suis un au hasard qui me conduit Ă lâentrĂ©e de la forteresse. LĂ , plusieurs sont en train de sâamuser en torturant un cavalier sumĂ©rien arrachĂ© Ă son dinomutant et tirĂ©, dans tous les sens du terme, Ă lâintĂ©rieur. En les observant, il sâavĂšre quâils considĂšrent le SumĂ©rien comme une sorte de casse-tĂȘte amusant Ă rĂ©soudre. Aussi, ils lâĂ©tirent et le plient dans tous les sens jusquâĂ ce que, Ă dĂ©faut de trouver une solution acceptable Ă cette Ă©nigme, les os du SumĂ©riens ne finissent par cĂ©der.
Alors, jâutilise ma vision de Mouche afin de savoir si, par hasard, il y aurait ici quelques Cafards ou Soars invisibles. Rien, si ce nâest quelques PorcoĂŻdes entiers, et encore vivants pour certains, en train de rĂŽtir, empalĂ©s sur une broche. Les mille-pattes ont le sens de la fĂȘte. Mais ça ne me dit pas oĂč se trouve cette fichue salle et ce Horla.
Ăa nâavance pas. Et plus je traĂźne, plus je risque de me faire repĂ©rer. Alors, je mâen remets Ă ROHUM. Il y a des humains dans ce palais, des Millevaliens. Et ils connaissent lâexistence de la salle que je cherche. Je capte leurs pensĂ©es et me laisse guider jusquâĂ la salle rouge palpitante.
Cette fille ne mâavait pas tout dit sur cette salle. Peut-ĂȘtre nâavait-elle-mĂȘme pas compris oĂč elle Ă©tait. Cette salle est en rĂ©alitĂ© une gigantesque cathĂ©drale construite sur le squelette mĂ©tallique dâun void-dragon. Et câest de son cĆur que vient cette lumiĂšre rouge palpitante. Chaque membre et organe interne, chaque vaisseau sanguin, sont autant de piĂšces et de couloirs menant jusquâĂ ce cĆur. Je ne sais pas pourquoi mais je sens que je nâai pas dâautre choix que de tout tenter pour atteindre ce cĆur ! Aussi, alors que plusieurs fantĂŽmes semblent mâavoir pris pour cible, je fonce jusquâĂ lâentrĂ©e de cette forteresse dans la forteresse. Et Ă©videmment, câest par le cul que je rentre !
Je remonte aussi vite que possible le colon technodracoĂŻde et me retrouve dans une sorte dâabri oĂč il fait trĂšs chaud. Dans un coin, il y a un trousseau de clĂ©s. Câest louche mais jâapproche. Je demande Ă ROHUM si je dois craindre un piĂšge. Ăvidemment que oui ! Sâil y a un piĂšge, câest que ces clĂ©s ont de la valeur. Alors, il me les faut ! Je tourne autour, prudemment. Je regarde partout autour de moi, prĂšs Ă rĂ©agir Ă la moindre menace. Rien Ă lâhorizon, jâattrape les clĂ©s et, littĂ©ralement, les bras mâen tombent !
Et je suis lĂ , comme un con, Ă regarder mes bras et ce trousseau de clĂ©s par terre. ROHUM me rassure, tout rentrera dans lâordre dans quelques heures. Mais dâici lĂ , jâespĂšre que personne ne me cherchera dâennui. Dans le doute, je vole jusquâau plafond et me colle dans un coin sombre. Prenant mon mal en patience, je rĂ©flĂ©chis Ă lâutilitĂ© de ces clĂ©s quand mon regard se porte sur une silhouette monstrueusement dĂ©gueulasse sculptĂ©e dans un recoin de la salle. Et, juste en dessous, je reconnais la rune gravĂ©e : Hshl !
Au bout de 4 heures, mes bras me reviennent et je peux enfin examiner ces clĂ©s. Elles ne sont pas normales. En fait, ce ne sont pas vraiment des clĂ©s. Câest⊠de la magie condensĂ©e. Chacune est un concentrĂ© dâĂ©nergie dâĂgrĂ©gore que je dois pouvoir libĂ©rer et utiliser. Et la rune ? Je me mĂ©fie de cette sculpture et prĂ©fĂšre mâesquiver.
Jâarpente un couloir qui me mĂšne rapidement Ă une grande salle Ă©voquant des thermes antiques. Et je constate quâils fonctionnent toujours. Il y a de lâeau, de la vapeur. Il y a aussi du monde. Ă travers la vapeur, je distingue quelques silhouettes mais jâai du mal Ă dĂ©finir ce qui est en train de se passer. Je distingue deux « personnes » et une au moins sâexprime dans ce que je reconnais ĂȘtre la Langue Putride. Le ton est plutĂŽt doux, mĂȘme si, malgrĂ© cela, je perçois une vrai tension. Celui qui parle Ă©voque une liaison. Il demande Ă lâautre dâattĂ©nuer sa douleur. Lâautre lui rĂ©pond dans la Langue Putride Ă©galement. Il Ă©voque des souvenirs. Il crache au visage du premier quâĂ©tant un espion, il ne peut rien pour lui. Lâautre entame alors une logorrhĂ©e mĂȘlant sentiment de culpabilitĂ© et satisfaction malsaine Ă lâexhibition de ses souffrances. CachĂ© dans la vapeur, je suis en train de me dire que je fous littĂ©ralement de ces histoires quand je percute. Ce sont lĂ des histoires de cĆur ! Y a-t-il un lien avec le cĆur de cette fille ? Et si lâun des deux Ă©tait le Horla que je cherche. Je mâapproche discrĂštement⊠ou plutĂŽt, jâessaye. Toujours dissimulĂ©, je fais pourtant un faux mouvement et libĂšre lâĂgrĂ©gore contenu dans lâune des clĂ©s. LâĂgrĂ©gore se combine alors aux derniĂšres paroles prononcĂ©es : « Le champion rectifie le labyrinthe ! »
Sous lâeffet de lâĂgrĂ©gore, la vapeur sâĂ©paissit encore. Mais je distingue malgrĂ© tout de nombreuses silhouettes et des cliquetis ainsi que des bruissements dâailes. Des Cafards ! MoitiĂ© insecte humanoĂŻde, moitiĂ© machine biomĂ©canique, cette nuĂ©e de crĂ©atures Ă taille humaine se rĂ©pand dans les bains. Ils grouillent partout, envahissent lâespace. Ils se grimpent les uns sur les autres et tapent les tĂȘtes-Clarck Nova les uns des autres. Ces prophĂštes du Chaos annoncent la venue du champion et la fin du Labyrinthe. Je vois des rayons de lumiĂšre verte fluorescente. Ils ont lĂąchĂ© des « AraignĂ©es Ă accĂ©lĂ©rer le temps » ! Câest ainsi quâils vont en finir avec ce labyrinthe. Ils vont hĂąter le temps et le mener jusquâau moment oĂč il tombera en ruine. PaniquĂ©, je regarde partout autour de moi et ne vois pas ce fameux champion. Peut-ĂȘtre ne sâagit-il pas dâun ĂȘtre dans le sens oĂč je lâentends. Peut-ĂȘtre que le champion nâest rien dâautre que le bordel ambiant, la nuĂ©e de Cafards ou ces AraignĂ©es. En tout cas, je dois me mettre Ă lâabri car si les Cafards accĂ©lĂšrent le temps jusquâĂ provoquer la ruine des lieux, ça veut dire quâils vont juste me tomber sur la gueule. Lâavantage, si je survis, câest quâil sera sĂ»rement plus facile de trouver lĂ le cĆur palpitant du void-dragon. Je mâenvole, espĂ©rant quâĂȘtre le plus haut possible mâĂ©vitera de me prendre des coups. Et alors que le squelette du void-dragon sâĂ©croule sur lui-mĂȘme et ceux qui le peuplaient, je file par une fenĂȘtre et arrive Ă me coller dans un recoin du palais-mille-pattes pour observer la chute du labyrinthe.
Jâattends un moment et constate avec Ă©tonnement mais satisfaction que cette catastrophe nâa finalement attirĂ© lâattention de personne. Jâattends encore un peu et voit des survivants Ă©merger de ce qui reste du labyrinthe. Je ne distingue aucun Cafards mais vois des AraignĂ©es filer dans lâombre en courant. Je ne vois personne mais, pourtant, jâentends des voix. Exactement les mĂȘmes que celles que jâai entendues dans les thermes. MalgrĂ© la chute du squelette et le temps qui passe, ces deux lĂ ne sont pas morts ? Ou alors, si je les entends sans les voir, câest peut-ĂȘtre parce que ce sont⊠des fantĂŽmes, des⊠Horlas ?
Toutefois, et câest plus gĂȘnant, aucune trace du cĆur rouge palpitant du void-dragon !
Je veux voir ces Horlas. Alors, je mâempare dâune des clĂ©s magiques et use de cet ĂgrĂ©gore pour les rendre visibles. Lâun dâentre eux se rĂ©vĂšle nâĂȘtre rien dâautre quâun⊠gigantesque tas de boue ! De lĂ , se forment des visages grossiĂšrement humains qui se parlent entre eux. Et je comprends quâil nây a jamais eu lĂ quâun seul Horla, un LiĂ©ju quâon appelle aussi Labyrinthe. Ce serait lui que les Cafards sont venus dĂ©truire et non le void-dragon ?
Je fixe successivement plusieurs visages et lâun dâentre eux rĂ©vĂšle des scarifications. Est-ce Ă lui que je dois mâadresser ? Quâa-t-il fait du cĆur de la fille ? Sait-il quelque chose au sujet du cĆur du void-dragon ? Pourquoi les Cafards ont tentĂ© de le tuer ?
Le Horla mâa repĂ©rĂ© et tourne une de ses tĂȘtes de boue, celle qui parlait avec la tĂȘte scarifiĂ©, vers moi. Elle me demande dâapprocher. Je connais ce genre de crĂ©atures. Ăa ne pense quâĂ se nourrir. Si cette chose sâest bien emparĂ© du cĆur de la fille, il est possible quâelle soit sous son emprise et quâil se soit servi dâelle pour rabattre des proies, comme moi. Confiant dans mes capacitĂ©s de MouchoĂŻde, je mâapproche prudemment en lui demandant ce quâil me veut. Il ne rĂ©pond pas mais me fait signe dâapprocher encore. Il veut mâattraper, câest certain ! JâarrĂȘte dâavancer et lui demande simplement de me raconter son histoire. Que fait-il ici ? Que fait cette citadelle mille-pattes dans la forĂȘt de Millevaux ? Quel est le secret du cĆur palpitant du void-dragon ? Il promet de tout me dire mais⊠je dois approcher encore. Si ce truc me touche, je risque de le payer trĂšs cher. Pourtant, jâapproche, prĂȘt Ă mâenvoler au moindre geste brusque de sa part. alors, a-t-il quelque chose dâintĂ©ressant Ă me dire ?
Le Horla commence par rire et mâexplique quâil a plusieurs relations amoureuses en mĂȘme temps. Jâen dĂ©duis que cette fille nâest pas la seule Ă qui il a volĂ© son cĆur. Mais ce nâest pas cela qui mâintĂ©resse. Je veux savoir pourquoi Millevaux se retrouve Ă abriter tant dâĂ©lĂ©ments issus de la Mer du Chaos dâAzathoth. Le Labyrinthe soupire. La tempĂ©rature baisse brutalement. Il avoue ne rien pouvoir me dire Ă ce sujet. Lui aussi, Ă©videmment, a constatĂ© lâarrivĂ©e, il y a longtemps maintenant, dâhabitants de la Mer du Chaos mais il ne sait ni comment, ni pourquoi. Ce quâil sait, câest que la ChĂšvre Noire, la ForĂȘt, les tolĂšre. Aussi, il les tolĂšre. Les Mille-Pattes ont construit ce palais autour du cadavre dâun void-dragon et il y a trouvĂ© refuge. Le Labyrinthe sâest cachĂ© dans le labyrinthe. Il refuse de me dire pourquoi il doit se cacher mais je devine quâil a perdu de sa puissance. On dirait quâil est⊠blessĂ©, affaibli en tout cas. Je peux peut-ĂȘtre en tirer avantage.
Je me lance. Je lui fais part de ma thĂ©orie. Jâai bien compris quâil sâĂ©tait cachĂ© ici pour reprendre des forces. Ses « liaisons amoureuses » sont en rĂ©alitĂ© des pantins quâil manipule afin de lui servir de rabatteur. Ainsi, cette fille ne mâa pas demandĂ© de lui ramener son cĆur, elle mâa envoyĂ© dans un piĂšge pour me faire bouffer. Toutefois, en tant que Mouche, je ne suis pas un met de choix (et jâespĂšre quâil me croira quand je lui dis ça). Je lui explique ĂȘtre ici suite Ă une vision dâun « autre-moi » tranchant un VoĂŻvode. Je ne connaissais pas lâexistence de cette forĂȘt avant. Je suis donc venu pour connaĂźtre lâorigine de cette vision. Et puisquâon dirait bien que câest cette vision, cette rĂ©vĂ©lation, qui a fait de moi une Mouche, je veux aussi comprendre comment ça se fait que les domaines de Shub-Niggurath et Azathoth se retrouvent aussi intimement liĂ©s. Je sens le Horla quelque peu dĂ©boussolĂ©. Je ne sais pas si câest vraiment Ă moi quâil sâadresse ou sâil parle tout seul mais il se rappelle que les Mille-Pattes craignaient le froid. Lui, bien sĂ»r, ça ne le dĂ©range pas. Je mâen remets Ă ROHUM pour avoir quelques prĂ©cisions. Il apparaĂźt comme fort probable que tous ces ressortissants de la Mer du Chaos se soient en rĂ©alitĂ© rĂ©fugiĂ©s Ă Millevaux. Mais pourquoi fuir la Mer du Chaos ? Ă cause du froid justement ? Un froid intense les aurait contraint Ă sâenfuir ? Et puis, est-il possible que certains aient choisi une autre destination que Millevaux ?
Je mâenvole et mâĂ©loigne du Horla. Je rĂ©flĂ©chis. On dirait quâune intense vague de froid a chassĂ© les habitants de la Mer du Chaos. Certains se sont rĂ©fugiĂ©s Ă Millevaux mais il est trĂšs possible que dâautres aient choisi dâautres destinations. Il est Ă©galement plus que probable que ces rĂ©fugiĂ©s foutent la merde Ă peu prĂšs partout oĂč ils arrivent. Mais il est Ă©galement plus que probable que la plupart, sinon tous, ne souhaitent que rentrer chez eux. Alors⊠comment rendre la Mer du Chaos de nouveau habitable ?
Corso la Mouche sâefface et laisse un peu plus de place au Joueur. Il existe diverses divinitĂ©s du froid, notamment Ithaqua ou encore Rlim Shaikorth. Lâun dâeux ou encore une autre serait-elle Ă lâorigine de la vague de froid ayant envahi la Mer du Chaos et contraint ses habitants Ă lâexil ? Et est-ce que le cĆur palpitant du void-dragon a quelque rĂŽle Ă jouer lĂ -dedans ? Dis-moi, ROHUM ! ROHUM me dit que non mais⊠ce serait quand mĂȘme bien de mettre la main dessus !
Je laisse le Horla dans les ruines du squelette du void-dragon et poursuis ma quĂȘte du cĆur palpitant. Ensuite, il faudra que je trouve un moyen de mettre fin Ă cette vague de froid qui sâest rĂ©pandue sur la Mer du Chaos. Ainsi, si le royaume dâAzathoth est de nouveau vivable, on peut espĂ©rer que ses habitants y retourneront spontanĂ©mentâŠ
Je laisse lĂ le LiĂ©ju, me disant que câest peut-ĂȘtre une connerie et que je devrais profiter de sa faiblesse pour lâabattre. Mais bon, force mâest de reconnaĂźtre que je ne suis pas vraiment un guerrier. Je nâai rien dâun SumĂ©rien, ni mĂȘme dâun Mille-Pattes. Alors je me fonds dans lâombre et repars en quĂȘte du CĆur Palpitant.
Je dĂ©boule dans une salle aux dimensions nettement plus rĂ©duites que celle abritant le Labyrinthe. Pourtant, il sâen dĂ©gage quelque chose de⊠mythique ! Au sol, une mosaĂŻque de pierres prĂ©cieuses dessine un astrolabe au centre duquel se trouve un puits. Les murs, eux, semblent fait de roches nues. Par contre, pas de bol, il y a du monde. Un tel endroit aurait pu ĂȘtre le thĂ©Ăątre dâune quelconque cĂ©rĂ©monie mais on dirait bien que ce qui se passe ici nâa rien de spirituel. Au contraire mĂȘme. Trois personnes, deux Millevaliens pure souche et une Mouche sâen prennent au puits central.
Et ils ont bon espoir dây parvenir puisque lâun des Millevaliens est manifestement un Horla, une sorte de gargouille. Lâautre est un humain corrompu par lâĂgrĂ©gore, ou le PĂ©trolâmagie. Pour ce que jâen vois, son corps semble parcouru de cicatrices et autres boursouflures verdĂątres et palpitantes. Je me colle au plafond et scrute la Mouche Ă la recherche de la rune Hshl sur sa nuque. Je veux savoir sâil sâagit dâun agent de Black Rain. Ăvidemment, je ne parviens pas Ă trouver un bon point de vue. En plus, il se met soudain Ă tomber une pluie acide ! Ă lâintĂ©rieur ?
Non ! Nous ne sommes plus Ă lâintĂ©rieur. Je ne sais sous quel effet, le toit sâest ouvert. Et non seulement il pleut de lâacide, mais en plus nous pouvons voir dans le ciel une titanesque citĂ© de mĂ©tal dont je ne me rappelle pas quâelle Ă©tait lĂ Ă mon arrivĂ©e. Est-ce une citadelle Voyvode ? JâespĂšre que non. Mais je me poserai la question plus tard car, effet de la pluie ou de la citadelle, je tombe du plafond, sujet Ă une terrible crise de vomissement. Au moins, je ne suis pas une cible facile pour les autres puisquâils se mettent eux aussi Ă vomir. Je tente de ramper jusquâau puits. En vain. Je ne peux plus que me tordre de douleur sur place.
Ă travers le voile des larmes que la douleur mâarrache, je vois, venant de la citadelle volante, dĂ©ferler une horde de Cyborgs bardĂ©s de technologie Voyvode. Certains nâont plus grand-chose dâhumain, hĂ©rissĂ©s quâils sont de lanceurs de vinyles de void-mĂ©tal ou autre tuyau dâĂ©jection de viande dâhomme-porc. Celui qui semble ĂȘtre le chef agite une Ă©norme pince mĂ©tallique projetant de la lumiĂšre noire. Je sens que je suis en train de sombrer dans lâinconscience et câest pas bon du tout. Il mâen coĂ»te mais jâarrive Ă puiser dans mes derniĂšres rĂ©serves pour ramper jusquâau puits. Mais le mutant aux boursouflures verdĂątres tentent de se saisir de ma cheville au passage. Je me dĂ©gage mais ça fait mal.
ArrivĂ© au bord du puits, je vois au fond de lâeau tourbillonner. Ăa sent la magie. Une magie mortelle. Ce nâest pas de lâeau quâil y a au fond. Est-ce de lâĂgrĂ©gore ou du PĂ©trolâMagie ? Et puis, y a-t-il vraiment une diffĂ©rence entre ces deux substances. Ce nâest mĂȘme pas sĂ»r. Mais jâai soudain lâhorrible sentiment de ne plus mâappartenir, de nâĂȘtre quâune marionnette. Je serai moins inquiet si jâavais la certitude que câest le Joueur qui tire les ficelles mais je sais que ce nâest pas le cas. Câest le Joueur qui tape ces mots mais ce nâest pas lui qui a dĂ©cidĂ© cette pulsion, ce vertige qui me pousse Ă me jeter dans ce puits. Est-ce que cela mĂšne quelque part ou vais-je seulement me noyer ? Et si ça mĂšne quelque part, oĂč ? Serai-je toujours dans le palais-mille-pattes ? Serai-je toujours Ă Millevaux ? Et qui est ce sorcier qui sâest substituĂ© au Joueur pour me pousser Ă me laisser glisser au fond du puits ?
OĂč suis-je ? Des marais. Je ne suis plus dans le palais-mille-pattes. Quand je lĂšve les yeux, je vois le ciel Ă©toilĂ©. Il fait nuit et jâai les pieds dans la boue. Autour de moi, aucune trace du palais, ni du puits qui mâa recrachĂ© ici. Sur ma gauche, une petite construction en ruine. Les vestiges dâune tour. Quand je mâapproche, je vois que des squelettes Ă©mergent des marais. Il y a eu une bataille ici et on a pas pris la peine de rendre plus dâhommages que ça aux dĂ©funts. Sâagit-il des cadavres de ceux qui ont tentĂ© de prendre cette bĂątisse ou de ceux qui ont voulu la dĂ©fendre ?
Les ruines nâont plus de porte. Mais elles nâen nâont pas besoin car des pans de murs se sont Ă©croulĂ©s et remplacent ce qui, Ă lâĂ©poque, a fait office de porte. Pas de problĂšmes, je vole par-dessus. Et derriĂšre, un gouffre ! Le plancher ne sâest pas seulement Ă©croulĂ©, il sâest enfoncĂ© sur plusieurs dizaines de mĂštres. Plusieurs centaines peut-ĂȘtre. Je ne vois pas le fond. De lâautre cĂŽtĂ©, toutefois, des pierres tombales Ă©mergent de la boue du marais. Cette mĂȘme boue se dĂ©verse lentement dans le gouffre mais je nâentends aucun bruit me laissant penser quâelle touche le fond. Une tombe attire nĂ©anmoins mon attention et je vole jusquâĂ elle. Plusieurs mains squelettiques sont sculptĂ©es dessus, comme si elles devaient courir le long de la pierre. Mais, une de ses mains tient un livre. Un vrai livre. Je dois pouvoir le prendre. Les doigts squelettiques masquent en partie le titre mais je parviens Ă lire le mot « Manifeste ». Je tente de dĂ©gager lâouvrage mais ça rĂ©siste. Impossible de bouger ce truc. Merde ! Jâai fendu un Voyvode en deux ! Câest pas un caillou qui va me rĂ©sister !
Jâutilise une des clĂ©s magiques, non pour son effet mais pour faire une sorte de levier. Il y a un peu de jeu entre les doigts du squelette mais⊠la clĂ© se brise et libĂšre son ĂgrĂ©gore. Et, une fois encore, mes bras tombent. Et pas seulement mes bras. Tout autour de moi, tout ce qui vit ou a vĂ©cu perd ses membres. Les arbres perdent leurs branches. Les animaux perdent une ou plusieurs pattes et se mettent Ă hurler alors quâils sâeffondrent dans la boue. Puis, lâinanimĂ© lui-mĂȘme devient la proie de cette vague dâamputation. Les pierres se brisent. Le ciel aussi. Les Ă©toiles se fracturent. Câest⊠la fin du monde ?
Mes yeux se posent de nouveau, plein dâeffroi, sur la tombe et je lis. Il sâagit de la tombe dâun sorcier connu sous le nom de Iben-Ohrer. Et on dirait quâil est lâauteur du Manifeste. Mais, je dois avant tout me calmer. Je tente de me convaincre que tout ceci nâest quâune hallucination, que mon bec est dĂ©fectueux et que je suis victime dâune remontĂ©e de PĂ©trolâmagie dâautant plus violente que la clĂ© brisĂ©e vient de dĂ©charger une bonne dose d'Ă©grĂ©gore.
Ainsi, je me ressaisis et tout redevient normal. Je regarde les deux clĂ©s qui me restent et dĂ©cide dâen briser une afin de libĂ©rer ce tome Ă©trange. Je veux en savoir plus sur ce sorcier, cet endroit et ce que je fous lĂ Â ! Sous lâaction de lâĂgrĂ©gore, les doigts sâouvrent et je mâempare du livre dont le titre complet est « Le Manifeste de Thuggon ». Quâest-ce que câest que ça ? Soudain, je me demande si ce sorcier, mĂȘme mort, pourrait ĂȘtre celui qui sâest substituĂ© au Joueur pour me faire tomber au fond du puits. Je parcours rapidement les premiĂšres pages du livre et comprends que Thuggon est une planĂšte. Et cette planĂšte est le domaine dâun Grand Ancien nommĂ© « Yâmo-Thog ». Est-ce une divinitĂ© du froid ? Yâmo-Thog est-il responsable de la glaciation qui sâest abattue sur la Mer du Chaos ?
AprĂšs avoir volĂ© jusque dans les ruines du petit donjon, je mâinstalle afin dâen lire plus. Iben-Ohrer semble avoir voyagĂ© jusquâĂ cette planĂšte. MalgrĂ© ses craintes, il nâa pu rĂ©sister Ă lâappel de la divinitĂ©. LâAncien est dĂ©crit comme une sorte de colosse Ă la peau bleutĂ©e. Il ne semble pas possĂ©der de tĂȘte, ou seulement une Ă©bauche ou un vestige. Deux yeux posĂ©s sur une boursouflure de chair entre ses Ă©paules. De lĂ , part un tentacule se terminant par une bouche aux crocs acĂ©rĂ©s. Le sorcier a trouvĂ© un moyen de se rendre physiquement sur Thuggon. Il dĂ©crit une planĂšte gelĂ©e, morte. Tellement morte que rien nây vit, exceptĂ© Yâmo-Thog. Iben-Ohrer raconte avoir traversĂ© une jungle pĂ©trifiĂ©e dans la glace. Puis, au milieu de la forĂȘt de glace, il a vu une statue de lâAncien. La pierre sâĂ©tait fendue sous lâeffet du froid et rĂ©vĂ©lait un passage. Mais, Ă sa grande surprise, le passage bien que descendant, ne conduisait pas sous terre. Iben-Ohrer sâest ainsi retrouvĂ© dans un petit temple amĂ©nagĂ© au fond dâun cratĂšre, peut-ĂȘtre un ancien volcan. LĂ , il eut une vision. Il allait perdre ses mains, les offrir Ă Yâmo-Thog. Je saute quelques chapitres. Je veux savoir si ce que raconte le sorcier est en lien avec ce qui sâest passĂ© dans la Mer du Chaos. Et puis, je veux aussi les coordonnĂ©es de cette planĂšte !
Oui ! Oui et oui ! La vague de froid qui a ravagĂ© la Mer du Chaos et conduit celui que jâai vu en rĂȘve Ă Millevaux vient bien de Thuggon ! Et le sorcier a mĂȘme notĂ© les coordonnĂ©es de ce monde. Ce nâest pas par hasard que, mĂȘme mort, Iben-Ohrer a fait en sorte que je lise son Manifeste. Il veut que je me rende sur cette planĂšte. Mais pourquoi ? Y a-t-il quelque chose Ă ce sujet Ă la fin du livre ? Oui, le sorcier achĂšve son Manifeste en Ă©mettant le dĂ©sir de retourner sur Thuggon mais il nâexplique pas pourquoi. Voulait-il rendre un ultime hommage Ă Yâmo-Thog ? Voulait-il au contraire se venger de lâAncien qui lui a volĂ© ses mains ? Regrettait-il dâavoir participĂ© au dĂ©clenchement de cette terrible glaciation ou, au contraire, souhaitait-il aller encore plus loin ? Quoi quâil en soit, il a fait en sorte de me dĂ©signer pour lui succĂ©der dans la tĂąche quâil sâĂ©tait imposĂ© de remplir. Jâirai donc sur Thuggon. Mais jây ferai bien ce que je veux !
Le voyage se dĂ©roule sans encombre et je dĂ©barque sur cette terre gelĂ©e. Autour de moi sâĂ©lĂšvent les ruines dâune antique citĂ© figĂ©e dans la glace. Iben-Ohrer parlait dâune forĂȘt, tant pis. Mais, si cette planĂšte est bien le domaine dâYâmo-Thog, il doit bien y avoir ici un lieu qui lui est dĂ©diĂ©.
Jâerre dans cet espace dĂ©sert jusquâĂ ce qui a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© une sorte de parc. Sous la glace, je vois des rosiers. Est-ce que la vie rependrait son cours si la glace sâen allait ? Mes pas me mĂšnent jusquâĂ une statue. Elle est brisĂ©e. Je nâen vois que le piĂ©destal et les jambes de celui ou celle quâelle reprĂ©sentait. Sâagissait-il de lâAncien ? Nulle inscription sur le piĂ©destal mais des petites gravures rappelant celle que jâai vu dans le palais-mille-pattes, accompagnant la rune Hshl. Et maintenant, je me rappelle que cette gravure reprĂ©sentait bien Yâmo-Thog.
Iben-Ohrer raconte dans son manifeste que le passage vers le temple de lâAncien se trouvait dans une statue brisĂ©e par le froid. Est-ce le cas ici aussi ? Non, mais les gravures sur un des cĂŽtĂ©s du piĂ©destal semblent ĂȘtre une sorte de carte de la planĂšte et de son ciel mettant un endroit prĂ©cis en Ă©vidence. Ăa me prend un long moment et je dois lutter contre le froid mais je finis par rĂ©ussir Ă me localiser, ainsi que ce fameux temple, sur ce semblant de carte. Apparemment, ce nâest pas trĂšs loin mais, avec ce froid, qui peut savoir combien de temps ça va me prendre ? Je peux essayer de gagner du temps en volant. Heureusement, le froid ne cause aucun dommage Ă mes ailes.
Cherchant des repĂšres dans le ciel et au sol avec ce que jâai pu « lire » sur cette « carte », je finis par sortir de cette citĂ© et par atterrir Ă proximitĂ© dâune tombe. Au vue des symboles gravĂ©s dessus, elle est consacrĂ©e Ă Yâmo-Thog. Si je me fies au Manifeste du sorcier, ce sont des monuments brisĂ©s qui conduisent au temple de lâAncien. Mais cette tombe est en bon Ă©tat. Alors, dois-je la briser ? Est-ce que ce sera suffisant ou la « porte » doit-elle forcĂ©ment ĂȘtre ouverte par une cassure due au froid ? Le « moi » de ma vision a dĂ©gommĂ© un Voyvode, je devrais donc pouvoir venir Ă bout dâun bout de caillou gelĂ©. Un bon coup dâĂ©paule suffit Ă faire basculer la pierre tombale qui se brise, fragilisĂ©e par le gel. Toutefois, je tombe Ă genoux sous lâeffet dâune nouvelle vision. La forĂȘt, lâautre moi, de nouveauâŠ
Cela fait maintenant trois jours que nous marchons en direction de ce chĂąteau qui est apparu au loin et⊠alors que lâair rĂ©sonne de guitares saturĂ©es et autres sonoritĂ©s Ă©lectroniques, il est toujours aussi loin ! Nous marchons et nous marchons et ne nous rapprochons jamais de ce chĂąteau. Pourtant, je suis quasiment certain que ses murs renferment lâusine de poupĂ©es sumĂ©riennes. Je veux dĂ©molir ce chĂąteau. Mais comment lâatteindre ? Nous verrons ça plus tard. La nuit tombe. Nous approchons dâune zone marĂ©cageuse et le vent est dense en ĂgrĂ©gore. Il y a de la magie dans lâair et elle est pourrie. Et elle vient de ce maudit chĂąteau !
Quâest-ce que ça veut dire ? Est-ce que cela signifie que le temple dâYâmo-Thog mâest Ă jamais inaccessible ? Non ! Impossible ! Je ne peux me rĂ©soudre à ça. Je fouille les restes de la pierre tombale. Il doit bien y avoir un passage quelque part au milieu de ces cailloux ! Mais il nây a rien ! Rien Ă part cette AraignĂ©e Ă accĂ©lĂ©rer le temps, produit de la technologie CafaroĂŻde. Elle ne fonctionne plus, sans doute Ă cause du froid mais je dois pouvoir la remettre en Ă©tat. Jâutilise lâĂgrĂ©gore contenu dans la derniĂšre de mes clĂ©s magiques pour « rĂ©chauffer » lâAraignĂ©e. JâespĂšre que ça va suffire et que ça ne va pas me pĂ©ter Ă la gueule.
Le temps file Ă la vitesse dâune araignĂ©e Ă la toile verte et gluante. La glace fond et laisse place, de nouveau, Ă de la vĂ©gĂ©tation. Et mon voyage dans le temps prend fin, me laissant dans une clairiĂšre, juste Ă cĂŽtĂ© dâune petite cabane. LĂ , un type Ă la carrure gigantesque vaque Ă ses occupations. Manifestement, il ne sâattendait pas Ă me voir mais parait pourtant heureux de ma venue.
Mon apparence de MouchoĂŻde ne lâeffraie pas. Il mâinvite mĂȘme Ă entrer et me propose Ă boire et Ă manger. Jâaccepte volontiers et, quand il mây invite, lui raconte mon histoire. Cette planĂšte nâest manifestement plus sous le joug dâYâmo-Thog. Dâailleurs, ce type, Colborn Heartcreek, nâen a jamais entendu parler. Il nâa mĂȘme jamais entendu parler dâune pĂ©riode de glaciation. Ătait-ce il y a si longtemps ? Y a-t-il quelque part des gens ou des sources que je pourrais consulter au sujet de lâhistoire de cette planĂšte ? Colborn me conseille de me rendre Ă la citĂ© la plus proche. LĂ , les prĂȘtres dâAzathoth pourront me renseigner.
Les prĂȘtres dâAzathoth ? Quâest donc devenue cette planĂšte ?
Cette citĂ© est⊠étrange. Jây sens bien lâinfluence dâAzathoth mais pas dâune maniĂšre aussi prĂ©gnante et chaotique que dans la Mer du Chaos. Il y a quelque chose de mĂ©diĂ©val dans lâarchitecture mais rien qui rappelle les coins les plus glauques de lâInterzone par exemple. En fait, cette citĂ© porte lâempreinte de la forĂȘt qui lâentoure. Et, Ă©coutant les conversations autour de moi, jâentends plusieurs fois le nom de Millevaux, Ă©noncĂ© non sans une certaine crainte dans la voix.
Errant dans les rues, jâen dĂ©duis quâYâmo-Thog a Ă©tĂ© chassĂ© et remplacĂ© par une sorte dâalliance de circonstance entre Azathoth et Shub-Niggurath. Le premier Ă©tendra son influence sur les villes, le second sur⊠le reste ? En vĂ©ritĂ©, je nâen sais rien.
Sur un des murs dâune toute petite place, un groupe dâhommes et de femmes (et dâautres choses aussi) se pressent autour dâaffiches. Ce sont des avis de recherches. Les rumeurs vont bon train concernant un barde, un conteur, accusĂ© de contrefaçon. Lâaffichette explique que le criminel voyage de citĂ© en citĂ© et quâil a Ă©tĂ© vu ici rĂ©cemment. Les prĂȘtres dâAzathoth offrent une prime de 250 piĂšces dâor pour sa capture.
Je pourrais demander un audience aux prĂȘtres dâAzathoth pour savoir ce qui sâest rĂ©ellement passĂ© sur cette planĂšte, mais jâobtiendrai plus facilement gain de cause, et 250 piĂšces dâor, si je nâarrive pas les mains vides. De plus, ce barde faussaire Ă©tant aussi un voyageur, il aura certainement des choses Ă me dire sur la forĂȘt de Millevaux.
GrĂące Ă ROHUM, je peux avoir une longueur dâavance sur les autres chasseurs de primes. Ainsi, ma nouvelle cible semble sâĂȘtre rĂ©fugiĂ©e dans les Ă©gouts. Le nommĂ© Erlan Sarfiel est visiblement un humain, mĂȘme pas un clone. Par contre, il semble douĂ© pour le maniement de la lame. MĂ©fiance donc tout de mĂȘme.
Dans les Ă©gouts, je sens un peu plus lâinfluence dâAzathoth. Ou plutĂŽt, on dirait que les eaux usĂ©es charrient aussi du PĂ©trolâMagie. Si la forĂȘt qui entoure toutes ces citĂ©s et bien Millevaux, elle doit regorger dâĂgrĂ©gore. Entre ces deux sources de magie, les sorciers doivent sâen donner Ă cĆur joie.
Azathoth soit louĂ©Â ! Ă peine ai-je mis un pied dans les Ă©gouts quâun zazamon apparaĂźt, manifestement Ă mon service. Ainsi, ce Gazzolon est une sorte de plante carnivore dont on ne distingue pas bien lâavant de lâarriĂšre mais qui hurle, qui hurle ! Je le flatte en tapotant ce que jâespĂšre ĂȘtre sa tĂȘte et commençons notre pĂ©riple souterrain.
Rapidement, quelque chose ne va pas. Un brouillard Ă©pais envahit les Ă©gouts et je nây vois rien du tout. Puis, alors que je sors de ce nuage, il sâavĂšre que nous ne sommes plus dans les Ă©gouts mais dans les bois. Et, au loin, un chĂąteau. Et je reconnais ce chĂąteau. Câest celui de ma vision, celui que mon « autre moi » nâa jamais rĂ©ussi Ă atteindre. Est-ce que moi aussi je vais devoir marcher pendant des jours sans jamais parvenir jusquâĂ cette forteresse ? Ces murs abritent-ils vraiment une usine de poupĂ©es sumĂ©riennes ? Est-ce vraiment une bonne idĂ©e de vouloir en savoir plus ?
Je me fige. Inutile de continuer Ă avancer si ça ne sert Ă rien. Mais je me pose quand mĂȘme des questions. Cette apparition ne peut pas ĂȘtre une simple coĂŻncidence, un simple fruit du hasard (et pourtantâŠ). De deux choses lâune :
1-cette hallucination est le fruit de lâĂgrĂ©gore ambiant, si je suis bien dans la forĂȘt, ou du PĂ©trolâMagie si je suis toujours dans les Ă©gouts. Dans ce cas, ce chĂąteau est une projection de mon inconscient ou quelque chose comme ça.
2-cette hallucination est le fruit dâun sort ou dâun rituel. Dans ce cas, qui est derriĂšre ça ? Quelquâun qui me connaĂźt, qui mâen veut ? Quelquâun qui a accĂšs Ă certaines de mes pensĂ©es puisquâil peut reproduire cette vision du chĂąteau. Et puis, pourquoi ? Un serviteur dâYâmo-Thog ? Iben-Ohrer ? Est-ce que ça a vraiment du sens ?
3-et si ce barde Ă©tait aussi un mage et que, ayant vu que jâĂ©tais Ă ses trousses, il mâaurait envoĂ»tĂ©Â ? AprĂšs tout, câest possible.
Mais, avant toute chose, je dois dĂ©jĂ mâassurer dâoĂč je suis. Toujours dans les Ă©gouts ou dans les bois. Et puis, en vue de ce chĂąteau, suis-je toujours sur la planĂšte Thuggon ou est-ce que ce brouillard mâa renvoyĂ© dans le Millevaux de mon « autre moi » ?
Ce chĂąteau au loin ne mâapparaĂźt pas du tout comme un bon prĂ©sage. Aussi, je dĂ©cide tout simplement de mâen dĂ©tourner ! Que ce quâa vĂ©cu mon « autre moi » me serve de leçon. Et puis, si ce chĂąteau abrite vraiment une sorte dâusine Ă SumĂ©riens, pas la peine que je me jette dans leurs pattes. Pour autant, est-ce que rebrousser chemin va me faire sortir de cette⊠illusion ?
Et oui ! Je fais demi-tour pour me retrouver dans les Ă©gouts. Et quand je me retourne, le brouillard a disparu. Mais, quand jây retourne, le brouillard revient. Et quand je mây enfonce Ă nouveau, je ressors en vue de ce chĂąteau. Mais, quelque chose a changĂ©. Le chĂąteau est en partie en ruine et recouvert de gel. GelĂ©, est-il toujours inaccessible ? On dirait bien que non. Jâapproche et⊠il ne recule pas ! Vais-je rĂ©ussir lĂ oĂč mon autre moi a Ă©chouĂ©Â ? Peut-ĂȘtre bien.
Jâavance et suis Ă lâaffĂ»t du moindre bruit, du moindre mouvement. Mais tout Ă lâair dĂ©sert. La porte est figĂ©e par la glace et il est impossible de la faire tourner sur ses gonds. Pour autant, le gel lâa fragilisĂ©e et un bon coup bien placĂ© devrait suffire. Pourtant, la glace rĂ©siste plus que je ne lâavais imaginĂ©. Non, ça va plus loin que ça. Jâentends dans mon crĂąne rĂ©sonner le rire dâYmo-Thog. LâAncien exerce toujours une certaine influence sur cette planĂšte et je suis⊠maudit ! Et bien, si jâen suis lĂ , autant aller jusquâau bout. Par contre, je cherche un autre accĂšs et mâinfiltre Ă lâintĂ©rieur via une brĂšche dans un mur.
Ă lâintĂ©rieur, lâagencement de cette petite piĂšce ressemble Ă celle dâun bateau. Il nây a rien en Ă©tat sauf une petite statuette en forme de corbeau. A priori, elle nâa rien de particulier. Pourtant, elle semble avoir Ă©tĂ© mise en Ă©vidence. Un peu comme si cette piĂšce lui Ă©tĂ© dĂ©diĂ©e. Aussi, je cherche dans tout ce qui traĂźne quelque chose pouvant mâen dire un peu plus. Mais, alors mĂȘme que je farfouille dans les dĂ©combres, un Ă©clair frappe mon zazamon qui est instantanĂ©ment rĂ©duit en cendres !
Soyons lucides, on mâen veut ! Jâai vraiment lâimpression dâĂȘtre seul en ces murs. Pourtant, Ă chacun de mes pas ou presque il arrive une catastrophe. Câest comme si on mâobservait et me mettait des bĂątons dans les roues dĂšs que possible. Sâagit-il de ce barde faussaire ? Sâagit-il plutĂŽt de serviteur dâYâmo-Thog qui nâauraient pas apprĂ©ciĂ© quâon mette un terme au rĂšgne de glace de leur divinitĂ© sur Thuggon ? Je vole jusquâĂ un coin de plafond et me colle dans lâombre, le temps de poser quelques questions Ă ROHUM.
Oui, on me surveille mais il ne sâagit pas de celui ou ceux que je soupçonne. Mais, sâil ne sâagit ni du barde, ni de serviteurs dâYâmo-Thog, sâagirait-il des SumĂ©riens ? Oui ! Les SumĂ©riens sont sur Thuggon. Et ils comptent bien poursuivre ici leur guerre contre Azathoth et son royaume. Ce chĂąteau-usine nâest plus en Ă©tat mais il sert de « portail » aux SumĂ©riens entre la forĂȘt de Millevaux de mon « autre-moi » et Thuggon.
En vĂ©ritĂ©, tout ça commence Ă me dĂ©passer et je ne sais plus si câest une si bonne idĂ©e que ça de courir aprĂšs ce barde. Avec la menace des SumĂ©riens qui planent, peut-ĂȘtre que je devrais juste courir au premier temple dâAzathoth pour prĂ©venir les prĂȘtres de ce qui est en train de se tramer. Mais me croiront-ils sans preuve ? Je ne sais pas si cette statuette est typique de lâart sumĂ©rien mais, au cas oĂč, je la prends. Si câest le cas, elle sera la preuve dâune prĂ©sence sumĂ©rienne sur Thuggon. Et sinon⊠je verrais bien !
Ăvidemment, le retour ne pouvait sâeffectuer sans embrouille ! Sorti des Ă©gouts, je constate que la ville est en proie Ă la panique. En effet, les rues sont envahies par un Ă©pais brouillard et, haut dans le ciel, se dessine la silhouette dâun dragon. Et dĂ©jĂ , les citadins craignent quâil ne sâagisse de Candiolanth, le lĂ©gendaire dragon rouge destructeur de citĂ©. Ă mon avis, il sâagit dâune illusion du mĂȘme genre que celle dont jâai Ă©tĂ© la cible dans les Ă©gouts. Mais bon, les prĂȘtres dâAzathoth, je lâespĂšre, en sauront plus.
ArrivĂ© au temple construit en os de void-dragon, enfin, je demande audience de toute urgence. Pour appuyer ma demande, je brandis la statuette, preuve Ă mes yeux de la menace sumĂ©rienne. On va me recevoir, oui, mais pas tout de suite. Les prĂȘtres sont occupĂ©s. Mais Ă quoi bordel ? Et je nâai pas fini de poser ma question quâune vague de PĂ©trolâmagie dĂ©ferle dans tout le temple et se rĂ©pand dans les rues, infligeant dâhorribles mutations Ă toute personne prĂ©sente dans les parages. Heureusement, ma nature de MouchoĂŻde me prĂ©serve. Une fois la vague dissipĂ©e, jâaccĂšde enfin Ă un concile de prĂȘtres auxquels, fort de ma statuette, je raconte toutes mes aventures et les prĂ©viens de la menace sumĂ©rienne. Manifestement, ils se fichent royalement de ce que je raconte. Je tente malgrĂ© tout de les convaincre et, va savoir pourquoi mais je sens lĂ lâinfluence du Joueur qui, sâil ne tire pas sur les cordelettes de la marionnette que je suis tape nĂ©anmoins les mots qui sont les miens sur son PC, fracasse la statuette au sol. Elle se brise dans un sorte de vent dâillusion et rĂ©vĂšle un crĂąne aux canines plus longues que nĂ©cessaires. Un crĂąne de vampire ! Lâun des prĂȘtres sâen saisit et entame le descriptif dâun artefact Ă la magie plus ou moins puissante.
Alors, face Ă toutes ces illusions, face Ă toute cette magie, prennent-ils enfin la menace sumĂ©rienne au sĂ©rieux ? Pas du tout ! Selon eux, les SumĂ©riens nâont rien Ă voir lĂ -dedans. Il nây a aucune prĂ©sence sumĂ©rienne sur Thuggon. Il nây a aucune crainte Ă avoir non plus de la part dâĂ©ventuels serviteurs dâYâmo-Thog car ils ont tous Ă©tĂ© tuĂ© il y a maintenant trĂšs longtemps. Toutefois, ils consentent Ă reconnaĂźtre lâexistence dâune menace quâils mettent sur le compte dâun mage, dâun sorcier ou nâimporte quoi du mĂȘme genre.
Lâespace dâun instant, jâai peur quâils me demandent de mettre fin Ă cette menace mais pas du tout. En rĂ©alitĂ©, ils ont dâautres projets pour la misĂ©rable Mouche Ă Merde que je suis. Une lĂ©gende locale parle du gardien secret dâun objet sacrĂ© se livrant Ă divers trafic. Ses trafics ne les intĂ©ressent guĂšre mais ils veulent cet objet sacrĂ©Â ! Il sâagirait des restes brisĂ©s dâun masque recouvert de fines Ă©critures, autant de sortilĂšges anciens et oubliĂ©s sur lesquels ils aimeraient bien mettre la main.
A toute fin utile, il semblerait que le gardien de cet artefact se soit spĂ©cialisĂ© dans le trafic dâĂȘtre humain. Il sâappelle Kohgn mais, dans le milieu, on lâappelle le HiĂ©rarque !
Le HiĂ©rarque ! Quel nom ! Si ça câest pas se la raconter⊠Bref, je dois lui mettre la main dessus. Dans les rues, tout le monde est hĂ©bĂ©tĂ©, sous lâemprise de cette vision dâun dragon Ă©mergeant du brouillard. Mais jâai peut-ĂȘtre lĂ une carte Ă jouer. Je peux en effet profiter de cet Ă©tat de stupeur ambiant pour poser mes questions tout simplement. JâespĂšre que, sous lâemprise de la peur, les gens seront moins vigilants, moins mĂ©fiants et rĂ©pondront Ă ma questions concernant le HiĂ©rarque.
Dans la foule, mon attention se porte sur un homme aux traits bouffis. Il a le teint jaunĂątre et sa peau grasse brille, lui donnant un air visqueux. Il a malgrĂ© cela un air hautain mais aussi⊠mystĂ©rieux. Aussi, je lâaborde le plus tranquillement du monde alors que la foule rassemblĂ©e lĂ Ă les yeux levĂ©s vers lâombre du dragon.
Je commence par lui dire que, selon moi, il nây a aucun vĂ©ritable dragon derriĂšre tout ça. A mon avis, et je ne suis pas loin de le penser rĂ©ellement, tout cela nâest quâune illusion due Ă une concentration excessive dâĂgrĂ©gore ou de PĂ©trolâMagie. Dâailleurs, nâest-ce pas lĂ une occasion inespĂ©rĂ©e pour des trafiquants de faire main basse sur une grosse quantitĂ© dâhallucinogĂšne quâils pourraient revendre plus tard. Et puis, cette hallucination collective persistante peut aussi se rĂ©vĂ©ler une formidable publicitĂ© pour un tel produit, non ? Mais lâhomme nâadhĂšre pas du tout Ă mon discours. Au contraire mĂȘme. DâaprĂšs lui, je ne devrais pas plaisanter avec ça car cela ne fera quâaccroĂźtre la colĂšre du dragon rouge. Je fais un pas en arriĂšre en reconnaissant que des trafiquants auraient effectivement plus Ă gagner Ă rester discret. Mais, Ă son avis, pourquoi Candiolanth agit ainsi, lui ? Lâhomme nâest sĂ»r de rien mais il pense que le dragon nâest peut-ĂȘtre pas au mieux de sa forme. Ce serait ça, finalement, qui lâaurait poussĂ© Ă sortir de sa retraite. Il a besoin de reprendre des forces. Il ferait donc monter la pression avec ce brouillard, attendant le moment propice pour fondre sur la ville et sâemparer de ce dont il a besoin. Jâacquiesce et lui demande sâil ne craint que dâautres profitent de la situation. Il ne pense pas mais me demande malgrĂ© tout Ă quoi je fais allusion. Aussi, jâenchaĂźne avec le HiĂ©rarque. Je sais, par les prĂȘtres dâAzathoth, quâil se livre au trafic dâĂȘtres humains. Aussi, jâĂ©mets lâhypothĂšse quâun tel personnage pourrait profiter de la panique gĂ©nĂ©rale pour procĂ©der Ă des enlĂšvements par exemple.
Mon homme connaĂźt le HiĂ©rarque. Et il le connaĂźt bien visiblement. Heureusement pour moi, il semble mĂȘme le dĂ©tester cordialement. Non, il nâa pas Ă©tĂ© lui-mĂȘme victime de ses agissements mais il trouve ces procĂ©dĂ©s rĂ©pugnants. Ainsi, jâapprends que le HiĂ©rarque se livre au trafic dâĂȘtres humains pour en faire des esclaves sexuels. Selon lui, câest tout simplement rĂ©voltant car on ne devrait pas avoir Ă passer par ce genre dâintermĂ©diaire pour accĂ©der Ă des tels esclaves. Dans une utopie telle quâil la conçoit, nous devrions tous ĂȘtre les esclaves sexuels les uns des autres sans que quiconque doive payer un trafiquant. Jâopine vigoureusement du chef et affirme avec autant de conviction que possible que ce HiĂ©rarque mĂ©rite mille sanctions. Et, innocemment, je lui demande si, selon lui, lâagitation ambiante nâest pas une bonne opportunitĂ© pour, justement, faire payer Ă ce HiĂ©rarque lâinfĂąme prix de son commerce. Mais lâhomme me rembarre aussitĂŽt. Il nâa nulle envie de sâen mĂȘler ni dây ĂȘtre mĂȘlĂ© et il met fin Ă la conversation en sâenfonçant dans la foule qui ne cesse de fixer lâombre de Candiolanth.
Au moins, jâen sais un peu plus sur le HiĂ©rarque et jâai une petite idĂ©e de lĂ oĂč le trouver et je file vers ce qui fait office dâInterzone dans cette citĂ©. Jâerre dans ce dĂ©dale obscur Ă la recherche de quelques MantoĂŻds, CafaroĂŻdes ou autres PĂ©trolâheads les plus louches possibles. Je jette finalement mon dĂ©volu sur un Cyborg Ă lâimplant gĂ©nital dĂ©mesurĂ©, pour ne pas dire cauchemardesque. Nul doute quâil ne peut quâavoir recours aux services de professionnel(le)s plus ou moins consentant(e)s. Je le trouve lĂ sâadonnant Ă une activitĂ© tĂ©moignant de sa frustration. PrĂ©sentement, il agite son implant, Ă©jectant ce qui semble ĂȘtre des saucisses de viande dâHomme-porcs. Je mâapproche en prenant bien soin de rester dans lâombre et invoque ROHUM afin de savoir si cette boĂźte de conserve connaĂźt mon HiĂ©rarque. Câest le cas, mais alors mĂȘme que je mâapprĂȘtais Ă mâen aller, le cyborg mâinterpelle. Bien que sâastiquant en pleine rue, il ne semble pas apprĂ©cier quâon lâobserve et me demande des comptes. Clairement, il veut se battre. Je peux comprendre, câest effectivement un autre moyen de se dĂ©barrasser de ses frustrations.
Mes yeux de MouchoĂŻde me permettent de le voir venir et Ă©viter ainsi sa premiĂšre attaque. Je vole dans un coin dâombre, me collant en hauteur, espĂ©rant ĂȘtre ainsi plus dur Ă atteindre. Autant pour moi, je me prends une saucisse en pleine tĂȘte. Câest dâautant plus humiliant quand on sait dâoĂč elle a Ă©tĂ© tirĂ©e. Mais jâai quand mĂȘme de la chance dans mon malheur car, Ă la lumiĂšre qui Ă©mane et sâaffaiblit aussitĂŽt autour du cyborg, je comprends que le gĂ©nĂ©rateur alimentant une partie de son blindage vient de tomber en rade. Câest maintenant Ă moi de jouer.
Mon « autre moi » a dĂ©zinguĂ© un Voyvode, je devrais donc pouvoir venir Ă bout dâun Cyborg en manque de compagnie. ROHUM ou Azathoth, je ne sais pas qui je dois remercier mais sous lâimpact du formidable coup de boule en piquĂ© que je viens de lui assĂ©ner, le Cyborg tombe Ă genoux ! Mais dĂ©jĂ il se relĂšve et empoigne son projecteur de saucisses quâil pointe dans ma direction. Il vise bien le saligaud ! Mais je lâaurai ! Je vole dans son dos pour le frapper sur le sommet de la tĂȘte. JâespĂšre lâassommer, au moins. Et câest mĂȘme mieux que ça ! Le Cyborg sâĂ©croule. Certains de ses implants devaient vraiment ĂȘtre de mauvaise qualitĂ© car il tombe littĂ©ralement en piĂšces Ă mes pieds.
Je nâen tirerai pas plus de lui, et pour cause, mais au moins, je sais oĂč trouver le HiĂ©rarque maintenant. De plus, Itâs time for loot ! Je rĂ©cupĂšre son implant lanceur de saucisses ainsi que sa batterie. Je ne sais pas trop Ă quoi ça peut me servir. Je sais encore moins si jâoserais me les faire poser par un charcudoc local. Au pire, je les revendrai. Mais pour lâheure, je file vers ce quartier oĂč je devrais trouver le HiĂ©rarque et qui porte le doux nom dâOubliettes Spectrales.
Les Oubliettes Spectrales ont bien mal choisi leur nom. Ce coin de la citĂ© nâa rien dâune oubliette, ni rien de spectral. En vĂ©ritĂ©, il sâagit dâune sorte de baie sâouvrant su une mer verte, un vaste pĂąturage sur lequel voguent quelques barcasses. Une sorte de petite mer intĂ©rieure verte, donc et un semblant de port de plaisance. Toutefois, et malgrĂ© ces apparences idylliques, qui dit port dit tavernes, auberges et filles de joie. Aussi, il doit bien y avoir lĂ quelques traces du commerce du HiĂ©rarque. Pourtant, aucune fille (ou autre) en vue. Je cherche une taverne mais on dirait quâil nây en a pas. Ce nâest vraiment quâune sorte de port de plaisance pour ceux des notables qui voudraient sâoffrir une petite virĂ©e sur ce lac vert. Je nâarrive pas Ă concevoir quâun tel endroit existe ici. NĂ©anmoins, sâil nây a pas de taverne, il y a malgrĂ© tout une sorte de « country club ».
Je pensais devoir montrer patte blanche et une carte de membre mais on me laisse rentrer sans aucun problĂšme. LâintĂ©rieur est confortable, trĂšs confortable. Une sorte de luxe discret qui a le bon goĂ»t de ne pas en faire trop. A cette heure de la journĂ©e, les lieux sont dĂ©serts. Je mâapproche du bar et commande un cocktail au hasard parmi les noms Ă©tranges prĂ©sents sur la carte. On me sert donc une MĂ©decine Soudaine Ă lâodeur infecte⊠et au goĂ»t infect Ă©galement. Je profite de ce que le serveur regarde ailleurs pour vider mon verre dans une plante verte. Les feuilles se fendent alors chacune en une bouche qui, se tournant vers moi, murmurent que je vais bientĂŽt mourir. Je sens comme une pointe au cĆur. Je rappelle le serveur et commande, cette fois, une IdĂ©e Diurne. Alors, il me regarde bizarrement, hĂ©sitant Ă me servir. ROHUM mâindique que ce cocktail est en rĂ©alitĂ© plus quâune boisson, câest un mot de passe. Je souris et enchaĂźne, expliquant dĂ©sirer mâentretenir avec le HiĂ©rarque. Le serveur semble inquiet et je le rassure. Je ne suis quâun humble client, certainement pas un reprĂ©sentant des forces de lâordre ou du dĂ©sordre. MalgrĂ© lâheure un peu inhabituelle pour ce genre de prestation, le serveur dĂ©clare pouvoir me conduire au HiĂ©rarque.
Le serveur me fait passer derriĂšre le bar. LĂ , nous empruntons une petite porte donnant sur les « coulisses » de lâĂ©tablissement. Fini le confort, les quartiers rĂ©servĂ©s au personnel tiennent plutĂŽt de la caserne. Les couloirs sont dĂ©serts mais je sens, partout, la prĂ©sence de ceux qui occupent les lieux aux heures de plus hautes frĂ©quentations. Finalement, ce nâest pas plus mal que je sois venu maintenant. Au moins, je serai tranquille. Nous arrivons devant une porte en acier et peinte en blanc. Câest une botte fixĂ©e lĂ par un gros clou qui fait office de marteau. Le serveur frappe plusieurs fois selon un rythme tenant lĂ encore du code secret. La porte sâouvre. DerriĂšre, un nain avec dâhorribles plaques rouges sur le visage. Muet, il parle avec les main. Il doit ĂȘtre sourd aussi car le serveur lui rĂ©pond en utilisant le langage des signes. Toutefois, il ne doit pas le parler couramment car il sây reprend plusieurs fois face aux multiples froncements de sourcils du nain. Finalement, nous entrons.
Je suis ennuyĂ© car on ne me conduit pas au HiĂ©rarque. En fait, on mâamĂšne directement dans un boudoir ou attendent divers esclaves sexuels de tous sexes ; toutes tailles mais aussi toutes espĂšces. Je me plante lĂ , joues le client hĂ©sitant et demande Ă parler au maĂźtre des lieux. Accepterait-il un entretien afin que je lui expose une demande un peu⊠particuliĂšre ? Le serveur traduit pour le nain qui se retire aprĂšs avoir acquiescĂ©. Il revient quelques instants plus tard. Le HiĂ©rarque veut bien me recevoir mais il me propose un rendez-vous un peu plus tard dans la journĂ©e. Je voyais les choses autrement mais, ne voulant pas faire de vagues, jâaccepte de revenir le lendemain, environ aux mĂȘmes heures.
Je quitte donc le Country Club en prenant bien garde Ă ne pas ĂȘtre suivi. En vĂ©ritĂ©, je suis convaincu que le HiĂ©rarque nâa diffĂ©rĂ© notre entrevue que pour pouvoir mener sa petite enquĂȘte. A moi donc de paraĂźtre le plus « banal » possible pour nâĂ©veiller aucun soupçon. Aussi, je passe les heures suivantes Ă traĂźner dans les rues, donnant mon avis sur le brouillard et la menace du dragon rouge. Je jette aussi discrĂštement possible des regards par-dessus mon Ă©paule. Si le HiĂ©rarque mâa fait suivre, ses sbires sont bons !
Je me prĂ©sente donc au Country Club le lendemain, Ă lâheure dite. Je commande une IdĂ©e Soudaine. Le serveur me reconnaĂźt mais reste neutre et discret en me faisant passer de lâautre cĂŽtĂ©. De nouveaux coups de bottes sur la porte blanche. Cette fois, câest un CafaroĂŻde Ă la face bien amochĂ©e par une sale blessure qui nous ouvre. Je repĂšre une araignĂ©e Ă accĂ©lĂ©rer le temps sur son Ă©paule. MĂ©fianceâŠ
Je mâattends Ă ce quâil me conduise au HiĂ©rarque et.. jâai tort. En fait, il me fait patienter dans une sorte de couloir ou dâantichambre donnant lâimpression dâĂȘtre dans une mine. Il y a mĂȘme des rails au sol. Le HiĂ©rarque se montre enfin. Je lĂąche un soupir, un peu lassĂ© par toute cette mise en scĂšne. Je suis frappĂ© par son long nez. Comme moi, il possĂšde un bec de PĂ©trolâhead. Est-il en lien avec le Crabe ? Celui-ci a-t-il Ă©tendu son influence jusquâici ? Je nâose lui poser la question. Jâattends. Lui aussi. Le silence est un peu pesant et je finis par le rompre. Je sors de mon sac lâimplant lance-saucisse que jâai rĂ©cupĂ©rĂ© sur le Cyborg et entame mon baratin comme quoi je voudrais quelque chose sur quoi mâen servir. Mais le HiĂ©rarque nâest pas dupe. Dâune façon ou dâune autre, il sait que je ne suis pas un client. Il demeure silencieux. Il ne fait que hocher la tĂȘte. Je regarde autour de moi, craignant que nous ne soyons pas seuls.
Mes yeux de MouchoĂŻdes me permettent dâavoir une vision Ă 360° sans avoir Ă tourner la tĂȘte. Aussi, le HiĂ©rarque ne peut savoir que je suis en train de checker les lieux. Pour autant, cela ne me met Ă lâabri de rien et surtout pas de ce doigt dâhonneur surgissant des cieux (et pourtant nous ne sommes pas dehors) et fonçant sur moi pour mâĂ©craser. Mais, va savoir pourquoi, alors que je porte mes bras en croix devant mon visage, protection inutile contre le destin, le doigt dĂ©vie de sa trajectoire et Ă©crabouille le HiĂ©rarque ! Je regarde autour de moi. Je ne comprends rien et jâespĂšre que rien ni personne ne va maintenant me sauter dessus. Il ne se passe rien, si ce nâest que jâentends, venant du fond de cet Ă©trange endroit, monter quelques grondements abjects. Mieux vaut ne pas traĂźner. En toute hĂąte, je fouille le cadavre. Je nây croyais pas mais, pourtant, il a sur lui un morceau du masque que veulent rĂ©cupĂ©rer les PrĂȘtres dâAzathoth. Par contre, il nây a quâun seul morceau. OĂč sont les autres ? Les grondements se font de nouveaux entendre. Je mâempare dâune clĂ© que le HiĂ©rarque avait dans sa poche et quitte les lieux.
Jâessaye dâĂȘtre discret mais jâai certainement Ă©chouĂ© quelque part car je ressens une vive douleur au niveau du bras droit. Normal, je viens de recevoir un carreau dâarbalĂšte. Ma vision mouchoĂŻde aurait dĂ» me prĂ©venir de la prĂ©sence dâun ennemi. Sâagit-il dâun tireur invisible, dâun magicien quelconque ? Je ne vois rien. AprĂšs, ce tunnel nâest pas des mieux Ă©clairĂ©s. Mais, ne voyant personne, je prĂ©fĂšre quand mĂȘme mâenfuir en courant. Mais, dĂ©jĂ , jâentends le sifflement dâun autre carreau. Je me jette Ă terre pour lâĂ©viter mais je me retrouve secouĂ© de spasmes alors mĂȘme quâun tsunami de vers blancs dĂ©cident de se frayer un chemin de je ne sais oĂč dans mon anatomie vers lâextĂ©rieur. Je me roule par terre et tente de comprendre oĂč mon tireur sâest cachĂ©. Ma peau se met alors Ă me dĂ©manger. Je sens des excroissances se frayer un chemin, une fois de plus, de lâintĂ©rieur de mon organisme vers sa surface mais, heureusement, ma constitution de Mouche vient rapidement Ă bout de cette tentative de cancer. Mais cela nâempĂȘche pas mon tireur de remettre le couvert et jâencaisse un second carreau. Dâun bond, je me relĂšve et reprends ma course vers la sortie.
Je trĂ©buche alors mĂȘme que mon cerveau Ă©clate sous lâeffet de la vision dâun gigantesque tsunami sâabattant sur la citĂ©. Ce nâest pas une simple hallucination. Câest une vision. Un prĂ©sage. Câest le futur. Et cela est prĂ©vu pour⊠demain ! Les prĂȘtres dâAzathoth sont-ils au courant ? Est-ce que cela Ă quelque chose Ă voir avec le brouillard et le dragon rouge ? Est-ce que je vais juste finir ici, comme un con, transpercĂ© par des carreaux dâarbalĂšte dont je ne sais mĂȘme pas qui les tire, ni dâoĂč ? Je ne veux pas finir comme un vulgaire hĂ©risson ! Je dois prĂ©venir les prĂȘtres dâAzathoth et, surtout, je dois sauver ma peau.
Ce masque, mĂȘme si je nâen possĂšde quâun bout, est couvert dâĂ©criture magique. Ce doit ĂȘtre un artefact puissant si les prĂȘtres le veulent. Et mĂȘme si jâen ai quâun bout, je peux peut-ĂȘtre profiter dâun de ses effets. Alors, je porte le masque devant mon visage et lis quelques-unes des inscriptions gravĂ©es lĂ en Langue Putride. Jaillit alors un flash psychĂ©dĂ©lique qui illumine le couloir. Et je vois, enfin, Ă qui jâai Ă faire. A en juger par sa panoplie, ce doit ĂȘtre un chasseur de prime. Il a lâair extrĂȘmement tendu, fermĂ© mĂȘme. Je remarque surtout ses yeux violets. Sa tenue est trĂšs soignĂ©e, presque trop. Est-ce Ă cause de ses yeux, il ne parait pas du tout embĂȘtĂ© par ce flash. Je roule sur moi-mĂȘme et parviens, quand mĂȘme, Ă Ă©viter un carreau. Je dois absolument reprendre lâinitiative. Je rĂ©flĂ©chis Ă toute vitesse et, grĂące Ă ROHUM, comprends que ce masque est un artefact en lien avec la technomagie dâAzathoth. Câest donc une magie chaotique et hasardeuse. Et avec un peu de chance, je dois pouvoir trouver dans ce bout de masque un sort qui viendra Ă bout de ce type.
Je lis donc ces mots en Langue Putride et me voilĂ revĂȘtu dâune cape. On va dire que câest toujours ça de gagnĂ©. Je tourne le dos Ă lâarbalĂ©trier et cours vers la sortie. Et je sens un carreau ricochet sur la cape. Elle est peut-ĂȘtre magiqueâŠ
Jâarrive finalement Ă la sortie. Mais jâai toujours mon chasseur de prime aux trousses. Je cherche donc Ă me perdre, et surtout le perdre, dans les ruelles de lâInterzone avant de regagner le temple dâAzathoth. Mais il me suit toujours. Au moins, il ne tire pas en courant.
Je demande asile aux prĂȘtres dâAzathoth alors mĂȘme que lâarbalĂ©trier et toujours sur mes talons. Dâailleurs, le caractĂšre sacrĂ© des lieux ne lâarrĂȘte pas et il fait irruption dans le temple. Reprenant son souffle, il pointe dĂ©jĂ son arme vers moi. Je vole jusque dans un coin dâombre tout en hurlant aux prĂȘtres prĂ©sents quâils doivent me protĂ©ger. Jâesquive deux carreaux avant de pouvoir me coller au plafond. Pendant ce temps, les prĂȘtres restent impassibles. Pourtant, quelque chose se passe. Des clameurs viennent de lâextĂ©rieur, attirant lâattention des prĂȘtres et du chasseur de primes. Tout le monde se prĂ©cipite dehors, mĂȘme si je sens que le tireur me garde dans son champ de vision.
Sans quitter ma cachette, je me connecte Ă la foule grĂące Ă ROHUM. Dehors, un Ă©norme vaisseau-bouche vient dâapparaĂźtre. Il peut venir de nâimporte oĂč et nâimporte quand puisque sa corne frontale lui permet de traverser les vortex spatio-temporels. Le pilote apparaĂźt, sorte dâhomme-ver Ă la peau trĂšs trĂšs pĂąle. Il a une rĂ©vĂ©lation Ă faire Ă la foule. La citĂ© va bientĂŽt ĂȘtre engloutie. Dans moins dâune journĂ©e. Je le savais ! Mais, ce que je ne savais pas, câest quâil y a un moyen de nous sauver tous.
Et ce moyen, câestâŠ
Alors quâune partie de la foule reste suspendue aux lĂšvres de cet Ă©trange pilote de vaisseau-bouche, une autre partie sâen est dĂ©jĂ dĂ©tournĂ©e pour aller prier le dragon rouge des les Ă©pargner. Le pilote semble quelque peu dĂ©confit par cette attitude mais cela ne lâempĂȘche pas de poursuivre.
Oui, nous pouvons tous ĂȘtre sauvĂ© de cette vague Ă venir. Pour cela, nous avons donc une journĂ©e pour rompre une malĂ©diction. Laquelle ? Celle lancĂ©e par les membres de lâĂglise du Serpent Innombrable ! Je regarde autour de moi. Ce nom ne semble pas totalement inconnu aux membres de la foule mais provoque quand mĂȘme un certain Ă©tonnement. Visiblement, ce nâest certainement pas le groupuscule le plus influent du coin. A moins, comme je ne peux mâempĂȘcher de le souffler Ă mon voisin, quâils ne prĂ©parent leur coup en secret depuis longtemps.
Pour autant, cette dĂ©claration suscite le doute. En effet, cette Ăglise est minoritaire mais, pour autant quâon le sache, ses membres ne font lâobjet dâaucune persĂ©cution qui justifierait la destruction de la ville. Je ne me sens pas lâĂąme dâun leader mais je ne peux mâempĂȘcher de faire courir le bruit que le meilleur moyen dâen ĂȘtre certain serait peut-ĂȘtre bien dâaller leur demander directement.
Et voila que cette suggestion se rĂ©pand et que la foule se met en marche vers le temple du Serpent Innombrable. Nous arrivons devant une petite bĂątisse austĂšre et sale. La façade est envahie par lâhumiditĂ© et il se dĂ©gage des lieux quelque chose de sinistre. Quelquâun dans la foule prend alors la parole et exige quâun membre de lâĂglise sorte sâexprimer sur la question. Personne ne sort Ă©videmment, certainement par peur dâun lynchage. Toutefois, une voix retentit et interroge la foule sur le motif de sa prĂ©sence. Une fois la clameur retombĂ©e, la voix nie en bloc ĂȘtre Ă lâorigine dâune quelconque malĂ©diction et nous prie tous de rentrer chez nous. Alors, je mâenvole au-dessus de la foule et demande sâil me serait possible dâentrer pour discuter, seul bien sĂ»r. Une fenĂȘtre sâouvre et on me fait signe dâentrer.
A lâintĂ©rieur, lâĂ©glise est Ă peine moins miteuse que sa façade. Je suis accueilli par un MantoĂŻd. Il a lâair nerveux. Il nâarrĂȘte pas de triturer sa bague. Je lui dis venir en paix. Contrairement Ă la foule, je ne pense pas que le Serpent Innombrable soit Ă lâorigine de cette malĂ©diction. Toutefois, lâĂglise a Ă©tĂ© accusĂ©e et, malgrĂ© cela, elle a peut-ĂȘtre un rĂŽle Ă jouer dans le sauvetage de la citĂ©. Je nâai pas lâimpression de lâavoir vraiment convaincu mais, quand mĂȘme, il me laisse poursuivre. En vĂ©ritĂ©, je nâai aucune hypothĂšse ni thĂ©orie sur la question et jâimprovise totalement mon baratin. Aussi, je lui explique que, selon moi, il est plus probable de voir lĂ les consĂ©quences des manigances de serviteurs dâYâmo-Thog, lâancienne divinitĂ© rĂ©gnante sur cette planĂšte. Je pense en effet que ce serait plutĂŽt qui, dans un esprit de vengeance et afin de restaurer un nouvel Ăąge de glace, auraient provoquĂ© lâapparition de ce brouillard et de cette ombre du dragon pour crĂ©er un certaine panique. De mĂȘme, ils auraient impliquĂ© lâĂglise du Serpent Innombrable uniquement pour semer plus de trouble et se laisser encore un peu plus de temps pour finaliser leur plan. LĂ , je sens le MantoĂŻd un peu plus intĂ©ressĂ©. Alors, a-t-il des informations concernant une rĂ©surgence du culte dâYâmo-Thog ou dâune quelconque divinitĂ© liĂ©e au froid et Ă la glace ? Non, mais⊠peut-ĂȘtre que le Serpent a une rĂ©ponse, lui.
Le MantoĂŻd me conduit alors dans une autre piĂšce, trois Ă©tages plus haut. LĂ , il sâarrĂȘte devant une porte. Je lâinterroge quant Ă ce quâil y a derriĂšre et il mâexplique que personne ne le sait. En rĂ©alitĂ©, personne nâa jamais ouvert cette porte. Pas depuis quâil est membre de lâĂglise en tous les cas. En fait, cette porte est magique. Pas dans le sens oĂč elle sâouvrirait sur dâautres endroits mais dans le sens oĂč elle est chargĂ©e dâun mĂ©lange dâĂgrĂ©gore et de PĂ©trolâMagie qui permet de faire voyager⊠lâesprit. Câest un peu, me dit-il, comme si une porte sâouvrait dans lâesprit et que le Serpent Innombrable en profitait pour y dĂ©verser une vision, une rĂ©vĂ©lation. Il pose alors les mains sur la porte, ferme les yeux et nous attendons tous les deux.
Le MantoĂŻd est un peu ennuyĂ© quand il se retourne vers moi. Le serpent nâa pas Ă©tĂ© trĂšs bavard. Tout ce quâil a pu voir concerne⊠Une tĂȘte de femme titanesque en pierre taillĂ©e, Ă moitiĂ© recouverte de mousse. Elle porte une sorte de casque dâastronaute et, dâaprĂšs le MantoĂŻd, elle parle dans une langue inconnue. Il me prĂ©vient Ă©galement que ses yeux Ă©mettent des rayons mortels. Super ! Et maintenant, oĂč je trouve cette tĂȘte gĂ©ante ? Dans la forĂȘt jâimagine. Le MantoĂŻd hausse les Ă©paules. Il ne peut mâen dire plus.
Heureusement pour moi, les prĂȘtres dâAzathoth connaissent lâexistence de cette tĂȘte et sâempressent de me faire un plan dĂ©taillĂ© pour y parvenir. Tant que je suis lĂ , je leur remets le bout du masque du HiĂ©rarque que jâai rĂ©cupĂ©rĂ©, leur promettant de leur ramener le reste si nous survivons Ă la prochaine journĂ©e. Je sens bien que ma rĂ©ponse ne leur convient pas et je me fĂ©licite dâĂȘtre immunisĂ© aux mutations car je reconnais dans lâinvocation quâil vient de lancer dans ma direction quelques expressions Ă©voquant un blob.
Pas la peine de mâattarder. Je quitte les lieux et fonce dans la forĂȘt jusquâĂ cette fameuse tĂȘte. Je verrai bien ce quâelle a Ă me dire.
Et je me retrouve dans cette forĂȘt. Je ne sais pas pourquoi mais jâai lâimpression de la connaĂźtre sans pourtant jamais y avoir mis les pieds. En rĂ©alitĂ©, je ne me souviens pas dây ĂȘtre allĂ©, ni mĂȘme de nây ĂȘtre jamais allĂ©. Je suis sĂ»r de ne pas savoir et pourtant⊠cette forĂȘt me rappelle quelque chose. Est-ce que cela a Ă voir avec mon « autre moi » ou le Joueur ? Le Joueur, lui, connaĂźt bien cette forĂȘt. Il lâa visitĂ© bien des fois Ă bien des Ă©poques et sous bien des formes. Pourtant, sâil la connaĂźt, il avoue volontiers que, pour lui aussi, elle demeure bien mystĂ©rieuse. Il est bien loin dâen avoir fait le tour.
Cela fait un petit moment maintenant que jâerre dans ces bois et je ne peux quâĂȘtre frappĂ© par lâexubĂ©rance de cette vĂ©gĂ©tation. Ce nâest pas une simple forĂȘt, je le sais bien. Câest le domaine autant quâun avatar de Shub-Niggurath mais⊠Il y a quelque chose⊠dâagressif dans la façon dont ces bois se dĂ©veloppe. Cette vĂ©gĂ©tation est un prĂ©dateur. On dirait que ces bois se dĂ©vorent eux-mĂȘmes mais que, malgrĂ© cela, ils en ressortent toujours plus fort. Ils se nourrissent dâeux-mĂȘmes, se renforcent. Ăa fait peur. Mais, dâun autre cĂŽtĂ©, se dĂ©vorant elle-mĂȘme, la forĂȘt semble renaĂźtre en permanence. Elle est un perpĂ©tuelle nouveau-nĂ©, sans mĂ©moire, qui doit tout redĂ©couvrir, tout rĂ©apprendre. Ăa aussi, ça me met mal Ă lâaise.
Jâarrive finalement au pied dâun arbre. Jâentends le hululement dâun hibou, plus haut dans son feuillage. Je lĂšve les yeux et distingue une silhouette taillĂ©e dans une sorte de feu translucide. Cet oiseau serait-il une manifestation de lâEmprise, une sorte de forme modelĂ©e dans lâĂgrĂ©gore selon des rĂšgles que je ne connais pas ? Essaie-t-il de me dire quelque chose ? Autant le lui demander. Je grimpe. Enfin, jâessayeâŠ
Le Joueur a pratiquĂ© lâescalade pendant plusieurs annĂ©es mais on dirait quâil ne mâen a rien transmis. Aussi, finalement, je mâen remets Ă mes ailes et vole jusquâĂ cet Ă©trange hibou. Une fois en face de lui, je le vois fixer sur moi son regard attentif. Et dans ce regard, je lis de la colĂšre. Dans ma tĂȘte, des mots et des images apparaissent, explosent mĂȘme ! Ce nâest pas formulĂ© dans un langage quâon pourrait qualifier dâ« humain » mais lâidĂ©e gĂ©nĂ©rale est une association des notions de livres et de poison. Alors, est-ce que cela veut dire que les livres, les mots, sont un poison, quâils sont dangereux ? Cette idĂ©e nâest pas nouvelle. Pourtant, elle fait Ă©cho Ă mes pensĂ©es concernant cette forĂȘt sans mĂ©moire. Dâune certaine façon, les livres sont nos 1er disques durs externes, non ? Des sortes de mĂ©moires⊠et ces mĂ©moires seraient un poison ? MĂ©moire, savoir⊠lâignorance serait-elle prĂ©fĂ©rable ? Vivre finalement dans un Ă©tat de perpĂ©tuel prĂ©sent, sans passĂ© ni avenir ? Je secoue la tĂȘte. Ce hibou est en train de jouer avec ma propension, et celle du Joueur, Ă me prendre la tĂȘte. Il me fait rĂ©flĂ©chir Ă toutes ces considĂ©rations pour mieux me faire oublier pourquoi je suis ici. Est-ce lĂ la ruse de la forĂȘt pour me dĂ©tourner de mon but ? Me remplir la tĂȘte de considĂ©rations plus ou moins et moins que plus philosophiques pour me dĂ©tourner de mon but ?
Les livres sont un poison, mais pour qui ? Pas pour moi ! Pour moi, au contraire, ils sont un remĂšde ou alors, comme lâĂ©crivait Sloterdijk, il sâagit dâun procĂšs dâintoxication volontaire. Ainsi, la lecture devient pour moi une sorte de mithridatisation. Je mâimmunise au poison. Je suis immunisĂ©, dĂ©jĂ , car je suis une MouchoĂŻde ! Alors, sans dĂ©tourner mon regard des yeux du hibou dâĂgrĂ©gore, je me dĂ©cide Ă lâ« ouvrir » pour lire en lui. Dans cet ĂȘtre dâĂgrĂ©gore et dâEmprise, je vais trouver ce que je cherche, lâendroit oĂč se trouve cette tĂȘte en pierre.
Le hibou rĂ©siste mais finit par cĂ©der. Jâai trouvĂ© ce que je cherchais. Ainsi, je vole maintenant vers mon but, ma cible, la tĂȘte gĂ©ante. Elle a Ă©tĂ© sculptĂ©e au sommet dâun tertre. DerriĂšre, il y a une cascade. Lâendroit est beau, dâautant plus que la nuit tombe. Le vent souffle, prĂ©misse du tsunami Ă venir ? Jâavance prudemment afin de ne pas tomber sous le coup de ses rayons mortels contre lesquels on mâa mis en garde. Et lĂ , je me rappelle de la carte que mâont donnĂ© les prĂȘtres dâAzathoth. La forĂȘt a Ă©tĂ© maligne et me lâa faite oublier. Jâaurais pu arriver plus tĂŽt. Jâai maintenant moins de temps pour trouver une parade Ă cette vague qui va dĂ©truire la citĂ©.
Je vole selon une trajectoire qui me permet de mâapprocher de la tĂȘte dans dĂ©clencher ses rayons. Maintenant que je suis tout proche dâelle, je reste silencieux et attends un peu au cas oĂč elle prendrait spontanĂ©ment la parole. Effectivement, je nâattends pas longtemps avant quâelle ne sâadresse directement Ă moi. Câest bizarre. Je pensais quâelle userait dâune sorte de tĂ©lĂ©pathie mais je vois distinctement bouger ses lĂšvres de pierre recouvertes de mousses. Son haleine est putride, comme la Langue dans laquelle elle sâexprime.
La tĂȘte me rassure. Elle ne me veut pas de mal. Il y a quelque chose de dĂ©senchantĂ© dans sa voix. En fait, elle ne me veut pas de mal car cela ne sert plus Ă rien. Elle affirme que, depuis le dĂ©but ou presque, je ne cours pas aprĂšs les bonnes cibles, je ne cherche pas du bon cĂŽtĂ©. Et maintenant, il est trop tard. Je lui demande sâil nây a vraiment aucun moyen dâĂ©viter ce tsunami. Il y en a un mais⊠il est trop tard maintenant. Dans le doute, je lui demande quel est ce moyen. AprĂšs tout, ce nâest pas parce quâelle semble convaincue quâil est trop tard que câest effectivement le cas. Et puis, peut-ĂȘtre me ment-elle ? Et la tĂȘte, jâai lâimpression quâelle se tourne vers moi-mĂȘme si câest faux parce que câest impossible, me demande :
« Ne tâest-il pas venu Ă lâidĂ©e que tu avais Ă©tĂ© droguĂ© et que tout cela nâĂ©tait quâune illusion, une hallucination ? »
PĂ©trolâhead que je suis⊠Je nâai rien pris depuis⊠depuisâŠÂ ?
Suis-je en manque ? Ai-je fais une overdose ?
Je me rappelle ces mots de Nietzsche quâon attribue aussi Ă Burroughs : « Rien nâest vrai, tout est permis. »
Merde !
Cette vague, ce tsunami, ce brouillard, cette fumĂ©e, ce dragon rougeâŠ
Tout cet ĂgrĂ©gore et ce PĂ©trolâmagie.
Suis-je vraiment ici ? Ne suis-pas tout simplement en train dâultra-planer ou de me tordre de douleur Ă cause du manque ?
Tout çaâŠ
⊠ne serait finalementâŠ
⊠quâune hallucination ?
Câest⊠trop tard ?
Vraiment ?
Quelque part, le Joueur se ronge les ongles. MĂȘme lui ne sait plus. Alors, quâest-ce quâon fait ?
La mĂ©moire est un poison. Les livres sont un poison. Et mĂȘme si je suis immunisĂ©, le mieux que jâai Ă faire est peut-ĂȘtre de faire comme cette forĂȘt : repartir Ă zĂ©ro !
Commentaires de Thomas :
A. 13540 mots... Encore une novelette. Vous ĂȘtes productif, monsieur LagauzĂšre !
B. « Je reconnaĂźtrai lâendroit car il y pleut beaucoup et lâeau de pluie transforme les choses »
Hum, hum, l'emprise :)
C. « Celui quâelle a appelĂ© Ă©tait scarifiĂ© mais malgrĂ© cela trĂšs beau. Ses cicatrices Ă©taient⊠artistiques et bouleversantes. »
Peut-ĂȘtre lâĆuvre d'un sarcomantien ?
D. « Millevaux ! Jâai lâimpression dâatterrir dans la cave inondĂ©e du Multivers. »
J'adore l'image :)
E. « Je demande à ROHUM si je dois craindre un piÚge. »
Tu me rappelles ce qu'est ROHUM ?
F. Je ne croyais pas ça possible, mais j'ai l'impression que tes RP sont de plus en plus what the fuck :)
G. Le personnage a des visions d'un autre personnage de ta campagne, ce qui accentue l'effet de flou, le sentiment que tout s'Ă©quivaut :)
H. Le personnage parcourt d'immenses durées dans le temps, j'ignore s'il sera à l'heure à son rendez-vous fixé quatre jours aprÚs son départ :)
I. « Et je reconnais ce chĂąteau. Câest celui de ma vision, celui que mon « autre moi » nâa jamais rĂ©ussi Ă atteindre. » ça me fait penser au ChĂąteau de Kafka. Peut-ĂȘtre qu'avec l'Ă©grĂ©gore, il est des lieux dont on peut voir les contours mais qu'on ne peut jamais atteindre.
J. « En vĂ©ritĂ©, tout ça commence Ă me dĂ©passer et je ne sais plus si câest une si bonne idĂ©e que ça de courir aprĂšs ce barde.  »
Moi aussi, ça commence à me dépasser :) Les « non mais » à répétition provoqués par les outils de systÚme nous perdent dans des méandres narratives inextricables :)
K. « Je le trouve lĂ sâadonnant Ă une activitĂ© tĂ©moignant de sa frustration. PrĂ©sentement, il agite son implant, Ă©jectant ce qui semble ĂȘtre des saucisses de viande dâHomme-porcs »
Ah oui quand mĂȘme on en est lĂ :)
L. « Le Joueur, lui, connaĂźt bien cette forĂȘt. Il lâa visitĂ© bien des fois Ă bien des Ă©poques et sous bien des formes. Pourtant, sâil la connaĂźt, il avoue volontiers que, pour lui aussi, elle demeure bien mystĂ©rieuse. Il est bien loin dâen avoir fait le tour. »
Et comment, moi non plus :)
M. « On dirait que ces bois se dĂ©vorent eux-mĂȘmes mais que, malgrĂ© cela, ils en ressortent toujours plus fort. Ils se nourrissent dâeux-mĂȘmes, se renforcent. Ăa fait peur. Mais, dâun autre cĂŽtĂ©, se dĂ©vorant elle-mĂȘme, la forĂȘt semble renaĂźtre en permanence. Elle est un perpĂ©tuelle nouveau-nĂ©, sans mĂ©moire, qui doit tout redĂ©couvrir, tout rĂ©apprendre. Ăa aussi, ça me met mal Ă lâaise.  »
J'aime beaucoup l'image
Hors ligne
PREMIER ĂTĂ DANS LE VENTRE DE MEJGORIĂ
Une séance enfantine intimiste qui se colore de plus en plus en sombre. Un récit et un enregistrement de partie par Claude Féry.
(temps de lecture : 9 min / temps dâĂ©coute : 48 min)
Joué en présentiel le 14/06/2020
Le jeu : Trois Ă©tĂ©s Ă Bonneville, un jeu de rĂŽle intimiste, aventureux et plein dâespoir, par Chestel
L'univers : La forĂȘt de Millevaux
Lire/télécharger le PDF du scénario
Farhad Sadykov, cc-by
Toutes les photos suivantes sont de Claude FĂ©ry (par courtoisie).
L'histoire :
Voici une petite réflexion sur ma démarche ludique.
à chaque nouvelle session je m'efforce de proposer différentes tonalités pour envisager les suites de notre campagne.
RéguliÚrement j'ai proposé trois jeux différents afin que nous obtenions lors de la mise en jeu l'atmosphÚre et l'intensité d'émotions attendues.
Récemment, dans le cadre de ma préparation non préparation, je me suis contenté de proposer un nouveau jeu, plutÎt destiné à une unique partie que je m'efforce de faire dialoguer avec la seconde partie de la session.
Dans notre derniĂšre session, je ne suis pas parvenu Ă Ă©tablir un lien avec le contenu fictionnel de notre partie de Le cueilleur dâarbres.
Quoique la seconde partie de la session ait été l'occasion de moucher une nouvelle bougie et poursuivre notre exploration de Mejgorié, je n'étais pas en mesure de tisser des liens comme je l'avais fait avec Lillipousse.
Xavier joue Helio
J'ai donc parcouru ma ludothĂšque et me suis arrĂȘtĂ© sur Mahamoth de John GrĂŒmph qui pourrait offrir un retour vers le Spomenik et les enfants de la LumiĂšre Noire : Germaine, Apo850 et HĂ©li.
J'ai ensuite songé à Skyrealms Of Jorune, l'épisode d'exploration de planÚte devant initialement aboutir à une scÚne de chasse Ramian lors du « Rurvi Tchorko ».
Entre temps chacune des joueuses m'a communiquĂ© ses centres d'intĂ©rĂȘts du moment, Xavier en me narrant une histoire rocambolesque d'un enquĂȘteur avec gourdin plutĂŽt que fusil de chasse, Alexa en me livrant une sĂ©rie de dessins oĂč son avatar rĂ©current destinĂ© Ă sa chaĂźne YouTube devient une Katsune plutĂŽt qu'une vampire et Gabrielle m'a Ă©voquĂ© une nouvelle dystopie.
Et moi, profitant d' un arrĂȘt maladie pour laisser vagabonder mes oreilles vers divers podcasts, j'ai dĂ©couvert au travers d'un souvenir rĂŽliste 3 Ă©tĂ©s Ă Bonneville du bon Docteur Chestel.
Je l'ai lu et succombĂ©, aux appels de gamins farceurs dans la montagne. ImmĂ©diatement ce sont des Ă©chos de jeux enfantins dans la forĂȘt des Vosges qui ont tintĂ© Ă mes esgourdes.
Puis j'ai écouté le dernier témoignage audio d'une partie de La clé des songes jouée par kF et Eugénie, une pure pépite de poésie,
un peu de neige salie de Bernard Gunter, transposée au jeu de rÎle...
Enfin, j'ai lu le hors série 5 de Sombre de Johan Scipion, ou plutÎt ses articles sur sa démarche créative afin d'obtenir « la peur comme au cinéma ».
Et je constate alors que ce que je tente de convoquer à ma table c'est un « cinéma pour l'oreille », (tagline déjà mobilisée par JérÎme Noetinger pour son excellente production sur Metamkine).
Avec Gabrielle, Alex et Xavier nous jouerons demain aprĂšs-midi les suites de notre exploration du Ventre de MejgoriĂ©, sous un autre angle toutefois. « Avec notre Ćil, nous arrangeons les rĂ©alitĂ©s. » Georges Aperghis.
Vivre dans le ventre de MejgoriĂ© rend la vallĂ©e au dehors un havre dĂ©sirable oĂč bĂątir notre refuge loin du regard inquisiteur de nos aĂźnĂ©s...
Manuel en cyriloc, comme toutes les instructions dans l'hypogée
Belle session de trois heures, beaucoup plus sombre que ce que propose initialement 3 étés à Bonneville. Nous avons convenu de jouer le second été sur le thÚme des transformations subies par nos personnages au contact du bois.
A la suite d'un dysfonctionnement d'une clé USB de transfert ne subsistent que les 2 premiÚres minutes des trois premiÚres étapes du plan 1 sur les presque deux heures jouées. Les étapes 4 et 5 ainsi que le bilan ont été épargné. Ce moignon sonore, à défaut d'autre chose, vous fournira une idée de l'ambiance à la table, loin du riant été savoyard.
Nous avons jouĂ© en dĂ©tail notre Ă©chappĂ©e. Kwolia Ă©met l'idĂ©e de voler un bidon d'acide Ă l'octroi. Vassily est d'accord mais se dĂ©gonfle tandis que Elisheba dĂ©bite des sornettes au vieil Alan sur des Ă©cureuils retors qui dĂ©vorent la cĂąblerie au risque d'interrompre l'alimentation Ă©lectrique de la salle des Dormeurs pour l'Ă©loigner. Helio et Elisheba enferment le dupe dans un rĂ©duit, pendant que Kwolia s'empare du bidon convoitĂ©, chĂąteau branlant sur un vieil escabot. Et il chute, comprime le bidon et sâĂ©clabousse les mains d'acide. Elisheba et Vassily l'enjoignent Ă se laver les mains Ă l'eau froide. Ăa picote ! Ăa picote ! Geint le voleur. Vassily et Helio grattent les murs dont ils ont la charge d'entretien Ă l'acide, pendant que le blessĂ© et Elisheba se rendent Ă l'infirmerie.
L'infirmerie ici se confond avec le sas de déconfinement, l'avant poste de l'hypogée, son regard sur le monde. Le lieu est à circulation restreinte. Aussi les deux gamins inventent la présence d'un nuage toxique de pollens qu'il conviendrait de circonvenir avant qu'il n'atteigne les conduits d'aération. Pendant qu' Elisheba distrait L'aßné de faction par son verbiage et l'entraßne au dehors, Kwolia inspecte la pharmacie. Trois types de produits dans des fioles s'offrent à lui : un translucide, un vert et un bleuté. Les inscriptions en cyriloc lui sont d'aucune utilité. Indécis il s'en remet à la sagacité de son amie, le vert s'est l'espoir... Elisheba se charge de l'injection et c'est atroce, ça brûle encore plus ! Alors hop ! une injection de la solution bleutée qui étend le gamin au sol, pris de convulsions. Il se redresse bientÎt, les lÚvres bleues, claquant des dents, mais ça marche !
Tout à changé. Elisheba aussi. Il lui voit sous la paupiÚre gauche un signe 24. Elle est une dormeuse. C'est un signe. Lui a un 6. Il lui injecte la solution bleue, froide, glacée puis qui bientÎt l'inonde d'une vive chaleur. Désormais ils sont des Dormeurs et sont condamnés à veiller leur pairs s'ils restent ici. Ils se promettent donc de se bùtir un refuge et de ne jamais revenir. Les deux autres s'en émeuvent et Kwolia leur offre une injection. Helio est 17 et Vassily 21 pour les autres et 3 selon lui. Ils grimpent dans le conduit d'aération et s'échappent aprÚs avoir saboté le sas technique.
Gabrielle joue Vassily
Ils Ă©mergent dans une hĂȘtraie bruissante de vie. Ils s'Ă©loignent heureux de quitter la citĂ© oppressante, mĂȘme si Elisheba et Helio sont un peu soucieux. Tout est nouveau et jamais plus ils ne formeront de dessins dans la moisissure qui ronge les coursives avec leurs brosses. Autour d'eux des milliers de fragrances se mĂȘlent dans l'air. Le soleil perce au travers des houppiers touffus et dessine la la lumiĂšre sur leurs visages. Dans la vallĂ©e en contrebas, l'eau cascade sur la roche. Des oiseaux chantent et Kwolia pousse un cri tonitruant en se suspendant Ă une liane pour franchir le ravin. Il atterrit cul par dessus tĂȘte, trĂšs fier, de l'autre cĂŽtĂ©. MĂȘme pas mal ! MĂȘme pas peur ! Il avertit qu'un truc horrible fait hou hou derriĂšre Helio. Mais non. C'est une farce !
En revanche il y a un essaim d'abeilles forestiÚres mécontentes... Il est trÚs vite rejoint par son copain Helio qui récupÚre la corde du plus prudent Vassily, qu'il hisse vers eux. Elisheba suit les deux garçons mais la liane trop sollicitée, cÚde. Elle est retenue dans chute par Vassily que tractent les deux compÚres. Kwolia passe la corde au pied d'un arbre solide à l'invite d'Helio et tout le monde remonte sain et sauf. Kwolia est tout ébranlé cependant. Contre la rugosité de l'arbre il perçoit une présence, hostile, avide.
Ce n'est pas son corset de branches
Ni ses cheveux de feuilles
Ni ses lĂšvres d'insectes
Qui lui font peur
C'est qu'elle n'a pas de cĆur
(Almanach)
Maintenant ils se tiennent prÚs du vieux panneau rouillé signalant le risque de montée des eaux. Ils ont franchi la frontiÚre.
La cavée aux goupils
Depuis le couvert de la chĂȘnaie, Elisheba lance un premier Ă©cho vers le versant qu'ils viennent de quitter. Un jeu de cris s'ensuit qui dissipe dans un premier temps leur trouble. Mais bientĂŽt ce sont des Ă©chos du passĂ© qui les assaillent. Les temps se mĂȘlent. Kwolia s'englue dans la poussĂ©e d'un rĂ©acteur tokamak et vit un combat confus dans MejgoriĂ© oĂč un marchand d'esclave et un croyant l'abandonnent Ă son sort pour protĂ©ger son amie, prise d'oubli. Helio entend des coups de feu qui s'Ă©ternisent...
Le temps fuit de toute part et ils s'Ă©loignent dans la chĂȘnaie pour mieux s'y perdre en cherchant Ă Ă©viter la menace des bĂ»cherons cannibales. La nuit les saisit dans une clairiĂšre sans refuge et tout le bois glanĂ© perdu. Ils s'installent dans le creux d'un arbre Ă trois troncs que Helio amĂ©nage sommairement.
Kwolia rĂȘve de danser Ă la cime des nuages, perd ses jambes, se drape dans la nue et sombre, proie d'une atroce douleur.
J'habite une blessure sacrée
j'habite des ancĂȘtres imaginaires
j'habite un vouloir obscur
j'habite un long silence
j'habite une soif irrémédiable
j'habite un voyage de mille ans
j'habite une guerre de trois cent ans
j'habite un culte désaffecté entre bulbe et caïeu
j'habite l'espace inexploité
j'habite du basalte non une coulée
mais de la lave le mascaret
qui remonte la valleuse Ă toute allure
et brûle toutes les mosquées
je m'accommode de mon mieux de cet avatar
d'une version du paradis absurdement ratée
- c'est bien pire qu'un enfer -
j'habite de temps en temps une de mes plaies
chaque minute je change d'appartement
et toute paix m'effraie.
Aimé Césaire, Le Calendrier Lagunaire
La cavée aux goupils
A presque-aube quatre cocons de toiles pendent dans la clairiĂšre.
D'immenses cannes chitineuses pareilles aux troncs des arbres descendant de ce ceux-ci.
Vassily se libĂšre du sien et arrache celui de Kwolia qui retombe au sol, blĂȘme, frissonnant.
Le cocon qui enserre Helio est immobile, linceul pudique jeté sur un corps frappé par la foudre de l'orage sec que la nuit a convié.
Vassily libĂšre partiellement Elisheba alors qu'un visage familier salive au dessus de leurs tĂȘtes. Alors Kwolia se redresse, sa bouche s'ouvre immense sur un cri silencieux qui Ă©branle la terre, souffle feuilles et soies et bientĂŽt ils sont enfin seuls. Ils bĂątissent une cabane rudimentaire Ă la lisiĂšre et s'Ă©changent promesses et serments solennels. Kwolia ne dit rien de ses dents et sa langue pourries par la sepsie de Pandora. Il Ă©treint leurs mains et pleure l'abandon qu'ils lui ont promis.
Nous avions tous présent à l'esprit la vidéo de présentation de Degenesis
dont le lien suit lorsque j'ai évoqué la réaction de Kwolia face à Visage Familier... Les sonorités de Wromb étaient de circonstances et cette scÚne était assez intense.
La cavée aux goupils
Manifestement Kwolia est celui qui a pris une balle Ă l'entrĂ©e de MejgoriĂ© et Elisheba serait LibertĂ© avant lâalcĂŽve... Lapin serait un Dormeur qui s'ignore... Une trĂšs belle session !
N. B. : Notre errance forestiÚre était illustrée par le diaporama de la cavée aux goupils que j'ai posté en inspiration.
La cavée aux goupils
Commentaires de Thomas :
Merci beaucoup pour ce nouveau retour de partie !
A. Les photos de fougĂšres et de plantes sont de toi ?
B. C'est quoi le Recombination Group ?
C. A quoi penses-tu que la revisitation trÚs sombre de l'ambiance légÚre de 3 étés à Bonneville est due ?
La cavée aux goupils
A. Oui Claude
B. C'est une organisation secrÚte qui au moyen de manipulations génétiques, de conditionnements et de moyens financiers et matériels colossaux à organisé la survivance, (sa survivance) à l'effondrement de la civilisation.
C. Au ton spontanément adopté par les joueuses, qui quoique le caractÚre léger ait été affirmé en amont on creusé un sillon trÚs sombre. Les dangers évoqués devenaient de réels enjeux et j'ai joué pour ma part ma feuille de personnage. Pour le final j'ai annoncé ma crainte et positionné ma noisette sur à sauver, sans secours la situation s'est encore aggravée. ParallÚlement Xavier s'est mis hors jeu avec la foudre... Ce n'était pas le ton initialement attendu, mais le résultat m'a vraiment plu, ainsi qu'aux autres. Gabrielle a joué en Théùtre de l'esprit et n'a pas vraiment suivi les injonctions du jeu.
C bis. Je souhaitais à titre personnel explorer un lieu au travers des souvenirs que se sont forgés de jeunes gamins. A cet égard cela a pleinement fonctionné. Les mécaniques et le plan 1 ont été scrupuleusement respectés. Ils ont soutenu note récit et produit comme escompté les trois heures de fiction attendue. Alex et Xavier ont joué avec leurs voix d'enfant et Gabrielle a joué les enfantillages avec naturel. Simplement notre cadre Millevalien a profondément contaminé la tonalité guillerette initiale du jeu.
Indubitablement ! Xavier en fin de session nous a indiqué que si celle-ci lui avait plu, certains moments l'avaient effrayés (mais il n'a pas désigné le D ou le X sur sa feuille de personnage) et que la musique faisait peeuuur. Sur la partie non couverte par le témoignage audio la source sonore consistait en une série d'improvisations de Bertrand Gauget au saxophone et la deuxiÚme partie d'une composition de musique concrÚte de Lionel Marchetti intitulée Chasser. Cette derniÚre est particuliÚrement inquiétante, mais le glissement de tonalité était amorcé dÚs la premiÚre étape.
La cavée aux goupils
Thomas :
C'est quoi le D sur la feuille de personnage ?
Claude :
Je me suite trompé. D désigne une demande d'arbitrage J'aurais du dire V droit de veto, une revisitation selon la rÚgle
Thomas :
C'est intéressant ces codes-lettres de sécurité émotionnelle sur la feuille de perso ! Que veut dire A ?
Gabrielle joue Vassily
Alex joue Elisheba
Alex joue Elisheba
Gabrielle joue Vassily
Hors ligne
LA PRISON
Un labyrinthe sans issue envahi par la forĂȘt, une errance pĂ©rilleuse en compagnie d'Ă©tranges dĂ©tenus... Un scĂ©nario et le rĂ©cit d'une aventure solo par Damien LagauzĂšre
(temps de lecture : 10 min)
Joué le 14/12/2019
Le jeu : English Eerie, par Trollish Delver Games, un jeu de rĂŽle sans MJ de contes dâhorreur classiques et folkloriques dans la campagne anglaise.
Univers : la forĂȘt de Millevaux
Lire / Télécharger le scénario mis en forme (temps de lecture : 3 min)
Gerhard, cc-by-nc
Synopsis :
Cette ancienne prison est en ruine. Pourtant, le PJ y est enfermĂ©. Il erre dans ce labyrinthe de murs Ă©croulĂ©s, de couloirs et de salles envahis par la vĂ©gĂ©tation Ă la recherche dâune sortie. Il ne sait pas comment il est arrivĂ© lĂ . Il sâest seulement rĂ©veillĂ©, allongĂ© sur un grabat fait de feuilles sentant le moisi. Des gĂ©missements ont suscitĂ© sa curiositĂ© et il a quittĂ© cette cellule pour dĂ©couvrir, dans une autre cellule, un homme au visage poupin et aux mains couvertes dâencre. Lui non plus ne sait pas ce quâil fait ici. Regardant ses mains tĂąchĂ©es dâencre pas encore sĂšche, il cherche un livre. Il explique au PJ quâil ne se rappelle de rien mais⊠qu'il Ă©tait en train dâĂ©crire quelque chose dâimportant. Et ce quelque chose est quelque part ici, dans cet endroit. Il sait, il est sĂ»r et certain, quâon lui a dĂ©robĂ© son texte car, dessus, il avait notĂ© comment sortir dâici !
Par endroit, le toit est Ă©croulĂ© mais, Ă cause des gravats et de la vĂ©gĂ©tation, il nâest jamais possible dâescalader les murs pour sâenfuir.
Personnage secondaire :
-Montague est donc cet homme au visage poupin convaincu dâavoir consignĂ© par Ă©crit le moyen de quitter cet endroit. Il pense que cet endroit recĂšle un secret et quâon les observe. Il sourit tout le temps mais, au fond de lui, se sent coupable car il veut tuer un membre de sa famille. Il est plus vieux quâil en a lâair.
-Quaté est un homme aux traits et au physique androgyne. Il erre lui aussi dans les couloirs. Comme les autres, il ne sait pas comment il est arrivé là mais il est à la recherche, pas tant de la sortie que du sceau parfait. Ce sceau, cette rune, ce symbole, est, prétend-il, présent en ces lieux. Le trouver et en comprendre la signification apportera bien plus de réponses que le seul accÚs la sortie de cette étrange prison.
-Frater Bush est une montagne. Il a lâair franc, volontaire. Il porte les cheveux longs et dĂ©tachĂ©s. Il a lâair fou de joie Ă lâidĂ©e dâĂȘtre ici. Il se dit aventurier et, pour lui, cette endroit ne peut ĂȘtre que le thĂ©Ăątre dâune vĂ©ritable et folle aventure. Il a hĂąte de se confronter aux lieux et Ă ceux qui sont derriĂšre tout ça. Il erre dans les couloirs depuis plusieurs jours. Il ne semble pas souffrir de la faim ou de la soif. Il explique se nourrir dâherbe et de racines, mais aussi de petits animaux quâil chasse.
-Tribale est une femme Ă lâair distant et indiffĂ©rent. Comme les autres, elle cherche la sortie depuis⊠elle ne sait plus. Elle pense ĂȘtre morte et en Enfer en raison de son passĂ© honteux. Quel passĂ©Â ? Elle a oubliĂ©. Au dĂ©but, elle pensait ĂȘtre ici pour retrouver la mĂ©moire et la sortie mais elle nây croit plus dĂ©sormais.
Indices mineurs :
-Une tombe profanĂ©e Ă un endroit oĂč elle nâa rien Ă faire.
-Un espace Ă ciel ouvert oĂč la vĂ©gĂ©tation a mutĂ© sous lâeffet de lâemprise et de lâĂ©grĂ©gore.
-Le PJ assiste Ă la transformation, douloureuse, dâun rat en⊠autre chose.
-Des traces rĂ©centes du passage dâun horla.
-Des lianes pendent du plafond mais⊠il nây a pas de plafond. Il sâest Ă©croulĂ©.
Obstacles environnementaux :
-La terre se met Ă bouger et poursuit le PJ pour lâengloutir.
-CachĂ© on ne sait oĂč, quelquâun ou quelque chose envoie des fruits pourris sur le PJ.
-Un buisson aux épines acérées barrent le chemin.
-Le PJ a un flash-back, une vision déformée de son passé.
-Des insectes jaillissent de partout et recouvrent le PJ.
Obstacles « personnages secondaires » :
-Montague devient nerveux et tente de forcer le PJ Ă lui donner son sang pour lui servir dâencre. Il veut poursuivre son Ćuvre littĂ©raire en utilisant le PJ comme encrier et comme parchemin.
-QuatĂ© sâest soudain accroupi. Il sâest mis Ă chantonner et Ă dessiner dâĂ©tranges symboles sur le sol. Il se relĂšve brusquement et tente dâĂ©trangler le PJ pour lâoffrir aux symboles.
-A cause de la faim, un personnage secondaire tente de dévorer le PJ.
-Un personnage secondaire est persuadĂ© dâavoir eu une vision et tente de convaincre le PJ dans la direction quâil croit ĂȘtre celle de la sortie.
-Un personnage secondaire tente de se suicider.
Tension :
1-Un portail sâouvre sur les forĂȘts limbiques mais ne fait que ramener le PJ et ceux qui lâaccompagnent Ă son point de dĂ©part, dans lâespace comme dans le temps.
2-Le PJ et ceux qui lâaccompagnent tombent un piĂšge tendu par un horla.
3-Des trompes et des cornes tonnent. On entend, sâapprochant, des cris, des aboiements. Des hommes (Â ?) Ă cheval, avec des chiens, prennent le PJ et ceux qui lâaccompagnent en chasse.
Spirit :
-Au moins 1 Spirit : traqué ou non, le PJ finit par trouver, sinon un sens à tout cela, la sortie de cette étrange endroit.
-0 Spirit : le PJ meurt sous les crocs des chiens ou⊠de faim et de soif dans les couloirs de cette prison.
XxXxX
Lâhistoire:
Je ne sais pas comment je suis arrivĂ© ici. Je ne me rappelle pas de grand-chose en rĂ©alitĂ©. Je mâappelle NoAnde et je suis, ou jâĂ©tais, le shaman du Clan des Arbres. Il sâest passĂ© quelque chose de grave, je le sens, pour que je me retrouve ici. Mais quoi ? Trouverai-je des rĂ©ponses ? En tout cas, je ne crois pas que ce soit ce type, Montague, qui puisse mâaider Ă en trouver. Il a lâair tout aussi perdu que moi. Mais peut-ĂȘtre quâil y a vraiment quelque chose dâimportant de consignĂ© dans son livreâŠ
1er jour :
-Nous errons ici depuis plusieurs heures maintenant. Nous nâavons aucune idĂ©e du chemin que nous devons prendre. Montague cherche son livre. Je cherche une sortie. Nous marchons au hasard. Alors que nous entrons dans un couloir sombre et Ă©troit, nous devons nous arrĂȘter. En plein milieu du chemin, il y a un trou. Et de lâautre cĂŽtĂ© de ce trou, il y a⊠une pierre tombale. Cet endroit nâa rien dâun cimetiĂšre et il nây a aucune autre tombe de cette sorte alentour. Je me penche pour voir sâil y a quelque chose de gravĂ© dans la pierre. Rien ! Câest un mauvais prĂ©sage.
-Montague se remet Ă gĂ©mir. Je me tourne vers lui et le voit fixer le fond de la tombe. A-t-il vu quelque chose qui mâa Ă©chappĂ©Â ? Je me penche et suis littĂ©ralement happĂ© par la lumiĂšre noire qui sâest mis Ă illuminer le fond du trou. Câest Ă©blouissant, aveuglant. Quand nous parvenons Ă recouvrer la vision, tout a changĂ© mais⊠rien nâa changĂ©Â ! Nous sommes toujours dans cette Ă©trange endroit mais câest la lumiĂšre qui a changĂ©. Le blanc est le noir et le noir est le blanc. Montague panique et je ne me sens pas bien non plus. Nous marchons, nous courrons. Rien ne nous poursuit si ce nâest la peur mais⊠elle est en nous. Que fuyons-nous au juste ? Quand la lumiĂšre redevient normale, je suis de nouveau allongĂ© sur ce grabat dans cette cellule. Un peu plus loin, jâentends des gĂ©missements. Je reconnais ceux de Montague.
2Úme jour :
-Nous avons repris notre errance avec Montague, comme si de rien Ă©tait, comme si nous nâĂ©tions jamais tombĂ©s au fond de cette tombe. Puis, une douleur cinglante me cloue au sol. Comme si on mâenfonçait une lame dans le crĂąne. Je hurle. Ma vision se trouble. Autour de moi, tout se dĂ©double, comme si tout se reflĂ©tait soudain dans un miroir, dans une symĂ©trie glacĂ©e qui mâĂ©voque la mort. Je me tourne vers Montague et⊠son double symĂ©trique. MĂȘme sa voix est dotĂ©e dâun reflet inversĂ©. Je sens quâil tente de mâapaiser mais comme tous ses mots sont doublĂ©s de leur strict inverse je ne sais rien de ce palindrome dysharmonieux ! Une nouvelle douleur me fait tomber Ă nouveau quand jâai cette rĂ©vĂ©lation que la symĂ©trie est en rĂ©alitĂ© lâopposĂ© de lâharmonie. Câest la mort. Un faux ordre. Un ordre illusoire. Je veux la vie⊠Mais la vie nâest-elle pas lâopposĂ©e de la mort ? Vie et mort sont-elles symĂ©triques ?
-Et je ne dois mon salut quâĂ une nouvelle menace. Alors que je me tords de douleur par terre, Montague et son double me secouent, me relĂšvent de force et me montre du doigt un homme⊠ou une femme, qui se prĂ©cipite vers nous, les mains en avant. Il ou elle nâa pas de double car⊠il ou elle sont dĂ©jĂ doubles et symĂ©triques. Il ou elle me saisit au cou et commence Ă mâĂ©trangler. Alors, ma vision redevient normale. Suffocant, je croise le regard de Montague qui est redevenu lui-mĂȘme. Alors, dans un sursaut dâĂ©nergie, je flanque un coup de boule Ă mon adversaire qui me relĂąche aussitĂŽt et sâĂ©croule au sol. Il se relĂšve presque aussitĂŽt et, alors que Montague et moi approchons, il sâexcuse et se prĂ©sente. Il sâappelle QuantĂ©. Et comme nous, il est coincĂ© ici depuis⊠Il ne sait plus. Il cherche dĂ©sespĂ©rĂ©ment une sortie dont il est convaincu quâelle se trouve dans un enchaĂźnement de symboles dissimulĂ©s un peu partout dans ces ruines. Pourquoi pas, aprĂšs tout ?
3Úme jour :
-QuantĂ© semble en avoir fini avec sa crise de dĂ©mence et se rĂ©vĂšle un compagnon de route finalement agrĂ©able. Il semble instruit dans les arts mystiques et symboliques et nous Ă©changeons quelques secrets relatifs Ă nos traditions respectives. Montague tente de prendre part Ă la conversation en affirmant que son fameux livre recĂšle lui aussi bien des secrets. Je veux bien le croire. Mais nous devons stopper notre discussion quand nous arrivons dans une sorte de cour. Au milieu, un arbre sâĂ©lĂšve et, assez haut, une femme au regard vide est assise sur une branche. Elle bouge bizarrement. On dirait quâelle va tomber. Nous lui disons de faire attention mais exige que nous la laissions tomber, au sens propre. Nous tentons de la raisonner mais rien nây fait. On dirait quâelle nâattendait que nous pour se laisser basculer dans le vide. Nous tentons de la rattraper au vol mais⊠trop tard !
-Plusieurs de ses os sont brisĂ©s. Il y a du sang tout autour dâelle. Nous nous regardons avec QuantĂ© et Montague et⊠nous savons quâil nây a plus grand-chose Ă faire. La femme sourit. Elle vient de sâĂ©vader.
4Úme jour :
-Nous nous nourrissons de ce que nous trouvons. Des petits animaux comme des rats ou des lĂ©zards, mais surtout des baies et des racines. Il y a manger ici, certes, mais pas assez pour que nous ne souffrions pas de la faim. Et QuantĂ© a Ă©tĂ© assez imprudent pour se jeter sur ces baies quâaucun de nous ne connaissaient. La sanction nâest pas mortelle mais QuantĂ© aura passĂ© plusieurs heures Ă se vider par tous les orifices possibles de sang et autres matiĂšres organiques puantes. Et quâavons-nous pu faire, avec Montague, si ce nâest le soulager en lui donnant de lâeau fraĂźche ?
-Nous aurions vraiment aimĂ© avoir plus de temps, pouvoir attendre que QuantĂ© aille mieux. Mais, soudain, la terre sâest mise Ă trembler. CâĂ©tait plus quâun sĂ©isme. La terre sâest soulevĂ©e et⊠câest comme si elle sâĂ©tait mise Ă nous poursuivre. Avec Montague, nous nâavons pas cherchĂ© Ă comprendre. Nous avons pris QuantĂ©, chacun par un bras, et nous sommes mis Ă courir aussi vite que possible. Ce nâest que lorsque nous avons regagner un couloir dallĂ© de pierre que la terre a cessĂ© de nous suivre. Il Ă©tait clair que nous pouvions plus revenir en arriĂšre maintenant.
5Úme jour :
-Ce couloir semble sans fin. De part et dâautre il nây a que des cellules mais aucune bifurcation. Nous ne pouvons quâaller tout droit ou revenir sur nos pas et affronter ce⊠« sĂ©isme vivant » ? Mais comment poursuivre notre chemin quand le passage est soudain barrĂ© par un inextricable aux Ă©pines acĂ©rĂ©s ? Alors, nous utilisons des bouts de bois traĂźnant ça et lĂ pour repousser un peu les taillis et nous frayer un passage.
-Mais ces broussailles ne sont pas le seul danger auquel nous devons faire face. QuantĂ© est le premier Ă hurler quand une multitude dâinsectes jaillit des buissons et se met Ă nous courir dessus, rentrant dans nos vĂȘtements mais aussi nos oreilles, nos bouches. Nous tentons de courir malgrĂ© les Ă©pines mais câest impossible. Nous sortons de ces buissons en rampant. Nous saignons de partout et vomissons des insectes et autres mille-pattes. Je ne parviens pas Ă retenir mes larmes. Les autres non plus.
6Úme jour :
-Nous avons besoin de repos. Et pour cela, nous avons besoin dâun endroit Ă peu prĂšs sĂ©cure. Nous le trouvons sous la forme dâune cellule dont le toit sâest Ă©croulĂ©. Nous voyons le ciel et cela nous redonne une sorte dâespoir, illusoire. Nous avons faim et, on ne lây reprendra plus, QuantĂ© se retient de se jeter sur cet Ă©trange lierre qui court sur les murs. Ce nâest pas du lierre. Ce nâen est plus. Je vois lĂ des dĂ©formations qui sont la marque de lâĂ©grĂ©gore. Je nây avais pas prĂȘtĂ© attention jusque-lĂ mais cet endroit est comme saturĂ© dâĂ©grĂ©gore. Lâemprise est trĂšs prĂ©sente. Peut-ĂȘtre est-ce lĂ lâexplication Ă tous ces mystĂšres ?
-Nous avons repris notre chemin et, cette fois, QuantĂ© et moi sommes plus attentifs Ă la prĂ©sence dâĂ©grĂ©gore. RĂ©alitĂ© ou auto-suggestion, nous en voyons de plus en plus les traces, les manifestations. Soucieux de ne pas ĂȘtre en reste, Montague nous fait part lui aussi de ses observations mais⊠nous savons bien quâil nâentend rien aux arts mystiques et occultes. Pourtant, nous aurions dĂ» prĂȘter plus attention Ă ces dires quand nous sommes tombĂ©s dans ce⊠piĂšge ? Deux lames bizarrement montĂ©es en anneaux ont bien failli nous trancher en deux. Et, dans les ombres, nous avons pu apercevoir la silhouette dâun horla. Ne pas nous avoir tuĂ© ne sembla pas lui poser de problĂšme. Il semblait mĂȘme sen moquer. Il quitta les lieux. Nous ne le vĂźmes pas vraiment mais nous avons entendus son rire sâĂ©loigner.
7Úme jour :
-Ce matin, nous avons Ă©tĂ© rĂ©veillĂ© par des ricanements. Nous avons reconnu ceux du horla dâhier. Et ces ricanements ont aussitĂŽt Ă©tĂ© suivi du sons de cornes et de trompes et⊠dâaboiements. Les ricanements gagnent en puissance. Les chiens se rapprochent. Nous pouvons les voir. Câest une vĂ©ritable meute enragĂ©e. DerriĂšre eux, des crĂ©atures vaguement humaines et difformes les Ă©nervent, les excitent, en soufflant dans leurs instruments. Et encore derriĂšre eux, immense et ricanant, le horla de boue et de bois. Nous courons ! Droit devant nous ! nous nâavons aucune idĂ©e de lĂ oĂč nos pas nous mĂšnent. Lâespace et le temps semblent sâĂ©tirer. Par moment, nous pensons les avoir semĂ©s puis ils rĂ©apparaissent. Parfois, nous voyons lâespace sâĂ©tirer entre eux et nous et nous espĂ©rons que le destin joue enfin en notre faveur. En vĂ©ritĂ©, cette course semble sans fin. Nous courons depuis des heures⊠des jours ? Je ne sais plus. Je ne sais pas non plus dâoĂč nous vient cette Ă©nergie qui nous permet de ne pas nous Ă©crouler mais, au bout dâun moment, au dĂ©tour dâun couloir, une sortie ! nous nous jetons dehors. Nous sommes enfin⊠dehors ! Nous nâattendons pas de savoir si le horla et sa meute peuvent ou non quitter cet endroit. Nous nous enfonçons dans la forĂȘt. Nous courons encore pendant un long moment puis, peu Ă peu, nous ralentissons et nous mettons Ă marcher. Enfin, au bout dâun moment, lâun dâentre nous finit par prendre la parole. Aucun de nous nâa vraiment compris ce qui sâĂ©tait passĂ©. Puis, sans dire un mot, QuantĂ© nous fait signe quâil va maintenant continuer sa route seul. Un peu plus tard, Montague me quitte aussi, avec un sourire. Je marche⊠toujours tout droit, vers je ne sais oĂč. Seul.
Commentaires de Thomas :
A. « -Tribale est une femme Ă lâair distant et indiffĂ©rent. Comme les autres, elle cherche la sortie depuis⊠elle ne sait plus. Elle pense ĂȘtre morte et en Enfer en raison de son passĂ© honteux. Quel passĂ©Â ? Elle a oubliĂ©. Au dĂ©but, elle pensait ĂȘtre ici pour retrouver la mĂ©moire et la sortie mais elle nây croit plus dĂ©sormais. »
Ce PNJ est tout Ă fait Millevaux :)
B. « -Mais ces broussailles ne sont pas le seul danger auquel nous devons faire face. QuantĂ© est le premier Ă hurler quand une multitude dâinsectes jaillit des buissons et se met Ă nous courir dessus, rentrant dans nos vĂȘtements mais aussi nos oreilles, nos bouches. Nous tentons de courir malgrĂ© les Ă©pines mais câest impossible. Nous sortons de ces buissons en rampant. Nous saignons de partout et vomissons des insectes et autres mille-pattes.  »
Avec le suicide du haut de l'arbre puis cette scĂšne, on est bien dans Millevaux, c'est cool :)
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L'APPEL DU 18 DE CHIEN
Suite des mésaventures légÚres des garnements de Mejgorié. Un récit et un enregistrement de partie par Claude Féry
(temps de lecture : 3 min / temps dâĂ©coute : 2H06)
Joué le 23/06/2020
Le jeu : Trois Ă©tĂ©s Ă Bonneville, un jeu de rĂŽle intimiste, aventureux et plein dâespoir, par Chestel
L'univers : la forĂȘt de Millevaux
Suite de Premier été dans le ventre de Mejgorié
Lire/télécharger le mp3 (partie 1)
Lire/télécharger le mp3 (partie 2)
(C) Claude FĂ©ry
Scénario :
Voici le plan n2 transposé pour notre table.
(C) Claude FĂ©ry
L'histoire :
V utrobe Mezhgor'ya
Vtoroye leto
Notre session a produit une fiction de 2h10.
Nous avons joué 4 des 5 étapes du plan n 2.
Nous avons convenu de jouer le troisiĂšme Ă©tĂ©, avec Little HĂŽ-Chi-Minh-Ville dans la mesure oĂč HĂ©lio Vassily et Elisheba ont dĂ©cidĂ© de libĂ©rer les Dormeurs de MejgoriĂ©.
Gabrielle a baptisé l'épisode l'appel du 18 de chien
(C) Claude FĂ©ry
HĂ©lio, gangrenĂ© par le bois se transformait en bouc, Elisheba en Kitsune. Kwolia les a libĂ©rĂ© de leur Ă©tat bestial afin qu'ils puissent entrer librement dans MejgoriĂ© en les mordant aprĂšs qu'il ait Ă©tĂ© lui-mĂȘme mordu par le Visage Familier qui nous poursuivait dans la chĂȘnaie.
(C) Claude FĂ©ry
J'ai mis en jeu ce poĂšme
J'allais solitaire, ainsi qu'un nuage
Qui plane au dessus des vaux et des monts.
Quand soudain, je vis, en foule,
Des jonquilles d'or, une légion,
A cÎté du lac, sous les branches grises,
Flottant et dansant, gaiement Ă la brise.
Serrées comme sont au ciel les étoiles
Qu'on voit scintiller sur la voie lactée,
Elles s'Ă©tendaient, sans un intervalle, https://live.staticflickr.com/65535/52978541683_e19baca7d9_o.jpg
Le long du rivage, au creux d'une baie.
J'en vis d'un coup dâĆil des milliers, je pense,
Agitant la tĂȘte, en leur folle danse.
Les vagues dansaient pleines d'Ă©tincelles
Mais elles dansaient plus allĂšgrement.
Pouvais-je rester, poĂšte, auprĂšs d'elles,
Sans ĂȘtre gagĂ© par leur enjouement ?
LâĆil fixe, Ă©bloui, je ne songeais guĂšre
Au riche présent qui m'était offert.
Car si je repose, absent ou songeur,
Souvent leur vision, à béatitude !
Vient illuminer lâĆil intĂ©rieur
Qui fait le bonheur de la solitude.
Et mon cĆur alors, dĂ©bordant, pĂ©tille
De plaisir, et danse avec les jonquilles.
William Wordsworth, Les Jonquilles, dans le recueil PoĂšmes
(C) Claude FĂ©ry
Et celui-ci
Je n'ai jamais cessé de marcher
vers mes racines d'homme
sans sourciers, sans boussole
sauf ma colÚre puisée dans le poumon du peuple
et les clameurs inédites de l'histoire
sauf mes yeux
n'ayant rien perdu
du désastre des ruelles
et de la rareté du pain
J'avais mal Ă mes racines
Abdellatif LaĂąbi, extrait du recueil L'arbre de fer fleurit
Gabrielle joue Vassili (C) par Claude FĂ©ry
Commentaires de Thomas :
Jâai Ă©coutĂ© la premiĂšre partie de deuxiĂšme Ă©tĂ© Ă MejgoriĂ©Â ! Voici mes retours :
A. La pousse de pierre au fond de la main, super manifestation de lâemprise
B. Super monologue de tes joueuses
C. Si jâai bien compris, vous avez gardĂ© seulement la fibre intime du jeu lors de cette session.
Alex joue Elisheba (C) par Claude FĂ©ry
Claude :
A. Effectivement la page 29, notre seconde rencontre Ă©tait avec le gĂ©nĂ©ral Ă la tĂȘte de cette unitĂ©, le docteur, qui a fait de nous ses cobayes, (billes de bois).
Nous avons envisagé notre libération non sous un angle réaliste, mais en nous appuyant sur une évocation des sévices que nous subissions, nous avons envisagé une ligne de fuite qui convoque le fantastique et, je l'espÚre, une forme de poésie, en résonance avec l'intitulé de la campagne.
Gabrielle joue Vassili (C) par Claude FĂ©ry
Nous aurions pu ajouter des pĂ©ripĂ©ties, notamment celles prĂ©vues autour du refuge du furet (pages 40, 41 et 42), mais j'ai proposĂ© Ă la table de nous arrĂȘter sur cette tonalitĂ© « enchantĂ©e ».
La suite ?
Les envies de la table, dans le désordre :
- Le playtest de la nouvelle mouture de Damnatio,
- The clay that woke,
- Pariah
- un carnet d'Ăcheveuille sur une tonalitĂ© prĂ© Millevaux / Jardins des esprits, inspirĂ©e de SCP ou de RWBY ou directement dans l'univers en cours de dĂ©veloppement d'Alex avec l'aide de Gabrielle.
B. Oui de trĂšs beaux moments
C. Nous avons joué les tonalités un peu dans le désordre.
(C) Claude FĂ©ry
Thomas :
1. Tout un programme ! Qu'est-ce que SCP et RWBY ?
(C) Claude FĂ©ry
Claude :
1. SCP est un univers de jeu oĂč une organisation la SCP recense et neutralise des manifestations paranormales. Fandom trĂšs actif avec toutes les fiches des bestioles.
RWBY est une série animée ou quatre jeunes apprenties maßtrisent les pouvoirs issus de poussiÚres de cristaux pour lutter contre les méchants.
D. Nous prĂ©parons un systĂšme de rĂ©solution qui reprend une discussion avec Alex sur ses attentes Ă la table dĂ©diĂ© Ă un futur carnet d'Ăcheveuille. [Note de Thomas : il est sorti depuis, il s'appelle Marche II]
(C) Claude FĂ©ry
Thomas :
Jâai Ă©coutĂ© la deuxiĂšme partie !
Voici mes retours :
A. Sympa le moment oĂč tu bugue en rĂ©citant la mĂȘme proposition en boucle
B. Une boisson qui peut avoir un goĂ»t et un aspect particulier, câest du kĂ©fir
C. La transformation de ton personnage en Visage Familier est bien flippante
Xavier joue HĂ©lio. (C) Claude FĂ©ry
(C) Alex Begyn
(C) Claude FĂ©ry
(C) Claude FĂ©ry
(C) Claude FĂ©ry
(C) Alex Begyn
(C) Claude FĂ©ry
(C) Claude FĂ©ry
(C) Alex Begyn
(C) Claude FĂ©ry
(C) Claude FĂ©ry
(C) Claude FĂ©ry
Représentation de Hélio. (C) Xavier Féry
(C) Claude FĂ©ry
(C) Alex Begyn
(C) Claude FĂ©ry
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TROISIĂME ĂTĂ DANS LE VENTRE DE MEJGORIĂ
Le troisiÚme été est à son orée, les enfants ont grandi et la Russie de Mejgorié a totalement fusionné avec l'enclave panasiatique de Little HÎ-Chi-Minh-Ville. Le cycle se boucle sur une totalité douce-amÚre et slavo-khmer.
(temps de lecture : 1 min / temps dâĂ©coute : 1h58)
Joué le 27/06/2020
Le jeu : Trois Ă©tĂ©s Ă Bonneville, un jeu de rĂŽle intimiste, aventureux et plein dâespoir, par Chestel
Jeu annexe : Little HĂŽ-Chi-Minh-Ville, du panasiatique-dystopique-biopunk par Thomas Munier
Univers : la forĂȘt de Millevaux
Ars Electronica, cc-by-nc-nd
Suite de L'Appel du 18 de Chien
L'histoire :
V utrobe Mezhgor'ya
Tret'ye leto
Ou
nowknong tikrong hau chi mi nh
rdauv ktaw tibei
Je joue kaula, commissaire du peuple, Khmer, un artifice.
Gabrielle joue Farben, un techie.
Xavier joue He li nanh, surnommé Prisme, un organo.
Alex joue E Li Ssa Baï, surnommée Confiance, une caïd
Nous avons joué notre troisiÚme été dans le ventre de Mejgorié cet aprÚs-midi avec Little HÎ Chi Minh Ville.
Une session qui a pleinement satisfait les joueuses.
Nos commandos ont délivré les Dormeurs de leur sommeil artificiel, mais à quel prix ?
Deviendront-ils des crĂšve la faim?
A quelle créature ont ils livré passage dans le sillage de leur mission ?
KaulaĂŻ, a fusionnĂ© avec E Li Ssa BaĂŻ pour repousser le horla, mais que deviendra-t-elle maintenant qu'elle a deux cĆurs, dont un de hantu, elle qui dĂ©jĂ entendait la voix des morts ?
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LA MAISON OĂ PERSONNE NâHABITE
Un solo court, et inhabituellement mystérieux et contemplatif, par Damien LagauzÚre
(temps de lecture : 2 min)
Joué le 26/12/2019
Le jeu : Home, par Shrinebuilder, un court jeu solo sur la mémoire, la nostalgie et les difficultés familiales.
Univers : la forĂȘt de Millevaux
road less trvled, cc-by-nc
L'histoire :
Ces derniers temps, je suis La Brindille. Je ne sais pas pourquoi on mâappelle comme ça. Je nâai rien dâune brindille. La vie est rude dans ces bois mais je mâen contente. En fait, je passe le plus clair de mon temps Ă rĂȘver. Et mes rĂȘves, ces derniers temps, me disent de rentrer chez moi, lĂ oĂč je suis nĂ©, lĂ oĂč jâai grandi. Alors, jâai pris la route mais⊠je ne sais pas vraiment pour oĂč.
Pourtant, jâai des images qui me reviennent⊠de trĂšs trĂšs loin. Je vois une maison. Dâun cĂŽtĂ©, cela me remplit de joie mais dâun autre jâai peur. Que vais-je trouver ? Et pourquoi suis-je parti ?
Jâai marchĂ© longtemps et traversĂ© bien des villes, des villages, parfois en ruines. Mais lĂ , je sais que câest le bon endroit. Ce ne sont pas tant des souvenirs qui remontent que des Ă©motions. Ce ne sont pas des images, ni des sons. Ce sont des sentiments qui ne trompent pas. Câest ici que jâai grandi, dans ces montagnes. Mon regard se porte sur une grosse araignĂ©e filant entre mes jambes et je me demande si jâai bien fait de venir lĂ .
Plus tard, je marche dans les bois prĂšs de la maison oĂč jâai grandi, mĂ©ditant sur ce qui mâa attirĂ© Ă cet endroit. Je me souviens vaguement avoir fait un rĂȘve il y a quelques mois Ă propos de ces bois, d'une figure et de la maison de mon enfance.
Un rĂȘve mâa dit de venir mais lâĂ©veil me dit de partir. Pourtant, je reste. Je ne parviens pas Ă me dĂ©cider Ă quitter ces lieux dĂ©solĂ©s, abandonnĂ©s. Jâai peur. Cet endroit est-il vraiment aussi Ă lâabandon quâil en a lâair ? Jâai lâimpression de ne pas ĂȘtre seul. Jâai lâimpression quâon mâobserve depuis⊠un rĂȘve. Jâai peur que quelquâun en train de rĂȘver ne mâespionne.
Comme je me dirige vers ce qui me semble ĂȘtre ce qui reste de la maison de mon enfance, jâaperçois quelqu'un. Sa tĂȘte me dit quelque chose. Il me sourit. Il dit sâappeler Sieben. Ăa ne me dit rien. Il me propose une partie dâosselets. Ăa me rappelle quelque chose.
Nous nous quittons aprĂšs quelques parties. Je retourne vers cette maison, « ma » maison ? C'est le crĂ©puscule, et je mâapproche, plein dâhĂ©sitation. Cette maison est mal en point et a besoin de travaux.
Je gravis quelques marches. Quelquâun que je ne connais pas me parle Ă travers la porte entrouverte. Il y a une chaĂźnette. Je nâai pas le temps de prononcer un mot que lâautre crie : « Il nây a personne ici ! Personne ne vit plus ici ! » Pourtant, il vit lĂ , luiâŠ
Je fais demi-tour. Je tourne et je vire dans ce village abandonnĂ©. Mes pas me ramĂšnent toujours non loin de cette maison. « Ma » maison ? Ce ne sont pas de souvenirs, plutĂŽt des intuitions. Jâai vĂ©cu ici et il sâest passĂ© quelque chose. Quoi ? OĂč est passĂ© ma⊠famille ? Parfois, jâai lâimpression de voir de la lumiĂšre Ă travers les fenĂȘtres de certaines maisons. Mais, je crois que ce nâest quâune impression ou seulement des reflets. Je crois que je suis seul ici. Seul avec le joueur dâosselets et lâautre habitant. Je ne suis pas seul mais qui sont-ils ? Qui sont-ils, pour moi ? Lâair se charge alors dâune mĂ©lodie. Ăa me dit quelque choseâŠ
Et soudain, je me rĂ©veille. Je suis toujours dans ce village abandonnĂ© mais ailleurs. Je suis lĂ , debout et ma tĂȘte est envahie par toutes ces choses qui ont dĂ©chirĂ© ma famille. Alors, je cours ! Je cherche ma maison. Les ronces et les branches dĂ©chirent mes vĂȘtements et Ă©gratignent mes bras. Mais alors, mais câest un rĂȘve, je trouve un de mes parents, et tombe dans ses bras. Et il me rĂ©conforte.
Mais câest un rĂȘve⊠Et dans mon rĂȘve, je traverse les bois, jusquâĂ un champ. Au loin, je vois de la lumiĂšre aux fenĂȘtres dâune maison. Je me remets Ă courirâŠ
La nuit derniĂšre, j'ai fait un rĂȘve Ă©trange ... J'Ă©tais un enfant, perdu dans les pins, et jâessayais de rentrer Ă la maison avant que l'obscuritĂ© ne tombe. Je savais oĂč jâallais. Je courrais en direction de cette maison, ma maison. « Ma » maison ?
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LE RITUEL DE PASSAGE
Encore une fresque solo épique centrée sur les pratiques magiques déviantes avec le zeste de folie pure qu'il convient au crossover avec les univers de Batronoban ! Un récit par Damien LagauzÚre
(temps de lecture : 45 minutes)
kr, libre de droits
Joué le 28/12/2019
Les jeux utilisés:
Les crimes ont été « joués » avec Arkham Noir
Les journaux ont été joués avec The Thousand Years Old Vampire.
Les lettres ont été joué avec la campagne Quill : Ink & Shadows.
Les lettres de la Mort ont Ă©tĂ© jouĂ©es avec The Reaperâs Almanac.
Corso a Ă©tĂ© jouĂ© avec MantoĂŻd Universe et Le Tarot de lâAventure ImprĂ©vue et Bois-Saule.
Univers : la forĂȘt de Millevaux
Lâhistoire:
Je suis « Gragasanil » Corso. Je suis un Soar, chevalier dâor en exil et collectionneur de machines Ă Ă©crire. Mon but dans la vie : tout savoir ! Je veux percer les secrets de lâunivers et dâAzathoth. Mais, pour lâinstant, je veux tout savoir sur la mort de Roularik et Putium, respectivement CafaroĂŻde, chevalier dâor en exil lui aussi, et Clone prĂȘtre dâAzathoth de leur Ă©tat. Cette affaire ne mâaurait concernĂ© en rien si, Azathoth seul sait pourquoi, je ne mâĂ©tais retrouvĂ© tĂ©lĂ©portĂ© sur la premiĂšre scĂšne de crime.
En tant quâancien chevalier dâor, jâavais entendu parler de Roularik mĂȘme si je ne lâavais jamais rencontrĂ©. Le Joueur, mĂȘme si cela lui paraissait plus que capillotractĂ©, se rappela les Watchmen et se demanda si quelquâun ou quelque chose nâen avait pas aprĂšs les chevaliers dâor exilĂ©s justement. Aussi, il devenait lĂ©gitime que je mĂšne lâenquĂȘte, ne serait-ce que pour Ă©ventuellement sauver ma peau de porc.
Pour des raisons historiques qui maintenant nous Ă©chappent un peu Ă tous, Azathoth partage son royaume du Chaos avec la forĂȘt de Millevaux, tout Ă la fois domaine et avatar de Shub-Niggurath. Le corps de Roularik se trouvait donc dans les bois les plus profonds. LĂ , je remarquai des marques laissĂ©es par la foudre sur un arbre. Or, ces marques diffĂ©raient de celles qui avaient foudroyĂ© le chevalier. LĂ , sur le tronc, un symbole Ă©tait tracĂ©. Et, cachĂ©es au pied de lâarbre, je trouvais Ă©galement un paquet de lettres. RĂ©digĂ©es Ă diffĂ©rentes dates par diffĂ©rentes personnes, elles avaient nĂ©anmoins en commun dâĂ©voquer les Anciens, la forĂȘt ainsi quâun ouvrage appelĂ© le Vir Stellas.
De retour dans lâInterzone, je me rendis chez mon ami Randolf Carter et lui fit part de mes dĂ©couvertes. Cela lui Ă©voqua un Ancien OubliĂ©. Je pensais Ă Shub-Niggurath bien sĂ»r et Carter me le confirma. Cette mort Ă©tait donc liĂ©e Ă la ChĂšvre Noire. Mais comment et pourquoi ? Carter me fit alors goĂ»ter une de ses drogues, un « cadeau » dâun de ses fournisseurs MantoĂŻdes. LĂ , sous lâeffet de la drogue psychĂ©dĂ©lique, le temps sâaccĂ©lĂ©ra et je me retrouvais dans une salle piĂ©gĂ© dâun donjon technomagique. Il sâagissait lĂ dâune ancienne arĂšne dĂ©sertĂ©e. LĂ , je trouvais un journal entre les mains du cadavre horriblement mutilĂ© et mĂ©connaissable dâun homme-porc.
Et en substance, voici le contenu du journal :
« Graga veut dominer le monde. Parfois, il pĂšte les plombs et doit ĂȘtre calmĂ©. Jâai rĂ©ussi Ă immobiliser, mais pour combien de temps, la structure dans laquelle il baigne en bloquant un mĂ©canisme avec un vinyle de void mĂ©tal. JâespĂšre quâil ne mâen veut pas trop. Yargalac veut que jâutilise un des sorts contenu dans mon livre pour lâaider dans sa vengeance mais⊠les voies dâAzathoth sont impĂ©nĂ©trables et cela ne marche pas comme ça. Ce nâest pas aussi simple. Je ne suis pas sĂ»r quâil lâait vraiment ni compris, ni acceptĂ©. Yargalac est toujours en quĂȘte dâartefacts dâorigine voyvode. Aussi, il mâinvite dans un tripot en plein cĆur de lâInterzone et me fait part dâune rumeur concernant des trĂ©sors repĂ©rĂ©s dans la forĂȘt. Je me mĂ©fie car câest un des fameux plans de Yargalac qui mâont mis face au SumĂ©rien. Mais son enthousiasme me gagne et nous partons pour la forĂȘt. LĂ , je suis pris dâun Ă©trange malaise. Je me sens mal. Yargalac ne montre aucun signe de gĂȘne. Je me concentre, regarde et Ă©coute partout autour de moi. Mais câest au-dessus que se trouve la source de mon mal-ĂȘtre. Nous passons sous un groupe dâarbres auxquels sont suspendues dâinnombrables petites poupĂ©es faites de brindilles et de chiffons. Je les montre Ă Yargalac qui sâen moque Ă©perdument. Pourtant, le vent les fait chanter dans cette Langue Putride qui me fait comprendre que nous sommes lĂ en un territoire appartenant Ă des adorateurs de Shub-Niggurath. Que dois-je comprendre ? Suis-je devenu allergique Ă la Langue Putride ou dois-je me mĂ©fier des serviteurs de la ChĂšvre Noire ? Nous finissons par trouver ce que nous cherchons mais il ne sâagit pas des trĂ©sors espĂ©rĂ©s. Aussi, câest sans regret que je laisse toutes ces babioles Ă Yargalac. Yargalac nâest plus. En vĂ©ritĂ©, je mâen moque un peu mais, pourtant, mes pas me portent vers lâune des demeures que nous avons partagĂ©e Ă une Ă©poque oĂč nous Ă©tions beaucoup plus actifs dans notre chasse aux artefacts voyvodes. En vĂ©ritĂ©, je mâattendais Ă ce que cet endroit soit de nouveau occupĂ© mais il nâen est rien. Tout a Ă©tĂ© laissĂ© Ă lâabandon. Je en sais pas si les lieux ont Ă©tĂ© occupĂ©s depuis notre dĂ©part mais il ne reste rien. Jâai lâimpression dâĂȘtre dans une boĂźte vide⊠comme mon ĂąmeâŠÂ »
Quâest-ce que tout cela pouvait bien signifier ? Les lettres relatives au Vir Stellas mentionnaient un rituel sanglant automutilatoire, des crĂ©atures venues dâune autre dimension, Nyarlathotep et Millevaux. LĂ , il sâagissait de retrouver des artefacts voyvodes dans la forĂȘt. Mais ce fameux Yargalac semblait mort et lâauteur de ce journal restait pour lâheure anonyme. Mais cette histoire Ă©tait elle aussi liĂ©e Ă Shub-Niggurath et Millevaux.
Je quittais cet endroit aprĂšs avoir dĂ©couvert lâentrĂ©e dâun tunnel souterrain. Je regagnais donc lâInterzone mais non sans avoir Ă©tĂ© confrontĂ© Ă lâexistence du TroisiĂšme Rituel Aklo dont, Ă ce moment-lĂ , je ne comprenais ni la prĂ©sence ni la signification.
Les choses devinrent Ă peine moins floues quand je pris connaissance de la mort de Putium, Ă©galement foudroyĂ© dans la forĂȘt. Pas de marques sur un arbre cette fois mais un passage dissimulĂ© menant jusquâĂ un mur de hiĂ©roglyphes parmi lesquels je reconnus le symbole du TroisiĂšme Rituel Aklo. Je trouvais lĂ Ă©galement un autre journal, beaucoup plus court celui-lĂ Â :
« Voyvodes ! Mal TĂȘte ! Langue Putride ! Batterie⊠Vide ! Yargalac, mort ! [âŠ] Sang pourri ! Malade ! Sang Putride de langue Putride ! Malade ! Pas boire sang de Langue Putride ! [âŠ] Sang Putride partout ! Malade ! Batterie vide⊠Sommeil⊠Oubli. [âŠ] Animaux forĂȘt fuient ! Courent loin ! Volent haut ! Animaux forĂȘt peur de moi ! »
Je ne comprenais rien. Je suivis le tunnel et, Ă sa sortie, me retrouvais face Ă une tombe envahie par la vĂ©gĂ©tation. MalgrĂ© cela, lâĂ©pitaphe Ă©tait lisible. Il sâagissait de la tombe dâun certain Moulesanil, Soar Cyborg. Et lâĂ©pitaphe disait : « LâĂ©lectricitĂ© garantit la rĂ©forme biscornue. » Je notais toutefois quâil y avait un Ă©cart dans le mot « biscornue » qui pouvait donc aussi ĂȘtre lu « Bis Cornue ». Deux cornes ? Comme ce Horla qui mâapparut alors que se mit soudain Ă tomber un violent orage nâayant rien de naturel ? Et sur la tombe, invisible jusquâalors, se mit Ă luire le symbole du TroisiĂšme Rituel Aklo. Je sortais mon flingue et mâapprĂȘtais Ă quitter ces bois, espĂ©rant que le Horla nâen aurait pas aprĂšs moi. Pas de chance, il me suit. Coup de chance, jâai Ă©tĂ© bien inspirĂ© de dessiner dans lâair, du bout de mon flingue, le symbole Aklo qui lâa fait fuir.
De retour dans lâInterzone, je mâenfermai chez moi et me plongeai dans le paquet de lettres, y cherchant un lien avec les deux journaux que jâavais trouvĂ©s. La premiĂšre avait Ă©tĂ© Ă©crite par un certain Damon Hesse dont je sais quâil sâagit lĂ dâun des pseudonymes du Joueur. Il sâadressait Ă un certain Pierre :
« Londres, le 3 septembre 1887
Cher PierreâŠ
Je suis encore Ă Londres. Je pensais rentrer plus tĂŽt mais jâavoue consacrer un temps considĂ©rable Ă lâun de ses opus dont je fais la collection. Vous connaissez ma passion pour les livres anciens, notamment ceux traitant de sujets Ă©sotĂ©riques, occultes mĂȘme, soit tout ce qui se situe Ă la frontiĂšre de la rationalitĂ©. Nombre de mes collĂšgues refusent de leur accorder le moindre intĂ©rĂȘt. Pourtant, ces ouvrages existent et ils sont des tĂ©moins de leur temps, eux aussi. Ainsi, un de ces ouvrages Ă©tait mis aux enchĂšre Ă Londres. Je me suis empressĂ© de mây rendre et dâen faire lâacquisition. La lutte fut Ăąpre. Je nâĂ©tais pas le seul intĂ©ressĂ© par le fameux Vir Stellas. Mais, aprĂšs avoir payĂ© le prix fort dans tous les sens du terme, je repartais avec lâouvrage.
Jâavais prĂ©vu de rendre visite Ă quelques vieux amis mais, finalement, je ne quitte quasiment plus ma chambre dâhĂŽtel. Je consacre en effet toutes mes journĂ©es, et mes nuits, Ă lâĂ©tude du Vir Stellas. Ătude est un mot peut-ĂȘtre bien inadaptĂ© car, en vĂ©ritĂ©, je « subis » littĂ©ralement lâemprise de cet Ă©trange tome. En effet, aprĂšs des heures et des jours plongĂ© dans ses pages, que puis-je en retirer si ce nâest dâĂ©tranges sentiments mĂȘlĂ©s faits de fascination et de⊠dĂ©goĂ»t.
En vĂ©ritĂ©, force mâest de reconnaĂźtre quâune Ă©norme partie du contenu du Vir Stellas me demeure interdite. Ce texte nâest pas uniquement rĂ©digĂ© en anglais. Et je ne suis mĂȘme pas certain que toutes ses parties soient Ă©crites en langues⊠humaines. En vĂ©ritĂ©, le peu de comprĂ©hension que jâai de cette ouvrage est plus « intuitif » que rationnel et je tiens cette comprĂ©hension plus des songes inspirĂ©s par la vision de ces mots et de ces images que dâune vĂ©ritable « intelligence » des propos consignĂ©s. En effet, Ă la lecture, je ne comprends que dâinfimes parties de ce texte. La nuit par contre, quand jâarrive finalement Ă dormir, câest autre chose.
Pierre ! Jâai vu en rĂȘve ce que jâai lu dans le livre ! Une forĂȘt, mais pas une simple forĂȘt comme on en visite dans nos contrĂ©es. LĂ , câĂ©tait autre chose. CâĂ©tait.. dĂ©rangeant⊠Cette forĂȘt est le domaine de quelque chose de terrible. Je ne sais si câest le maĂźtre des lieux qui mâest apparu mais jâai vu, dans le ciel de cette forĂȘt, un gigantesque buste de pierre. Je ne me rappelle que de son casque Ă cimier rappelant celui dâun soldat romain. Son regard portait loin devant lui. Il ne mâa pas vu, je lâespĂšre. Pierre ! Avez-vous dĂ©jĂ entendu parler de ce livre ? Connaissez-vous le Vir Stellas ? Quelquâun vous a-t-il dĂ©jĂ racontĂ© une histoire comme la mienne ? Jâai besoin de votre aide, Pierre. Je dois en savoir plus. Accepteriez-vous de me recevoir et de me dire ce que vous comprenez du Vir Stellas ?
Pierre, jâai tardĂ© Ă poster cette lettre et peut-ĂȘtre que jâai bien fait. Jâai de nouveau rĂȘvĂ© du Vir Stellas la nuit derniĂšre. Ou plutĂŽt, jâai rĂȘvĂ© de cette forĂȘt quâil dĂ©crit. Je me suis de nouveau retrouvĂ© plongĂ© dans ses illustrations. Cette forĂȘt est plus quâune forĂȘt, je lâai dĂ©jĂ dit. Mais ce nâest pas seulement le domaine de la chose qui rĂšgne sur ces bois. Je crois que cette forĂȘt est LA chose en elle-mĂȘme, lâEntitĂ© dominante. Je nâai pas revu cet Ă©trange buste gĂ©ant dans les cieux de ces bois. Mais jâai ressenti autre chose. CâĂ©tait plus insidieux. CâĂ©tait⊠pire. Cet endroit baigne dans une « énergie » malsaine, Pierre. Une sorte dâĂ©ther que certains des habitants de ces bois manient grĂące des rĂšgles qui seraient interdites dans notre monde. Sont-ce ses rĂšgles qui sont dĂ©crites dans le Vir Stellas ? Jâai besoin de votre aide, Pierre, pour me dĂ©barrasser de ces rĂȘves, de ces tourments, mais aussi pour comprendre ce que sont ces bois, ce quâest⊠Millevaux !
Damon Hesse »
La seconde Ă©tait lâĆuvre dâun certain Paul. Je savais quâil sâagissait de Paul Singer, un autre avatar du Joueur :
« ChÚre Jemima,
Je suis en ce moment mĂȘme Ă Arkham, au chevet dâun ami mal en point. Toutefois, ce nâest pas de cela dont je veux te parler. Tu le sais, mes grands-parents sont dĂ©cĂ©dĂ©s rĂ©cemment. Ce nâest pas de cela non plus dont je veux te parler. Pourtant⊠Parmi toutes les choses quâils mâont laissĂ©, il y a une chose qui ne pourra quâattirer ton attention. Il sâagit dâun livre intitulĂ© Vir Stellas. Câest un recueil bien Ă©trange. Il est Ă©crit dans divers langages auxquels je ne comprends que peu de choses. Mais ce nâest pas tout, il y a aussi dâĂ©tranges hiĂ©roglyphes semblables Ă certains que tu mâas dĂ©jĂ montrĂ©s. Oui, je te parle dâoccultisme !
En ce qui me concerne, je ne peux prĂ©tendre avoir une vĂ©ritable comprĂ©hension du contenu de ce livre. Mais je ne suis pas le seul dans ce cas. En fait, le livre est accompagnĂ© dâune sĂ©rie de notes rĂ©digĂ©es par un ami de la famille. Il a Ă©tudiĂ© lâouvrage et confirme que le principal de ce que lâon peut saisir du Vir Stellas ne provient pas tant du texte que des visions que suscitent ses mots et ses gravures. Et jâai Ă©tĂ© moi aussi la proie de ces visions Ă©tranges. Et jâai vu, en songes, les choses dĂ©crites par Pierre Durand ainsi que par celui qui lui avait confiĂ© le livre. Et comme eux, jâai vu des fragments de cette forĂȘt quâils appellent Millevaux.
Mais ce nâest pas tout est loin de lĂ Â ! Durand a Ă©tudiĂ© aussi profondĂ©ment que possible le texte mĂȘme du Vir Stellas et il a mis en Ă©vidence les diverses Ă©tapes dâun rituel. Oui, un rituel qui permettrait de gagner cette Ă©trange forĂȘt non plus en rĂȘve mais en rĂ©alitĂ©. Or, pour cela, il faut ĂȘtre au moins deux. Câest pour cela que jâai besoin de toi. Je te sais fĂ©rue dâoccultisme et il nây a que toi pour mâaider Ă rĂ©aliser ce rituel.
Je sais que tu es trĂšs occupĂ©e. Je sais aussi que tu es trĂšs susceptible et que tu croiras peut-ĂȘtre que tout cela nâest quâune plaisanterie. Mais cela nâest pas le cas. Je te supplie de me croire. Jâai lu et relu les notes de Durand. Je me suis plongĂ©e encore et encore dans les gravures et les symboles Ă©tranges du Vir Stellas. Il y a des mots qui ne pourront que trouver Ă©cho en toi et achever de te convaincre. As-tu entendu parler de Millevaux ? Peut-ĂȘtre pas. Mais, as-tu entendu parler de Shub-Niggurath ? Je ne suis sĂ»r de rien Ă©videmment et câest aussi pour ça que jâai besoin de toi, de ton expertise. Mais il est dâores et dĂ©jĂ certain que cette forĂȘt de Millevaux et ce ou cette Shub-Niggurath sont intimement liĂ©s. Je veux en savoir plus. Et je sais que toi aussi, aprĂšs avoir lu cette lettre, tu voudras en savoir plus. Alors, mâaideras-tu Ă rĂ©aliser cette invocation ?
Je te lâai dit, je suis Ă Arkham en ce moment. Aussi, rejoins-moi ! LĂ , dans les bois bordant la Miskatonic, ou nâimporte quel autre endroit qui te semblera le plus propice, nous rĂ©aliserons ensemble ce rituel et percerons ces secrets qui ne furent que frĂŽlĂ©s par Durand. Toi comme moi ne pouvons que saisir cette incroyable opportunitĂ©. Rejoins-moi Ă Arkham. Je te montrerai le livre. Je te raconterai mes rĂȘves. Nous verrons Millevaux.
Paul »
La troisiÚme, écrite par un certain Hatecroft, était adressée à Paul :
« Paul, mon amiâŠ
Jâai besoin de ton aide. Je suis actuellement Ă Arkham. Venu lĂ Ă la demande dâune amie, je ne pouvais un seul instant me douter de ce qui mâattendait. Et pourtant, jâaurais peut-ĂȘtre pu mâen douter. Tu le sais, en tant que linguiste, il mâarrive de faire profiter de mes lumiĂšres quelques-unes de mes connaissances fĂ©rues de livres rares, anciens et traitant le plus souvent de phĂ©nomĂšnes occultes. Câest ainsi que jâai fait la connaissance de celle qui allait devenir une grande amie : Jemima Carter. Mais, je le rĂ©pĂšte, comment aurai-je pu prĂ©voir ce qui mâattendait ?. Paul, par avance je tâen conjure, pardonne-moi.
Jemima sâĂ©tait rendue Ă Arkham Ă la demande dâun de ses amis. Celui-ci prĂ©tendait ĂȘtre en possession dâun ouvrage rare et il avait Ă©veillĂ© sa curiositĂ©. Toutefois, Jemima mâa Ă©galement fait part de ses inquiĂ©tudes quant Ă la santĂ© de son ami. En effet, ce dernier Ă©tait littĂ©ralement obsĂ©dĂ© par sa lecture, ce qui visiblement ne lui ressemblait pas. Lâessentiel de ses propos tournaient donc autour de la rĂ©alisation dâun sort et câest pour cela quâil avait besoin de lâaide de mon amie.
Face Ă lâinquiĂ©tude de Jemima, je me dĂ©cidais donc Ă me rendre Ă Arkham. Mais jâarrivais trop tard. Au lieu de Jemima et de son ami, je trouvais deux corps horriblement mutilĂ©s. Mais, plus Ă©trange encore est la « mise en scĂšne ». Tous deux Ă©taient en effet recouvert de cicatrices et de plaies reproduisant en grande partie les symboles Ă©tranges dessinĂ©s sur les murs de la piĂšce oĂč je les ai dĂ©couverts. Ces mĂȘmes symboles se trouvaient dans diverses notes Ă©parpillĂ©es autour des cadavres. Ăvidemment, jâai tout de suite prĂ©venu la police qui a conclu Ă un suicide particuliĂšrement macabre.
Pour ma part, je ne pouvais croire Ă un suicide. Non ! Il sâĂ©tait passĂ© autre chose. Jâai alors entrepris dâinterroger les plus proches voisins et jâai appris quelques faits Ă©tranges, questionnants en tout cas. Ainsi, ils mâont racontĂ© avoir entendu une vĂ©ritable cacophonie en provenance des bois cette fameuse et terrible nuit. Et pour ce que jâai pu saisir des notes avant que la police ne les mette sous scellĂ©s, il semble bien que la forĂȘt joue un rĂŽle important dans toute cette histoire.
Ce nâest pas tout. On mâa aussi rapportĂ© avoir vu dâĂ©tranges lumiĂšres cette nuit-lĂ , toujours dans les bois alentours. En vĂ©ritĂ©, je suis convaincu que Jemima et son ami se sont rendus dans la forĂȘt cette nuit-lĂ . Je ne sais pas ce quâils ont fait, ce quâils ont vu mais je suis prĂȘt Ă parier que cela les a suivis jusquâĂ cette piĂšce oĂč je les ai trouvĂ©s. Je ne suis pas superstitieux. Dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, jâessaye et jâespĂšre ĂȘtre un homme Ă lâesprit ouvert mais, toutefois, sans ĂȘtre crĂ©dule. Pourtant, aprĂšs ce que jâai vu dans cette piĂšce et avoir entendu le rĂ©cit des voisins, je me demande vraiment si Jemima nâa pas vĂ©ritablement participĂ© Ă quelque chose de magique. Et si câest vraiment le cas, elle en a payĂ© le prix fort. La police va trĂšs certainement classer lâaffaire. Pour ma part, cette affaire ne sera jamais classĂ©e tant que je ne saurai pas ce qui sâest rĂ©ellement passĂ© dans les bois cette nuit-lĂ . Et pour cela, jâai besoin de ton aide. Puis-je compter sur toi ?
Patrick Hatecroft »
Lâauteur de la quatriĂšme lettre, par contre, ne me disait rien :
« Je vis prĂšs de ces bois depuis maintenant prĂšs de dix ans. Je les connais bien. Je mây promĂšne souvent avec mon chien. Ce sont des lieux tranquilles, des lieu de paix. Mais ce nâest plus le cas depuis maintenant un mois. Il se passe des choses Ă©tranges dans nos bois. Ătranges et tragiques, criminels.
Vous vous rappelez sĂ»rement la dĂ©couverte de ces deux corps horriblement mutilĂ©s, recouverts de coupures et autres plaies. Il ne sâagit pas dâun cas isolĂ©. Loin sâen faut. Un de mes plus proches amis sâest intĂ©ressĂ© Ă cette affaire.
Charlie, mon ami, a vu les corps. Il a Ă©galement vue la scĂšne de crime. Il a vu ces Ă©tranges scarifications et les notes, le livres qui les ont inspirĂ©es. Cela lâa traumatisĂ©. Depuis ce jour, il ne fut plus le mĂȘme, littĂ©ralement obsĂ©dĂ© par ce quâil avait vu. ObsĂ©dĂ© au point de les⊠reproduire. Je ne sais pas comment cela est arrivĂ© mais, Ă la faveur dâune promenade, câest moi qui est retrouvĂ© le corps de Charlie dans les bois, marquĂ©s de la mĂȘme façon que ces deux autres corps. Je nâen croyais pas mes yeux. Jâai encore du mal Ă y croire.
Je nâai pas lâĂąme dâun flic. Pourtant, je me devais dâagir. Surtout face Ă lâinertie des forces de lâordre. Alors, je me suis rendu, de nuit, dans les bois. Car, cette nuit encore, on y entendait dâĂ©tranges clameurs. Et, sans rĂ©ellement comprendre ce dont jâĂ©tais tĂ©moin, je ne peux que vous rapporter cette horrible scĂšne qui, si elle nâexplique rien, aura au moins le mĂ©rite de vous faire saisir lâampleur de ce qui se trame.
Ainsi, me guidant dans la nuit au son de ces chants, jâarrivais bientĂŽt Ă lâorĂ©e dâune clairiĂšre. LĂ , jâai vu, une dizaine de personnes, nues et aux corps recouverts de ces cicatrices mystĂ©rieuses, danser autour dâun homme, que dis-je, un gĂ©ant ! richement vĂȘtu. Le gĂ©ant ricanait devant les contorsions des danseurs. Il Ă©manait de lui quelque chose de monstrueux. Je ne sais pas dans quelle langue ils chantaient mais je me rappellerai pourtant toute ma vie ces mots : « Ie, ie Nyarlathotep, thusai cul nubula Nyarlathotep ! » Je ne sais pas qui sont ces gens, mais je serais pas surpris si nous dĂ©couvrions bientĂŽt de nouveaux corps scarifiĂ©s dans les bois. La police ne semble pas trĂšs prompte Ă agir. Pourtant, il faut que cela cesse. Aussi, je mâen remets Ă vous et Ă votre bon sens civique.
Lewis Johnson »
Et la derniÚre me laissa on ne peut plus perplexe :
« Quâest-ce qui mâa pris ? Pourquoi jâai voulu me mĂȘler de cette histoire ? Lewis ! Aurais-je vraiment pu laisser un autre se confronter à ⊠ça ?! Oui, non ! Je ne sais plus. Je ne sais plus par oĂč commencer. Le commencement ? La lettre de Lewis au journal ? Pourquoi Ă©crire au journal et non pas me contacter directement ? A-t-il cherchĂ© Ă me protĂ©ger tout en tentant de prĂ©venir les gens ? Il a vu, lui aussi, il a vu ça ! Je le sais, jâen suis sĂ»r ! Est-ce pour ça quâil sâest⊠dissipĂ© dans la nature ? Et Betsy, pauvre bĂȘte ! Non, jamais Lewis nâaurait abandonnĂ© Betsy. Que lui est-il arrivĂ©Â ? Que mâest-il arrivĂ©Â ? Rien ! Rien, tout cela nâest quâun rĂȘve, une fiction, un horrible cauchemar !
Mais quâai-je vu en rĂ©alitĂ©Â ? Ou, quâai-je cru voir ? Quel tour mâa jouĂ© mon esprit ? Dans les bois, une trentaine de personnes, nues, Ă©corchĂ©es et scarifiĂ©es autour dâun homme, cet homme, un gĂ©ant ! Ils dansaient au son dâune horrible symphonie. Et le gĂ©ant riait ! Puis, un autre son a remplacĂ© la musique. Je crois que câĂ©tait lĂ depuis le dĂ©but mais⊠mon esprit refusait de le voir.
Les danseurs ne dansaient plus. Ils Ă©taient Ă terre, corps ruinĂ©s, tordus et⊠dĂ©vorĂ©s ! En train dâĂȘtre dĂ©vorĂ©s par des⊠des crĂ©atures indescriptibles ! Des ombres grises recouvertes de⊠pustules et dotĂ©es dâailes membraneuses se repaissaient des viscĂšres des danseurs. Les hurlements de douleurs se mĂȘlaient aux rires et aux chants. Et aux horribles bruits de mastications.
Je pose ces mots sur le papier pour faire sortir ces visions de moi. Il y a quelque chose dans les bois. Quelque chose qui provoque ces hallucinations. Car câest bien de cela quâil sâagit, des hallucinations ! Tout cela nâest que le fruit de mon imagination, stimulĂ©e par ou Ă cause de la lettre de Lewis. Je couche ces visions sur le papier. Je les transforme en mots pour les faire sortir de moi. Ensuite, je mettrai cette lettre dans une enveloppe et je ne lâouvrirai plus jamais !
IL Y AVAIT DE LA JOIE DANS LE REGARD DE CETTE HOMME ! PLUS QUE DE LA JOIE. DE LâEXTASE ! IL PLEURAIT ET RIAIT EN MĂME TEMPS ! ET IL ME REGARDAIT ALORS QUE CES CHOSES LUI AVAIENT DĂJĂ DĂVORĂ LES JAMBES ! CâEST AU-DELĂ DE TOUT CE QUE LâESPRIT HUMAIN PEUT CONCEVOIR. ET IL A DIT « NYARLATHOTEP NOUS A APPORTE LE PARADIS, QUâIL EN SOIT BIEN !«  »
De retour dans lâInterzone, je me mets face Ă ma machine Ă Ă©crire. Je vĂ©rifie que le rĂ©servoir de PĂ©trolâmagie est plein et je fais une place dans ma cervelle de porc pour le Joueur. Je reprends les journaux et lettres que jâai trouvĂ©s et les relis tout en tapant quelques notes Ă propos de divers Ă©lĂ©ments rĂ©currents et de leurs potentiels liens.
Ainsi, je pense que ce livre, le Vir Stellas, est peut-ĂȘtre bien Ă©crit, au moins en partie, en Langue Putride. Cela expliquerait que les auteurs des lettres aient eu tant de mal Ă le dĂ©chiffrer tout autant quâils furent les objets de visions millevaliennes. Et ces mĂȘmes visions auraient comme consĂ©quences, voire comme but, de les inciter Ă se livrer Ă ce rituel dâinvocation de Nyarlathotep.
Ce rituel, qui est peut-ĂȘtre le TroisiĂšme Rituel Aklo, suppose des pratiques automutilatoires. Et nâest-ce pas lâautomutilation ultime que de se laisser dĂ©vorer par des crĂ©atures qui sont, peut-ĂȘtre, des Horlas Ă©missaires de Shub-Niggurath ? En fait, je me demande si le rituel contenu dans le Vir Stellas nâa pas pour but dâobtenir de Nyarlathotep quâil intercĂšde avec la ChĂšvre Noire en faveur des invocateurs ? Peut-ĂȘtre que ces derniers ne savaient comment sâadresser directement Ă la ChĂšvre Noire ? Mais, quâattendaient-ils vraiment dâelle ? Le paradis ? Vraiment ?
Il est un fait connu que les SumĂ©riens sont adeptes des tatouages et autres scarifications. Est-il possible que le SumĂ©rien mentionnĂ© dans les journaux est eu le Vir Stellas entre les mains ? A-t-il eu lui aussi des visions ? Dâailleurs, est-il possible de trouver cette tĂȘte gĂ©ante dont parle lâauteur de la premiĂšre lettre ?
Il apparaĂźt Ă©galement que ces lettres viennent dâailleurs. Un monde, une dimension qui ne connaĂźt pas « concrĂštement » Millevaux. Ont-ils tentĂ© dâattirer lâattention de Shub-Niggurath de leur propre chef ou sâagit-il dâun plan de la ChĂšvre Noire pour se rĂ©pandre dans dâautres mondes ? Compte-t-elle trahir Azathoth ?
Mais les journaux parlent aussi de « batterie » et donc dâĂ©nergie, dâĂ©lectricitĂ© comme celle qui a foudroyĂ© la premiĂšre victime. Ils parlent aussi dâartefacts voyvodes et de Cyborgs, certainement alimentĂ©s eux-aussi par de lâĂ©lectricitĂ©. Alors, quel est leur lien avec la ChĂšvre Noire ? Comment comprendre ce malaise que ressent lâauteur du journal par rapport Ă la Langue Putride ? Y a-t-il une sorte dâincompatibilitĂ© entre lâĂ©lectricitĂ©, ou nâimporte quelle Ă©nergie alimentant les Voyvodes et les Cyborgs, et Shub-Niggurath ? Et si, bien que les influences dâAzathoth et Shub-Niggurath puissent cohabiter, il nâen Ă©tait pas de mĂȘme pour les Cyborgs et les Voyvodes ?
Je tiens peut-ĂȘtre lĂ un dĂ©but de piste. Maintenant, je dois tout de mĂȘme comprendre en quoi tout cela concerne les Chevalier dâOr exilĂ©s. Je devrais peut-ĂȘtre aussi me renseigner sur ces Graga et Yargalac.
Quâest-ce que je fous lĂ Â ? La tĂȘte me tourne Ă cause de la gravitĂ© inversĂ©e. Cette antique sphĂšre voyvode paraissait abandonnĂ©e. Et pourtant, les Millevaliens vivant lĂ lâont reconvertie en arĂšne. Je ne sais mĂȘme pas comment ils me sont tombĂ©s dessus. En attendant, je fais face Ă un Soar, comme moi ? Pas vraiment. Son groin sâest transformĂ© en ce bec caractĂ©ristique des PĂ©trolâhead. Le cochon doit ĂȘtre dĂ©foncĂ© comme pas permis. il nâa pas dâarme. Je ne sais pas si je dois ĂȘtre rassurĂ© ou dâautant plus inquiet. Quant Ă moi, on mâa Ă©videmment dĂ©lestĂ© de mon flingue et de mon armure dâor. Je rĂ©flĂ©chis. Je tente dâĂ©valuer la situation. Je ne devrais pas. Le Soar me saute dessus ! Mais jâai quand mĂȘme des restes de mon passĂ© de chevalier dâor. Jâesquive dâun bond, roule sur le cĂŽtĂ©, me redresse et lui saute dessus Ă mon tour. Le porc est rĂ©sistant. Je me heurte Ă un mur. Il vacille Ă peine. Mais jâai de la chance. ComplĂštement dĂ©foncĂ© quâil est, ses attaques sont complĂštement chaotiques et finalement assez faciles Ă Ă©viter, pour lâinstant. Je me jette Ă nouveau sur lui. Mais, cette fois, je vise Ă hauteur des genoux et parviens Ă le faire tomber. Je le tourne sur le ventre, mâassois sur son dos et mâempare de son bras pour lui infliger une sĂ©vĂšre clĂ©. Je ne souhaite pas spĂ©cialement le tuer. JâespĂšre quâil va abandonner et quâon va en rester lĂ . Je ne sais pas sâil comprend un traĂźtre mot de ce que je raconte mais je lui demande dâabandonner. Et il doit ĂȘtre finalement moins fracassĂ© du crane que je ne le pensais. Il lĂšve son bras libre et frappe plusieurs fois le sol en signe dâabandon. Lâespace dâun instant, jâai eu peur que la foule nâexige sa mise Ă mort mais, au contraire, elle se montre Ă©tonnamment clĂ©mente.
Jâai gagnĂ© et on me permet de quitter lâarĂšne. On me rend mĂȘme mes affaires. Je demande Ă rencontrer le ou les maĂźtres des lieux. Les gardes ne sont pas contre mais⊠Ils Ă©changent un regard un peu gĂȘnĂ©. Je leur demande ce quâil y a. Veulent-ils un baquechiche ? Ils sourient. Le Joueur a de la chance et doit ĂȘtre dâhumeur taquine. Il a mis dans mes poches une poignĂ©e de Noix et de Billes qui les emmĂšneront trĂšs trĂšs loin⊠au pays des CĆlacanthes, peut-ĂȘtre ? Mais je en devrais pas parler dâeux, ça risquerait de les attirer.
On me conduit dans le bureau dâun des responsable de cette arĂšne : un Voyvode ! Je ne comprends pas. Je croyais cette arĂšne construite dans un artefact abandonnĂ© par les Voyvodes. Il me le confirme. La sphĂšre a Ă©tĂ© abandonnĂ©, conquise par Millevaux puis plus ou moins reconquise par les Voyvodes qui en ont fait ce lieu festif. Bon, OK, pourquoi pasâŠ
Je plonge mon regard dans ce qui pourrait ĂȘtre lâĂ©quivalent chez ce Voyvode. En rĂ©alitĂ©, il me fait plutĂŽt bonne impression et je pense pouvoir lui parler franchement. Aussi, je lui explique mâĂȘtre retrouvĂ© sur deux scĂšnes de crimes. Tout ça part un peu dans tous les sens mais il y aurait un lien entre Azathoth, Shub-Niggurath mais aussi lâĂ©lectricitĂ©, les Cyborgs, dâanciens chevaliers dâor et⊠les Voyvodes. Je lui fait part de mon hypothĂšse selon laquelle si lâalliance entre Azathoth et la ChĂšvre Noire fonctionne plutĂŽt bien, ce nâest peut-ĂȘtre pas le cas vis-Ă -vis des Cyborgs, Voyvodes et tout ce qui fonctionnerait avec de lâĂ©lectricitĂ©. Et puis, je soupçonne Ă©galement la ChĂšvre Noire dâavoir des projets dâexpansion incluant des SumĂ©riens. Câest pas facile dâinterprĂ©ter lâattitude dâun Voyvode mais je lui trouve lâair⊠circonspect. Alors, a-t-il un avis sur la question ? Les Voyvodes ont-ils sentis des « problĂšmes » de « compatibilité » entre lâĂ©lectricitĂ© et lâĂgrĂ©gore ? Et le Voyvode, qui me donne lâimpression dâĂȘtre Ă©tonnĂ© par tout ce que je lui raconte, me rĂ©pond par lâaffirmative. Alors, dâaprĂšs lui, est-il possible que, dans le dos dâAzathoth, Shub-Niggurath ait ourdi quelques plans contre les eux et les Cyborgs ? Et lĂ encore, jâobtiens une rĂ©ponse affirmative.
Les livres dâhistoire nous enseignent que les Voyvodes et les SumĂ©riens sont tous deux ennemis du Royaume quâils Ă©taient censĂ©s servir. Pour autant, Ă choisir, il nâest guĂšre Ă©tonnant que la ChĂšvre Noire ait jetĂ© son dĂ©volu sur les SumĂ©riens plutĂŽt que sur les Voyvodes. Aussi, il est trĂšs possible quâelle ait corrompu certains SumĂ©riens afin quâils servent ses intĂ©rĂȘts. Mais ça ne me dit rien quant au lien avec les chevaliers dâor en exil. Le Voyvode a bien une idĂ©e mais⊠ce nâest quâune idĂ©eâŠ
Et sur les bons conseils du Voyvode, je me retrouve de nouveau sous terre, en pleine forĂȘt. DâaprĂšs lui, ce nâest pas un hasard si je me suis retrouvĂ© sous terre aprĂšs la dĂ©couverte de ces crimes. Et ce nâest pas un hasard si moi, un ancien chevalier dâor, jâai Ă©tĂ© mis en face du symbole du TroisiĂšme Rituel Aklo. Le Voyvode nâa pas voulu sâavancer mais mâa tout de mĂȘme laissĂ© entendre que, pourquoi pas ?, certains chevaliers dâor auraient eu entre les mains de quoi rĂ©aliser ce rituel. Et lĂ , je pensais au Vir Stellas. Mais je pensais aussi Ă ce mur de hiĂ©roglyphes. Je devais le retrouver. Mais force me fut de constater que jâĂ©tais bel et bien perdu. Perdu mais⊠pas seul pour autant. On me suivait. Je me cachais et reconnus la silhouette dâun MantoĂŻde. En fait, il sâagissait de plusieurs MantoĂŻdes. Non, dâun seul ! Alors, un ou plein ? En vĂ©ritĂ©, il sâagissait dâun Mille-pattes humain, ou plutĂŽt dâun Mille-pattes MantoĂŻde. Je ne savais pas que ces trucs-lĂ pouvaient exister. Je ne savais pas non plus quâils avaient une bonne vue car il mâavait manifestement repĂ©rĂ© et me demandait de sortir de lâombre. Mon flingue Ă la main, je mâapprochais du monstre. Je sentais en lui comme une animositĂ© contenue. Je crois quâil aurait bien voulu me sauter dessus mais il avait manifestement quelque chose Ă me dire. Il se prĂ©senta comme Ă©tant un certain Korium. Il vivait dans lâInterzone, il y a longtemps. Puis, il est devenu ce que jâavais sous les yeux et se cachait sous terre. Il ne cacha ni son envie ni la facilitĂ© avec laquelle il pourrait me dĂ©couper en tranches de bacon mais il y avait plus important. Je devais le suivre.
Je ne sais plus oĂč jâen suis aprĂšs les rĂ©vĂ©lations de Korium. Ce dernier mâa conduit jusquâau fond de son repaire souterrain et mâa racontĂ© une bien Ă©trange histoire, son histoire⊠celle dâavant quâil ne devienne un mille-pattes MantoĂŻde.
Korium est plus vieux quâil en a lâair et, reconnaĂźt-il, sa mĂ©moire lui joue des tours. Mais, il sait que sa « mort » est liĂ© Ă lâhistoire dâun de ses proches, un certain Trashalak. Je me demandais si jâavais vraiment du temps Ă perdre avec cette histoire et sus que oui dĂšs que Korium mentionna que Trashalak Ă©tait un Cyborg chasseur de reliques Voyvodes, accompagnĂ© dans cette tĂąche par un certain⊠Yargalac, passionnĂ© lui aussi de reliques Voyvodes et⊠chevalier dâor en exil !
Korium mâexpliqua comment Trashalak Ă©tait revenu « diffĂ©rent » dâune de ses chasses dans la forĂȘt. Yargalac lâavait informĂ© de lâexistence dâune sphĂšre voyvode abandonnĂ©e mais il sâĂ©tait passĂ© quelque chose lĂ -bas. Trashalak avait changĂ©. Physiquement et mentalement ! Il avait expliquĂ© cela par son intĂ©rĂȘt nouveau pour la magie du Chaos mais il y avait autre chose. Sinon, comment expliquer que, peu Ă peu, tous soient mort, Yargalak, Graga et lui-mĂȘme ? Lui avait eu la chance que ses mille-pattes esclaves sexuels le ressuscitent sous cette forme pleine de potentiels mais les autres⊠MĂȘme Trashalak avait fini par disparaĂźtre entre temps. Pourtant, Korium avait entendu des rumeurs comme quoi quelquâun lui ressemblant avait Ă©tĂ© aperçu dans lâInterzone. Il Ă©tait facilement reconnaissable Ă sa peau Ă©cailleuse mais aussi parce que, parfois, il portait encore le chapeau « magique » quâil lui avait offert autrefois. Attention toutefois, ce chapeau est un vecteur de maladies contagieuses.
VoilĂ ce quâavait pu me dire Korium. Et tout prenait semblant de sens. Des Cyborgs, des reliques voyvodes, les chevaliers dâor, Millevaux⊠Tous ces Ă©lĂ©ments Ă©taient dĂ©jĂ liĂ©s dans une autre histoire. Et il semblait que ce fameux Trashalak erre dans lâInterzone. Etait-il liĂ© aux meurtres actuels ? Je devais le trouver pour mâen assurer et aussi savoir en quoi les chevaliers dâor dâaujourdâhui Ă©taient liĂ©s Ă cette vieille histoire.
Et me voilĂ zonant dans lâInterzone Ă la recherche de ce fameux Trashalak, Cyborg Ă la peau de serpent. Mais, alors que je dĂ©ambule, posant des questions Ă travers des glory holes et nâayant pas souvent une rĂ©ponse intĂ©ressante, je me rends compte que je suis moi-mĂȘme suivi. Je tourne et vire dans les ruelles sombres et Ă©troites de cette partie de lâInterzone. Je fais une boucle. Je ne tente pas tant de semer mon poursuivant que dâinverser les rĂŽles. Et quand je parviens Ă mâapprocher assez prĂšs, sa peau ! Des Ă©cailles !
« Trashalak ? »
Le Cyborg-serpent se fige, demeure immobile et ne me répond pas.
« Trashalak. Tu es Trashalak, câest ça ? Jâai Ă te parler. Retournes-toi lentement, jâai un flingue. »
Mais celui dont je quasiment certain quâil sâagit de celui que je cherche se met soudain Ă courir tout droit. Je vise les jambes. Je tire. Mais il est rapide, le con ! Je me mets Ă courir. Mais il zigzague Ă toute vitesse et je le perds rapidement. Je me retrouve au milieu dâune petite place. Au-dessus de moi flotte un rocher. Et sur ce rocher, un portail dâune dizaine de mĂštres de haut irradie dâĂ©nergie technomagique. Tout autour flottent de petits objets et de petites crĂ©atures fusionnant les uns avec les autres. Trashalak a-t-il empruntĂ© ce portail ? Dois-je le suivre ? Je sens que je suis en train de prendre la dĂ©cision la plus conne de toute ma vie mais⊠je mâĂ©lance et traverse le portail. Je verrais bien ce quâil y a de lâautre cĂŽtĂ©.
Lâatterrissage est rude. Jâai lâimpression que mes os ont tenu bon mais je mâinquiĂšte pour mes organes internes. Je me palpe et constate quâon dirait bien, malgrĂ© la douleur, que tout est restĂ© Ă sa place. Je ne peux en rendre grĂące quâĂ mon armure dâor. Mais, alors que je mâausculte, je remarque que mon corps est dĂ©sormais couvert de tatouages qui changent de formes en permanence et Ă©voquent tour Ă tour des scarifications et des symboles chaotiques. Et parmi eux, je reconnais les symboles du TroisiĂšme Rituel Aklo !
Mais, maintenant, la question Ă 1000 litres de PĂ©trolâmagie. OĂč suis-je ?
Une forĂȘt⊠Je reconnais Millevaux Ă son Emprise. Mais il y a quelque chose de diffĂ©rent. Ce nâest pas le Millevaux que je connais, dâoĂč je viens. Ce nâest pas le Millevaux de chez moi. Non loin, il y a un vieux manoir envahi par la forĂȘt. Prudemment, lâarme au poing, je mâapproche. Aussi discrĂštement que possible, je me colle Ă une fenĂȘtre et entends du bruit. Il y a quelquâun, qui parle tout seul. Non, câest Ă moi quâil parle. Il me dit de me tirer. Il y a quelque chose de menaçant dans sa voix mais pas seulement. Quelque chose me dit que ce serait mĂȘme plutĂŽt pour mon bien quâil mâenjoindrait Ă ne pas rester lĂ . Je raffermis ma prise sur mon flingue et me montre Ă la fenĂȘtre. LĂ , je fais face Ă la Mort. Pas LA Mort, mais la Mort. Enfin, une Mort. Quand elle me voit, elle a lâair agacĂ©. Je remarque quâelle tient une liasse de feuilles Ă la main.
Comme je nâai pas lâimpression que cette mort soit vraiment un ennemi, je rentre dans cette ruine et me prĂ©sente. La Mort a lâair surpris. Elle jette un Ćil sur les feuilles puis sur moi. Elle hoche la tĂȘte et me les tend. Elle mâexplique ne pas ĂȘtre la maĂźtresse des lieux. Elle nâest venu lĂ que pour rendre visite Ă lâauteur de ces lettres. Mais il est introuvable. Toutefois, maintenant que je suis lĂ , ce nâest plus son affaire. Câest la mienne. Dâun geste du menton, elle montre les lettres que jâai maintenant dans la main et sâen va. Je ne cherche pas Ă la retenir. Je mâassois sur une vieille chaise et commence Ă lire.
« LETTRE 1 :
Hey,
Comment va ?
Un petit mot car il mâest arrivĂ© un truc bizarre. Jâai eu une Ăąme Ă faire passer de lâautre cĂŽtĂ©. En soi, rien dâĂ©trange lĂ -dedans mais⊠ce sont les circonstances de sa venue qui mâont Ă©tonnĂ©. Le type sâappelle Raymond Guts. Il est, ou Ă©tait journaliste. Il enquĂȘtait sur des faits bizarres et potentiellement criminels ayant lieu dans la forĂȘt autour de la ville oĂč il vivait. En fait, il est convaincu dâĂȘtre mort⊠mais AVANT dâĂȘtre arrivĂ© jusquâĂ mon manoir !
As-tu dĂ©jĂ eu une expĂ©rience similaire ? Normalement, les Ăąmes dont nous avons la charge viennent directement de lĂ oĂč elles vivaient. Il nây a pas dâĂ©tape, ou de « plan », intermĂ©diaire. La personne meurt et arrive directement chez nous. Câest nous, lâĂ©tape intermĂ©diaire, non ?
Comme Ă mon habitude, jâai invitĂ© mon Ăąme en peine Ă ma table. Je fais ainsi dâune pierre deux coups. Je favorise le passage dâune Ăąme vers lâautre monde et je prends soin de cette vieille bĂątisse dont jâai Ă©galement la responsabilitĂ©. Ces dĂźners sont plutĂŽt agrĂ©ables finalement. Ăa met un peu de vie dans ces murs. Et mes Ăąmes semblent apprĂ©cier un dernier repas. Câest aussi lâoccasion de discuter, dâen apprendre plus sur eux.
Sur Raymond, je nâaurais pas appris grand-chose finalement tant il Ă©tait obsĂ©dĂ© par les circonstances de sa mort. Il mâa racontĂ© avoir Ă©tĂ© tĂ©moin dâun sabbat dans les bois en lâhonneur dâune divinitĂ© nommĂ©e Nyarlathotep. Tu connais ? Et, en fait, il pense ĂȘtre mort lĂ -bas. Il mâa ainsi racontĂ© sâĂȘtre certes rĂ©veillĂ© dans sa chambre dâhĂŽtel mais lâĂ©tablissement, toute la ville Ă©tait vide ! Et câest lĂ que les crĂ©atures monstrueuses quâil a vues dans les bois lui ont sautĂ© dessus pour le dĂ©vorer. Mais, il est convaincu que ces crĂ©ature lâavaient dĂ©jĂ dĂ©vorĂ© la nuit prĂ©cĂ©dente.
Tu imagines bien que jâai tentĂ© de le rassurer. Je lui ai expliquĂ© la procĂ©dure et quâil nâavait finalement rien Ă craindre de ce qui lâattendait de lâautre cĂŽtĂ©. Mais cela nâa pas Ă©tĂ© facile tant il Ă©tait en proie Ă la panique aprĂšs ce⊠rĂȘve ? Je ne sais pas trop comment appeler cette expĂ©rience.
A la fin du repas, Raymond avait retrouvĂ© un peu de son calme. Il semblait apaisĂ© et jâai donc pu le conduire de lâautre cĂŽtĂ©, le vĂ©ritable autre cĂŽtĂ© cette fois. Mais, alors que je faisais un peu de rangement, jâai remarquĂ© quelque chose, au niveau du manoir. Tu me prendras pour un imbĂ©cile mais je te jure que jâai vu de la mauvaises herbe et quelques racines sâinfiltrer entre les pierres, en bas du mur. Et je te jure aussi quâil nâa pas Ă©tĂ© facile de sâen dĂ©barrasser. Est-ce que tu crois que ça a un lien avec son histoire de sabbat forestier ? Ou alors, ce ne serait quâune coĂŻncidence ?
Et toi, que deviens-tu ?
LETTRE 2Â :
Mâas-tu portĂ© la poisse ?!
Pour ĂȘtre franc, que tu ne te moque pas de moi aprĂšs ma derniĂšre lettre mâavait fait plaisir mais je ne pensais pas susciter une telle rĂ©action. Mais bon, je comprends bien, surtout aprĂšs ce que tu mâas racontĂ© Ă propos de cette femme venant de Millevaux, câest ça ?
Bon, il faut moi aussi que je te raconte. On ne va pas jouer Ă celui qui aura eu lâĂąme la plus dingue Ă faire passer mais⊠jâai reçu une espĂšce de mouche humaine ! Je te jure. Cette chose pouvait prendre forme humaine mais, en dessous, elle a des yeux dâinsecte, des ailes de mouches et une espĂšce de bec en ferraille qui a fusionnĂ© avec la moitiĂ© de son visage. Câest horrible. Et je ne te raconte mĂȘme pas comment il se nourrit quand il a cette forme-lĂ .
Bref, tout ça pour dire que ce Corso mâa racontĂ© son histoire et que câĂ©tait complĂštement dingue. Il dit venir de lâOcĂ©an du Chaos, le domaine dâAzathoth. Il prĂ©tend avoir fui sur la planĂšte du dieu de la glace aprĂšs quâil fut chassĂ© par Azathoth et⊠Shub-Niggurath. Ce dernier serait, si jâai bien compris le nom compliquĂ© de⊠je te laisse deviner⊠Millevaux ! Cela ne te rappelle rien ?
Jâai interrogĂ© Corso Ă ce sujet. DâaprĂšs lui, câest finalement assez simple. Un certain Yâmo-Thog a dĂ©clenchĂ© une Ă©norme glaciation qui a recouvert le domaine dâAzathoth. Aussi, les habitants ont dĂ» fuir et certains se rendus chez Shub-Niggurath, Ă Millevaux donc. Mais la glace continuait de se rĂ©pandre, de mĂȘme que la forĂȘt a elle aussi une certaine propension Ă se rĂ©pandre. Alors, Azathoth et Shub-Niggurath se sont rendus sur la planĂšte dâYâmo-Thog pour en finir avec lui. Ensuite, ils se sont partagĂ©s les lieux. Mais, Corso nâest plus sĂ»r de rien car il mâa avouĂ© ĂȘtre dĂ©pendant au PĂ©trolâmagie et il se demande si une partie de son histoire nâest pas juste un horrible dĂ©lire dĂ» au manque.
Tu te doutes bien que je nâai pas fait traĂźner le dĂźner et que ça a Ă©tĂ© fromage OU dessert mais certainement pas les deux. De toutes façons, Corso nâĂ©tait pas vraiment inquiet par ce qui lâattendait de lâautre cĂŽtĂ©. Il Ă©tait certain de se rĂ©incarner trĂšs bientĂŽt car il nâen avait pas fini avec toute cette histoire.
Et moi non plus, câest bien le problĂšme ! En vĂ©ritĂ© je te le dis, je crois que mon manoir a Ă©tĂ© contaminĂ© par⊠Millevaux ! Tu sais, je tâai dit, dĂ©jĂ , que de la mauvaise herbe sâĂ©tait infiltrĂ© entre les murs. Et bien câest allĂ© crescendo aprĂšs le dĂ©part de Corso. Je ne sais pas ce que ce truc a fait Ă mon manoir mais en Ă peine une nuit tout le rez-de-chaussĂ©e Ă©tait envahi par la vĂ©gĂ©tation. Et dehors ! Les murs Ă©taient recouvert de lierre. MĂȘme le jardin entourant le manoir Ă©tait mĂ©connaissable. Autant te dire que je ne pouvais plus rien faire Ă ce stade-lĂ . Si jâen crois le rĂ©cit de Corso, cela voudrait dire que Shub-Niggurath sâest mis en tĂȘte de sâapproprier ma demeure.
Je nâĂ©tais pas fier quand jâai annoncĂ© la nouvelle Ă qui tu sais. Mais, Ă ma grande surprise, elle a fait preuve dâune certaine comprĂ©hension et mâa mĂȘme proposĂ© une nouvelle charge. Mais, jâaime mon manoir, mĂȘme sâil est en proie Ă une folie vĂ©gĂ©tale. Alors, jâai demandĂ© Ă rester. Et elle a acceptĂ©. Je continuerai donc de recevoir ici mes Ăąmes trĂ©passĂ©es et jâessaierai, sinon dâendiguer le phĂ©nomĂšne, au moins de le comprendre.
Mais bon, si de ton cĂŽtĂ© tu as des choses Ă mâapprendre, surtout nâhĂ©sites pas.
En espérant que les choses soient plus simples de ton cÎté.
LETTRE 3Â :
Salut,
Je suis bien content dâapprendre que tu as de la visite. Ici, rien ! Personne ! Je ne peux pas croire quâil nây a plus assez de morts pour quâon mâen envoie quelques-uns. Ou alors, câest le revers de la mĂ©daille. Elle mâa laissĂ© le manoir mais me prive de compagnie ? Tu crois quâelle ferait un truc pareil ?
Je dois tâavouer quelque chose. Sa demande nâĂ©tait pas explicite mais je crois quâelle aurait voulu que je « nettoie » le manoir de la prĂ©sence de ce « Millevaux ». Mais, en vĂ©ritĂ©, je nâen ai rien fait. Je nâai mĂȘme pas essayĂ©. DĂ©jĂ , je te jure, câest une entreprise titanesque. Impossible pour une seule personne ! Je ne peux que constater lâĂ©tendue des dĂ©gĂąts et essayer de comprendre. Mais, un moment, jâai pensĂ© que si mon manoir Ă©tait envahi par la forĂȘt, je recevrais les Ăąmes de ceux qui y vivaient. Jâaurais alors eu lâoccasion dâen apprendre plus. Mais si personne ne vient ! Est-ce que ça veut dire que personne ne meurt lĂ -bas ? Je sais bien que câest impossible.
Alors, je me suis inventĂ© un nouveau boulot. Oui, je laisse le manoir tomber en dĂ©crĂ©pitude, en proie Ă Millevaux. Et moi, et bien jâen profite pour explorer cette Ă©trange forĂȘt. Il y a plein dâendroits bizarres qui sont apparus avec elle. Mais tous ont en commun dâĂȘtre envahi par la vĂ©gĂ©tation. Jâai visitĂ© de vieux bunkers, des camps nomades, des lieux de cultes, des taniĂšres de monstres. Jâai vu des monstres ! Et jâai vu, de loin, des sorciers manipuler cette matiĂšre bizarre dans laquelle baigne Millevaux pour remodeler la rĂ©alitĂ© selon leurs fantasmes. Cette forĂȘt est tout Ă la fois effrayante et fascinante. Je crois que je nâen ferai jamais le tour.
JâachĂšve ici cette lettre car le soleil se couche et je nâaurai bientĂŽt plus de lumiĂšre.
A bientĂŽtâŠ
LETTRE 4Â :
Un homme Ă tĂȘte de porc ! Tu mâentends ! Et plus que ça mĂȘme. Câest un porc, un vrai porc sur deux pattes mais avec des pieds et des mains comme nous ! Et lui aussi dit sâappeler Corso ! Il dit se souvenir ĂȘtre dĂ©jĂ venu, quand il Ă©tait une mouche ! Et il mâa racontĂ© notre prĂ©cĂ©dent dĂźner. Comment peut-il savoir ? Comment ce porc peut savoir ? Il a mĂȘme fait des commentaires sur lâĂ©tat du manoir.
Tu veux que je te dise quelque chose ? Cela reste entre nous mais⊠câest lui qui mâa rassĂ©rĂ©nĂ©. Il mâa expliquĂ© que tout Ă©tait normal. Il sâest mĂȘme excusĂ© car il nâexclut pas que ce soit un peu sa faute si Millevaux a envahi le manoir. Il souriait, il a vraiment tout fait pour ĂȘtre rassurant. Les rĂŽles Ă©taient complĂštement inversĂ©s.
Ce Corso mâa racontĂ© vivre dans un endroit quâil appelle lâInterzone. LĂ , il fait office, en quelque sorte, de dĂ©tective. Pour lâinstant, il est mort, il ne lâa jamais niĂ© mais il mâa aussi jurĂ© quâil devait retourner dans lâInterzone car une nouvelle affaire lâattendait et que tout cela devrait normalement ĂȘtre liĂ© Ă Millevaux. Mais pas seulement. Il a aussi parlĂ© de Nyarlathotep. Tu te rappelles de ce nom ? Ce truc serait le messager des dieux. De certains dieux en tous les cas. DâaprĂšs lui, il sâest passĂ© des choses aux alentours dâune ville nommĂ©e Arkham et des gens ont attirĂ© lâattention de ce Nyarlathotep. Et ce dernier a rĂ©pondu Ă lâappel. Et il aurait Ă son tour appelĂ© Shub-Niggurath Ă venir se repaĂźtre de ce nouveau monde.
Corso le porc nâa pas pu mâen dire plus. Il a reconnu que, dans cette histoire, tout Ă©tait Ă dĂ©couvrir. Et il a mĂȘme regrettĂ© que le « passage » suppose dâoublier une partie de tout ce quâil mâa dĂ©jĂ racontĂ©. Il espĂšre juste que, quelque part, il restera une trace de tout ça. Lui, est convaincu de se rĂ©incarner une nouvelle fois en cochon et de mener une nouvelle enquĂȘte dans lâInterzone.
Alors, chose Ă©tonnante, il mâa ensuite pris dans ses bras et mâa jurĂ© que tout allait bien se passer.
Et toi, tu crois que tout va bien se passer ? Tu crois que tout ça va bien finir ?
LETTRE 5Â :
Jâabandonne⊠Mais en rĂ©alitĂ©, est-ce moi qui abandonne ou mâa-t-on abandonnĂ©Â ? Quelle erreur ai-je commis pour en arriver lĂ Â ? Franchement, dis-moi, est-ce quâil y avait vraiment un moyen de prĂ©server le manoir de Millevaux ? Tu crois vraiment que jâaurais pu faire quelque chose ? Tu crois vraiment que, tout seul, jâaurais pu freiner lâinfluence de⊠Shub-Niggurath ?
Elle ne me rĂ©pond plus. Plus personne ne me rĂ©pond. RĂ©ponds-moi, sâil te plaĂźtâŠ
JâespĂšre que Corso va rĂ©soudre son enquĂȘteâŠÂ »
Câest dingue ! Cela nâa aucun sens ! Ces lettres parlent non seulement de toute cette histoire mais elles parlent aussi⊠de moi ! Lâauteur de ces lettres affirment me connaĂźtre, mâavoir vu. Deux fois ! Une fois sous forme de MouchoĂŻde et une autre sous ma forme actuelle. Et lĂ encore, il est question dâun rituel concernant Nyarlathotep, Shub-Niggurath et Millevaux. En rĂ©alitĂ©, jâai lâimpression que lâauteur de ces lettres a Ă©galement reçu ceux des autres lettres que jâai dĂ©jĂ trouvĂ©es.
Jâai des doutes quant au fait que le Millevaux qui a envahi ces lieux soit le mĂȘme que celui qui entoure lâInterzone. Pourtant, ce doit ĂȘtre lĂ que je trouverai Trashalak, voire mĂȘme peut-ĂȘtre lâauteur de ces nouvelles lettres. AlorsâŠ
Je mâenfonce dans ce nouveau Millevaux, cette forĂȘt que je ne connais pas. Il fait presque nuit et une tempĂȘte sâest levĂ©e. Jâai marchĂ© trop longtemps pour faire demi-tour et me mettre Ă lâabri dans cette Ă©trange demeure dâoĂč je viens. Alors, je marche encore. Mon armure dâor dĂ©gouline de pluie. Elle me protĂšge de bien des choses mais pas du vent. Et câest en vain que je cherche une trace du passage de Trashalak.
Au bout dâun moment, je distingue une faible lueur dans lâobscuritĂ©. Jâapproche et dĂ©boule dans une clairiĂšre. LĂ , sâĂ©lĂšvent les restes dâune demeure semblable Ă celle que jâai quittĂ©e. Il nây a aucune lumiĂšre, sauf cette lueur Ă lâĂ©tage qui, dĂ©jĂ , montre des signes de faiblesse. Je fais le tour et ne trouve aucune entrĂ©e praticable. Soit elles ont Ă©tĂ© condamnĂ©es, cimentĂ©es, soit elles sont tellement envahies par la vĂ©gĂ©tation quâil est impossible de se frayer un chemin. Je tente dâescalader un mur mais la pluie lâa rendu trop glissant. Je reviens sous la fenĂȘtre oĂč il y avait de la lumiĂšre. Jâai lâimpression quâelle sâest encore affaiblie. Jâappelle. Aucune rĂ©ponse. Je nâentends aucun bruit venant de lâintĂ©rieur. Et lĂ encore, impossible de trouver une bonne prise pour grimper. Vais-je devoir rester sous la pluie ? Je ramasse une pierre et vise la fenĂȘtre Ă©clairĂ©e. Ma pierre entre, elle, et moi⊠je glisse sur lâherbe mouillĂ©e. Je me retrouve le cul dans la boue Ă espĂ©rer avoir attirĂ© lâattention de quelquâun. Mais il ne se passe rien et la lumiĂšre finit par sâĂ©teindre.
Alors, la terre tremble ! La terre sâouvre juste devant moi et un mur dâeau sâĂ©lĂšve, menaçant de sâabattre sur moi. ApparaĂźt alors, surgi de je ne sais oĂč, un homme, nu, dont la tĂȘte est comme une espĂšce de sculpture de chair malhabile reprĂ©sentant une tĂȘte de lion. Il semble recouvert dâun Ă©norme masse de chair rougeĂątre et presque liquide, palpitante. Il tend la main dans ma direction et promet de me sauver de ce tsunami en Ă©change de mon Ăąme. Je dois venir avec lui pour ĂȘtre sauvĂ©. Et mon Ăąme, je la rĂ©cupĂ©rerai plus tard. Le mur tremble au-dessus de ma tĂȘte mais ne sâabat toujours pas sur nous. Et lâĂȘtre Ă©trange, cette espĂšce de boursouflure se fait encore plus pressante. Ăa sent le piĂšge Ă plein nez. Ăa sent le Horla aussi.
Calmement, je retire une des protections de mon armure et observe les tatouages mouvant sur mon avant-bras. Quand ceux-ci prennent la forme du symbole du TroisiĂšme Rituel Aklo, je lâexhibe Ă cette chose. Et elle se met alors Ă paniquer. Le masque de chair se liquĂ©fie et toute cette chair superflue glisse le long du corps de lâhomme pour se rĂ©fugier dans les bois. Il ne reste plus lĂ quâun homme, nu et transi de froid, au regard aussi explosĂ© que sâil sâĂ©tait gavĂ© dâhallucinogĂšnes. Je retire lâimpermĂ©able qui recouvre mon armure et le donne Ă lâhomme qui, peu Ă peu, sort de son hĂ©bĂ©tude. Je me prĂ©sente.
Il sâappelle MĂźm. Il est sorcier. Il est tombĂ©, il y a fort longtemps, sous la coupe de ce Horla qui lâa, en quelque sorte, parasitĂ© et contraint Ă utiliser ses talents afin de piĂ©ger dâautres victimes pour se nourrir. En fait, ce Horla ne peut parler. Aussi, il avait surtout besoin dâune voix. Il aurait pu user de la force mais il nâĂ©tait pas encore assez dĂ©veloppĂ© pour cela. MĂźm me remercie de lâavoir sorti de lĂ mais je le sens bien amer aprĂšs cette expĂ©rience. Ăvidemment, le mur dâeau a disparu avec le Horla mais⊠la tempĂȘte souffle toujours et nous devons trouver un abris. MĂźm nâa aucune idĂ©e de lĂ oĂč nous pourrions aller. Le Horla sâest enfui avec ses connaissances de la forĂȘt. Quand je lui pose la question, il lui semble reconnaĂźtre cette demeure devant laquelle nous sommes mais ses souvenirs sont trĂšs flous. Il me semblait que le Horla se servait peut-ĂȘtre de cette lueur Ă lâĂ©tage pour attirer des proies mais MĂźm est incapable de me le confirmer. En tout cas, la crĂ©ature sâest enfuie dans les bois. On peut donc espĂ©rer que le manoir est vide et que, pour peu quâon puisse entrer, nous y serons Ă lâabri.
MĂźm ne prend pas le risque dâescalader la façade mais il trouve quand mĂȘme une sorte de soupirail par lequel nous gagnons les sous-sols du manoir. Il ne fait pas chaud mais au moins nous sommes Ă lâabri de la tempĂȘte. Jâobserve le sorcier. Je lui trouve un air prĂ©occupĂ© malgrĂ© lâimpassibilitĂ© quâil affiche. JâhĂ©site Ă lui poser des questions, Ă lui demander ce qui ne va pas. Mais je ne dois pas oublier ce que je fais lĂ . Je cherche Trashalak. Je dois savoir en quoi les chevalier dâor sont mĂȘlĂ©s Ă cette histoire entre Azathoth, lâĂ©lectricitĂ© et Millevaux. Je ne dois pas me laisser distraire. Je vais attendre la fin de cette tempĂȘte puis je reprendrai ma route. Mais, peut-ĂȘtre que ce sorcier pourrait quand mĂȘme mâaiderâŠ
Jâexplique au sorcier les raisons de ma prĂ©sence en ces lieux. Je veux en savoir plus sur les plans de la ChĂšvre Noire et les liens avec lâĂ©lectricitĂ© et les Cyborgs, Voyvodes et chevaliers dâor en exil. Peut-il mâaider ? Sait-il quelque chose ? A-t-il dĂ©jĂ entendu parlĂ© dâartefacts voyvodes, ou mĂȘme du Vir Stellas ?
MĂźm affirme ne rien entendre Ă ce que je lui raconte. Et il me demande mĂȘme, assez brutalement, de ne plus aborder ce sujet. Cette rĂ©ponse ne me convient pas. Aussi, je me saisis de mon flingue par le canon et fracasse la tĂȘte du sorcier Ă coups de crosse en rĂ©pĂ©tant mes questions. Quand jâen ai fini, mon arme est inutilisable mais, la gueule en sang, MĂźm gargouille quâil peut peut-ĂȘtre quelque chose pour moi maisâŠ
« Mais quoi, Bordel ?! »
MĂźm mâexplique quâil ne sait rien. Il me rappelle que moi non plus, je ne sais rien. Mais, il y a ici des gens, des choses, qui savent. Il suffit de devenir ces gens, ces choses et⊠je saurai. Mais que dois-je devenir ? Un arbre ! Un noyer, dont les racines auront baignĂ© dans lâĂgrĂ©gore et le PĂ©trol'magie, dont les Noix ouvrent les portes de la connaissance. Et comment devient-on un tel arbre ? LĂ , MĂźm dit pouvoir faire quelque chose pour moi.
La tempĂȘte est passĂ©e. La nuit est tombĂ©e et devenue brune. MĂźm et moi quittons cette Ă©trange ruine et nous enfonçons dans les bois. Ils sont de plus en plus touffus, denses. Nous devons nous frayer un passage en repoussant les branches dont je soupçonne certaines de ne vraiment pas vouloir que nous atteignons notre but. Pourtant, nous y parvenons. Je mâattendais Ă un clairiĂšre mais ce nâest pas le cas. Au-dessus de nous, dans les branches, sont (sus)pendues des petites poupĂ©es faites de branches et de boue. MĂźm mâindique un endroit, entre deux arbres, et me demande dây prendre place. Il sâagenouille devant moi et recouvre mes pieds, jusquâaux chevilles de terre et de mousses. Il me demande ensuite de lever les bras. Je mâexĂ©cute. Autour de moi, il dispose des bougies, des poupĂ©es, des soucoupes remplies de liquides odorifĂ©rant. Je nâai aucune idĂ©e dâoĂč il a sorti tout ça puisque, Ă part mon impermĂ©able, il nâa rien sur le dos. PourtantâŠ
MĂźm se fige devant moi. Il ouvre la bouche mais aucun son ne sort. Alors, il fait honneur Ă son nom et se lance sous mes yeux Ă une Ă©trange et quelque peu dĂ©rangeante pantomime. Il tourne sur lui-mĂȘme. Il tourne autour de moi, toujours silencieux. Et je sens. Je sens les tatouages qui me recouvrent sâagiter. Je sens ma peau de porc changer de texture, durcir. Je sens mon sang se transformer lui aussi. Je sens mes pieds sâallonger, se fondre dans la terre. Mes bras sâallongent et se couvrent de feuilles. Mes pieds sâenfoncent dans la terre et deviennent des racines. Ils traversent la terre et se gorgent dâĂgrĂ©gore. Et lâĂgrĂ©gore se mĂȘle Ă la sĂšve qui coure dans mes veines et remonte jusquâau bout de mes branches. Mes racines sâenfoncent et creusent la terre jusquâà ⊠Une grotte !
Quel Ă©trange endroit. Je suis toujours un arbre figĂ© dans le sol. Pourtant, mon regard se porte partout oĂč mon esprit le veut. Jâerre dans cet endroit. Câest bizarre. Ce nâest pas mon regard qui obĂ©it Ă ma volontĂ©, câest ma volontĂ© qui obĂ©it Ă mon regard, Ă son besoin maintenant obsessionnel de se poser partout oĂč il le peut. Mais une autre pulsion me pousse pourtant Ă mâenfuir. Cet endroit est malsain. Il est⊠sale, polluĂ© et corrompu. Il y a ici quelque chose qui, si je reste trop longtemps, va me contaminer. Quâest-ce ? Il ne sâagit pas dâĂgrĂ©gore., ni de PĂ©trolâmagie. Je tente de reprendre le contrĂŽle de mon regard. En vain ! La sanction est mĂȘme immĂ©diate. Je sens des centaines, des milliers de cafards et autres insectes surgir de partout dans cette grotte. Ils courent vers mes racines et remontent jusquâĂ mon tronc. LĂ , ils gravissent mes branches et sâinfiltrent en moi. Ils rampent dans mes veines et se gorgent de lâĂgrĂ©gore qui sâest mĂȘlĂ© Ă ma sĂšve, Ă mon sang. Tout Ă ma douleur, je laisse mon regard errer, voler jusquâà ⊠la Mort !
La Mort est lĂ Â !, dans cette grotte. Et quand elle tombe sous le poids de mon regard, elle se retourne et « me » fixe de ses orbites vides. Que fait-elle lĂ Â ? je tente de lui parler, de lui communiquer mes pensĂ©es. Mais lĂ encore, la sanction est immĂ©diate, sous la forme dâune pluie acide qui ronge mes feuilles et mes branches. MalgrĂ© tout, jâespĂšre que cette mort a saisi. Saisi quoi ? Que jâĂ©tais lĂ , que je voulais savoirâŠ
Mais la mort demeure impassible. Ses orbites vides fixent un espace vide. Je ne sais pas, je ne pense pas quâelle a perçu ma prĂ©sence. Mais, que fait-elle ici ? Jâattends, jâespĂšre quâelle va reprendre sa tĂąche et que jâapprendrai quand mĂȘme quelque chose. La mort dĂ©tourne son regard du mien, quâelle ne semble toujours pas avoir perçu. Par-dessus son Ă©paule, je vois lĂ un livre : le Vir Stellas ! La Mort a mis la main sur le Vir Stellas ! Elle tient lâouvrage Ă deux mains. Elle est fĂ©brile, euphorique. Puis elle sâen va en courant.
Je redeviens un homme-porc dans le silence le plus total. MĂźm en a fini avec son Ă©trange magie mais on dirait que tout autour de nous sâest mis Ă la page de son art et a dĂ©cidĂ© de vivre, encore un peu, dans le silence. Silence que je nâose troubler. MĂźm demeure imperturbable. Quand jâentends de nouveaux les bruit de la forĂȘt, je prononce enfin quelques mots. Jâinforme le sorcier que je vais retourner dans la maison de la Mort. Il est toujours muet. Il parait heureux. Nous prenons la route ensemble.
Et nous parvenons en vue de ce manoir. Câest une ruine envahie par la vĂ©gĂ©tation. Il nây a aucune lumiĂšre mais un Ă©trange comitĂ© dâaccueil. PrĂšs de lâentrĂ©e, il y a une huitaine de silhouettes qui se dressent tant bien que mal et sâapprochent de nous en claudiquant. Ils sont tous vĂȘtus de capes crasseuses et exhibent devant nous les moignons de leurs bras et jambes amputĂ©s. Ils ne parlent pas. On leur a aussi coupĂ© la langue. Ils ricanent seulement. Ils nous frĂŽlent de leurs moignons mais ne nous empĂȘchent pas dâavancer. Au moment dâentrĂ©e, je me tourne vers MĂźm. Toujours silencieux, il me fait un signe Ă©loquent de la tĂȘte. Je vais devoir entrer seul.
A lâintĂ©rieur, tout est sombre. JâĂ©prouve une sensation bizarre Ă la surface de tout mon corps. Jâai lâimpression que, lâespace dâun instant fugace, ma peau se durcit, redevient Ă©corce. Mais quand je palpe mes avant-bras, ils sont normaux, seulement recouvert dâune substance un peu collante rappelant de la sĂšve. Je tends lâoreille mais nâentends rien. Jâappelle. Personne ne me rĂ©pond. Jâavise un escalier. Je monte. Je fais attention Ă lĂ oĂč je mets les pieds mais pas de piĂšges ou des racines malignes. Enfin, on diraitâŠ
Soudain, un zazamon surgit de nulle part. Dans le noir, je crois reconnaĂźtre un Burâkwek Ă son gros cerveau gĂ©latineux. Il me braque avec cette technologie Ă vapeur qui va cracher de lâacide si je ne fais rien. Je saute de cĂŽtĂ© et Ă©vite de justesse le flot dâacide. Je nâai plus de flingue mais un bon coup de poing en plein dans sa masse cĂ©rĂ©brale spongieuse me libĂšre le passage. Jâappelle de nouveau. Mais toujours rien. Et jâai beau tendre lâoreille, je nâentends rien non plus. Pourtant, je suis certain de ne pas ĂȘtre seul ici. Ce Burâkwek nâest pas apparu tout seul. Quelquâun lâa invoquĂ©. Et je soupçonne cette mort de lâavoir fait Ă lâaide du Vir Stellas. Le problĂšme est que, Ă ma connaissance, le Vir Stellas contient des rituels bien plus dangereux que lâinvocation dâun zazamon et comme je nâai aucune idĂ©e ni des projets ni des compĂ©tences en sorcellerie de cette mortâŠ
En haut des marches, je suis accueilli par un hibou. Il dĂ©ploie ses ailes. Il a lâair⊠heureux. Mais⊠les hiboux ne sont pas ce quâils paraissent. Dans une vie antĂ©rieure, je possĂ©dais des clĂ©s « magiques » permettant dâaltĂ©rer le rĂ©el. Est-il-possible de puiser dans cette rĂ©miniscence de quoi rendre sa vĂ©ritable apparence Ă cet oiseau ? Je nâai pas de clĂ© mais, pourtant, lâimage du hibou se met Ă onduler, Ă se tordre. Il devient flou. Et cette tache de flou dans le vide se compresse pour devenir⊠un cadenas qui tombe lourdement au sol. Maintenant, il me faut une clĂ©.
Deux idĂ©es me viennent Ă lâesprit. Et si je pouvais ouvrir ce cadenas Ă lâaide du symbole-clĂ© du TroisiĂšme Rituel Aklo ? Ou sâil sâagissait plutĂŽt de la foudre ? Si je brandissais ce cadenas et attirais un Ă©clair, que se passerait-il ? Mais avant tout, je veux trouver cette mort et le Vis Stellas. Et je rĂ©agis ! Je suis dans un manoir en ruine, sombre et envahi par la forĂȘt de Millevaux, domaine et avatar de Shub-Niggurath. Et, je cherche la mort⊠Est-ce vraiment une bonne idĂ©e ? Et dâoĂč me vient cette image fugace dâune⊠chaise Ă©lectrique ? Jâai le cadenas. Ai-je besoin de plus ?
Je redescends les marches en courant. Je me prĂ©cipite vers la sortie. En vĂ©ritĂ©, rien ne sâoppose Ă ma fuite mais jâentends derriĂšre moi une voix grave avec quelque chose dâĂ la fois racoleur et mesquin dans le ton. Câest ironique, sarcastique mais, lâair de rien, cette voix me met en garde quant au fait de rĂ©unir des objets dĂ©fectueux. Sâagit-il du cadenas ? Juste avant de sortir, je jette un coup dâĆil par-dessus mon Ă©paule, il y a bien quelquâun dans les escaliers mais je ne parviens pas Ă lâidentifier nettement. Je sors !
Dehors, les Ă©clopĂ©s ne sont plus lĂ . MĂźm non plus. Le brouillard sâest levĂ©. Je sens que je suis en danger. Il souffle un vent sec. Je mâenfonce dans la forĂȘt pour mettre une distance de sĂ©curitĂ© entre cet endroit et moi. Puis, jâexamine le cadenas. Je remarque quâil porte quelques inscriptions dont je ne connais pas le sens. Je soulĂšve une partie de mon armure et compare ces symboles avec ceux que prennent mes tatouages mouvants. Mais il nây a aucun rapport. Alors, si mes tatouages ne semblent pas destinĂ©s Ă lâouvrir, il me reste la foudre. Vais-je devoir attendre quâun orage Ă©clate ou puis-je compter sur les rĂ©serves dâĂ©nergie dâun vieil artefact cyborg ou voyvode ? Mais vais-je en trouver dans ce Millevaux lĂ ou vais-je devoir trouver un moyen de rentrer chez moi ?
Jâerre dans la forĂȘt. Je nâai aucune idĂ©e de comment regagner lâInterzone. Jâaurais dĂ» mettre la main sur le Vir Stellas. Il y a peut-ĂȘtre une formule, un rituel dedans. Je marche pendant des heures. Mes pensĂ©es, comme moi, vagabondent et se posent de nouveau sur cette image de chaise Ă©lectrique. Dans le manoir, jâai cherchĂ© aprĂšs une mort. Dans les bois, je cherche une source dâĂ©lectricitĂ©. Avec une chaise Ă©lectrique, jâai les deux, non ? Mourir sur une chaise Ă©lectrique ouvrirait ce cadenas ? Trouverais-je une telle chaise au fond dâun vieux vaisseau voyvode ?
Et jâarrive en bordure dâun cours dâeau. Il fait presque nuit et une tempĂȘte se lĂšve. Je ne sais plus trop ce que je fais lĂ . Je sers le cadenas dans ma main mais, est-ce sous lâeffet de la forĂȘt, des pans de ma mĂ©moire se sont dĂ©jĂ Ă©chappĂ©s. En fait, je crois quâune partie de moi a dĂ©jĂ quittĂ© les lieux. Je retrouverais peut-ĂȘtre la mĂ©moire quand je serai de retour dans lâInterzone. Mon histoire mâattend peut-ĂȘtre dĂ©jĂ lĂ -bas. Mais en attendant, jâai besoin de souvenir pour avancer. Alors, je me replonge dans ces lettres et ces journaux. Je me rappelle la chasse aux artefacts voyvodes avec Yargalac. Je me rappelle aussi de la tombe de ce Soar Cyborg et de cette Ă©pitaphe : « LâĂ©lectricitĂ© garantit la rĂ©forme biscornue. » Et je me souviens mâĂȘtre fait cette rĂ©flexion comme quoi biscornue pouvait signifier tordu mais aussi Ă©voquer « deux cornes ». Quâest-ce qui a deux cornes tordues ? Quâest-ce que lâĂ©lectricitĂ© pourrait tordre ? Est-ce que lâĂ©lectricitĂ© pourrait tordre un ĂȘtre Ă deux cornes ? Mais un bruit me tire de mes pensĂ©es. Sans faire attention, je me suis aventurĂ© sur le territoire dâun Horla.
Et une silhouette reptilienne sort de lâeau. Je ne suis pas certain quâil sâagisse vraiment dâun Horla. Câest un cyborg. Je le vois Ă son implant lanceur de vinyles et Ă sa batterie. Il y a quelque chose dâĂ la fois vif et vide dans son regard. Il a un Ă©trange chapeau sur la tĂȘte, trop grand. Dans une main, il tient un livre â un exemplaire du Vir Stellas ? â et dans lâautre, un petit conteneur en verre. A lâintĂ©rieur, il y a un cĆur.
Et je rĂ©agis ! La batterie ! Elle contient forcĂ©ment de lâĂ©lectricitĂ© ou une Ă©nergie du mĂȘme genre qui ouvrira le cadenas. Je ne sais pas si ce cyborg reptilien acceptera de mâaider, ni mĂȘme sâil comprend quand on lui parle mais je lui demande quand mĂȘme. AprĂšs tout, on ne sait jamais. A ma grande surprise, il accepte mais, car il y a un mais, il dit vouloir se souvenir de certaines choses. De quoi ? De sa vie dâavant. Je lui demande de patienter un peu car je crois pouvoir faire quelque chose.
Je prends les deux journaux attribuĂ©s Ă Trashalak. Je les relis. Quelque chose me dit que ce cyborg pourrait bien ĂȘtre celui que je cherche mais jâai un doute. Alors, je me fies Ă cette rĂ©miniscence dâune autre vie, celle oĂč jâavais les clĂ©s qui permettaient de changer le monde, et jâespĂšre pouvoir changer les choses. Sous le coup dâune intense fatigue, je tombe Ă genoux. Mais, quand mon regard se porte sur lâun des journaux, je lis :
« Je mâappelle Trashalak. Je suis, ou plutĂŽt jâĂ©tais, un clone cyborg qui admire les Voyvodes. Mon plaisir dans la vie : dĂ©truire ! Enfin ça, câĂ©tait avant⊠Cela fait maintenant plusieurs annĂ©e que jâerre ainsi. Jâai rĂ©ussi Ă cacher ma nouvelle nature Ă mes proches. La nuit, quand je suis seul, je mâexerce avec ces nouvelles facultĂ©s qui sont les miennes. Câest Ă©trange, bizarre et fascinant de ne pas mourir⊠Mais, mĂȘme si cela mâapporte beaucoup, ce nâest pas gratuit. Je ne sais pas si câest lâinfluence de mon immortalitĂ© ou du chapeau mais, parfois, je ressens une subite envie de mourir. Cela passe vite mais cela revient souvent⊠En tout cas, je ne sais pas si câest Ă cause ou grĂące Ă cette nouvelle nature, mais les sorts contenus dans le livre sont dĂ©sormais miens et je peux les utiliser sans mĂȘme avoir besoin du livre. Dans la foulĂ©e, je me suis initiĂ© Ă quelques mystĂšres et mes recherches m'ont permis de mettre la main sur un Ă©clat dâĂ©pĂ©e magique brisĂ©e lors dâune bataille. Cette Ă©clat me permettra de crĂ©er de nouveaux sorts ou dâamĂ©liorer ceux que je maĂźtrise dĂ©jĂ . LĂ encore, est-ce un effet de la magie dâAzathoth (en tout cas, câest que jâai dit Ă tout le monde) ou une consĂ©quence de mon immortalitĂ©, mais me voilĂ recouvert dâĂ©cailles reptiliennes qui renforcent ma longĂ©vitĂ© et ma rĂ©sistance. Il mâa retrouvĂ©Â ! Le SumĂ©rien ! Il est venu chez moi et je nâai pu que mâincliner face Ă sa puissance. Nous ne nous sommes pas affrontĂ©s, pas la peine. Je sais quâil est plus fort que moi. Il vient dâarriver en ville avec un plan dont il ne veut rien me dire mais je dois le servir. Cela ne me plaĂźt guĂšre mais je ne peux quâaccepter, dâautant plus quâil fait montre dâune Ă©tonnante gĂ©nĂ©rositĂ© Ă mon Ă©gard. Mais qu'attend-il vraiment de moi ? Et quels sont ses buts ? Je ne sais pas qui est cet homme et je veux lâoublier. Aussi, certes je consigne ici cet Ă©vĂ©nement Ă©trange mais je mâen vais aussitĂŽt perdre ces notes. Pour oublier. Peut-ĂȘtre que cela fera sens pour celui ou celle qui lira ces lignes. Mais pour moi, cela nâen a aucun. Cet homme mâa sautĂ© dessus, dans les bois. Il mâa menacĂ© de son couteau en exigeant que je lui explique ce que, selon moi, valait la vie. Comment rĂ©pondre Ă cette question quand, comme moi, on ne meurt plus ? Alors, je lui ai expliquĂ© que pour moi la vie ne valait rien. Que peut-elle valoir pour celui qui se nourrit de sang humain et dâinsectes ? Et jâai profitĂ© dâun moment dâhĂ©sitation de sa part pour me repaĂźtre de son sang. Son sang Ă©tait Ă©cĆurant, Putride ! »
Je tends le journal au cyborg reptile. Il lit. Il a lâair heureux.
Trashalak me conduit dans un sous-sol de bĂ©ton suintant lâhumiditĂ©. Il rĂšgne un silence qui me plaĂźt assez. Trashalak mâexplique quâil partage cet endroit avec un Horla qui se nourrit du son. Aussi, autant ne pas attirer son attention en faisant trop de bruit. Sur le trajet, il ramasse quelques poignĂ©es de lichen et des racines. Nous arrivons dans une salle dont les murs, le sol et le plafond grouillent de larves et de vers. Trashalak, avalant une grosse poignĂ©e dâasticots, mâexplique quâaprĂšs sa transformation par le SumĂ©rien il ne pouvait plus se nourrir que de sang et dâinsectes. Mais, avec le temps, il a rĂ©ussit Ă varier un peu son alimentation. Nous sommes donc ici dans son⊠garde-manger.
Trashalak ouvre son gros livre. Jâessaye de lire le titre mais nây parviens pas. Il me tend la main. Je lui donne le cadenas. Il mâexplique ensuite que mĂȘme si sa batterie est pleine, il nâa quâun nombre limitĂ© de tentatives pour ouvrir le cadenas. Il va donc certes utiliser cette Ă©lectricitĂ© mais doit Ă©galement recourir Ă la technomagie dâAzathoth. Et lĂ , il me prĂ©vient, tout peut arriver. Je suis sous terre, dans une salle grouillante de vers dĂ©gueulasse, en compagnie dâun cyborg reptilien adepte de technomagie. Je ne suis plus à ça prĂšs.
« Quand faut y allerâŠÂ »
Trashalak lance une incantation. Il ne se passe rien mais il me demande de retirer mon armure. Je mâexĂ©cute et il parcourt du doigt mes tatouages polymorphes. Je ne comprends rien Ă ces symboles. Lui, au contraire, semblent les connaĂźtre. Il marmonne des mots que je ne saisis pas. Il tourne quelques pages de son livre et rĂ©cite une formule. Une flaque de PĂ©trolâmagie apparaĂźt. Il sâagit en rĂ©alitĂ© dâun Buggarzak pustulant qui sâapproche de moi avec un air concupiscent. Trashalak lĂąche le livre et se tord les mains jusquâĂ sâarracher les ongles en hurlant. Une fois fait, il ramasse le livre du bouts de ses doigts ensanglantĂ©s et, maladroitement, tourne encore quelques pages. Je fais un pas dans sa direction, pour lâaider. Mais je nâarrive plus Ă bouger. Je suis littĂ©ralement paralysĂ©. Pas par la peur ou le dĂ©goĂ»t, mais par la technomagie. Et quand je parviens de nouveau Ă bouger, câest pour me retrouver pliĂ© en deux en train de vomir un flot dâexcrĂ©ments. Quand les vomissements cessent, ils sont remplacĂ©s par une crise de tremblements incontrĂŽlable. Je regarde Trashalak. A quoi joue-t-il ?
Trashalak lĂšve les yeux vers moi. Si jâai des questions Ă poser Ă Azathoth, câest maintenant !
« Azathoth, vais-je rentrer chez moi ?
NON !, me répond-il par la bouche de Trashalak.
Vais-je mourir ici ?
OUI, ET TU VAS SOUFFRIRÂ !
Connais-tu les plans secrets de la ChÚvre Noire ?
OUIÂ !
Les Chevaliers dâOr ont-ils un rĂŽle Ă jouer dans tout ça ?
NON, ET ILS NâONT JAMAIS EU UNE QUELCONQUE IMPORTANCE DANS TOUT CELA ! »
Trashalak reste immobile. Je crois que, cette fois, il attend mon assentiment avant de tourner les pages et lancer un autre sort. Au point oĂč jâen suis, je lui fais signe dây aller. Un gros Ćil se met Ă flotter en lâair. Câest un Burâkwek aux dents pointues. Pour lâinstant, il dort. MĂȘme en sommeil, son Ćil reste ouvert. Et dâouvert, tout vert, moi je deviens⊠violet ! Et alors que ma peau change de couleur, mes tatouages eux aussi changent de couleur et deviennent dorĂ©s. Puis, les couleurs changent et alternent Ă toute vitesse. On dirait que je⊠clignote. Et mes tatouages changent eux aussi de forme et de couleur. Je ne comprends rien mais Azathoth lâa dit, je vais crever !
Trashalak ne me demande pas mon avis et se lance dans une nouvelle formule. Il sourit. Un Portail Dimensionnel sâouvre enfin. DerriĂšre, je reconnais les ForĂȘts Limbiques. Alors, le Burâkwek se rĂ©veille et me saute dessus pendant que Trashalak emprunte le Portail qui se referme derriĂšre lui. Et moiâŠ
Moi, je me vide de mon sang. Le Burâkwek mâa sautĂ© Ă la gorge et arrachĂ© un bon bout de bidoche. Je suis par terre, au milieu des vers et des asticots et un zazamon est en train de se repaĂźtre de mon sang.
Et voila comment ça se termine pour moi. Je voulais tout savoir mais Azathoth savait dĂ©jĂ et⊠on dirait bien quâil sâen fout complĂštementâŠ
Trashalak a traversĂ© les ForĂȘts Limbiques et a pu regagner lâInterzone. Depuis, on raconte quâun tueur en sĂ©rie dĂ©coupe des jeunes hommes de 15 ans en 12 morceaux avec une scie de bĂ»cheron. On dit quâil pratique des rituels sanglants au nom dâAzathoth qui laisse faireâŠ
Commentaires de Thomas :
A. Je consacre en effet toutes mes journĂ©es, et mes nuits, Ă lâĂ©tude du Vir Stellas. Ătude est un mot peut-ĂȘtre bien inadaptĂ© car, en vĂ©ritĂ©, je « subis » littĂ©ralement lâemprise de cet Ă©trange tome.
J'adore :)
B. « Cette forĂȘt est plus quâune forĂȘt, je lâai dĂ©jĂ dit. Mais ce nâest pas seulement le domaine de la chose qui rĂšgne sur ces bois. Je crois que cette forĂȘt est LA chose en elle-mĂȘme, lâEntitĂ© dominante. Je nâai pas revu cet Ă©trange buste gĂ©ant dans les cieux de ces bois. Mais jâai ressenti autre chose. CâĂ©tait plus insidieux. CâĂ©tait⊠pire. Cet endroit baigne dans une « énergie » malsaine, Pierre. Une sorte dâĂ©ther que certains des habitants de ces bois manient grĂące des rĂšgles qui seraient interdites dans notre monde. »
J'aime bien comme tu dĂ©cris la forĂȘt de Millevaux sans nommer les termes techniques, en mode le personnage dĂ©couvre totalement.
C. « Oui, un rituel qui permettrait de gagner cette Ă©trange forĂȘt non plus en rĂȘve mais en rĂ©alitĂ©. Or, pour cela, il faut ĂȘtre au moins deux. Câest pour cela que jâai besoin de toi. Je te sais fĂ©rue dâoccultisme et il nây a que toi pour mâaider Ă rĂ©aliser ce rituel. »
Hum, bonne idée :)
D. « Au lieu de Jemima et de son ami, je trouvais deux corps horriblement mutilĂ©s. Mais, plus Ă©trange encore est la "mise en scĂšne". Tous deux Ă©taient en effet recouvert de cicatrices et de plaies reproduisant en grande partie les symboles Ă©tranges dessinĂ©s sur les murs de la piĂšce oĂč je les ai dĂ©couverts. Ces mĂȘmes symboles se trouvaient dans diverses notes Ă©parpillĂ©es autour des cadavres. Ăvidemment, jâai tout de suite prĂ©venu la police qui a conclu Ă un suicide particuliĂšrement macabre. »
Je suppose que c'est le rituel pour partir Ă Millevaux :)
E. L'échange de lettres est réussi, dans le plus pur style lovecraftien.
F. Tu rencontres la Mort dans une cabane qui te tend du courrier Ă lire ? On se croirait dans du Pratchett :)
G. J'aime bien l'idĂ©e du manoir du passeur d'Ăąmes qui se fait peu Ă peu envahir par Millevaux et le passeur d'Ăąmes qui dĂ©cide de quand mĂȘme y rester, parce qu'il se sent chez lui :)
H. J'aime bien les chassés-croisés dans le temps, en mode vertige logique : Corso qui lit des lettres qui ne seront écrites que plus tard, puis qui découvre un manoir qui est le futur du manoir précédemment visité...
I.J'aime beaucoup le look de l'homme-lion, et le fait que la tĂȘte lĂ©onine soit en fait un horla qui recouvre un humain.
J. « Il me semblait que le Horla se servait peut-ĂȘtre de cette lueur Ă lâĂ©tage pour attirer des proies mais MĂźm est incapable de me le confirmer. » Je crois reconnaĂźtre une entrĂ©e proche dans Nervure (des brigands qui allument une lanterne dans une maison pour attirer des voyageurs Ă dĂ©trousser). Utilise-tu de temps en temps Nervure ?
K. « PrĂšs de lâentrĂ©e, il y a une huitaine de silhouettes qui se dressent tant bien que mal et sâapprochent de nous en claudiquant. Ils sont tous vĂȘtus de capes crasseuses et exhibent devant nous les moignons de leurs bras et jambes amputĂ©s. Ils ne parlent pas. On leur a aussi coupĂ© la langue. Ils ricanent seulement. Ils nous frĂŽlent de leurs moignons mais ne nous empĂȘchent pas dâavancer. »
Sont-ce les survivants des rituels de passage dans Millevaux ?
L. « Deux idĂ©es me viennent Ă lâesprit. Et si je pouvais ouvrir ce cadenas Ă lâaide du symbole-clĂ© du TroisiĂšme Rituel Aklo ? Ou sâil sâagissait plutĂŽt de la foudre ? Si je brandissais ce cadenas et attirais un Ă©clair, que se passerait-il ? Mais avant tout, je veux trouver cette mort et le Vis Stellas. Et je rĂ©agis ! Je suis dans un manoir en ruine, sombre et envahi par la forĂȘt de Millevaux, domaine et avatar de Shub-Niggurath. Et, je cherche la mort⊠Est-ce vraiment une bonne idĂ©e ? »
En fait, tous ces rituels de passage me font penser Ă la conclusion du jeu de rĂŽle S'Ă©chapper des Faubourgs :)
M. « Trashalak lĂąche le livre et se tord les mains jusquâĂ sâarracher les ongles en hurlant. Une fois fait, il ramasse le livre du bouts de ses doigts ensanglantĂ©s et, maladroitement, tourne encore quelques pages. Je fais un pas dans sa direction, pour lâaider. Mais je nâarrive plus Ă bouger. Je suis littĂ©ralement paralysĂ©. Pas par la peur ou le dĂ©goĂ»t, mais par la technomagie. Et quand je parviens de nouveau Ă bouger, câest pour me retrouver pliĂ© en deux en train de vomir un flot dâexcrĂ©ments. Quand les vomissements cessent, ils sont remplacĂ©s par une crise de tremblements incontrĂŽlable. Je regarde Trashalak. A quoi joue-t-il ? »
Ah ça rigole pas ces rituels :)
Hors ligne
IL FAUT TUER LA REINE DES ELFES
Un solo Millevaux qui vire Ă la high / dark fantasy la plus Ă©chevelĂ©e, c'est ce que vous aurez droit avec ce retour d'expĂ©rience oĂč je prends le temps de dĂ©tailler les mĂ©caniques de cet Ă©mulateur de MJ efficace qu'est 9 Questions !
(temps de lecture : 10 min)
Eric, cc-by-nc-nd
Joué en solo le 15/12/2023
Le jeu : 9 Questions, par John Fiore, un moteur pour le jeu de rĂŽle solo
Univers : la forĂȘt de Millevaux
Hyperion par Krallice, un black metal spatial et instrumental, lumineux, intense et habité.
Le contexte :
Voilà un moment que je voulais tester 9 Questions via un solo qui serait ensuite diffusé, et je me mets enfin le pied à l'étrier, car je suis assez avancé dans l'écriture de Biomasse et donc si je veux tirer quelques leçons de 9 Questions, il est plus que temps de le tester. Je me permets de vous faire un CR solo un peu sale, avec beaucoup de commentaires méta, pour que vous puissiez voir l'impact du moteur.
J'ai dĂ©cidĂ© de me lancer sans lecture prĂ©alable du jeu. Il est court, j'avais la flemme et surtout je voulais me garder la surprise. PremiĂšre bonne surprise, ça fonctionne en plug and play. Le jeu est une suite de questions orientĂ©es avec une procĂ©dure qui mĂȘle jets de dĂ©s, directives et mentions d'emploi de gĂ©nĂ©rateurs alĂ©atoires externes et d'un systĂšme de jdr choisi par la personne qui joue. Du fait de sa rĂ©daction (dissociant actions de PJ et actions de MJ), ce me semble aussi ĂȘtre un bon moteur du jdr 1 MJ / 1 PJ.
Mon personnage (créé avec cette table) :
075_Roberto Rizatto _Pixjockey_ Facebook resident, cc-by-nc & Agathe Pons, libre de droits
Mission de vie : Je suis VIVELIANE
Je suis de nature féerique. J'aspire à maßtriser tous les arcanes de la magie pour devenir insurpassable. Je veux voler les secrets magiques d'une personne que j'aime et je veux enfermer une personne rivale en sortilÚge.
Destin
GUERRE
La grande guerre qui fait rage au loin dans la forĂȘt va avoir de grandes rĂ©percussions ici et je vais me retrouver au centre de cette tourmente. Je vais reprocher Ă une personne d'importer le conflit et je vais dĂ©velopper un amour romantique pour un autre personne, alors que je crois que c'est le pire moment pour s'attacher.
(J'ai hésité avant de garder cette premiÚre image tirée, puisque je la considÚre comme un des portraits les plus gore de Nervure mais je me suis dit que j'allais me forcer à utiliser les premiers tirages. Je pars donc sur le principe que Viveliane, mon personnage, a utilisé le visage d'une personne qu'elle aimait pour s'accaparer ses secrets magiques (cf sa mission de vie).)
Question 1a : Quelle est l'hostilité inhérente au cadre du jeu qui entre inopinément en conflit avec la motivation héroïque des PJ et menace de s'aggraver avec le temps ?
Le monde est en train de pourrir. Les forces tĂ©nĂ©breuses prennent le dessus. La forĂȘt devient dĂ©moniaque et les hommes sont pris de folie. C'est contraire avec les valeurs de beautĂ© et de poĂ©sie que je recherchais en tant que membre du peuple fae.
Cette accĂ©lĂ©ration de la dĂ©crĂ©pitude, on le doit Ă Bevaraiz, la reine des elfes corrompus. [je me suis aidĂ© d'un des gĂ©nĂ©rateurs prescrits dans le jeu, Seventh Sanctum. Elle absorbe la puretĂ© du monde pour nourrir son cĆur et se maintenir en vie. [inspirĂ© de ce gĂ©nĂ©rateur d'icĂŽnes assez cool prescrit par le jeu, Zero Dice]
Dead in the woods par Grey Daturas, du stoner/sludge bruitiste, instrumental et chamanique, lourd, lent, rotatif, fuzzy, décérébré, jouissif, planant
L'ennemi poursuit de nouveaux objectifs (tirage de dĂ© demandĂ© par le jeu). Bevaraiz a envoyĂ© ses sbires, les araignĂ©es archivistes, Ă ma poursuite. Elle veut absorber mon pouvoir. Les monstrueux et gigantesques arachnides Ă tĂȘte de grimoire courent dans les frondaisons Ă ma recherche.
{en tant que PJ :
⹠Utilisez les rÚgles du JdR et les capacités des héros pour répondre à la menace selon leurs motivations héroïques]
[je vais utiliser le systÚme de résolution de Nervure]
J'essaye de tuer les araignĂ©es archivistes avec des papillons de sang qui sortent de mes yeux. Cela ne marche pas, les papillons s'Ă©crasent sur leurs champs de force mentaux et elles me capturent dans leur toile. J'en profite pour lire Ă la dĂ©robĂ©e quelques unes des glyphes Ă©crites sur leurs grimoires. J'en dĂ©duis que cela faisait partie de mon destin d'ĂȘtre prĂ©sentĂ© Ă la reine des elfes.
(rĂ©solution : Vous Ă©chouez mais vous apprenez quelque chose dâutile pour la suite.)
(je réalise que je devais choisir entre question 1a et question 1b alors que je pensais enchaßner les deux)
Question 2 : Quel événement inhabituel se produit peu de temps aprÚs ?
(tirage d'oracles : shuriken et pancarte fléchée ; tirage d'événement : un combat)
Je suis portĂ© sur une poutre portĂ©e par les deux araignĂ©es archivistes. Nous arrivons dans la cour d'automne de la reine, ou ce qu'il en reste. Toute la vallĂ©e trempe dans un bain bactĂ©riologique, il ne demeure de son palais d'automne que les colonnes boisĂ©es Ă tĂȘte de dragon, dĂ©sormais pourries de moisissure.
C'est alors que des goupils attaquent la cour à coups de shurikens (j'ai choisi des goupils car c'est l'espÚce la plus ninja-compatible), ils sont visiblement là pour m'exfiltrer. La reine réagit, du haut de son trÎne de ronces flétries, elle envoie des vagues de putréfaction sur les goupils. L'un d'eux meurt, un autre est "seulement" touché et la troupe arrive à m'emporter au loin.
(rĂ©solution : Lâune des protagonistes se transforme en horla.)
Alors qu'ils me délient et que je veux les remercier, je réalise que leur chef, Rocambole (nom tiré de ma table des noms de goupils, encore inédite), est celui qui a été atteint par la souillure. Il cache tant bien que mal son bras et la partie de sa gueule qui ont été touchés, mais je me doute qu'il va mourir ou se transformer en horla. Je sais que c'est le pire moment pour s'attacher, mais j'ai le coup de foudre pour ce farouche guerrier. [je joue un élément de mon destin "Guerre"]
Rocambole n'est pas du genre à se perdre en effusions. Il me morigÚne plutÎt pour mon imprudence et dit qu'il ne m'a pas fait libérer gratis. je vais devoir mettre mes pouvoirs au service de leur guérilla.
Question 3 : Quels éléments des résultats de la Question 1a ou 1b et de la Question 2 se retrouvent soudainement liés de maniÚre surprenante, mettant encore plus en péril les PJ et leur motivation héroïque ?
Au coin du feu, Rocambole m'avoue que les goupils seraient peut-ĂȘtre responsables de la corruption de la reine des elfes. Ils ont jadis voulu la capturer pour utiliser son Ă©nergie magique afin de se dĂ©fendre des humains mais disons... que l'expĂ©rience a mal tournĂ©. La reine des elfes leur a Ă©chappĂ©e, griĂšvement corrompue et elle est ainsi devenue cette menace globale pour tout habitant de la forĂȘt. Les goupils sont aujourd'hui considĂ©rĂ©s comme combattants de la libertĂ© parce qu'ils sont parmi les derniers Ă l'affronter, mais ils ont aussi une lourde responsabilitĂ© dans cette guerre.
Ceci n'altĂšre pas ma rĂ©solution Ă m'allier avec les goupils. Je passe du temps avec Rocambole mĂȘme si je ne suis pas au stade de lui avouer mes sentiments. J'ai cependant rĂ©ussi Ă gagner assez sa confiance pour m'occuper de ses soins. Ses jours ne sont pas en danger, mais cela se confirme qu'il va devenir un horla. La corruption s'est Ă©tendue et il doit dĂ©sormais porter une capuche pour le cacher des siens.
Question 4 : Comment les PJ peuvent gagner du terrain sur lâennemi/la menace grĂące Ă leur motivation hĂ©roĂŻque ?
(jet de dé : 3 -> poursuite)
Nous devons prendre l'initiative. Actuellement, nous ne sommes pas de taille Ă affronter la reine des elfes, notre courte confrontation m'en a donnĂ© la certitude. Il nous faut un artefact, le cristal de ciel, qui est dĂ©tenu par les corax, qui jusqu'Ă prĂ©sent sont restĂ©s neutres dans cette guerre. Les espions goupils savent qu'une cohorte de corax s'est mise en charge de dĂ©placer le diamant qui attire trop de convoitises lĂ oĂč il est, Ă la Cour Corbelle. Chance pour nous, le cristal est trop pour qu'ils puissent le transporter sous forme corbeau. Ils le dĂ©placent dans un coffre, et ils sont sous forme humaine et doivent marcher.
Avec Rocambole, deux autres goupils d'élite (Morsure et Crispe) et une grourse de combat (Gueularde), nous nous lançons à leurs trousses.
Quand nous arrivons Ă rattraper la cohorte, nous comprenons que les corax avaient anticipĂ© une attaque. Ils ont avec eux un ignoble troll des marais et Ă©galement Sourire, une redoutable sorciĂšre corax de la Voie du Cercle Noir. Ă peine avons-nous assimilĂ© cette information que la magie noire fait son Ćuvre et nous sentons nos rythmes cardiaques devenir fous.
(je réalise un peu tard que Zero Dice permet de copier-coller simplement les icÎnes des tirages en version PHP. Je vous les mets donc ici).
Le combat fait rage. Gueularde parvient à terrasser le troll des marais mais Morsure meurt d'une crise cardiaque. Les corax passent au plan B. Ils ouvrent le coffre. A l'intérieur, le diamant du ciel, tendu de filets, est emporté par des corax métamorphosés en corbeaux. Mais nous avons capturé Sourire. C'est une puissante sorciÚre. à défaut d'avoir le cristal du ciel, nous allons la forcer à travailler pour nous.
(résolution : Vous échouez mais vous avez une bonne surprise.)
Mademoiselle Chaos CC, cc-by-nc
Question 5 : Comment les gains hĂ©roĂŻques tirĂ©s des rĂ©sultats de la Question 4 peuvent-ils soudainement ĂȘtre remis en cause lorsque de nouvelles informations sur le vrai visage / le vrai plan / le vrai pouvoir de l'ennemi est connu ?
Sourire nous rit au nez : "Vous vous y prenez trop tard de toute façon. La reine va tuer le roi Obéron et c'en sera fini de toute pureté dans ce monde."
Pour l'avoir vu une fois, je sais que le roi est extrĂȘmement bizarre. Ses yeux sĂ©duisants sont azur. Ses cheveux sont la couleur des amĂ©thystes. Sa voix est hypnotique et convaincante. Il y a une Ă©lĂ©gance Ă ses lĂšvres qui est trĂšs sĂ©duisante. Il a des cicatrices sur le bras droit - discuter de ce moyen sĂ»r de l'amener aux larmes. (littĂ©ralement un tirage alĂ©atoire de Seventh Sanctum)
Nous nous prĂ©cipitons vers la cour d'hiver du roi ObĂ©ron pour empĂȘcher le pire. Si Sourire ne nous aide pas, je l'emprisonnerai en sortilĂšge (cf ma mission de vie).
Nous arrivons Ă la cour du roi ObĂ©ron, mais nous n'avons que quelques minutes d'avance sur la reine des elfes et Sourire ne se montre pas trĂšs coopĂ©rative. J'emprisonne alors son Ăąme dans une pomme et j'utilise cet objet, piquĂ© d'aiguilles pour dĂ©placer le roi ObĂ©ron avec nous dans les forĂȘts limbiques.
(rĂ©solution : Vous optez pour lâattitude la plus vile.)
ObĂ©ron ne se montre pas vraiment reconnaissant. Il m'accuse d'avoir dĂ©truit le corps de Sourire pour mon agenda personnel. Il semble ĂȘtre si amoureux de la reine qu'il pourrait mourir pour elle.
Question 6 : Comment les rĂ©sultats nĂ©gatifs des Questions 4 et 5 peuvent-ils encore ĂȘtre intensifiĂ©s, en forçant les hĂ©ros Ă s'engager dans une action de type "agir ou mourir" conformĂ©ment Ă la motivation hĂ©roĂŻque ?
La peau de Carambole se desquame sous forme de feuilles mortes. Sa transformation en horla semble ĂȘtre imminente. Il grogne et n'a plus toute sa tĂȘte. je lui avoue mon amour mais j'ignore s'il comprend. Je dois tirer une flĂšche-harpon dans le cĆur de la reine des elfes pour m'en servir pour guĂ©rir Carambole.
(je tire une poursuite mais là encore je me suis déjà fait une idée, donc on part plutÎt sur un combat).
PortĂ© par Gueularde, Carambole et moi nous portons Ă la rencontre du convoi maudit de la reine des elfes. AnimĂ© par l'Ă©nergie du dĂ©sespoir et par mon pouvoir magique dĂ©cuplĂ© par les deux sacrifices passĂ©s, je rĂ©ussis mon tir et j'arrache le cĆur de la reine. Je le fais manger Ă Carambole qui retrouve forme humaine... euh, renarde. Je l'embrasse passionnĂ©ment.
J'ai l'impression d'ĂȘtre moins monstrueux moi aussi.
(rĂ©solution : Lâune des protagonistes retrouve son humanitĂ© perdue.)
Par contre, la reine des elfes, privĂ©e de son cĆur, perd toute cohĂ©sion, elle se rĂ©pand en branches et en racines griffues dans toutes les directions.
Question 7 : OĂč la motivation hĂ©roĂŻque peut-elle sâexprimer le plus efficacement ?
(tirage : combat)
Il est temps de faire face Ă la situation. Je dois mettre toute mon Ă©nergie magique dans la bataille dĂ©cisive contre la reine des elfes, tant que le roi ObĂ©ron est Ă l'abri dans les forĂȘts limbiques.
The storm bells chime par Sol, entre dark ambient et gothique, le dialogue entre un ange et un bûcheron avec en fond la tristesse du piano et l'écorce des guitares.
Alors que l'orage fait rage, je me vide de ma substance pour contrer les attaques mortelles de la reine-hydre.
Mais je me suis dĂ©finitivement attaquĂ© Ă plus fort que moi. Elle plante ses racines dans mon cĆur et je comprends que je vais bientĂŽt mourir.
Mais j'ai compris sa faille. Je murmure quelque chose à Carambole. Il retient ses larmes et acquiesce. Il prend ma pomme piquée d'aiguilles, et fuit dans un passage limbique. Les tentacules végétaux de la reine s'engouffrent aussitÎt à sa poursuite.
Question 8 : OĂč se dĂ©roule l'Ă©preuve de force finale entre les hĂ©ros et l'ennemi par rapport aux rĂ©sultats de la Question 7 ?
(je vais au plus vite, donc j'ignore les tirages aléatoires hors résolution pour me centrer sur les procédures)
Dans les forĂȘts limbiques, une version dĂ©gradĂ©e et dĂ©crĂ©pie de la cour d'hiver s'est dĂ©veloppĂ©e autour du Roi ObĂ©ron. Carambole lui fait avaler de force la pomme plantĂ©e d'aiguilles qui contient l'Ăąme de Sourire.
Les tentacules végétaux se précipitent vers le roi. Carambole fait mine de s'interposer, mais au dernier moment il fait une esquive qui donne l'impression que les tentacules l'ont balayé (alors qu'ils visaient à le tuer).
Les tentacules prolongĂ©s de petites mains et de bouches avec la voix de la reine implorent le roi de se laisser dĂ©vorer, ce qu'il accepte de bon cĆur, par amour. Il se fait aspirer par des troncs d'arbres creux qui forment les plus gros tentacules de la reine.
Carambole jubile. Le ver était dans le fruit. La "nourriture" était piégée.
Les tentacules explosent. La reine n'a pas supporté le poison qu'était la pomme. Une pluie d'écorces pourries retombe sur la parodie de la cour d'hiver.
(rĂ©solution : Les choses se passent comme on vous lâavais prĂ©dit.)
Question 9 : OĂč en est le monde suite aux rĂ©sultats des Questions 7 et 8 ?
Depuis la mort de la reine des elfes, le monde n'est pas meilleur qu'avant sa corruption. Il n'est juste plus voué à sa perte. La guerre perdure. Entre humains et goupils. Entre goupils et corax.
Et moi, en terre, je repose.
Dans le cĆur de Carambole, je vis encore.
Et son cĆur de guĂ©rillero bat trĂšs fort.
Bilan :
Je ne prétends pas que 9 Questions a été rédigé spécifiquement pour une approche plug and play mais ça s'en rapproche beaucoup.
Il y a cependant un dĂ©faut d'Ă©criture si on se fie Ă cette approche, c'est qu'au dĂ©but de chaque question, on nous demande d'imaginer quelque chose puis on nous fait tirer sur une table pour prĂ©ciser ce quelque chose mais Ă ce moment je trouve que c'est trop tard car mon idĂ©e est dĂ©jĂ figĂ©e. Cela me semble important de bien grouper les procĂ©dures qui doivent ĂȘtre appliquĂ©es en mĂȘme temps ou de penser Ă l'ordre de prĂ©sentation (j'aurais moins fait l'erreur si la procĂ©dure avait Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e en sens inverse). Autre problĂšme, il y a un gĂ©nĂ©rateur de PNJ mais il est Ă la toute fin, sans mention prĂ©alable de son existence, du coup je l'ai pas utilisĂ©, c'est dommage. Ce sont des leçons que je peux tirer pour mes propres rĂ©dactions.
C'Ă©tait trĂšs long Ă jouer puisque ça m'a pris deux heures et demie, mais je dois reconnaĂźtre que j'ai perdu beaucoup de temps en retranscription, Ă vouloir vous montrer mes tirages et tout. Je ne suis pas certain de dire que cette longueur de traitement est un dĂ©faut, on peut au contraire parler de haut potentiel ludique, et puis ça serait allĂ© beaucoup plus vite si j'avais juste jouĂ© dans ma tĂȘte avec des aides de jeu physique.
Mon tirage de perso de départ (un féerique) plus les générateurs plutÎt typés fantasy ont orienté l'histoire vers de la hi-fantasy. C'était intéressant mais pas forcément ce que j'avais envie de jouer. En rÚgle générale, 9 Questions reste orienté pour jouer de l'héroïsme, ceci dit.
Au final, 9 Questions tient bien la route si vous comprenez bien que ce n'est pas du tout un systÚme autonome mais un guide pour transformer vos aides de jeu en émulateur de MJ cohérent. Il y a sûrement quelques leçons à en tirer pour Biomasse sans que je puisse aujourd'hui dire lesquels. Je dois dormir dessus.
Hors ligne
FORĂTS JAUNES
Humeur noir et mindfuck au menu d'un opium jaune corsé à souhait. Un récit de partie solo par Damien LagauzÚre
Temps de lecture : 21 mn
(image par Dall.e)
Joué le : 03/01/2020
Le jeu principal : Lacuna par Jared Sorensen, un jeu de rĂŽle dâinception onirique et conspirationniste
Univers : la forĂȘt de Millevaux
Jeux secondaires :
Bois-Saule, jeu de rÎle solo pour vagabonder dans les ténÚbres sauvages de Millevaux
Oriente, perdre ses repĂšres en traversant la forĂȘt de Millevaux
L'histoire :
Le personnage de « Cobra Verde », AKA lâAgent Fowler, a Ă©tĂ© crĂ©Ă© et jouĂ© avec un mix de Lacuna LIEN, Mantra LIEN, Omniscience LIEN.
Les scĂšnes des premiĂšres missions ont Ă©tĂ© dĂ©fini avec Dream Askew. Jâai utilisĂ© Bois-Saule LIEN, Oriente LIEN ainsi que Mantra 2 LIEN pour les suivante
Avant, il était un Serpent. « Cobra Verde », le toxico, le dealer, le chimiste concepteur de doux poisons hallucinogÚnes.
Maintenant, il est lâAgent Fowler. Pour le compte de lâ « Organisation », il explore ce monde Ă©trange oĂč sont propulsĂ©s ceux qui sont addicts Ă cette nouvelle drogue quâon appelle « La Bille ».
Mission 1Â :
Random Connect : Digital Realm
ProblĂšme ! Je ne suis pas lĂ oĂč je suis censĂ© ĂȘtre. Mais il y a quelque chose Ă trouver ! Cet endroit est un grand vide mais je sens pourtant une « prĂ©sence » pleine de⊠vĂ©nĂ©ration ? Une sorte de gardien invisible qui mâobserve.
Le gardien sort de lâombre. Il me laissera accĂ©der au Royaume de la Bille si je lui rends sa mĂ©moire. Je pourrais lui concocter une drogue Ă cet effet mais jâai besoin de matĂ©riel. Je contacte « Ctrl » qui me fournit lâĂ©quivalent dâun petit laboratoire de chimie. Le gardien a lâair satisfait de ce que la drogue lui procure comme mĂ©moire. Il me laisse passer.
Infos pour lâOrganisation : le Domaine Digital est une sorte de check-point entre notre monde et celui de la Bille. Il y a un gardien.
Mission 2Â :
Random Connect : Varied Scarcities
Câest une usine gĂ©ante ou une plateforme pĂ©troliĂšre plantĂ©e dans le dĂ©sert. LĂ encore, je me sens observĂ©. Ăa sent la mort, la charogne. Une femme me rejoint. Je la connais de vue. Je lâai croisĂ©e au siĂšge de lâ « Organisation ». Elle a Ă©tĂ© recalĂ©e Ă lâentretien. Quand je lui demande ce quâelle fait lĂ , elle me rĂ©pond : « Le croquis embrasse les consĂ©quences. Le soleil se souvient dâune chose. »
Elle est dĂ©foncĂ©e. A la Bille ? Je lui demande qui est son fournisseur. Je dois la secouer pour obtenir une rĂ©ponse : La Magicienne ! Je le trouverai dans un endroit nommĂ© Le Chaudron. Mais le Chaudron nâest pas dans notre monde. Il est ici, dans le monde de la Bille.
Infos pour lâOrganisation : lâ « Organisation » nâa visiblement pas le monopole de la Bille. Celle quâon appelle La Magicienne est un fournisseur. Mais elle se cache ici, dans le monde de la Bille. Comment fait -elle pour accĂ©der Ă notre monde ?
Mission 3Â :
Random Connect : Outlying Gangs
Je cherche La Magicienne et son chaudron. Je traverse le dĂ©sert jusquâĂ une arche de pierre taillĂ©e par le vent. Jâentre alors sur le territoire de ceux quâon appelle « La Gracieuse ArmĂ©e du Sacrifice », une bande de mutants motorisĂ©s. Est-ce la Bille qui les a fait muter ? Vais-je muter moi aussi ? Sâagit-il dâanciens toxs venus de mon monde ou bien sont-ils des⊠indigĂšnes du monde de la Bille ?
En attendant, trois engins Ă moteur foncent vers moi. On me tire dessus. Le tireur a des tentacules et le corps recouvert de boursouflures verdĂątres. Jâesquive, roule au sol et saute. Je dĂ©sarçonne un motard. Jâappelle « Ctrl ». Jâai besoin dâaide. Trois agents apparaissent et la lutte est dĂ©jĂ plus Ă©gale.
Nous capturons un mutant mais il refuse de parler. Les agents mâexpliquent ne pas pouvoir le ramener chez nous. Je passe une dizaine de minutes Ă le torturer et apprends oĂč trouver ce fameux Chaudron.
Infos pour lâOrganisation : le monde de la Bille est peuplĂ© mais je ne sais pas si ce sont des toxs issus de notre monde ou des gens qui sont « nĂ©s » ici. Certains ont manifestement mutĂ©, sous lâeffet de la Bille ? Jâai localisĂ© le Chaudron.
Mission 4Â :
Random Connect : Varied Scarcities
Câest un vaste marchĂ© fait de bric et de broc qui sâĂ©tend au fond dâun cratĂšre poussiĂ©reux et ensablĂ©. LĂ , je cherche La Magicienne. Soudain, une femme est prise dâun violent hoquet. Elle se tord de douleur et crache quelque chose de bien trop gros pour tenir dans sa gorge. Câest une⊠arbalĂšte !
Câest un signe. Je veux cette arbalĂšte ! La femme est sur la dĂ©fensive. Elle me dit vouloir ĂȘtre tranquille et me prĂ©vient que cette arme est Ă usage unique. Je promets de la laisser tranquille si elle me donne lâarme.
Il nây a quâun seul carreau. Je pointe lâarbalĂšte tout droit au-dessus de ma tĂȘte et tire, mais aprĂšs avoir gobĂ© une Bille. Le carreau monte trĂšs haut puis prend la direction des Abattoirs. Câest lĂ que se cache La Magicienne.
Infos pour lâOrganisation : La Magicienne se cache dans les Abattoirs. Avec de la Bille, je peux altĂ©rer la rĂ©alitĂ© de ce monde.
Mission 5Â :
Random Connect : The Earth Itself
Ces Abattoirs ne ressemblent pas tout Ă fait aux nĂŽtres. La viande suspendue aux crochets nâest pas morte. Elle attend dâĂȘtre trempĂ©e dans un bain sombre dont lâodeur rappelle la Bille.
La viande nâest pas morte et elle est agressive. Jâesquive, je cours. Je me fie Ă mon instinct et Ă la Bille pour trouver mon chemin jusquâĂ La Magicienne.
Jâouvre une porte et manque de tomber dans un gouffre. Au fond souffle un vĂ©ritable ouragan. Sur le cĂŽtĂ©, La Magicienne, les bras croisĂ©s, scrute le fond dâun chaudron. Elle me laisse mâapprocher et regarder.
Dans le chaudron, il y a un Ă©pais liquide noir. Câest le mĂȘme Ă partir duquel on fabrique la Bille. Je plonge la tĂȘte dedans et avale de grandes gorgĂ©es. Mais, sous lâeau, je vois un visage. Une femme plante son regard dans le mien. Quand je ressors la tĂȘte du chaudron, je sens un truc se tortiller dans mon cerveau.
Quand je me tourne vers elle, La Magicienne affiche un air indiffĂ©rent. Je lui explique qui je suis et pourquoi je suis lĂ . Jâexplore le monde de la Bille pour le compte de lâ « Organisation ». Peut-elle mâaider ? Elle dit que non.
« Ctrl » me dit de lui proposer un job. Elle doit beaucoup dâargent et lâ « Organisation » la paiera bien. Je transmets lâoffre. La Magicienne a lâair triste. Elle accepte.
Infos pour lâOrganisation : La Magicienne a acceptĂ© lâoffre dâemploi. Jâai un truc vivant dans le crĂąne.
Mission 6Â :
Random Connect : The Earth Itself ?
Ce nâest plus le dĂ©sert. Câest une forĂȘt. Est-ce une autre rĂ©gion du monde de la Bille oĂč ai-je atterri « ailleurs » ?
Jâaperçois une petite maison en ruine. Il y a de la lumiĂšre. Un feu est allumĂ© mais la maison est vide et ne montre aucune trace dâoccupation rĂ©cente. Je mâapproche du feu. Je gobe une Bille et une fine tige de fer apparaĂźt dans ma main. Je la fais tourner dans le feu et lâenfonce dans ma narine jusquâĂ mon cerveau. Je farfouille pour dĂ©loger le « truc ».
Flashback !
Je me souviens avoir fait preuve dâaltruisme. Une nana voulait du matos mais nâavait pas dâargent. JâĂ©tais en position de force et aurait pu exiger dâelle tout ce que je voulais. Elle me lâa mĂȘme proposĂ©. Elle mâa flattĂ©, caressĂ© dans le sens du poil et Ă©tĂ© prĂȘte Ă tout pour sa dose. Mais jâai refusĂ©. Jâai refusĂ© ses flatteries et tout ce quâelle avait Ă mâoffrir. GĂ©nĂ©reusement, je lui ai donnĂ© sa dose parce que⊠je ne suis pas un monstre sans scrupule. Je suis quelquâun de bien.
Infos pour lâOrganisation : câest faux ! Je ne suis pas quelquâun de bien et je nâai agi que par pur orgueil. Ce nâĂ©tait pas un acte de gĂ©nĂ©rositĂ©, ni de bontĂ©. Si cela avait Ă©tĂ© le cas, je ne lui aurais pas donnĂ© sa dose. Je lui aurais conseillĂ© de dĂ©crocher et donnĂ© lâadresse dâun centre de dĂ©sintox. Ce nâest pas la bontĂ© qui mâa poussĂ© Ă agi ainsi, câest lâorgueil, la fiertĂ© que jâai ressenti de la voir sâhumilier ainsi. Je nâai pris ni son argent, ni son corps, ni ses flatteries. Jâai pris sa dignitĂ©. Jâai toujours ce truc vivant dans le crĂąne.
Infos pour lâOrganisation 2 : dâaprĂšs lâ « Organisation, cette forĂȘt ne fait pas partie du monde de la Bille. Mais cela leur parait « intĂ©ressant » que ces mondes communiquent et je dois explorer cette forĂȘt.
Mission 7Â :
Random Connect : Une mangrove.
Une fois de plus, jâatterris dans cette forĂȘt. Je ne sais pas si câest que le monde de la Bille ne veut plus de moi ou si câest cette forĂȘt qui tient absolument Ă ma prĂ©sence. Jâai atterri Ă plat ventre dans cette boue. Je suis dĂ©gueulasse. Je relĂšve la tĂȘte. Il est lĂ . Il est vĂȘtu de peaux de bĂȘtes cousues un peu nâimporte comment. Il porte plusieurs besaces en bandouliĂšre. Je ne vois pas son visage. Il porte un masque en peau Ă©galement, surmontĂ© de deux paires de cornes. Un cerf ou un daim. Un truc comme ça. Il me tend la main. Il ne dit rien. Il sâappelle Oriente.
Oriente ne parle pas. Enfin, il parle trĂšs peu. De toutes façons, il arrive Ă parler sans ouvrir la bouche. Ce nâest pas de la tĂ©lĂ©pathie. Ce nâest pas non plus le genre de communication que je peux avoir avec « Ctrl ». Câest autre chose.
Lâ « Organisation » veut que jâexplore cette forĂȘt. Oriente sera mon guide. Mais Oriente ne fait pas partie de lâ « Organisation ».
Nous atteignons une portion de forĂȘt envahie par le brouillard. Oriente me fait signe de mâarrĂȘter. Il farfouille dans lâune de ses besaces et en sort une espĂšce de bĂąton avec des trucs qui pendouillent. Il se met Ă parler dans une langue que je ne comprends pas. Il me dira ensuite que câest la Langue Putride. La langue des Horlas. Mais en attendant, le brouillard se dissipe. Oriente mâexplique que ce brouillard est en fait constituĂ© des spores vampiriques Ă©mis par un Horla-champignon. Je le crois.
Oriente tend le bras dans une direction. Je dois continuer seul. Je marche tout droit jusquâĂ un ossuaire. Plus jâavance, plus je me fais discret. Je vois deux personnes, deux femmes. Lâune possĂšde un casque Ă corne. Lâautre exhibe une grosse bague. La premiĂšre porte de nombreuses marques de morsures un peu partout sur les bras. Lâautre, celle Ă la bague, saigne du nez mais les deux sâen fichent.
JâĂ©coute. Elles se plaignent que leur mĂ©moire est « à sec ». Elles en accusent la forĂȘt. La femme au casque montre alors une feuille. LĂ , elles lisent ensemble et Ă haute voix. Il existe un lieu oĂč elles pourraient changer de vie⊠et mĂȘme plus. Ce papier est-il une carte ? Je le veux ! Je bondis de ma cachette et saute sur celle au casque, celle qui mâa lâair la plus forte. Lâ « Organisation » mâa dotĂ© dâun flingue. Je ne sais pas combien jâai de munitions. Alors, je mâen saisis par le canon et fracasse la mĂąchoire de la femme. Puis, jâempoigne mon arme dans le bon sens et tire une unique balle. Pile lĂ oĂč il faut pour quâelle ne se relĂšve pas. Je me retourne vers lâautre. Elle est sans rĂ©action. Son visage affiche juste une trĂšs grande tristesse. Je tends la main et exige le papier. Mais elle refuse. Elle fait un pas en arriĂšre mais ne semble pas dĂ©cidĂ©e, pas capable, de mâattaquer. Je brandis mon flingue. Je tire.
Je rĂ©cupĂšre la feuille sur son cadavre. Il sâagit bien dâune carte.
Je rejoins Oriente. Je lui montre la carte. Je lui dis que câest lĂ que je veux aller. Mais avant, je dois faire mon rapport Ă lâ « Organisation ».
Infos pour lâOrganisation : Oriente parle la Langue Putride, la langue des Horlas. Il sâagirait des « monstres » peuplant la forĂȘt. Pour autant, Oriente ne me parait pas hostile. Je crois quâon a pas besoin dâĂȘtre un monstre pour apprendre cette langue. En tout cas, Oriente mâa lâair dâen savoir long sur pas mal de choses. Il nâest pas bavard et il faudra ĂȘtre patient pour lui soutirer ses secrets.
Infos pour lâOrganisation 2 : jâai mis la main sur une carte indiquant un endroit plus ou moins important. DâaprĂšs les propriĂ©taires de la carte, ce lieu permet de « changer de vie ». Je ne sais rien de leurs projets et plus personne nâen saura rien maintenant. Oriente semble capable de me conduire Ă cet endroit.
Infos pour lâOrganisation 3 : je tenais Ă©galement Ă remercier lâ « Organisation » dâavoir acceptĂ© ma demande concernant la formation aux diverses techniques de MĂ©ditation. Pour lâinstant, je fais des allers et retours plus ou moins Ă ma convenance en direction de cette forĂȘt mais cela ne durera peut-ĂȘtre pas et il se pourrait aussi quâil me soit difficile de mâapprovisionner en Bille.
Mission 8Â :
Random Connect : un rivage.
De retour dans cette forĂȘt, Oriente monte un campement de fortune au bord dâun fleuve. Nous avons marchĂ© longtemps. La nuit est brune. Il y a quelque chose de bizarre dans lâair. Il ne fait, ni chaud ni froid. Ni sec, ni humide. Je ne sais pas dâoĂč me viennent ces mots. Peut-ĂȘtre est-ce Oriente qui me les suggĂšre, mais je pense Ă lâEmprise et Ă lâĂgrĂ©gore, mĂȘme si je ne comprends pas trop ce que cela implique. En tout, il y a de la magie dans lâair.
Oriente nâa pas besoin de moi. Alors, je mâassois au bord de lâeau et je rĂ©flĂ©chis Ă ce que je fais ici. Ăa fait bizarre mais ça me demande un effort de me rappeler. Je me concentre pour organiser mes pensĂ©es et me souvenir que je suis en mission pour lâ « Organisation ». Je me rappelle vaguement le monde de la Bille et la Magicienne. Cela me semble si loin. MĂȘme notre monde me semble loin. En fait, cette forĂȘt commence Ă me sembler plus rĂ©elle que tout le reste. Et je me surprends Ă me forcer Ă me rappeler que je ne suis pas dâici. Je suis lĂ en mission dâexploration. En quelque sorte, je dois cartographier cette forĂȘt. La carte ! Oui, je dois aussi trouver cet endroit qui paraissait si important Ă ces deux femmes que jâai tuĂ©es. Ăa aussi, ça parait si loin.
Je dois localiser cet endroit pour⊠changer de vieâŠ
Non ! Ce ne sont pas mes souvenirs. Ce sont ceux de ses femmes. Quâest-ce qui se passe ? pourquoi cette idĂ©e apparaĂźt soudain dans ma tĂȘte et pourquoi elle essaye de sây incruster, de sây faire une place comme⊠ce truc ?Et je songe que ça fait un moment que le truc en question ne sâest pas tortillĂ© dans ma tĂȘte. Et lĂ , je lâentends ricaner. Puis, une main sur mon Ă©paule. Oriente ! Quelquâun est avec lui. Il porte une robe de bure. Il sâassoit Ă cĂŽtĂ© de moi. Il dit :
« Le bien sâenvole sans une Ă©gratignure. Câest une faible supposition. La pyramide alerte le philosophe. Câest comique ! »
Puis, il se lĂšve et sâen va. Jâattends un moment puis je me lĂšve Ă mon tour. Le moine nâest plus lĂ . Oriente est assis et allume un feu. Quand je lui pose la question, il mâexplique que le moine parle la Langue des Oiseaux. Et il ne mâen dira pas plus ce soir.
Infos pour lâOrganisation : en plus de la Langue Putride, il existe une Langue des Oiseaux. On comprends les mots mais il nâest pas forcĂ©ment Ă©vident dâen saisir le sens. Cette forĂȘt exerce une drĂŽle dâinfluence sur moi.
Mission 9Â :
Random Connect : la forĂȘt, en pleine nuit. Le vent souffle.
Jâai mal dans ma tĂȘte. Le truc sâagite et me fait voir des choses. A travers les arbres, je vois des silhouettes, des ombres qui sâagitent. Le bruit du vent, câest leur voix, leurs incantations. Le dĂ©sert, câest le monde de la Bille. Câest⊠chimique. La forĂȘt, câest le monde de lâĂgrĂ©gore et de lâEmprise. Câest⊠magique. Et ça me fait peur, beaucoup plus que la chimie.
Je veux autre chose. Oriente est lĂ mais ne fait rien. Pourquoi ? Je me sens mal. Jâai peur de la magie. Alors, je mâen remets Ă la chimie. Je gobe une Bille. La forĂȘt devient floue. Oriente et moi sommes toujours dans la forĂȘt mais ailleurs. Loin de ces ombres qui chantent comme le vent. Devant nous se dresse une pyramide du genre aztĂšque ou maya. Elle est recouverte de lianes et de racines. Je lĂšve les yeux. Des tĂąches noires flottent dans le ciel, sous la canopĂ©e. Câest liquide. Ces tĂąches sont constituĂ©es de lâingrĂ©dient principal entrant dans la composition de la Bille. Je me tourne vers Oriente. A la place de sa tĂȘte, je lis le mot « cannibale » ! Il porte maintenant une lyre et se met Ă jouer. Mais aucun son ne sort.
Je regarde autour de moi. Nous sommes seuls sur les lieux. Je devine que cet endroit doit pourtant susciter bien des convoitises. Je nâai aucune idĂ©e de ce quâil peut bien y avoir Ă lâintĂ©rieur de cette pyramide, mais ces flaques volantes⊠Jâappelle « Ctrl ». Je lui explique la situation, la nĂ©cessitĂ© selon de sĂ©curiser les lieux et de sâapproprier cette ressource. Jâexplique aussi quâil est possible que cette pyramide soit le refuge dâune bande de cannibales et que, peut-ĂȘtre, dâautres sont dĂ©jĂ en route pour prendre possession de lâendroit. Par contre, je ne peux faire ça seul. Et puis, je ne crois pas pouvoir vraiment compter sur Oriente.
« Ctrl », dans son infinie bontĂ©, accĂšde Ă ma demande. Je suis toujours seul mais jâai des armes et des munitions en quantitĂ© suffisante. Et ça tombe bien car jâentends du bruit venant de la forĂȘt. Câest EXACTEMENT ce que je craignais ! Des types venus dâon ne sait oĂč veulent faire main basse sur la pyramide et ces flaques volantes. Et moi, je suis seul, avec un Oriente hors dâĂ©tat de nuire. Heureusement, je suis Ă©quipĂ© et prĂȘt Ă les recevoir.
Je nâattends pas leur autorisation, ni celle dâOriente, pour leur tirer dessus. Je ne suis pas trĂšs douĂ© pour comprendre les tenants et aboutissants de cet endroit mais je le suis assez pour tirer dans le tas bien comme il faut. A voir leurs armes automatiques, je me doute que ce ne sont pas des autochtones. Mais je peux me tromper. En tout cas, je pense que, comme pour le monde de la Bille, on n'est pas les seuls Ă pouvoir y accĂ©der. JâĂ©vite leurs rafales et me mets Ă couvert. Je choisis une arme un peu plus puissante et vise le conducteur de leur 4x4. Le chauffeur perd la vie et le contrĂŽle du vĂ©hicule qui sâĂ©crase contre un arbre. Balle perforante pour faire exploser le rĂ©servoir ! Et le 4x4 !
La menace est passĂ©e. Je me tourne vers Oriente dont la tĂȘte affiche toujours le mĂȘme mot. Il continue de pincer les cordes de sa lyre muette. « Cannibale » ! Quâest-ce que ça veut dire ? Je ne sais pas sâil veut me mettre en garde contre un danger ou sâil mâinsulte. Pourquoi ne peut-il pas sâexprimer normalement ?
Je sĂ©curise lâendroit. Jây pose les outils Ă©lectroniques fournis par « Ctrl ». Câest complĂštement hors-sujet dans un tel environnement mais « Ctrl » est certain que cela suffira Ă leur garantir lâexclusivitĂ© de cette ressource planante. OK, moi, je ne fais quâobĂ©ir aux ordres. Une fois fait, je me tourne vers Oriente. Je crois que je comprends.
Je ne sais pas si les types sur le 4x4 Ă©taient des gens de la forĂȘt ou dâailleurs. Mais, ce dont je suis sĂ»r, câest quâOriente est bien un gars du coin. Cette forĂȘt est magique. Donc lui aussi doit ĂȘtre magique quelque part. et peut-ĂȘtre aussi que, finalement, il ne parle pas si bien que ça ma langue. AprĂšs tout, les langues des Oiseaux et Putrides lui semblent plus familiĂšres. Peut-ĂȘtre que jâai tort dâattendre de lui quâil me parle dans ma langue comme si câĂ©tait sa langue maternelle. Peut-ĂȘtre quâil fait de son mieux pour communiquer avec moi et mâaider. Peut-ĂȘtre que je peux lâaider aussi ?
Je gobe une Bille. La tĂȘte-mot dâOriente frissonne. Câest maintenant ! Le vrai danger, le CannibaleâŠ
Autour de nous, les arbres changent de forme. Ce sont maintenant des membres amputĂ©s et sanguinolents plantĂ©s dans la terre, terre quâils inondent de sang. Et de la pyramide sort un homme Ă tĂȘte de chien. Il est nu, si ce nâest le chapelet de tripailles enroulĂ©es autour de ses Ă©paules et qui lui tombent sur le torse. Il nâa pas de bras. Des ses moignons, le sang coule Ă flot mais cela nâa pas lâair de le dĂ©ranger. La lyre se met, enfin, Ă faire du bruit. Le son est mĂ©lodieux mais la mĂ©lodie est trĂšs lente et triste. Je me suis donnĂ© Ă fond contre les autres types et je ne suis plus au top de ma forme. Il me reste une partie du matĂ©riel fourni par « Ctrl » et une poignĂ©e de Bille. JâespĂšre que ça va suffire.
Une Bille me permet de ralentir le canidĂ©-cannibale suffisamment longtemps pour prendre lâinitiative et en profiter au mieux. Jâen aurai dâautant plus besoin quâune meute de chiens amputĂ©s, rampant sur leurs moignons ensanglantĂ©s, sort de la pyramide. Je touche lâhomme-chien avec ma balle spĂ©ciale anti-clĂ©bard, ma « cani-balle » ! Jâai une chance pas croyable, Ă moins que la mĂ©lodie jouĂ©e par Oriente y soit pour quelque chose, mais le Cannibale sâĂ©croule net et les autres chiens regagnent lâintĂ©rieur en⊠miaulant !
Oriente a repris sa tĂȘte normale mais a toujours la lyre Ă la main. Il continue de jouer pendant que je lâattrape par lâĂ©paule pour nous Ă©loigner. Jâai fait ce que jâavais Ă faire. Maintenant, lâ « Organisation » va envoyer dâautres agents pour finir le boulot.
Infos pour lâOrganisation : communiquer avec Oriente nâest pas toujours Ă©vident mais je suis convaincu que malgrĂ© ça câest un bon guide et que je peux compter sur lui. La pyramide a Ă©tĂ© sĂ©curisĂ©e conformĂ©ment aux instructions de « Ctrl » et lâ « Organisation » pourra trĂšs bientĂŽt profiter de cette nouvelle source de « je ne sais quoi » pour fabriquer de la Bille. Toutefois, et aussi idiot que cela puisse paraĂźtre, jâattire lâattention de mes supĂ©rieurs sur le fait que, non seulement cette forĂȘt communique avec le monde de la Bille, mais abrite Ă©galement une forme de vie constituĂ©e du composant principal de ladite Bille. La Magicienne est-elle au courant ?
Mission 10Â :
Random Connect : un chùteau !!!
Je nâai aucune idĂ©e de ce que lâ « Organisation » a mis en place autour de la pyramide. On mâa fait comprendre quâil serait mieux vu que je ne pose pas de question. Jamais ! Alors, je nâen pose pas. Mais je mâen pose quand mĂȘme quand Oriente et moi approchons de ce chĂąteau.
Le soleil se lĂšve. Une fois nâest pas coutume, la mĂ©tĂ©o nâa rien Ă voir avec ce que nous connaissons dans notre monde. Lâair est chargĂ© de cette magie qui façonne la forĂȘt et confĂšre au climat quelque chose de spĂ©cifique et indĂ©finissable. Toutefois, le ciel est couvert. Et jâai faim ! Oriente propose que nous nous abritions dans ce chĂąteau, le temps de nous restaurer. Jâaccepte Ă©videmment.
Ce qui est bizarre, câest que ce chĂąteau nâest pas au milieu dâune clairiĂšre ou au sommet dâune butte. Il est en plein au milieu des arbres. Certains, dâailleurs, traversent mĂȘme ses murailles et le toit de certaines de ses tours, pour celles qui tiennent encore debout.
Le repas traĂźne un peu en longueur. Jâavoue manquer de motivation Ă lâidĂ©e de marcher dans ces bois pendant des heures. Puis, nous entendons du bruit Ă lâextĂ©rieur. Oriente se lĂšve et sâapproche discrĂštement dâune ouverture. Il me fait signe que deux personnes approchent. Il y a lĂ un grand blond, plutĂŽt fin, voire maigre. Lâautre, je ne sais pas trop si câest un homme ou une femme. Mais il ou elle a les cheveux longs et mĂąchouille une de ses mĂšches. A voir leur accoutrement, nul doute que ce sont des natifs de cette forĂȘt. Ou, en tout cas, ils vivent lĂ depuis longtemps.
Le couple entre dans une piĂšce vide. Nous avons pris soin de nous cacher. Bonne surprise, il parle une langue que je comprends. Et ils parlent dâun trĂ©sor qui serait cachĂ© en ces lieux. Mais ils ne disent rien de la nature mĂȘme de ce trĂ©sor. Moins bonne surprise, ils restent lĂ et commencent Ă fouiller les lieux. Jâaurais prĂ©fĂ©rĂ© quâils commencent leurs recherches ailleurs, que nous puissions quitter notre cachette.
La patience nâest pas mon fort. Je craque et dĂ©cide de me montrer. Jâai mon arme Ă la main mais ne la braque pas sur eux. Pour autant, je leur pose clairement la question quant Ă lâobjet de leur recherche. Ils se regardent, lâai mĂ©fiant, et gardent le silence. LĂ , je braque mon arme en direction du blond. Bizarrement, ils ne semblent pas armĂ©s. En tout cas, ils ne rĂ©agissent pas. Lâautre continue mĂȘme Ă mĂącher ses mĂšches avec une certaine nonchalance. Je rĂ©itĂšre ma question. Que sont-ils venus chercher ici ?
Entre deux mĂąchouillages, lâautre parle dâun coutelas mais refuse de mâen dire plus, ni de mâexpliquer en quoi cet objet a une quelconque valeur. Je commence Ă mâinquiĂ©ter un peu. Oriente est toujours dissimulĂ©. Et aucun des deux ne semblent vĂ©ritablement inquiet par la situation. Pourtant, je les menace de mon arme alors quâils nâen ont pas. Ăa sent mauvais. Sans baisser mon arme, je contacte « Ctrl » et lui demande son avis sur la situation. « Ctrl » rĂ©pond immĂ©diatement. Je sens quâil est tendu. Il me prĂ©vient aussi calmement que possible de prendre garde. La situation va se dĂ©grader trĂšs vite !
Et lĂ , le sol et les murs se recouvrent de vers, de larves et asticots. Câest vĂ©ritablement dĂ©gueulasse. Le blond se baisse et passe la main au milieu de ces horreurs dans un geste plein de douceur. Lâautre observe attentivement. Je regarde mes chaussures. Elles sont dĂ©jĂ recouvertes de vermines. Je les secoues mais ça ne sert pas Ă grand-chose. Quand je lui pose la question, lâautre mâexplique que cet endroit est hantĂ©. Câest la demeure dâun Horla dont cette vermine est la manifestation.
Le blond mâexplique que ce truc est un Kukac. Ce Horla habite les insectes et autres types de vermines comme celle-lĂ . Elle ne pense quâĂ se nourrir. Elle est capable de dĂ©tecter toute trace de vie jusquâĂ plusieurs centaines de mĂštres. Il ne sert Ă rien dâessayer de communiquer avec lui, mĂȘme en utilisant la Langue Putride. Toutefois, certains talismans permettent de le « dompter » provisoirement.
Câest donc ça ? Ces deux-lĂ possĂ©deraient de tels talismans. Ils ont peut-ĂȘtre dâautres amulettes, dâoĂč cette confiance en eux faisant quâils se moquent de mon arme ? En tout cas, le Horla parait pour lâheure inoffensif. Et le coutelas en question, est-il magique lui aussi ? Pas de rĂ©ponse !
Je me sens coincĂ©. Je pourrais tirer mais jâai peur que cela ne mette fin au contrĂŽle exercĂ© sur le Horla. Pour autant, puis-je vraiment laisser ces deux-lĂ faire ce quâils veulent ? Et puis, me laisseront-ils partir en vie ? Et Oriente, oĂč est-il et que fait-il ? Je propose alors aux deux de les aider Ă trouver ce coutelas. Je leur promets de le leur laisser. Tout ce que je veux en Ă©change, câest pouvoir quitter les lieux en vie. Mais ma proposition ne leur convient pas. Que veulent-ils alors ?
Et ils partent dans un dĂ©lire, mâexpliquant quâils veulent connaĂźtre leur avenir et dĂ©couvrir lâemplacement dâun trĂ©sor et⊠ça nâa aucun sens. OK, je braque mon arme sur celui, ou celle, aux cheveux longs et tire ! Il ou elle tombe Ă terre en gĂ©missant. DĂ©jĂ , les vers commencent Ă le recouvrir. On dirait que le contrĂŽle exercĂ© sur le Horla faiblit dĂ©jĂ . Je me tourne vers le blond qui, tĂ©tanisĂ©, ne sâattendait pas à ça. Double headshot ! Il sâĂ©croule au milieu des vers.
Alors que je mâattends Ă ce que le Horla, libĂ©rĂ© de tout contrĂŽle, sâen prenne Ă moi, la masse grouillante nâen fait rien. Mais, une silhouette sort de lâombre. Elle porte le mĂȘme costume noir que moi. Câest un agent de lâ « Organisation ». Il se prĂ©sente : « Agent spĂ©cial Sadler ». Dans sa main droit, un coutelas. Il sâapproche de moi dâun pas rĂ©solu. Jâai la trouille quâil ne me plante. Pourtant, je ne bouge pas. A ma grande surprise, il mâattrape par le bras et me fourre le coutelas dans la main avec pour consigne de le remettre Ă lâ « Organisation ». Toutefois, il me demande de ne pas mentionner sa prĂ©sence en ces lieux.
Ăjection !
Infos pour lâOrganisation : jâai trouvĂ© ce coutelas dans un chĂąteau hantĂ© par un Horla. Il semblait de grande valeur pour les chasseurs de trĂ©sors Ă qui je lâai pris.
Mission 11Â :
Random Connect : un port en ruines.
Oriente est lĂ . Nous longeons la riviĂšre et arrivons dans ce qui fut un petit port. Il y a les traces dâun campement rĂ©cent. Je commence Ă remonter la piste mais Oriente me saisit par le bras et agite la tĂȘte. Son visage sâestompe et devient le mot « cannibale ». Câest une obsession chez lui ou quoi ?! Quoi quâil en soit, je farfouille quand mĂȘme et trouve, dans ce qui reste du feu Ă©teint, des ossements⊠humains !
Il fait nuit et, comme souvent, il y a du vent. Par moment, jâai lâimpression que le vent est le langage de la forĂȘt au mĂȘme titre que la Langue des Oiseaux et la Langue Putride sont les langages de ceux qui la peuplent. Alors, la forĂȘt tente-t-elle de me dire quelque chose ? Je me tourne vers Oriente et lui trouve, malgrĂ© son masque, un air des plus circonspects.
Je demande Ă Oriente de rallumer le feu. Je veux que nous fassions halte ici car le truc dans mon cerveau sâagite Ă nouveau et me fait mal. Il me montre une chauve-souris du doigt et sâassoit autour du feu. Il me dit alors que les hiboux ne sont pas ce quâils paraissent. Et pour cause, il mâa montrĂ© lĂ une chauve-souris. Jâai trop mal Ă la tĂȘte pour essayer de comprendre ce quâil cherche Ă me dire.
Je me suis finalement endormi. Et je suis rĂ©veillĂ© par des voix. Oriente est en plein discussion avec des gens. Ils ont des chevaux et autres animaux de traits. Il sâagit dâune caravane nocturne. Je fais semblant de dormir et Ă©coute leur conversation. Un membre de la caravane me montre du doigt et explique quâils se rendent vers mon destin fatal. Oriente ne rĂ©pond rien. Il Ă©coute attentivement. Le gars parle dâun phare. Il veut mây emmener.
Je me lĂšve et lui demande alors pourquoi il veut mâemmener si mon destin doit ĂȘtre fatal. Mais il refuse de me rĂ©pondre. Il fixe Oriente et rĂ©pĂšte que je dois partir avec eux. Ils sont nombreux. MĂȘme armĂ©, je ne suis pas du tout certain de faire le poids. Et il ne me reste que deux Billes. Et Oriente nâa pas lâair dĂ©cidĂ© Ă prendre mon parti. Est-ce la fin pour moi ? Je botte en touche. Je demande quelques instants au type et contacte « Ctrl ». Que dois-je faire ?
Je crois que je pĂąlis. « Ctrl » mâordonne de suivre ces types. Il me dit que tout cela, ma mission, nâĂ©tait quâune diversion. Il mâordonne dâĂ©chouer, volontairement. Est-il vraiment en train de me demander de mourir ? Juste parce que le vĂ©ritable objectif de lâ « Organisation » viendrait dâĂȘtre atteint et que je ne leur servirais plus Ă rien ? Non, se dĂ©fend « Ctrl », au contraire ! Certes cette mission dâexploration de la forĂȘt nâĂ©tait quâun prĂ©texte, une couverture dissimulant un autre plan. Mais cette mission a sa propre importance et doit ĂȘtre menĂ©e Ă bien. Et pour ça, je dois suivre ces types. Bon, je veux bien Ă©chouer mais⊠pour Ă©chouer, il faut tenter quelque chose. Alors, je prends mon flingue et tire dans le tas, sans mĂȘme prendre la peine de viser. Maintenant, soit ils me tuent, soit ils mâembarquent.
Ha ! MĂȘme sans viser je fais mouche ! Et eux sont plus mauvais que je ne le pensais. Vraiment, ce sont des marchands, pas des soldats. A ce rythme-lĂ , je sens que ça va ĂȘtre long dâĂ©chouer. Alors, je me prends volontairement les pieds dans une racine. Je mâĂ©croule et les laisse me sauter dessus. Quelquâun mâassomme et ça a le mĂ©rite de stopper net le truc qui sâagite dans mon cerveau.
Infos pour lâOrganisation : jâaurais aimĂ© ĂȘtre informĂ© des tenants et aboutissants de cette mission. Jâaurais moins eu cette dĂ©sagrĂ©able impression dâĂȘtre un pion.
Mission 12Â :
Random Connect : un phare !
Je me rĂ©veille Ă lâintĂ©rieur dâune piĂšce circulaire. Je devine quâil sâagit dâun phare. DU phare. Ăvidemment, je suis attachĂ©. Oriente est lĂ , lui aussi, mais il est toujours inconscient. Je crois que je vais essayer dâoublier les derniĂšres heures et le fait quâil nâa rien fait pour me venir en aide. AprĂšs, je suis Ă©tonnĂ© quâil soit ligotĂ© lui aussi. Je pensais que ces types lui rĂ©serveraient un autre sort. En fait, je suis mĂȘme Ă©tonnĂ© quâil soit lĂ . Mais jâai un autre souci. Jâai besoin de Bille, maintenant !
Je tire sur mes liens et parviens Ă suffisamment les distendre pour me libĂ©rer et gober une Bille. Je me sens mieux. Il ne mâen reste plus quâune. Il va falloir la jouer Ă lâĂ©conomie ou⊠en payer les consĂ©quences.
On cogne Ă la fenĂȘtre. Câest⊠le vent. Avant mĂȘme de libĂ©rer Oriente, je mâapproche et ouvre la fenĂȘtre. Le vent sâengouffre et sans vraiment comprendre les mots quâil emploie, jâen comprends le sens. Il chante mon Ă©pitaphe. Vais-je vraiment mourir ici ?
Je ne me dĂ©cide pas encore Ă libĂ©rer Oriente. Avant, je rĂ©cupĂšre la carte que jâai prise aux deux femmes. Je regarde lâendroit oĂč elles voulaient se rendre. Ce nâest pas un phare mais⊠sous mes yeux, le dessin change et indique⊠un phare ! Je gobe ma derniĂšre Bille en espĂ©rant que la carte change encore maisâŠ
⊠Je suis ailleurs⊠je suis autre⊠je ne comprends rien⊠je comprends tout. Non, je ne comprends rien. Je me souviens. Les deux pieds dans la terre, mes racines profondĂ©ment enfoncĂ©es dans cette terre gorgĂ©e dâĂgrĂ©gore, jâai vu ! Quâai-je vu ? Je ne mâen rappelle pas. Il faudrait que je mâenfonce encore plus dans la terre, que je mâenterre⊠Il faudrait que je dĂ©ploie mes branches, que je les offre au vent.
Je me rappelle de tout. Je ne me rappelle de rien. Je crois que le truc dans mon cerveau est en train dâĂ©clore mais ça ne me fait pas mal. Au contraireâŠ
Infos pour lâOrganisation : Ă©jection ! ĂJECTION !!!
Commentaires de Thomas :
A. « Elle se tord de douleur et crache quelque chose de bien trop gros pour tenir dans sa gorge. Câest une⊠arbalĂšte ! »
Celle-lĂ je l'ai vraiment pas vu venir XD
B. « Je gobe une Bille et une fine tige de fer apparaĂźt dans ma main. Je la fais tourner dans le feu et lâenfonce dans ma narine jusquâĂ mon cerveau. Je farfouille pour dĂ©loger le « truc ». »
ça me fait tellement penser à un test Covid :p
C. « La viande suspendue aux crochets nâest pas morte. Elle attend dâĂȘtre trempĂ©e dans un bain sombre dont lâodeur rappelle la Bille.
La viande nâest pas morte et elle est agressive.  »
Je trouve que c'est une tellement chouette Ă©vocation de la Viande Noire
D. « Dans le chaudron, il y a un Ă©pais liquide noir. Câest le mĂȘme Ă partir duquel on fabrique la Bille. Je plonge la tĂȘte dedans et avale de grandes gorgĂ©es. »
J'adore le comportement totalement irrationnel du PJ
E. « Jâai refusĂ© ses flatteries et tout ce quâelle avait Ă mâoffrir. GĂ©nĂ©reusement, je lui ai donnĂ© sa dose parce que⊠je ne suis pas un monstre sans scrupule. Je suis quelquâun de bien. »
Je crois que cette partie est ta plus drĂŽle que j'ai jamais lu :)
F. « Je nâai pris ni son argent, ni son corps, ni ses flatteries. Jâai pris sa dignitĂ©. »
C'est tellement fort. Tu es dans une forme olympienne sur ce solo.
G. « Je touche lâhomme-chien avec ma balle spĂ©ciale anti-clĂ©bard, ma « cani-balle » ! »
On est en plein dans la langue des oiseaux.
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ĂCUREUIL BLANC
la promesse d'un écureuil et la lutte aux cÎtés de Wagner le cosaque pour la Makhnovchtchina. Un récit de partie par Claude Féry.
Temps de lecture : 2 mn
(image par Dall.e)
Toutes les photos suivantes sont de Claude FĂ©ry (par courtoisie).
Joué le : 25/07/2020
Le jeu : Pour la Commune par Nitz, un jeu descendant de la Reine pour rejouer le Grand Soir.
L'histoire :
Cette aprĂšs-midi nous jouerons les pages 24, 35, 40, 41 et 42 de notre carnet Ăcheveuille encore avec le systĂšme de rĂ©solution l'inflorescence puis avec Pour la commune, nous jouerons l'instance de Wagner le cosaque selon ce livret.
Nous n'avons joué que la page 35 et Pour la Makhnovchtchina.
Nous avons tenté de remémorer à l'écureuil sa promesse faite à Rayon de soleil puis changeant de tactique nous avons obtenu qu'il nous guide.
Xavier a joué blanc écureuil le moment venu, (nous jouions en transparence).
Le Furet a récolté la balle perdue du maton qu'a éliminé Wagner.
Dans un second temps Pour la Makhnovchtchina nous avons lutté aux cÎtés du cosaque Wagner pour voir notre cause triompher.
Nestor Makhno en 1921 (domaine public)
Thomas :
Encore un grand merci pour ce nouveau retour de partie ! Je constate qu'Ă chaque sĂ©ance vous ne jouez qu'une ou deux fiches d'Ăcheveuille. Le vois-tu comme une rĂ©ussite (i.e. les fiches sont Ă haut potentiel ludique / c'est cohĂ©rent avec vos habitudes de jeu qui tournent autour d'une ou deux scĂšnes par sĂ©ance) ou comme un Ă©chec (i.e. la promesse de profondeur d'Echeveuille ne serait pas atteinte Ă ta table) ?
Claude :
Je considĂšre qu'Ăcheveuille offre un trĂšs haut potentiel ludique.
Et avoir joué le contenu principal ou manifeste d'une page du carnet ne signifie pas qu'on en a épuisé le potentiel tragique ou dramatique.
Le format de nos sessions est court en fiction (rarement plus de 2 heures) mais je pense intense.
Le découpage est lié à nos disponibilités, pas nécessairement à notre volonté de couper court.
Respecter l'horaire convenu permet de renouveler réguliÚrement l'expérience, quitte à écourter un arc narratif ou à en reporter la mise en jeu.
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